Avril 2009 Stratégies

Finalité du programme de dépistage du cancer colorectal

Le cancer colorectal constitue, en Belgique, par ordre de fréquence, le 3e cancer touchant la population masculine et le 2e cancer touchant la population féminine. Le risque de développer un cancer colorectal commence à augmenter après l’âge de 40 ans et de façon plus importante après l’âge de 50 ans. Ce risque double approximativement à chaque décade.
Le taux de mortalité liée à ce cancer est élevé car le diagnostic et le traitement sont généralement réalisés à un stade avancé de la maladie.
De nombreuses études ont démontré que la mortalité liée à ce cancer peut être réduite grâce au dépistage d’individus asymptomatiques.
Les cancers colorectaux sont généralement précédés par des lésions bénignes dont l’exérèse peut éviter la survenue d’un cancer.

Mars 2009 – Lancement du programme de dépistage du cancer colorectal

Le cancer colorectal représente en Belgique quelque 7.700 nouveaux cas par an; il s’agit du cancer digestif le plus fréquent. Il arrive en troisième position chez l’homme après le cancer de la prostate et du poumon et en deuxième position chez la femme après le cancer du sein.
Il reste associé à une mortalité élevée (40 à 50% des personnes atteintes décèdent dans les 5 ans). Le nombre de nouveaux cas est faible avant 50 ans pour augmenter ensuite de façon rapide.
L’objectif du dépistage de masse proposé en Communauté française est de réduire la mortalité par la détection précoce de lésions cancéreuses. De plus, la détection suivie de l’exérèse des adénomes permet d’éviter le développement de cancers.
La population cible est la population appartenant à la tranche d’âge 50-74 ans. Le test de dépistage retenu en Communauté française est le test de recherche de sang occulte dans les selles (Hémoccult II).
Les personnes présentant des symptômes ou ayant des antécédents personnels ou familiaux doivent quant à elles faire l’objet d’un suivi spécifique.
Les modalités d’organisation du dépistage sont précisées dans ce numéro.

La recommandation du Conseil européen du 2 décembre 2003 relative au dépistage du cancer (2003/878/CE) recommande par ailleurs aux États membres de mettre en place un programme de dépistage du cancer colorectal, par recherche de sang occulte dans les selles, pour les femmes et les hommes de 50 à 74 ans, afin de réduire la mortalité des suites d’un cancer colorectal.

Objectifs du programme de dépistage du cancer colorectal

Organiser l’ensemble des activités du dépistage du cancer colorectal permettant de dépister toutes les personnes relevant de la compétence de la Communauté française, âgées de 50 à 74 ans.
Ces activités sont les suivantes:
1. Informer et former les médecins généralistes et les gastro-entérologues francophones inscrits sur le listing des dispensateurs de soin de l’Institut national d’assurance maladie-invalidité;
2. Assurer l’approvisionnement des médecins généralistes en kits de dépistage;
3. Organiser les invitations à participer au programme;
4. Réceptionner les tests FOBT réalisés par les personnes concernées et les lire;
5. Assurer la transmission des résultats;
6. Assurer le suivi des résultats;
7. Assurer la cohérence et la pertinence du programme de dépistage du cancer colorectal;
8. Assurer la concertation entre les différents acteurs du programme: Communauté française, médecins (généralistes et gastro-entérologues), Registre du Cancer, etc.;
9. Assurer la qualité du programme;
10. Organiser le traitement des informations et des résultats;
11. Analyser des données anonymisées à des fins statistiques et épidémiologiques, en vue de l’évaluation du programme.

Fonctionnement du programme

Un Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal est mis en place au sein du Centre de référence pour le dépistage des cancers agréé par l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 11 juillet 2008 relatif au dépistage des cancers en Communauté française.
Ce Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal a pour missions:
1° l’organisation des invitations et réinvitations envoyées à la population concernée en vue de l’inviter à se rendre chez son médecin généraliste ainsi que la participation à l’élaboration de campagnes de sensibilisation de la population concernée en vue de l’inciter à se rendre chez son médecin généraliste;
2° la lecture des tests FOBT et la transmission des résultats;
3° le suivi des tests FOBT positifs et des demandes de coloscopie d’emblée;
4° l’établissement et la tenue à jour d’une base de données, dont la Communauté française est responsable;
5° l’approvisionnement et le réapprovisionnement des médecins généralistes en kits.
Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal invite et/ou sensibilise la population concernée à se rendre chez son médecin généraliste.
Le médecin généraliste, après évaluation du risque, motive la personne concernée à réaliser un test de dépistage ou l’adresse à un gastro-entérologue en vue d’une coloscopie totale.
Le Centre de référence va, quant à lui, entre autres:
-réaliser une analyse des données anonymisées reprises dans la base de données établie et tenue à jour par le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal, afin notamment d’évaluer la qualité et l’efficacité du programme en Communauté française, en collaboration avec la Fondation du Registre du Cancer;
-soumettre des propositions en vue d’adapter le programme du cancer colorectal aux évolutions scientifiques et technologiques;
-superviser et évaluer le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal.

Le déroulement détaillé du programme

Information et formation des médecins

En vue d’assurer le démarrage efficient du programme, informer et former les médecins généralistes et les gastro-entérologues, sur base d’un cédérom établi en consensus entre les différents acteurs du programme (information et formation organisées par le Centre de référence).

Fourniture de kits

Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal fournit un kit ‘médecin’ aux médecins généralistes avant le démarrage des premières invitations.
Le médecin généraliste peut demander par voie électronique, par fax ou par téléphone la livraison d’un nouveau kit qui lui sera envoyé par voie postale dans les meilleurs délais afin de réapprovisionner son stock.
Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal évalue l’utilisation des kits par médecin généraliste.

Invitations

Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal envoie chaque mois les invitations, comprenant la lettre d’invitation, un questionnaire et le dépliant d’information, aux personnes âgées de 50 à 74 ans leur proposant de se rendre chez leur médecin afin de participer au programme.
Les invitations sont envoyées le mois anniversaire, au cours d’une année paire pour les personnes qui sont nées un jour impair et au cours d’une année impaire pour les personnes qui sont nées un jour pair.
Si une personne ne désire pas participer au programme, elle peut motiver son refus via le questionnaire et le renvoyer au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal.

Réinvitations

Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal envoie une réinvitation aux personnes concernées, deux ans après la réalisation d’un test négatif ou 5 ans après une coloscopie négative.
Si une personne désire ne plus participer au programme, elle peut motiver son refus via le questionnaire et le renvoyer au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal.

Campagnes de sensibilisation

L’Administration organise, en collaboration avec le Centre de référence, des campagnes de sensibilisation à destination de la population et des médecins concernés.

Rôle du médecin généraliste

Le médecin généraliste motive sa patientèle éligible à participer au programme. La participation au programme de dépistage peut faire suite à la lettre d’invitation, à une démarche personnelle ou sur incitation du médecin généraliste au cours d’une consultation ordinaire.
Le médecin généraliste, après anamnèse, évalue le niveau de risque de développer un cancer colorectal.
Il complète, en ce qui le concerne, le questionnaire, dont les données reprises doivent comprendre au minimum:
-les coordonnées de la personne: n° NISS, nom, prénom, sexe, date de naissance, adresse complète, n° ou nom de la mutuelle,
-les coordonnées du médecin généraliste: nom, prénom, adresse complète,
-la date de consultation,
-les données d’anamnèse,
-la recommandation quant au type de dépistage.
En cas de risque moyen de développer un cancer colorectal, le médecin généraliste remet à la personne concernée le test FOBT à réaliser à domicile, le questionnaire qu’il a complété en ce qui le concerne, et une enveloppe pré-adressée au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal et port payé par le destinataire.
La personne renvoie au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal le test FOBT réalisé à domicile (clairement identifié avec ses coordonnées au moyen d’une vignette de mutuelle ou d’étiquettes pré-imprimées sur le questionnaire) et le questionnaire au moyen de l’enveloppe pré-adressée et port payé par le destinataire.
En cas de risque élevé ou très élevé de développer un cancer colorectal, le médecin généraliste oriente la personne vers un gastro-entérologue et lui remet un formulaire autocopiant de demande de coloscopie totale ainsi qu’une enveloppe pré-adressée au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal et port payé par le destinataire.
Le médecin généraliste renvoie simultanément le questionnaire complété au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal.

Réception et encodage des données

Les données relatives à la personne concernée sont encodées par le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal dans une base de données sécurisée qui lui est propre. Ladite base de données est sous la responsabilité de la Communauté française.
La personne doit prendre connaissance de la brochure qui explique le programme de dépistage du cancer colorectal et marquer son accord pour l’enregistrement, le suivi et le traitement de ses données personnelles dans ce cadre.
La base de données mentionne clairement si la personne autorise le traitement ultérieur de ses données personnelles dans le cadre du programme.
En cas de refus, le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal limite le traitement des données personnelles à celles qui sont exigées pour l’application des réglementations, notamment en matière de facturation, et pour l’enregistrement du résultat des lectures et la transmission des résultats au médecin généraliste relevant.
Les données saisies comportent au moins les données minimum reprises sur le support accompagnant le test FOBT ou la demande de coloscopie d’emblée.
La personne a le droit de prendre connaissance des données enregistrées qui la concernent et de faire corriger toute donnée inexacte.
Si les données sont illisibles ou incomplètes ou si le test FOBT ne peut pas être interprété en raison de sa mauvaise qualité, le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal avertit le médecin généraliste et l’invite, le cas échéant, à faire recommencer le test FOBT.

Lecture des tests FOBT

Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal procède à la lecture des tests FOBT qu’il reçoit et encode les résultats dans sa base de données.

Résultats

Suite à la lecture des tests FOBT, tous les résultats sont transmis au médecin généraliste par le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal. Pour chaque résultat des tests FOBT, un arbre décisionnel définit l’attitude à adopter.

Transmission des résultats positifs

En cas de test positif, le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal informe aussitôt le médecin généraliste qui annonce le résultat du test positif à la personne concernée et l’invite à poursuivre la mise au point.
La personne concernée reçoit également un courrier du Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal, 5 jours après l’envoi du courrier à son médecin généraliste, l’invitant à prendre contact avec son médecin.

Coloscopie totale

En cas de test positif ou pour une personne présentant un risque élevé ou très élevé de cancer colorectal, une coloscopie totale doit être effectuée par un gastro-entérologue.
Le gastro-entérologue communique les résultats de la coloscopie au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal via un protocole standardisé.
Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal enregistre les résultats de cette coloscopie dans sa base de données.
Si dans les deux mois qui suivent la date de demande de la coloscopie, aucun résultat n’est parvenu au Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal, le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal envoie un rappel au médecin généraliste.

Facturation des prestations relatives à la lecture des tests FOBT

Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal met en place les procédures nécessaires pour obtenir le remboursement des lectures des tests FOBT auprès de l’INAMI selon la nomenclature en vigueur.

Analyse des données – évaluation

Le Centre de référence assure une analyse à des fins statistiques et épidémiologiques des données anonymisées en vue de l’évaluation du programme.

Informations aux médecins

Au moins une fois par an, les données d’évaluation du programme sont transmises par le Centre de référence aux médecins généralistes et gastro-entérologues au travers d’un site web qui leur est consacré.

Comité de pilotage

Le déroulement détaillé du programme pourra être adapté par l’Administration sur avis du comité de pilotage mis en place dans le cadre de ce programme auprès du Centre de référence. Ce comité de pilotage insistera sur les objectifs relatifs à l’assurance de la qualité, aux coûts et à l’efficacité du programme.

Assurance de qualité et suivi/évaluation

1. Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal doit répondre à des critères de qualité de fonctionnement. Ces critères doivent être constamment suivis et évalués par le comité de pilotage.
2. Le suivi/évaluation du programme s’appuie sur certains indicateurs recommandés par le comité de pilotage. De nouveaux indicateurs d’évaluation pourront être proposés au fil du temps par le comité de pilotage. Ils seront en adéquation avec les indicateurs définis dans les ‘European guidelines for quality assurance in colorectal cancer screening’, lesquels sont élaborés par les experts européens et sont en voie de finalisation.
Ces indicateurs sont par exemple:
-couverture;
-âge au moment des tests (prélèvements);
-qualité des prélèvements;
-délai de transmission des prélèvements (consultation – réception des prélèvements);
-délai entre la réception des prélèvements et la transmission du résultat;
-taux de prélèvements non gérables;
-délai entre la transmission du résultat positif et la réception du résultat de la coloscopie;
-taux de tests positifs;
-taux de ‘perdus de vue’;
-spécificité;
-sensibilité;
-taux de coloscopies complètes;
-taux de biopsies;
-taux de complications;
-délai de rendez-vous pour une coloscopie;
-durée de la coloscopie;
-taux de détection et stades des adénomes et des cancers, etc.
3. L’assurance de qualité au niveau du Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal.
Le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal s’engage à assurer un niveau de qualité maximum à tous les échelons. Ceci inclut notamment l’adoption de procédures pour les différentes étapes du processus, la formation continue du personnel et la disposition d’arbres décisionnels.

Glossaire

1° Administration: la Direction générale de la Santé du Ministère de la Communauté française.
2° Centre de référence: le Centre de référence agréé en Communauté française pour le dépistage des cancers qui coordonne le programme en Communauté française conformément à l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 11 juillet 2008 relatif au dépistage des cancers en Communauté française.
3° Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal: le centre chargé de la mise en œuvre du programme cancer colorectal.
4° Coloscopie d’emblée: examen endoscopique de l’ensemble du cadre colique. Il est indiqué en cas de risque élevé ou de risque très élevé de cancer colorectal.
5° Décret: le décret du 14 juillet 1997 portant organisation de la promotion de la santé en Communauté française.
6° Invitation: lettre envoyée par le Centre de lecture aux personnes âgées de 50 à 74 ans qui n’ont jamais fait de test de dépistage afin de les inviter à profiter d’un test de dépistage du cancer colorectal dans le cadre du Programme.
7° Kits: les kits fournis aux médecins généralistes se composent d’une brochure qui leur est destinée, de kits patients pour la filière ‘risque moyen’ et de kits patients pour la filière ‘risque élevé ou très élevé’.
8° Lettre de résultat: lettre de résultat du test FOBT transmise au médecin généraliste par le Centre de gestion du dépistage du cancer colorectal.
9° Médecin généraliste: médecin généraliste francophone inscrit sur le listing des dispensateurs de soin de l’Institut national d’assurance maladie-invalidité.
10° Questionnaire: document annexé à l’invitation ou remis par le médecin généraliste à la personne qui désire participer au programme. Il permet de déterminer le niveau de risque.
11° Réinvitation: lettre envoyée aux personnes par le Centre de gestion de dépistage du cancer colorectal deux ans après un test négatif ou 5 ans après une coloscopie négative, si ces personnes sont toujours éligibles.
12° Test FOBT: test de recherche de sang occulte dans les selles (« Fecal occult blood test »); il s’agit d’un test dont l’analyse provoque une réaction peroxydasique de l’hémoglobine vis-à-vis d’un réactif au gaïac. La personne doit recueillir deux échantillons sur une même selle sur plusieurs selles successives. Ce test ne nécessite pas de régime alimentaire particulier.
13° Test positif: dès que la réaction est positive sur au moins un échantillon parmi ceux utilisés pour un test complet, le test est considéré comme positif; tout test FOBT positif nécessite une mise au point complémentaire consistant en une coloscopie totale.
14° Risque moyen: personne asymptomatique qui présente un risque moyen de développer un cancer colorectal. Ce risque est évalué à 3,5%.
15° Risque élevé: personne qui présente des antécédents personnels ou familiaux de cancer colorectal ou qui a des antécédents de polypes adénomateux ou qui a souffert d’une maladie inflammatoire du colon, de la maladie de Crohn, d’une rectocolite ulcéro-hémorragique.
16° Risque très élevé: toute personne souffrant d’une maladie de Lynch (cancer colorectal héréditaire non polyposique: HNPCC) ou d’une polypose héréditaire.
Information fournie par l’Administration de la Santé de la Communauté française