Novembre 2012 Par Gaëtan ABSIL Stratégies

L’évaluation est entrée dans le langage courant de la communication politique, bien plus elle tend à s’affirmer dans les pratiques d’une bonne gouvernance.

L’évaluation des politiques vise à la fois à apprécier la valeur d’une action publique et à enrichir le débat public sur ces mêmes politiques. L’évaluation des politiques publiques peut se décliner selon plusieurs modalités : le contrôle et la sanction (vise la conformité à la réglementation), le pilotage et la gestion (suivre l’exécution des actions), l’audit et la correction (réduire les risques), la décision stratégique (optimiser les effets par rapport aux besoins, expliquer les écarts entre effets attendus et atteints). Cette évaluation se caractérise aussi par une ouverture aux sciences politique et économique.

Un des enjeux des évaluations des politiques publiques réside dans une tension entre une technocratisation de l’État, où l’évaluation serait une affaire d’experts et de spécialistes (souvent au nom de la complexité du monde et de la spécialisation des savoirs) et le débat démocratique, où l’évaluation sert au peuple comme contrôle sur les élus et représentants. Champs d’expression des tensions entre différentes visions de la société, entre différentes positions institutionnelles, entre décideurs au niveau global et opérateurs de proximité ou opérateurs à des niveaux intermédiaires, les politiques publiques offrent un terrain particulièrement adéquat aux approches d’évaluation négociée. Ainsi, la collecte de données utiles au pilotage de la politique de santé de la Fédération Wallonie-Bruxelles suppose d’articuler les enjeux de l’action locale et de la gouvernance plus globale. L’article de Gaëtan Absil et Michel Demarteau illustre et analyse les objets et processus de négociation pour ce faire.

Allant plus loin que l’approche négociée, pour accentuer les dimensions émancipatrices de l’évaluation, Noémie Hubin expose quel protocole d’évaluation a été mis en place dans le cadre du dispositif pilote des Cellules bien – être à l’école. Ce protocole vise à laisser émerger, sans a priori, au départ des actions locales, ce que seront les repères d’une future action publique en ce domaine. Il permet aussi d’outiller les différents acteurs, depuis les partenaires des communautés éducatives jusqu’aux services du Gouvernement et aux conseillers politiques, afin qu’ils participent à la formalisation progressive de ces points de repères.

Ni négociée, ni émancipatrice, l’évaluation du premier PNNS belge est centrée sur la structure et les modalités de gestion d’un plan de santé publique et repose sur des analyses qualitatives. Ce faisant, elle offre une réelle occasion de réflexion formative sur les valeurs opératoires et mobilisatrice d’un outil de gestion de l’action publique de plus en plus fréquemment utilisé.

De telles approches de l’évaluation seront d’autant plus fructueuses que se développe aux différents paliers de l’action publique une culture de l’évaluation, fondée sur une initiation théorique et technique, mais surtout sur une approche concrète des démarches démocratiques et pluralistes de l’évaluation.

S’il est opportun de développer une culture de l’évaluation auprès des décideurs et acteurs administratifs (comme tente de le faire le certificat universitaire présenté par Catherine Fallon), dans le même mouvement, il est intéressant d’inciter les citoyens et les opérateurs de proximité à s’approprier les évaluations, à mieux comprendre leur réalisation et leur finalité. L’appropriation de l’évaluation devient ainsi un acte de citoyenneté, offrant la possibilité d’une critique constructive et argumentée des substrats des décisions politiques et sociétales.

C’est donc pour densifier le tissage de cette culture commune que nous incitons les lecteurs d’Éducation santé à découvrir ces quelques cas d’évaluation des politiques publiques.