Décembre 2016 Par Centre Fédéral d'Expertise des Soins de Santé (KCE) Initiatives

Indemnisation des personnes contaminées par l’hépatite C ou le sida suite à une transfusion

Plusieurs centaines de personnes en Belgique restaient sans recours suite à une contamination par les virus de l’hépatite C ou du sida due à une transfusion sanguine dans les années 1980. La Ministre de la Santé a chargé le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de santé (KCE) de trouver une solution pour sortir de cette impasse.

Le KCE recommande de confier au Fonds des Accidents Médicaux (FAM) la mission d’indemniser ces victimes de manière forfaitaire. Étant donné qu’il s’agit de faits assez anciens, le KCE recommande de ne pas exiger des victimes qu’elles apportent la preuve du lien de causalité entre la transfusion et la contamination, mais seulement de prouver qu’elles ont reçu une transfusion en Belgique. Un montant de 20.000€ serait attribué aux victimes directes et des montants de 10.000 et 5.000€ aux victimes secondaires. On estime le budget de cette indemnisation à 67 millions d’euros, à répartir sur une quinzaine d’années.

Des victimes mais pas de coupable

On se souvient que, dans les années 1980, les transfusions sanguines ont été à l’origine de certaines contaminations par les virus de l’hépatite C (VHC) et du sida (VIH). Comme ces virus étaient à peine découverts et qu’il n’existait pas de tests permettant de les identifier, il n’était pas possible de désigner de responsables – au sens juridique – de ces contaminations. Selon les lois de l’époque, les victimes n’avaient donc aucune possibilité de se faire indemniser.

Des discriminations persistantes

Depuis lors, cette situation a suscité plusieurs initiatives de la part du monde politique, notamment les lois de 1991Note bas de page et de 2010Note bas de page. Ces deux lois ne permettent toutefois pas d’intervenir pour des faits antérieurs à leur entrée en vigueur. Par ailleurs, certaines victimes de contamination par le virus du sida avaient bénéficié d’une compensation ponctuelle si la transfusion avait eu lieu entre août 1985 et juin 1986. Force a donc été de constater que toutes ces personnes n’avaient pas été traitées de façon équitable. C’est pour mettre fin à ces discriminations que la Ministre Maggie De Block a demandé au Centre Fédéral d’Expertise des Soins de santé (KCE) de revoir le problème de fond en comble.

Une nouvelle mission pour le Fonds des Accidents Médicaux

Le KCE a mené avec les parties concernées un long travail d’identification et de caractérisation des discriminations existantes. Avec l’aide de juristes spécialisés, ce groupe de travail a ensuite co-construit une solution susceptible de convenir à chacun. Elle consiste à confier l’indemnisation des victimes de contamination par transfusion au Fonds des Accidents Médicaux (FAM). Comme il s’agit pour le FAM d’une nouvelle mission, distincte de sa mission principale, ceci devra faire l’objet d’une loi spécifique.

Pas de limite temporelle

Pour éviter de reproduire des discriminations relatives à la période à laquelle a eu lieu la contamination, le KCE estime qu’il n’est pas souhaitable de fixer une date de début à cette période. Et ce d’autant plus que les connaissances scientifiques ne permettent pas de dater avec précision le moment d’apparition des virus en question dans notre pays.

Le KCE recommande donc de prendre en considération toutes les contaminations par les virus VIH et VHC consécutives à une transfusion sanguine, quelle que soit l’année de la transfusion, pour autant qu’elle ait été effectuée en Belgique et pour autant que l’infection occasionne des symptômes d’une durée minimale de 6 mois ou contraigne la victime à suivre un traitement lourd.

Pas nécessaire de prouver le lien de cause à effet

Étant donné qu’il s’agit de faits souvent assez anciens, le KCE recommande de ne pas exiger des victimes qu’elles apportent la preuve du lien de causalité entre la transfusion et la contamination, mais seulement de prouver qu’elles ont reçu une transfusion en Belgique et qu’elles ont été contaminées par le VIH ou le VHC. En cas de contestation, c’est au Fonds qu’il reviendrait de prouver l’absence de ce lien de causalité (renversement de la charge de la preuve).

Des forfaits différents pour les victimes directes et secondaires

Un montant forfaitaire (que le KCE propose de fixer à 20.000 €) serait attribué aux victimes directes, c’est-à-dire toutes les personnes qui ont contracté le VIH ou le VHC par voie transfusionnelle, ainsi que les enfants contaminés durant la grossesse ou à la naissance.

Des montants inférieurs (10.000 € et 5.000 €) seraient prévus pour les conjoints et ‘assimilés’ c’est-à-dire les personnes qui entretiennent/entretenaient des relations affectives suivies avec la victime directe (donc aussi des cohabitants non-apparentés ou des aidants proches), et pour les enfants des victimes directes.

Un budget de 67 millions

Le nombre de personnes concernées a été estimé, pour l’hépatite C, à 1243 victimes directes et 6072 victimes indirectes et, pour le sida, à 41 victimes directes et 184 victimes indirectes.

Le KCE a calculé que le budget nécessaire à cette indemnisation s’élèverait à environ 67 millions d’euros, à répartir sur une période d’environ 15 années au cours de laquelle on s’attend à recevoir des demandes. Il s’agit là d’un montant maximum car basé sur des hypothèses très prudentes. Le KCE recommande que le FAM reçoive les moyens financiers et humains nécessaires pour assumer cette nouvelle mission.

À faire savoir!

Enfin, le KCE insiste sur la nécessité d’assurer la publicité nécessaire à cette possibilité de compensation financière, notamment au travers des associations de patients, afin qu’elle puisse être mobilisée par tous ceux qui remplissent les conditions de son application, quel que soit leur niveau socio-économique, de formation et de littératie en santé.

Loi sur les produits défectueux, qui exige que la victime apporte la preuve que son problème de santé est bien dû à un produit défectueux.

Loi instituant le Fonds des Accidents Médicaux (FAM) qui offre la possibilité de demander réparation de préjudices liés à des accidents médicaux même si aucune responsabilité n’est établie (loi dite ‘no fault’).