Mars 2020, devant l’explosion du nombre de cas de Covid-19, les gouvernements de plusieurs pays dĂ©cident du confinement de leur population. Pause. Une partie du monde s’arrĂȘte. Et ensuite ?

Regards sur l’aprĂšs-pandĂ©mie, quels possibles pour demain ?

“A quoi ressemblera le monde d’aprĂšs la crise sanitaire ?”. Dans sa note de veille “Les Nouvelles des Possibles N°2”, FrĂ©dĂ©ric Claisse, de l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS), nous propose d’explorer quatre scĂ©narios – des hypothĂšses ou des “rĂ©cits relatifs au futurNote bas de page” – qui se sont dessinĂ©s dans les prises de position de citoyens, chercheurs, philosophes… au cours du premier mois de confinement gĂ©nĂ©ralisĂ© de prĂšs de la moitiĂ© de l’humanitĂ©. Bien que polarisĂ©s, ces diffĂ©rents scĂ©narios ne s’excluent pas nĂ©cessairement les uns les autres. “Ils sont en conversation permanente, partagent des problĂšmes, se disputent autour d’enjeux communs qu’ils polarisent Ă  leur maniĂšre. On n’a donc pas affaire Ă  quatre routes distinctes qui s’offriraient Ă  nous, mais Ă  une sĂ©rie de chemins qui peuvent se recouper pour aboutir Ă  des destinations diffĂ©rentes”(Claisse, 2020, p. 3) .DĂšs lors, quelle place sera rĂ©servĂ©e Ă  la promotion de la santĂ© dans ce monde d’aprĂšs ? Quel rĂŽle pourra-t-elle jouer ? A l’heure oĂč nous nous posons cette question, les acteurs du secteur se mobilisent pour faire entendre leurs souhaits, leurs visions
 Cette synthĂšse de la note de l’IWEPS permet d’amener des Ă©lĂ©ments complĂ©mentaires aux rĂ©flexions menĂ©es et prĂ©sentĂ©es tout au long de ce numĂ©ro spĂ©cial d’Education SantĂ©.

Scénario 1 : la transformation

Dans ce scĂ©nario, la crise que nous traversons est Ă  l’image de la goutte d’eau qui fait dĂ©border le vase. Elle est le rĂ©sultat d’un modĂšle de sociĂ©tĂ© insoutenable. Elle rĂ©vĂšle les grandes failles de notre fonctionnement sociĂ©tal, qu’il s’agisse de “l’impasse d’un modĂšle de gouvernance qui a vu l’Etat se dĂ©sinvestir de ses missions de service public”(Claisse, 2020, p. 3) (sur le plan politique et social quant aux conditions de travail du personnel soignant, Ă  la pĂ©nurie des masques, etc.) ou du“ systĂšme en train de causer la destruction de l’environnement et d’accĂ©lĂ©rer le changement climatique”(Claisse, 2020, p. 4) (sur le plan environnemental).DĂšs lors, un retour au “monde d’avant” n’est pas envisageable, il est nĂ©cessaire d’opĂ©rer une grande transformation, ou a minima un changement de cap. Cependant, cette transformation dĂ©pend du prisme par lequel on l’envisage, par exemple, un retour de l’Etat social ou encore un “plan de sortie” pour le climat. Rappelons que ces hypothĂšses ne s’excluent pas nĂ©cessairement. D’autres encore plaident pour ce qu’ils qualifient de “corona resetNote bas de page”, en portant la vision empreinte d’utopie d’un monde plus justeÂČ (Claisse, 2020, p. 5).“L’addition ou la convergence de ces exigences de transformation (Ă©cologiques d’un cĂŽtĂ©, Ă©conomiques et sociales de l’autre) pourrait avoir pour effet une prise de conscience accrue de la nĂ©cessitĂ© de prendre en compte le long terme dans des domaines comme l’environnement, l’énergie, la santĂ© ou la mobilitĂ©, et pousser l’acteur public Ă  relancer des politiques Ă©conomiques et sociales ambitieuses (
)”, indique l’auteur.

Scénario 2: le retour à la normale

Le titre est Ă©vocateur. Pragmatisme pour les uns, ardent souhait pour les autres, fatalisme (voir pessimisme) pour d’autres encore… la situation actuelle (l’état d’urgence) est transitoire et exceptionnelle. On est ici dans le scĂ©nario de la continuitĂ©.Sur le plan Ă©conomique, la relance de la consommation et de l’économie ainsi que la poursuite du modĂšle capitaliste sont salvateurs. La crise permettra mĂȘme de favoriser la libĂ©ralisation du systĂšme de santĂ©, par exemple. Le plan environnemental risque fort d’ĂȘtre (encore plus) lĂ©sĂ© au nom de la relance Ă©conomique (du secteur aĂ©rien, du tourisme, etc.). “ Dans un tel scĂ©nario, il y a fort Ă  parier qu’une fois levĂ©e la pĂ©riode de confinement, les individus, trop heureux de reprendre le cours de leur vie, se remettront Ă  voyager et Ă  consommer comme avant. “ (Claisse, 2020, p. 7). Toutefois, personne (ou trĂšs peu de gens, s’il y en a) ne nie les effets Ă  long terme de la crise, assortis d’une lente reprise Ă©conomique, dans le “monde d’aprĂšs”.Dans cet angle d’approche, certains redoutent toutefois la prolongation des mesures dites d’exception (mesures “de guerre”) sur le plan Ă©conomique ou sur celui des restrictions de libertĂ©s et droits humains.

Scénario 3: la résilience

Ce scĂ©nario postule que nous ne sortirons pas indemne de la crise mais que nous serons plus rĂ©silients car nous aurons “tirĂ© des leçons” de ce que nous aurons traversĂ©. Dans ce scĂ©nario, on prend en compte les “effets d’apprentissage”(Claisse, 2020, p. 8). qu’ont permis cette crise, tels que les Ă©changes trĂšs rapides de savoirs scientifiques ou les “efforts de coordination et de mobilisation mondiale”(Claisse, 2020, p. 8), par exemple. Au niveau individuel, les gestes barriĂšres sont intĂ©grĂ©s et deviennent la norme. Il est intĂ©ressant de noter, dans une rĂ©flexion sur l’avenir de la promotion de la santĂ©, qu’il revient ici Ă  chacun de modifier ses habitudes. Par ailleurs, une libertĂ© surveillĂ©e via des dispositifs de tracking, par exemple, est considĂ©rĂ©e comme un prix acceptable Ă  payer.Il ne s’agit donc pas tout Ă  fait d’un retour au “monde d’avant” comme dans le scĂ©nario prĂ©cĂ©dent. “L’humanitĂ© prend davantage conscience de sa vulnĂ©rabilitĂ© : les flux d’échange de biens, de services et de personnes reprĂ©sentent aussi des vecteurs de propagation pour des hĂŽtes avec lesquels elle doit (rĂ©)apprendre Ă  vivre. L’application du principe de prĂ©caution n’implique pas pour autant une entrave ou une limitation Ă  la circulation dans une Ă©conomie qu’il serait encore plus coĂ»teux de ‘dĂ©mondialiser’ » (Claisse, 2020, p. 8).

ScĂ©nario 4: l’effondrement

Ce quatriĂšme scĂ©nario est celui qui apporte sans doute le point de vue le plus catastrophiste. Il est autrement plus radical que celui du changement malgrĂ© quelques points communs. La thĂ©orie de l’effondrement (appelĂ©e aussi collapsologie) est de plus en plus prĂ©sente ces derniĂšres annĂ©es et soutient l’idĂ©e selon laquelle la sixiĂšme extinction de masse, le tarissement des ressources (notamment Ă©nergĂ©tiques mais aussi alimentaires Ă  cause de l’appauvrissement des sols liĂ© Ă  l’agriculture intensive), ainsi que le changement climatique ont menĂ© nos sociĂ©tĂ©s au bord du prĂ©cipice, de l’effondrement. Cette thĂ©orie est portĂ©e par des collapsologues. Parmi les plus illustres, on peut citer Pablo Servigne ou Jean-Marc Jancovici en France. Selon ce scĂ©nario, la crise liĂ©e Ă  la pandĂ©mie est rĂ©vĂ©latrice du fait que nous avons atteint un point de non-retour :“l’effondrement, selon eux inĂ©vitable, de la civilisation industrielle dont la plupart des indicateurs ont irrĂ©versiblement dĂ©passĂ© les seuils d’alerte.” ”. L’écologiste français Noel MamĂšre parle de “rĂ©pĂ©tition gĂ©nĂ©rale avant l’effondrement (Claisse, 2020, p9)” ou de la continuitĂ© d’un “processus dĂ©jĂ  entamĂ© (…) [qui] pourrait prendre plusieurs annĂ©es (Claisse, 2020, p.9)”comme le pense le sociologue Dominique Bourg, mais aussi d’effondrement des rĂ©seaux de production et de distribution entraĂźnant l’ensemble du systĂšme par un effet de dominos.NĂ©anmoins, les thĂ©ories de l’effondrement ne tournent pas uniquement autour de la maniĂšre ou du moment oĂč le monde tel qu’on le connait va s’écrouler. Il serait trĂšs rĂ©ducteur de ne retenir que le discours apocalyptique de ses partisans qui Ă©voquent Ă©galement “l’émergence de nouvelles formes de production, de consommation et de sociabilitĂ© dans la pĂ©riode de l’aprĂšs, qui doit se prĂ©parer dĂšs maintenant”(Claisse, 2020, p. 9). Sur ce point clĂ©, il rejoint donc l’idĂ©e de changement prĂŽnĂ©e par le premier scĂ©nario.

Un effondrement différencié par des inégalités sociales accrues

En Ă©voquant ce dernier scĂ©nario, l’auteur prĂ©cise qu’il existe un registre voisin Ă  celui de l’effondrement. “En rĂ©alitĂ©, il conviendrait plutĂŽt de parler d’effondrement diffĂ©rencié’, tant la crise sanitaire prĂ©carise certaines catĂ©gories de la population ou certaines zones gĂ©ographiques. Un des effets les plus soulignĂ©s de la pandĂ©mie est la maniĂšre dont la crise et sa gestion par le confinement rĂ©vĂšlent les inĂ©galitĂ©s et intensifient les vulnĂ©rabilitĂ©s. ”(Claisse, 2020, p. 10).

Le “retour des communs”, un autre scĂ©nario de l’effondrement

Durant la crise sanitaire, un autre phĂ©nomĂšne important Ă  noter est celui de la solidaritĂ©. De nombreuses initiatives ont fleuri un peu partout : fabrication de masques, de matĂ©riel de protection, distributions de nourritures, moyens pour contrer l’isolement… On observe « de la gĂ©nĂ©rositĂ© et de l’inventivitĂ© des personnes pour pallier le manque de matĂ©riel mĂ©dical, distribuer de la nourriture aux plus dĂ©munis ou garder le contact avec les personnes isolĂ©es (Claisse, 2020, p. 11) », plutĂŽt que des gens qui se dĂ©chirent les uns les autres comme le laissaient croire divers scĂ©narios de films apocalyptiques. Cette variante du scĂ©nario de l’effondrement impliquerait donc un retour aux valeurs importantes en communautĂ©. “S’il est contre-intuitif, ce scĂ©nario de “retour des communs” n’est, en rĂ©alitĂ©, pas incompatible avec celui de l’effondrement – ni, d’ailleurs, avec celui d’un retour de l’Etat social, dont ces actions mettent en Ă©vidence l’impuissance ou la dĂ©faillance (Claisse, 2020, p. 11). »Parmi ces diffĂ©rents scĂ©narios mais aussi de maniĂšre transversale, il convient maintenant de se demander oĂč et comment va s’inscrire la promotion de la santĂ© dans le monde de demain. Les intervenants en promotion de la santĂ© se mobilisent. Pour Education SantĂ©, associĂ© Ă  la note des FĂ©dĂ©rations bruxelloises et wallonne de Promotion de la SantĂ©, retour au « monde d’avant » et Ă  ses inĂ©galitĂ©s toujours grandissantes n’est pas souhaitable.

Claisse, F. (2020). Covid-19: quatre scĂ©narios pour l’aprĂšs-crise. Les nouvelles des possibles : note de veille prospective de l’IWEPS, N°2. https://www.iweps.be/wp-content/uploads/2020/04/NVPO02.pdf

D’aprĂšs le prospectiviste Jim Dator, citĂ© dans la note de l’IWEPS : Dator, J. (2009), « Alternative Futures at the Manoa School », Journal of Futures Studies, 14(2), pp. 1–18.

Le volontariat est largement rĂ©pandu dans notre pays. D’aprĂšs la Fondation Roi Baudouin, prĂšs de 1,2 million de Belges font du volontariat au sein d’organisations. Et c’est loin d’ĂȘtre une activitĂ© marginale : un volontaire preste « en moyenne prĂšs de 190 heures au cours de l’annĂ©e Ă©coulĂ©e, soit prĂšs de 4 heures par semaine. »Note bas de page. La vie associative couvre un large Ă©ventail de domaines d’activitĂ© : sport, culture, jeunesse, santĂ© et bien-ĂȘtre, fĂ©minisme, environnement, vie de quartier… Il y en a pour tous les goĂ»ts.

Y a-t-il un lien entre engagement volontaire dans la vie associative et la santĂ© tant subjective qu’objective ? C’est la question de recherche Ă  l’origine d’une Ă©tude Ă  grande Ă©chelle, menĂ©e par la MutualitĂ© chrĂ©tienne, ses mouvements partenaires et la FacultĂ© de psychologie de l’UCLouvain.

Le volontariat, c

Notions clés et méthode de départ

Pour ce qui est du volontariat, nous suivons la dĂ©finition de Borgonovi (2008)Note bas de page : il s’agit d’une « activitĂ© dans laquelle l’individu donne de son temps Ă  des groupes et organisations, sans compensation financiĂšre en retour. » Et par participation Ă  la vie associative, on entend la participation Ă  une activitĂ© sociale organisĂ©e au sein d’une structure (club, organisation, mouvement). Il s’agit, par exemple, d’une randonnĂ©e organisĂ©e par un club de marche, mais pas d’une balade avec quelques amis. Cette participation Ă  la vie associative peut ĂȘtre passive ou active. Il est question de participation passive si l’on participe ou bĂ©nĂ©ficie simplement des activitĂ©s organisĂ©es (ex. : aller marcher avec un club de randonnĂ©e). En cas de participation active, la personne organise les activitĂ©s (ex. : elle organise la randonnĂ©e ou l’effectue en tant que volontaire).

Afin de permettre une comparaison entre rĂ©pondants ayant un niveau variable d’engagement social, une participation suffisamment forte des volontaires Ă©tait importante (ce sont des rĂ©pondants avec un engagement social Ă©levĂ©). C’est pourquoi l’Ă©tude a Ă©tĂ© menĂ©e en collaboration Ă©troite avec les mouvements francophones et nĂ©erlandophones partenaires de la MC : AltĂ©o et Samana (mouvements de personnes malades, valides et handicapĂ©es), ÉnĂ©o, Ă©nĂ©oSport et Okra (mouvements des aĂźnĂ©s), Ocarina – anciennement Jeunesse & SantĂ© – et Kazou (organisations de jeunesse) ainsi qu’Intersoc (service vacances de la MC). 2.033 volontaires engagĂ©s dans ces associations ont rĂ©pondu Ă  un questionnaire en ligne et donnĂ© leur accord pour coupler leurs rĂ©ponses Ă  l’analyse de leurs donnĂ©es de santĂ© sur les annĂ©es 2017 et 2018. 4.988 membres MC ont complĂ©tĂ© le panel selon les mĂȘmes modalitĂ©s.

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Parmi les 7.021 participants Ă  l’étude, il y a une majoritĂ© de femmes (55%) L’ñge moyen est de 57 ans, mais la distribution des Ăąges est trĂšs Ă©tendue, des jeunes (18 ans, du fait de la prĂ©sence des organisations de jeunesse comme Kazou et Ocarina) aux plus ĂągĂ©s (jusqu’à 90 ans). On dispose Ă©galement d’une diversitĂ© sociale : toutes les catĂ©gories sociales et niveaux de formation sont reprĂ©sentĂ©s.

Les participants Ă  la recherche ont Ă©tĂ© rĂ©partis en quatre groupes : (1) les volontaires actifs dans un ou plusieurs mouvements partenaires de la MC (2.053), (2) les membres MC actifs dans une association ou organisation (2.028), (3) les membres MC qui prennent part Ă  la vie associative de maniĂšre passive (1.108) et (4) les membres MC qui n’y participent pas du tout (1.852).

Dans les rĂ©sultats prĂ©sentĂ©s ci-aprĂšs, les effets de quatre variables ont Ă©tĂ© pris en compte : l’ñge, le genre, le fait de bĂ©nĂ©ficier de l’intervention majorĂ©e (BIM) et le fait de vivre seul. ConcrĂštement, au niveau des indicateurs prĂ©sentĂ©s, les diffĂ©rences observĂ©es entre les quatre groupes de rĂ©pondants ne sont pas dues Ă  des effets provenant de ces quatre variables de contrĂŽle (Ăąge, genre, BIM, fait de vivre seul). Par exemple, s’il y a davantage de contacts avec les mĂ©decins dans tel groupe de rĂ©pondants, on ne pourra pas dire que c’est dĂ» au fait qu’ils seraient plus ĂągĂ©s que les autres rĂ©pondants. Les effets de ces quatre variables de contrĂŽle ayant Ă©tĂ© neutralisĂ©s, les diffĂ©rences mises en lumiĂšre reflĂštent davantage l’influence de la participation Ă  la vie associative sur l’indicateur en cause.

Processus psychosociaux

Est-ce que la participation Ă  la vie associative a une influence significative sur le bien-ĂȘtre ? Le questionnaire comportait de nombreuses questions permettant de mesurer divers processus psychosociaux participant au bien-ĂȘtre (sentiment de fusion avec la sociĂ©tĂ©, d’intĂ©gration sociale, de solitude, soutien social perçu, Ă©panouissement, estime de soi, sentiment de sens, individualisme / collectivisme, souci empathique / prise de perspective). Les rĂ©sultats sont sans appel : les liens sont significatifs pour toutes les variables psychosociales mesurĂ©es et auto-rapportĂ©es par les participants.

Par exemple, le ‘sentiment de fusion avec la sociĂ©té’ a Ă©tĂ© mesurĂ© Ă  l’aide des schĂ©mas ci-aprĂšs. Le score se dĂ©duit du schĂ©ma sĂ©lectionnĂ© par le rĂ©pondant : de A (score 1) = ‘Je me sens Ă  cĂŽtĂ© de la sociĂ©té’ Ă  E (score 5) = ‘Je me sens en fusion avec la sociĂ©té’. Pour les quatre groupes de rĂ©pondants, le score moyen est donnĂ© Ă  la Figure 1.

Parmi les schĂ©mas au-dessous, lequel correspond le mieux Ă  la maniĂšre dont vous vous situez par rapport Ă  la sociĂ©tĂ© ?ImageQu’observe-t-on ? Les personnes qui ne participent pas Ă  la vie associative obtiennent un score significativement plus faible que les personnes qui y participent. Le score du ‘sentiment de fusion avec la sociĂ©té’ augmente avec la participation : les participants actifs ont un score significativement plus Ă©levĂ© que les participants passifs. Les personnes qui participent Ă  la vie associative ont donc le sentiment d’ĂȘtre davantage un Ă©lĂ©ment de la sociĂ©tĂ©. Et plus la participation est active, plus ce sentiment se renforce.

Autre exemple : le ‘sentiment de solitude’. Ici, le score est calculĂ© (Likert Ă  5 points) sur la base de rĂ©ponses aux questions suivantes : ‘Je sens que je manque de compagnie’, ‘Je me sens abandonné’, ’Je me sens isolĂ© des autres’. Les rĂ©ponses vont de : ‘pas du tout d’accord’ (score 1) Ă  ‘tout Ă  fait d’accord’ (score 5). Donc, plus le score est Ă©levĂ©, plus on se sent seul. Pour les quatre groupes de rĂ©pondants, le score moyen est donnĂ© Ă  la Figure 2. On observe que plus l’engagement dans la vie sociale structurĂ©e est actif, moins on se sent seul. La simple participation permet dĂ©jĂ  de se sentir moins seul que la non-participation. Si l’on s’engage activement dans un rĂŽle de volontaire, ce sentiment de solitude est encore plus faible.

Figure 1 : Sentiment de fusion avec la sociétéImage

Figure 2 : Sentiment de solitudeImage

Santé subjective

Au-delĂ  des processus psychosociaux, le questionnaire a permis de mettre en lumiĂšre la maniĂšre dont les rĂ©pondants Ă©valuent leur Ă©tat de santĂ©. Sur base de quelques questions, un score factoriel a Ă©tĂ© calculĂ©, qui reflĂšte ce niveau de santĂ© ‘subjective’ (car auto-rapportĂ©e). L’interprĂ©tation de ce score est la suivante. Le score 0 reprĂ©sente le degrĂ© moyen de la santĂ© perçue pour l’ensemble des rĂ©pondants. Un score positif dĂ©note alors une meilleure santĂ© perçue que la moyenne des rĂ©pondants. Un score nĂ©gatif signifie que le rĂ©pondant estime ĂȘtre en moins bonne santĂ© que la moyenne.

Aussi bien les participants actifs que les participants passifs se sentent dans un état de santé moyen (score proche de 0). Le groupe des « volontaires » se sent clairement en meilleure santé (score positif de 0,21), en revanche les non-participants rapportent une moins bonne santé perçue (score négatif de -0,27). Comme on peut le voir à la Figure 3, ne pas participer à la vie sociale organisée influence négativement la maniÚre dont on évalue sa propre santé. Par rapport à ce dernier groupe, le fait de participer (passivement ou activement) améliore déjà la perception de son état de santé.

Figure 3 : Santé perçueImage

Santé objective

Lorsqu’on se sent en meilleure santĂ©, on recourt moins souvent aux soins de santĂ©. Nous avons des rĂ©sultats qui vont dans ce sens. En effet, les personnes qui ne participent pas du tout Ă  la vie associative – et se sentent en moins bonne santĂ© – entrent davantage en contact (9 Ă  10% de plus) avec les mĂ©decins que celles qui ont une participation active ou passive. Il en va de mĂȘme pour le volume des hospitalisations de jour (40% de plus).

L’engagement volontaire a Ă©galement des effets significatifs en ce qui concerne les mĂ©dicaments remboursĂ©s. La trĂšs grande majoritĂ© de nos rĂ©pondants recourent Ă  l’un ou l’autre mĂ©dicament. Mais on constate que la proportion de non-consommateurs a tendance Ă  diminuer – cela signifie que la proportion de consommateurs de mĂ©dicaments augmente – au fur et Ă  mesure que la participation Ă  la vie sociale diminue. De plus, les personnes qui ne participent pas Ă  la vie associative prĂ©sentent, en volumeNote bas de page, une consommation de mĂ©dicaments significativement plus Ă©levĂ©e (de l’ordre de 17%) que les trois groupes qui y participent. Ces tendances gĂ©nĂ©rales s’observent Ă©galement pour certaines classes thĂ©rapeutiques de mĂ©dicaments, comme la classe thĂ©rapeutique N, soit celle des mĂ©dicaments agissant sur le systĂšme nerveux (antiĂ©pileptiques, antidĂ©presseurs, antipsychotiques
). La consommation de mĂ©dicaments de la classe N est donnĂ©e Ă  la Figure 4.

Figure 4 : Volume de médicaments de la classe NImage

Conclusion

La prĂ©sente Ă©tude se veut exploratoire. Ses premiers rĂ©sultats viennent confirmer bien des intuitions et tĂ©moignages – voir ci-dessousNote bas de page – relatifs aux bienfaits du volontariat. Donner son temps aux autres fait du bien ! S’engager dans le volontariat donne du sens, crĂ©e des liens sociaux, apporte du bien-ĂȘtre et participe au sentiment d’ĂȘtre en bonne santĂ©. MĂȘme si l’on ne peut affirmer avec certitude qu’il y a un lien de cause Ă  effet, la corrĂ©lation entre volontariat et santĂ© ressort clairement des rĂ©sultats. Ceux-ci entrent en cohĂ©rence avec un courant scientifique qui montre combien la participation Ă  la vie sociale va de pair avec le bien-ĂȘtre.

D’oĂč l’importance d’encourager et de valoriser le volontariat. La nouvelle loi fĂ©dĂ©rale qui encadre le volontariat apporte des Ă©claircissements sur certains points (cadeaux, dĂ©fraiements
). Mais des freins Ă  l’engagement volontaire subsistent, en particulier pour les prĂ©pensionnĂ©s et les chĂŽmeurs. Pointons aussi le risque de marchandisation d’activitĂ©s effectuĂ©es aujourd’hui de maniĂšre gratuite et volontaire. On peut s’inquiĂ©ter de voir des plateformes collaboratives proposer de telles activitĂ©s contre rĂ©munĂ©ration.

En guise de conclusion, on pourrait dire ceci : autant il faut Ă©viter que le volontariat soit rendu obligatoire ou instrumentalisĂ©, autant il est nĂ©cessaire de le promouvoir et de le valoriser. Le volontariat n’est pas seulement une source d’enrichissement pour la vie en sociĂ©tĂ©, il l’est aussi pour la santĂ© et le bien-ĂȘtre de ceux qui s’y engagent. Investir dans le volontariat, c’est aussi investir dans la santĂ©.

Jean, volontaire à Altéo

‘Je m’investis pour rompre l’isolement des personnes en invaliditĂ© et leur offrir un univers accueillant’.

L’invaliditĂ© et l’isolement, Jean, 73 ans, les a vĂ©cus. ‘Je travaillais comme ingĂ©nieur pour une grande multinationale lorsqu’on m’a proposĂ© un poste enviĂ© de tous. J’avais 51 ans et j’ai acceptĂ© cette nouvelle fonction
 mais, en fait, elle ne servait Ă  rien ! Un an et demi plus tard, je suis tombĂ© en ‘bore out’ (Ă©puisement professionnel liĂ© Ă  un manque de travail ou Ă  l’ennui suscitĂ© par les tĂąches qui sont confiĂ©es), puis en dĂ©pression profonde’, confie Jean.C’est Ă  la suite d’un voyage proposĂ© aux personnes en invaliditĂ© par AltĂ©o que Jean s’est initiĂ© au volontariat. ‘Lors de ce sĂ©jour, j’ai fait la connaissance de personnes rencontrant les mĂȘmes difficultĂ©s que moi. Un an plus tard, des vacanciers ont crĂ©Ă© un comitĂ© d’invalides. Ils m’ont proposĂ© de les rejoindre. C’est alors que j’ai expĂ©rimentĂ© le bĂ©nĂ©volat pour la premiĂšre fois, explique Jean qui voit Ă  sa maladie, un cĂŽtĂ© positif : J’ai dĂ©couvert un monde oĂč rĂšgnent le respect, la solidaritĂ© et la convivialitĂ©. Notre comitĂ© tente de briser l’isolement des personnes en invaliditĂ©. On organise des confĂ©rences, des excursions, des balades, des diners
 Assez vite, j’ai retirĂ© du plaisir de cet engagement et j’ai pris conscience que je servais Ă  quelque chose. J’ai longtemps Ă©tĂ© suivi par mon mĂ©decin, par un psychothĂ©rapeute et je prenais des mĂ©dicaments mais tout cela est dĂ©sormais derriĂšre moi. Ce qui m’a aidĂ©, c’est la chaleur humaine qui, selon moi, est indissociable de la guĂ©rison physique et morale.Aujourd’hui, Jean s’active toujours au sein du comitĂ© dont il est devenu le secrĂ©taire. Il s’implique aussi Ă  d’autres niveaux dans le mouvement auquel il consacre deux Ă  trois jours par semaine. ‘Cela me permet de rester en forme’, lance-t-il.

Louis, actif Ă  Ocarina

‘J’ai envie de transmettre tout ce que l’on m’a transmis. Surtout, cette bienveillance !’

Louis, 20 ans, consacre cinq Ă  six soirĂ©es par mois comme volontaire au sein d’Ocarina, organisation de jeunesse. ‘AprĂšs avoir co-animĂ© des stages pour enfants dans mon village, j’ai voulu me former pour pouvoir encadrer seul un groupe. J’ai optĂ© pour la formation d’animateur organisĂ©e par Ocarina’.Être animateur lui a tout de suite plu : ‘J’ai dĂ©couvert les ‘obligations positives’. Rien ne nous oblige Ă  nous investir mais dĂšs qu’on fait ce choix, on l’assume Ă  fond et on honore ses engagements avec plaisir. J’aime voir qu’on est tous rassemblĂ©s autour d’une mĂȘme cause’. Louis apprĂ©cie tant son volontariat qu’il a dĂ©cidĂ© de dĂ©couvrir les coulisses de l’animation et d’intĂ©grer le comitĂ© Ocarina de sa rĂ©gion. ‘Le volontariat nous force Ă  bouger, Ă  dĂ©couvrir nos limites aussi. Mais il m’a surtout permis de dĂ©velopper des relations, de gagner en confiance en moi, en prenant la parole en public, par exemple. Et j’ai dĂ©couvert le sentiment de bienveillance que je compte bien transmettre Ă  mon tour’.

Marée M, Hustinx L, Xhauflair V, De Keyser L & Verhaeghe L. 2015. Le volontariat en Belgique : Chiffres-clés. Bruxelles. Rapport de la Fondation Roi Baudouin

https://www.kbs-frb.be/~/media/Files/Bib/Publications/PUB_3367_Volontariat.pdf (p. 25)

Borgonovi F. 2008. Doing well by doing good. The relationship between formal volunteering and self-reported health and happiness. Social Science & Medicine, 66(11):2321-34.

EstimĂ© en DDD – Defined Daily Doses. C’est la dose d’entretien moyenne prĂ©sumĂ©e par jour pour un mĂ©dicament utilisĂ© dans son indication principale chez l’adulte.

https://www.ipheb.be/wa_files/457-458.pdf

Van Haesebrouck S. 2019. Être volontaire Ă  la MC, le choix du lien et du sens. En Marche. Ă©dition du 5 dĂ©cembre 2019. www.enmarche.be

L’environnement exerce une influence considĂ©rable sur la santĂ© physique et psychique. De plus, on observe un cumul entre les inĂ©galitĂ©s environnementales et les inĂ©galitĂ©s sociales. Partant de ce constat, Forest Quartiers SantĂ©, asbl active dans le champ de la promotion de la santĂ©, a dĂ©veloppĂ© plusieurs projets pour y rĂ©pondre.

Vers Une Forest Ensante

Pour agir sur les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©, Forest Quartiers SantĂ© (FQS) organise depuis de nombreuses annĂ©es une sĂ©rie d’actions communautaires de premiĂšre ligne dans les quartiers populaires de Forest et Saint Gilles. ConcrĂštement, FQS mĂšne de multiples projets avec les habitants, axĂ©s sur des thĂ©matiques telles que le logement, l’alimentation saine et durable, l’exercice physique, l’emploi, l’inclusion numĂ©rique, la sĂ©curitĂ© dans les milieux de vie, la participation citoyenne, etc.

Afin d’augmenter la pertinence et l’impact de ces actions, FQS prĂ©conise une dĂ©marche collective, intersectorielle et participative afin de favoriser l’engagement conjoint des habitants, professionnels et Ă©lus dans la dĂ©finition de leurs besoins, de leurs prioritĂ©s et leurs actions en vue de la co-construction de solutions concrĂštes. Dans cette optique, FQS agit en partenariat et en rĂ©seau avec les acteurs associatifs et institutionnels de la commune de Forest, afin d’identifier et coordonner les actions de maniĂšre optimale, et de dĂ©velopper des stratĂ©gies qui prennent en compte la globalitĂ© des situations. Les actions visent en prioritĂ© les habitants des quartiers les plus prĂ©carisĂ©s des communes de Forest, un public multiculturel cumulant souvent des vulnĂ©rabilitĂ©s telles que faibles revenus, faible niveau de formation, non-emploi, logement dĂ©gradĂ©, situation d’exil, isolement social, etc.

Habitat et Santé

Le premier projet, initiĂ© il y a quelques annĂ©es dĂ©jĂ , a trait Ă  l’habitat. La dĂ©gradation et l’insalubritĂ© des logements relĂšvent d’une problĂ©matique qui a des effets dramatiques sur la santĂ© et les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©. Le diagnostic Ă©tabli sur le pĂ©rimĂštre de Forest fait Ă©tat dans certains quartiers d’une piĂštre qualitĂ© du bĂąti et de nombreux habitants vivent dans des logements exigus, vĂ©tustes, voire insalubres. On y rencontre des problĂšmes d’humiditĂ©, d’Ă©clairage insuffisant, de ventilation inadĂ©quate, d’exiguĂŻtĂ©, d’installation Ă©lectrique ou de chauffage dĂ©ficients. Il Ă©tait donc important de sensibiliser les citoyens Ă  l’impact de leurs gestes quotidiens qui peuvent contribuer Ă  dĂ©grader, prĂ©server ou amĂ©liorer l’état du logement et influer sur la qualitĂ© de vie. C’est sur cette base que FQS a mis en place des ateliers « logement sain » de premiĂšre ligne.

Leurs objectifs Ă©taient d’atteindre et sensibiliser le plus grand nombre de personnes possible, de dĂ©velopper les capacitĂ©s d’agir individuelles et collectives des participants pour rendre leurs logements plus sains, ainsi que de renforcer la cohĂ©sion sociale du quartier par des activitĂ©s communautaires, de sensibilisation, de mĂ©diation. Il s’agissait d’informer la population sur les ressources mises Ă  sa disposition, sur une meilleure utilisation et une gestion plus durable du logement ainsi que de ses Ă©quipements (entretien, chauffage, aĂ©ration, etc
). FQS a donc organisĂ© des ateliers consacrĂ©s Ă  des thĂ©matiques telles que les polluants intĂ©rieurs, les nuisibles (principalement les acariens), l’humiditĂ©, etc., ainsi que la gestion durable et Ă©coresponsable de l’habitat.

Le projet propose entre autres des ateliers de fabrication de produits d’entretien Ă©coresponsables, oĂč les participants sont amenĂ©s Ă  prendre conscience de l’impact des produits traditionnels sur leur santĂ© et sur l’environnement.

D’autres ateliers sont consacrĂ©s aux polluants intĂ©rieurs et Ă  l’humiditĂ©. En dĂ©tecter les sources et la nature, ĂȘtre informĂ© sur leurs consĂ©quences, et expĂ©rimenter des solutions parfois toute simples, comme une aĂ©ration rĂ©guliĂšre ou l’Ă©limination de moisissures, permet souvent de limiter les nuisances.

Les ateliers abordent aussi ce qu’on appelle les « nuisibles » (organismes animaux, vĂ©gĂ©taux, bactĂ©ries
) et plus prĂ©cisĂ©ment les acariens, dont la prĂ©sence multiplie l’occurrence d’allergies ou de troubles respiratoires, et les moyens de lutte pour les Ă©viter.

L’accent est Ă©galement mis sur le recyclage, la gestion des dĂ©chets, avec une conscientisation globale sur les questions environnementales.

Pour que l’action s’Ă©tende Ă  un maximum de personnes et que ses effets se prolongent dans le temps, FQS a Ă©galement mis en place un rĂ©seau de « citoyens-relais » qui pourront Ă  leur tour sensibiliser leur entourage familial, leur voisinage, les associations dans lesquelles ils sont impliquĂ©s, etc.

Ateliers de cuisine « saine et durable »

Un autre axe sur lequel Forest Quartiers SantĂ© agit est l’alimentation, tant on sait que la maniĂšre de se nourrir est un facteur de santĂ© primordial. Le projet consiste Ă  organiser et animer des cycles d’ateliers de cuisine saine, durable, vĂ©gĂ©tarienne, et inscrits dans une optique zĂ©ro dĂ©chet. Ici, pas de cuisine gastronomique et onĂ©reuse comme c’est souvent de mode. L’animatrice tient compte des habitudes alimentaires des participants et de leur budget ; elle propose une cuisine de qualitĂ© mais accessible.

Les ateliers permettent de sensibiliser, (in)former et autonomiser les participants sur diffĂ©rents aspects de l’alimentation : sensibilisation globale Ă  l’impact de nos comportements alimentaires sur la santĂ© et l’environnement, notions de diĂ©tĂ©tique et conception de menus Ă©quilibrĂ©s, achats durables, gestion du frigo, conservation et rĂ©utilisation des aliments, compostage des dĂ©chets, etc.

Ces ateliers de « cuisine durable » permettent de réaliser des recettes originales tout en apprenant à se tourner vers le local, bio, de saison et les petits marchands plutÎt que les grandes enseignes, tout en privilégiant des denrées accessibles financiÚrement.

L’animatrice de FQS a optĂ© pour des recettes vĂ©gĂ©tariennes (ce qui permet de rĂ©duire les coĂ»ts, d’éviter les difficultĂ©s liĂ©es aux diffĂ©rents prescrits culturels et religieux, et de minimiser l’impact nĂ©gatif sur la santĂ© et l’environnement). Le projet vise aussi Ă  faire connaĂźtre les ressources disponibles et alternatives sur les territoires visĂ©s (marchĂ©s, coopĂ©ratives et magasins d’alimentation bio, potagers et composts collectifs, Jardin Essentiel Ă  Forest
).

De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, il s’agit aussi de prendre conscience des enjeux de l’alimentation au niveau mondial et local, tant du point de vue de la santĂ© que de celui de l’environnement, et d’adopter de nouveaux comportements.

Le projet entend sensibiliser les participants Ă  l’amĂ©lioration de l’environnement Ă  diffĂ©rents Ă©gards : utilisation de produits de proximitĂ©, de circuit court, afin de rĂ©duire les impacts Ă©nergĂ©tiques, de produits issus de culture biologique, optique ‘zĂ©ro dĂ©chet’, utilisation de matĂ©riel de cuisine et de contenants ‘zĂ©ro plastique’, produits d’entretien Ă©cologiques…

Évoluer dans un environnement plus favorable Ă  sa santĂ©

En milieu urbain, il n’est pas toujours Ă©vident de garder un contact avec la nature.

Et pourtant, l’impact que la nature a sur la santĂ© n’est plus Ă  dĂ©montrer: baisse des troubles respiratoires, de la pression artĂ©rielle et du stress, action sur la dĂ©pression ou encore amĂ©lioration de l’immunitĂ© sont quelques-uns de ses bienfaits. Reconnecter les habitants avec l’écosystĂšme urbain et pĂ©riurbain est donc particuliĂšrement important.

C’est pour cette raison que FQS a lancĂ© en 2019 un nouveau programme d’action axĂ© sur des activitĂ©s en lien avec la sauvegarde de l’environnement et l’utilisation durable et rationnelle des ressources de la nature.

Ainsi, FQS organise, principalement avec des publics d’enfants d’associations partenaires sur Forest (Le Cairn, le Partenariat Marconi), des « balades nature » dont les objectifs sont de sensibiliser les enfants Ă  l’environnement et la biodiversitĂ©, de les connecter avec la nature, tout en privilĂ©giant des activitĂ©s de plein air. Forest et ses alentours possĂšdent de nombreux espaces verts trĂšs peu connus et frĂ©quentĂ©s par les habitants, particuliĂšrement des milieux dĂ©favorisĂ©s. Balade botanique par les Ă©tangs de Pede, Ă  Anderlecht, avec un guide nature, visites du rucher du Parc Brel ou du jardin d’abeilles du Bois du Laerbeek (en tenue d’apiculteur!), oĂč les enfants ont Ă©galement savourĂ© des fruits et des lĂ©gumes de saison cultivĂ©s dans le verger, promenades et activitĂ©s en forĂȘt de Soignes ou au Parc Bempt pour dĂ©couvrir les diffĂ©rents Ă©cosystĂšmes, sont quelques-unes des activitĂ©s qui ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© proposĂ©es. Ces balades sont complĂ©tĂ©es par des activitĂ©s en intĂ©rieur, axĂ©es sur l’alimentation saine telles que la confection d’une pyramide alimentaire, avec des reconnaissances de fruits et lĂ©gumes Ă  l’aveugle ainsi que la dĂ©gustation de produits biologiques et de saison.

Ces activités ludiques et participatives ont rencontré un grand succÚs auprÚs de ces petits citadins qui découvraient souvent pour la premiÚre fois des lieux et des ressources pourtant accessibles.

Les jardins santé

Enfin, cette annĂ©e, FQS est en passe de concrĂ©tiser dans un nouveau projet en partenariat avec l’ULB : « Jardins SantĂ© Ă  Bruxelles ». Ce projet, rassemblant diverses associations, entend dĂ©velopper de vĂ©ritables lieux d’expĂ©rience en RĂ©gion bruxelloise, Ă  travers un rĂ©seau de jardins collectifs en milieu urbain, qui joueront le rĂŽle de laboratoires vivants (« living labs ») oĂč les habitants pourront cultiver et mieux connaitre des plantes mĂ©dicinales, aromatiques, et « alicaments », aidĂ©s et conseillĂ©s par des professionnels.

La RĂ©gion bruxelloise recĂšle un grand nombre de jardins urbains et d’espaces verts. La biodiversitĂ© vĂ©gĂ©tale sauvage et cultivĂ©e qu’ils hĂ©bergent reprĂ©sente des outils et ressources insuffisamment exploitĂ©s. ConsidĂ©rĂ©e depuis le rĂšgne de LĂ©opold II comme la « commune des parcs », Forest est un lieu privilĂ©giĂ© pour un projet de co-crĂ©ation comme celui des « Jardins SantĂ© Ă  Bruxelles ». En collaboration trĂšs Ă©troite avec le service du DĂ©veloppement durable de la Commune de Forest, qui a donnĂ© son soutien logistique et matĂ©riel, ont Ă©tĂ© identifiĂ©s plusieurs jardins potagers et espaces verts qui seraient susceptibles d’hĂ©berger des petits/moyens « living labs ». PlutĂŽt que de se concentrer en un seul lieu, plusieurs petites parcelles seront exploitĂ©es, ce qui permettra d’atteindre diffĂ©rents publics, en crĂ©ant un vĂ©ritable rĂ©seau de jardins santĂ©, chacun avec ses propres caractĂ©ristiques.Un projet riche qui, Ă  travers l’environnement, a pour enjeu de dĂ©velopper l’autonomie des personnes dans la prise en charge de leur santĂ©.

Pour en savoir plus : Forest Quartiers Santé : www.f-q-s.be

Image Quelques ressources pour aller plus loin:

  • Paquin, S., Laurin, M. (2016) Guide sur les environnements favorables aux saines habitudes de vie dans les municipalitĂ©s. MontrĂ©al : Direction rĂ©gionale de santĂ© publique du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Ăźle-de-MontrĂ©al, ComitĂ© quĂ©bĂ©cois de formationsur les saines habitudes de vie et QuĂ©bec en Forme. 147p.: disponible en ligne sur le site du reso www.uclouvain.be/reso
  • Heritage, Z., RouĂ©-Le Gall, A. CĂ©sar, C. (2015) Urbanisme et amĂ©nagements favorables Ă  la santĂ©. SantĂ© en action, n° 434, 56p.: disponible en ligne sur www.santepubliquefrance.fr
  • Beaudoin, M., Levasseur, M-E. (2017) Verdir les villes pour la santĂ© de la population. QuĂ©bec: Institut national de santĂ© publique du QuĂ©bec (INSPQ), 111p.: disponible en ligne sur www.inspq.qc.ca
  • Delamaire, C., Ducrot, P. (2018) Environnements favorables Ă  une alimentation saine : une rĂ©ponse aux inĂ©galitĂ©s sociales de santé ?. SantĂ© en action, n°444, 52p. : disponible sur www.santepubliquefrance.fr

Article paru sur So Epidemio, le 05/02/2020.

Une nouvelle Ă©tude publiĂ©e dans Journal of Adolescent Health suggĂšre qu’il existe une relation Ă  double sens entre la perpĂ©tration de l’intimidation en milieu scolaire (aussi appelĂ©e harcĂšlement scolaire) et les problĂšmes de santĂ© mentale chez les jeunes. La perpĂ©tration d’intimidation augmenterait le risque de dĂ©velopper des problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s – tel que la dĂ©pression, l’anxiĂ©tĂ©, le retrait social – et prĂ©senter ces problĂšmes augmenterait la probabilitĂ© d’intimider les autres. Alors que les prĂ©cĂ©dentes recherches se sont concentrĂ©es sur les causes et les consĂ©quences pour les victimes d’intimidation, il s’agit de la premiĂšre Ă©tude Ă  explorer de maniĂšre approfondie la sĂ©quence temporelle entre la perpĂ©tration de l’intimidation et les problĂšmes de santĂ© mentale.

L’intimidation en milieu scolaire, ou harcĂšlement scolaire, est dĂ©finie comme un comportement agressif intentionnel et rĂ©pĂ©tĂ©, associĂ© Ă  une intention nĂ©gative, qui est utilisĂ© par un enfant ou groupe d’enfants pour maintenir son pouvoir sur un autre enfant ou groupe [1]. Aux États-Unis, il a Ă©tĂ© estimĂ© qu’entre 18% et 31% des jeunes ĂągĂ©s de 10 Ă  18 ans sont impliquĂ©s dans l’intimidation en tant que victime ou bourreau [2]. En France, l’enquĂȘte Health Behaviour in School-aged Children (HBSC) de 2013-2014 estime que 45% des adolescents de 11, 13 et 15 ans sont impliquĂ©s dans le harcĂšlement scolaire [3]. Concernant la santĂ© mentale des adolescents, une enquĂȘte amĂ©ricaine de 2016 rapporte que 6% des adolescents ĂągĂ©s de 12 Ă  17 ans souffrent de dĂ©pression, 11% d’anxiĂ©tĂ© et 8% ont des troubles du comportement [4]. En France, le rapport de l’Inserm sur les troubles mentaux, dĂ©pistage et prĂ©vention chez l’enfant et l’adolescent [5], estime que 12% des enfants et adolescents souffrent de troubles Ă©motionnels (troubles anxieux et de l’humeur) et comportementaux. Alors que l’association entre le fait d’ĂȘtre victime d’intimidation et la survenue de problĂšmes de santĂ© mentale immĂ©diats comme Ă  plus long terme est bien documentĂ©e, la littĂ©rature sur les causes et les consĂ©quences de la pratique d’intimidation sont beaucoup plus Ă©parses. À ce jour, aucune Ă©tude n’a investiguĂ© l’hypothĂšse selon laquelle la relation entre la pratique d’intimidation et les problĂšmes de santĂ© mentale pourrait ĂȘtre bidirectionnelle.

Afin d’étudier l’existence possible d’une association bidirectionnelle entre l’intimidation et les problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s, nous avons analysĂ© les donnĂ©es de 13 200 adolescents ĂągĂ©s de 12 Ă  17 ans provenant des vagues 1 (2013-2014) et 2 (2014-2015) de l’enquĂȘte longitudinale amĂ©ricaine Population Assessment of Tobacco And Health (PATH) [6]. PATH est une Ă©tude de cohorte longitudinale reprĂ©sentative de la population amĂ©ricaine qui avait pour but premier d’étudier les comportements, attitudes et croyances en matiĂšre de tabagisme et leur impact sur la santĂ©. Parmi les adolescents interrogĂ©s, 79% ont dĂ©clarĂ© n’avoir jamais intimidĂ© d’autres jeunes, 11% ont dĂ©clarĂ© avoir intimidĂ© d’autres jeunes il y a plus d’un an et 10% ont dĂ©clarĂ© avoir intimidĂ© d’autres jeunes au cours des 12 derniers mois prĂ©cĂ©dant le dĂ©but de l’enquĂȘte. Lorsque la pratique d’intimidation a Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e uniquement dans le mois prĂ©cĂ©dant le dĂ©but de l’enquĂȘte, 16% ont dĂ©clarĂ© avoir intimidĂ© d’autres personnes il y a plus d’un mois et 5% ont dĂ©clarĂ© avoir intimidĂ© d’autres personnes au cours du mois.

Lors de l’analyse de la relation entre la perpĂ©tration de l’intimidation et les problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s, nous avons observĂ© que les jeunes ayant dĂ©clarĂ© ĂȘtre auteurs d’intimidation Ă©taient plus Ă  risque de dĂ©velopper des problĂšmes de santĂ© mentale niveaux modĂ©rĂ©s Ă  Ă©levĂ©s comparĂ©s aux jeunes ayant dĂ©clarĂ© ne pas avoir pratiquĂ© d’intimidation. Nous avons Ă©galement constatĂ© que les adolescents qui prĂ©sentaient des problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s de niveaux modĂ©rĂ©s Ă  Ă©levĂ©s avaient un risque accru d’intimider d’autres personnes par rapport Ă  ceux dĂ©clarant pas ou peu de problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s.

Notre Ă©tude [7] a permis de montrer que l’association entre la pratique d’intimidation et les problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s est probablement bidirectionnelle : intimider augmenterait le risque de dĂ©velopper des problĂšmes de santĂ© mentale et prĂ©senter des problĂšmes de santĂ© mentale augmenterait la probabilitĂ© d’intimider les autres. Cependant, il est important de souligner que les mĂ©thodes de recueil des donnĂ©es – incluant les dĂ©finitions utilisĂ©es, la formulation des questions et l’auto-administration des questionnaires – pourraient surestimer ou sous-estimer la prĂ©valence de l’intimidation dans notre Ă©tude et, par consĂ©quent, influencer la force de l’association entre la perpĂ©tration de l’intimidation et les problĂšmes de comportement intĂ©riorisĂ©s. Nos rĂ©sultats fournissent une extension importante Ă  la littĂ©rature existante et suggĂšrent que les stratĂ©gies de prĂ©vention et d’intervention des comportements d’intimidation chez les jeunes devraient considĂ©rer le moyen de prendre en compte et gĂ©rer les sentiments nĂ©gatifs et les problĂšmes de santĂ© mentale.

Références

  1. Gladden RM, Vivolo-Kantor AM, Hamburger ME, Lumpkin CD. Bullying Surveillance Among Youths: Uniform Definitions for Public Health and Recommended Data Elements, Version 1.0. Atlanta, GA: National Center for Injury Prevention and Control, Centers for Disease Control and Prevention and U.S. Department of Education; 2014.
  2. Committee on the Biological and Psychosocial Effects of Peer Victimization: Lessons for Bullying Prevention, Board on Children, Youth, and Families, Committee on Law and Justice, Division of Behavioral and Social Sciences and Education, Health and Medicine Division, National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine. Preventing Bullying Through Science, Policy, and Practice [Internet]. Rivara F, Le Menestrel S, editors. Washington (DC): National Academies Press (US); 2016 [cited 2018 Aug 24]. Available from: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK390413/
  3. Inchley J, Currie D, Young T, Samdal O, Torsheim T, Augustson L, et al., editors. Growing up unequal: gender and socioeconomic differences in young people’s health and well-being: Health Behaviour in School-Aged Children (HBSC) Study: international report from the 2013/2014 survey. Copenhagen, Denmark: World Health Organization Regional Office for Europe; 2016.
  4. Ghandour RM, Sherman LJ, Vladutiu CJ, Ali MM, Lynch SE, Bitsko RH, et al. Prevalence and Treatment of Depression, Anxiety, and Conduct Problems in US Children. The Journal of Pediatrics. 2019;206:256-267.e3.
  5. mĂ©dicale (Inserm) I national de la santĂ© et de la recherche. Troubles mentaux : DĂ©pistage et prĂ©vention chez l’enfant et l’adolescent [Internet]. Les Ă©ditions Inserm; 2002 [cited 2020 Jan 27]. Available from: http://www.ipubli.inserm.fr/handle/10608/165
  6. United States Department Of Health And Human Services. National Institutes Of Health. National Institute On Drug Abuse. Population Assessment of Tobacco and Health (PATH) Study [United States] Public-Use Files: User Guide. 2016 [cited 2019 Oct 31]; Available from: http://www.icpsr.umich.edu/cgi-bin/file?comp=none&study=36498&ds=0&file_id=1239402&path=NAHDAP
  7. Azevedo Da Silva M, Gonzalez JC, Person GL, Martins SS. Bidirectional Association Between Bullying Perpetration and Internalizing Problems Among Youth. J Adolesc Health. 2019.

Faux-to-language

Matériel

  • Un guide pĂ©dagogique (31 pages)
  • 54 cartes tĂ©moignages
  • 54 photos
  • Une feuille rĂ©capitulative

Concept

Cet outil est Ă  destination de tout·e professionnel·le qui souhaite aborder les problĂ©matiques liĂ©es aux stĂ©rĂ©otypes ou aux discriminations en utilisant l’expression collective, la confrontation des points de vue et tendre ainsi vers plus de respect. Les photos sont accompagnĂ©es d’un guide pĂ©dagogique qui propose des pistes de rĂ©flexions et de discussions.

Faux-to langage tente d’éviter la dichotomie « nous » versus « les autres » et permet ainsi de dĂ©fendre le principe d’égalitĂ©. Lutter contre les discriminations est un devoir de citoyen·ne qui vise Ă  garantir le renforcement du lien social et qui tente de promouvoir la tolĂ©rance.

A noter qu’à partir de ces photos, une exposition a Ă©tĂ© crĂ©e : ‘LumiĂšre sur zones d’ombre’. Elle est mise Ă  la disposition de toutes personnes qui en feraient la demande.

Objectifs

Aborder les stéréotypes dans une perspective globale en prenant en compte les dimensions de genre, sociales, physiques, ethniques, culturelles et religieuses.

CrĂ©er un environnement de respect, d’équitĂ© et lĂ©gitimant les diffĂ©rences, notamment en prenant conscience de ses propres prĂ©jugĂ©s.

Bon Ă  savoir

Faux-to langage s’inscrit dans le cadre du projet d’Initiative Locale d’IntĂ©gration, portĂ© par le centre de planning familial Infor-Femmes. Il a Ă©tait rĂ©alisĂ© en partenariat avec quatre associations liĂ©geoises (CrĂ©asol, la LEEP, L’éclat de rire et SirĂ©as).

Il est disponible au prix de 20€. Il peut ĂȘtre accompagnĂ©e d’une formation.

L’avis de Pipsa (www.pipsa.be)

Appréciation globale

Cet outil simple et efficace permet de prendre conscience de ses stĂ©rĂ©otypes/prĂ©jugĂ©s/discriminations, pour un public d’adultes et grands adolescents.

L’utilisation de l’outil ne demande pas d’expertise-contenu (un bagage d’animateur.trice est toutefois souhaitable) mais une clarification de ses propres valeurs et stĂ©rĂ©otypes/prĂ©jugĂ©s/discriminations.

A partir de belles photos rĂ©alistes et de rĂ©cits authentiques, le public est amenĂ© Ă  questionner ses propres reprĂ©sentations des discriminations. Les tĂ©moignages vĂ©cus interpellent, favorisant l’implication de chacun. Les mises en situation dĂ©construisent, sans jugement, les petits automatismes/prĂ©jugĂ©s du quotidien.

Le guide de l’animateur clarifie les quelques Ă©lĂ©ments thĂ©oriques utiles aux activitĂ©s. DiversifiĂ©es, modulables, celles-ci proposent en sus des variantes qui suggĂšrent une mise en mouvement, des pistes d’action pour le groupe.

En milieu scolaire, les cours confessionnels ou de citoyennetĂ© pourront s’en saisir avec bonheur. Mais de maniĂšre plus large, les lieux d’éducation, de formation, les entreprises, les administrations publiques, 
 tous les lieux oĂč le vivre ensemble est un enjeu pour la qualitĂ© des relations y trouveront un cadre pour soutenir la parole de leurs usagers.

L’utilisation de l’outil demande un cadre de confiance et de respect à poser avant l’animation.

Objectifs

  • Identifier ses reprĂ©sentations des prĂ©jugĂ©s, stĂ©rĂ©otypes, discriminations dans tous les domaines oĂč elles peuvent s’exercer (genre, social, physique, ethnique, culturel, religieux)
  • Comprendre le processus de formation des discriminations (amenĂ©s par l’animateur qui dispose des notions thĂ©oriques pour ce faire)
  • Analyser ses prĂ©jugĂ©s, stĂ©rĂ©otypes, discriminations sur base des informations apportĂ©es
  • DĂ©velopper l’empathie pour l’autre

RĂ©serves

PrĂ©-requis : s’interroger, seul ou en Ă©quipe, sur ses stĂ©rĂ©otypes et prĂ©jugĂ©s avant utilisation de l’outil.

Public cible

A partir de 16 ans – jeunes adultes – adultes

Utilisation conseillée

  1. Prendre le temps d’identifier ses propres stĂ©rĂ©otypes
  2. Préférer une utilisation répétée (animations diversifiées) pour faire évoluer les représentations dans un groupe
  3. Ne pas oublier les Ă©lĂ©ments thĂ©oriques qui permettent de faire du lien avec les situations concrĂštes qui Ă©mergent de l’animation

Points forts

SynthÚse théorique claire, appréhension rapide, diversité des photos et authenticité des témoignages.

Points d’attention

Poser le cadre de bienveillance avant utilisation.

Sujets abordés

Discrimination, vivre ensemble, préjugés, stéréotypes, compétences psychosociales.

OĂč trouver l’outil

Chez l’Ă©diteur

Infor-Femmes LiĂšge

10 rue Trappé

4000 LiĂšge

Belgique

+32 (0)4 222 39 65

inforfemmesliege@gmail.com – http://www.inforfemmesliege.be

Dans la collection Les dĂ©clics du genre, retrouvez un nouvel outil « genre et promotion de la santé » rĂ©alisĂ© par Le Monde selon les femmes, en partenariat avec Femmes et SantĂ©. Cet outil Ă  destination des personnes-relais a pour vocation de nous aider Ă  intĂ©grer l’approche de genre dans les actions et animations en promotion de la santĂ©.

« Genre et promotion de la santé », un outil pour faire déclic !

L’idĂ©e d’éditer cet outil a germĂ© au fil des activitĂ©s menĂ©es par la plateforme pour la promotion de la santĂ© des femmes1, avec des publics trĂšs divers. Soutenir les personnes-relais pour inclure une lecture « genre » dans les pratiques s’inscrit dans la collection Les dĂ©clics du genre2, qui offre des pistes mĂ©thodologiques.

Au moyen de cet outil, nous proposons de changer de lunettes pour passer d’une approche centrĂ©e sur la santĂ© des femmes Ă  une perspective « genre et santĂ© ».

Des constructions sociales intrinsÚquement idéologiques

Aucun regard, aucun savoir n’est neutre. Alors qu’on a souvent tendance Ă  prĂ©senter la santĂ© pour tous comme neutre et Ă©quitable, notre dĂ©marche vise Ă  dĂ©passer la vision sexuĂ©e des approches, comme faire un relevĂ© sexospĂ©cifique par exemple, et interroger les mĂ©canismes de discrimination qui sont Ă  l’Ɠuvre. Ces mĂ©canismes engendrent des inĂ©galitĂ©s de droit Ă  la santĂ© de la personne.

Chausser des lunettes « genre et santé », c’est donc partir du principe que la santĂ© reflĂšte les inĂ©galitĂ©s sociales. Celles-ci dĂ©coulent de constructions sociales qui nous enferment dans les stĂ©rĂ©otypes du sexe biologique.

Ces constructions sociales sont idĂ©ologiques en ce sens qu’elles prĂ©servent un systĂšme Ă©conomique fondĂ© sur des rapports de domination. Prenons un exemple universel trĂšs Ă©loquent : les discours autour de l’amour maternel utilisĂ©s pour assigner les femmes au travail domestique, non payĂ© et invisible. Ou encore tout le montage mensonger autour de la fragilitĂ© du corps fĂ©minin selon lequel le corps des femmes a besoin d’ĂȘtre assistĂ©, et surtout contrĂŽlĂ©, tout au long de la vie, au cours des cycles reproductifs ou non-reproductifs.

Les femmes et leurs corps ne sont pas fragiles en soi, mais se voient fragilisés par des valeurs sociétales péjoratives qui les enferment dans des rÎles considérés comme spécifiquement féminins.

Ce processus de fragilisation des femmes et de leurs corps a, en plus, tendance Ă  s’accroĂźtre quand on le combine Ă  des facteurs de prĂ©carité : ĂȘtre une jeune mĂšre ou cheffe de famille monoparentale, ĂȘtre ĂągĂ©e, migrante, handicapĂ©e ou encore affaiblie par une maladie. Ce constat est d’autant plus vrai dans le contexte socio-Ă©conomique actuel oĂč les mesures d’austĂ©ritĂ© adoptĂ©es Ă  diffĂ©rents niveaux de pouvoir ont un impact direct sur les conditions de vie – dĂ©favorables Ă  la santĂ© – qui touchent plus sĂ©vĂšrement les femmes.

Le modÚle hégémonique de la médecine

Si on observe plus spĂ©cifiquement les discriminations Ă  l’Ɠuvre dans le modĂšle hĂ©gĂ©monique du mĂ©decin, on constate que la tendance dominante dans le secteur professionnel de la santĂ© a dictĂ© la norme de ce qui est « normal » ou ce qui est « pathologique ». Cette norme est fondĂ©e sur la « vĂ©ritĂ© biologique » (basĂ©e sur les variables biologiques). Depuis longtemps dĂ©jĂ , cette tendance a Ă©tĂ© analysĂ©e en termes de pouvoir. Dans les actions de santĂ© de maniĂšre gĂ©nĂ©rale, les savoirs des patient.e.s ne sont pas considĂ©rĂ©s, la conception et les pratiques mĂ©dicales sont guidĂ©es par une rationalitĂ© scientifique qui exclue les autres modĂšles de santĂ©. Les pratiques autoritaires et non inclusives des mĂ©decins envers les patient.e.s engendrent une asymĂ©trie dans la relation mĂ©decin-patient.e.s, un lien de subordination.

Ces mĂ©canismes rĂ©sultent d’une volontĂ© de contrĂŽle social et idĂ©ologique.

Avoir une vision d’ensemble au moyen de l’analyse intersectionnelle

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RepĂ©rer les inĂ©galitĂ©s et les mĂ©canismes de discriminations ouvre la voie Ă  une analyse intersectionnelle. Ce type d’analyse vise Ă  apprĂ©hender de façon globale et croisĂ©e les inĂ©galitĂ©s de sexe/genre, classe, race/ethnicitĂ©, Ăąge, handicap et orientation sexuelle.

L’étape suivante a Ă©tĂ© de repĂ©rer les inĂ©galitĂ©s et les mĂ©canismes de discriminations pour ouvrir la voie Ă  une analyse intersectionnelle, qui vise Ă  apprĂ©hender de façon globale et croisĂ©e les inĂ©galitĂ©s de sexe/genre, classe, race/ethnicitĂ©, Ăąge, handicap et orientation sexuelle. La mĂ©thodologie utilisĂ©e pour construire les contenus de cette publication est participative. Nous faisons confiance Ă  nos savoirs thĂ©oriques et pratiques ainsi qu’à nos intuitions et surtout nous nous attachons Ă  reconnaĂźtre et Ă  respecter les compĂ©tences de chacun.e.

Dans l’analyse, il y a un aller-retour entre le regard collectif et individuel. Celui-ci nous a montrĂ© l’importance de rester dans les pratiques de groupes de santĂ© autogĂ©rĂ©s par les participantes. En effet, ceux-ci, qui s’inscrivent dans une dĂ©marche collective et inclusive de la santĂ© (voir le DĂ©clic du genre RĂ©fĂ©rentiel Auto-santĂ© des femmes). Celle-ci porte sur la valorisation des compĂ©tences et des expertises propres des femmes, qui est le garant de l’horizontalitĂ© du partage collectif.

Le dĂ©clic, rĂ©sultats de l’analyse et pistes d’action

A travers ce DĂ©clic, nous souhaitons proposer des pistes et aider Ă  aborder la promotion de la santĂ© Ă  partir d’une analyse de dĂ©terminants sociaux qui intĂšgre l’approche de genre.

La mĂ©thodologie propose de comprendre les enjeux liĂ©s Ă  l’approche de genre Ă  partir de la vie quotidienne. La place du questionnement fait partie de la dynamique : tensions entre vie professionnelle et familiale, maternitĂ©, allaitement, contraception pour les femmes et les hommes
 dans une sociĂ©tĂ© tournĂ©e vers la performance, la productivitĂ© et l’individualisation. Elle vise aussi Ă  comprendre quelles sont les rĂ©percussions des reprĂ©sentations et mythes normatifs auxquels les femmes et les hommes sont confrontĂ©.e.s dans leur vie quotidienne concernant leur corps, leur santĂ©, leur sexualité  Elle cherche Ă  Ă©clairer la raison pour laquelle le systĂšme socio- Ă©conomique a besoin de ces stĂ©rĂ©otypes pour fonctionner.

Celui-ci propose une lecture genre dans les diffĂ©rents domaines de la santĂ©, pas seulement dans celui de la santĂ© reproductive et sexuelle mais aussi en promotion de la santĂ©. Cette dĂ©marche demande de connaĂźtre les stratĂ©gies dĂ©veloppĂ©es par les mouvements de femmes, d’identifier la place du droit Ă  la santĂ©, au niveau international, dans le lobbying politique, de prendre conscience de l’impact des croyances et de dĂ©couvrir les propositions utilisĂ©es dans les ateliers d’auto-santĂ©.

IntĂ©grer la dimension de genre dans une dĂ©marche de promotion de la santĂ© consiste aussi Ă  reconnaitre la personne dans sa dimension plurielle, Ă  valoriser son bien-ĂȘtre individuel et collectif, Ă  reconnaĂźtre les conditions de vie nĂ©cessaires Ă  l’exercice de ses droits. En promotion de la santĂ©, la question des droits est importante ; s’approprier l’information permet de faire valoir ses droits pour ĂȘtre libre de faire ses propres choix. Le mouvement social, inhĂ©rent au projet de promotion de la santĂ©, permet de combattre collectivement les discriminations, Ă  commencer par celles basĂ©es sur le genre.

Pour se procurer l’outil (tĂ©lĂ©chargeable ou Ă  commander): http://www.mondefemmes.be-genre-developpement-outils.htmPour aller plus loin :

La santĂ© publique, comme tant d’autres secteurs, est percutĂ©e de plein fouet par le phĂ©nomĂšne Big data en tous genres qu’il charrie. La mĂ©decine, l’Ă©pidĂ©miologie ou encore la prĂ©vention intĂšgrent bon an mal an ce nouvel outil, la santĂ© publique pourrait bien ĂȘtre en train de changer de visage. Mais alors, est-il possible que nous ne la reconnaissions plus ?

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La santĂ© publique, comme tant d’autres secteurs, est percutĂ©e de plein fouet par le phĂ©nomĂšne Big data en tous genres qu’il charrie. La mĂ©decine, l’Ă©pidĂ©miologie ou encore la prĂ©vention intĂšgrent bon an mal an ce nouvel outil, la santĂ© publique pourrait bien ĂȘtre en train de changer de visage. Mais alors, est-il possible que nous ne la reconnaissions plus ? Cette question Ă©tait au cƓur d’une journĂ©e d’Ă©changes organisĂ©e par le groupe de recherche DataSantĂ© le 26 avril dernier Ă  Nantes (France), au cours de laquelle sont intervenus une dizaine de chercheurs quĂ©bĂ©cois et français.

Le Big data dĂ©signe les quantitĂ©s faramineuses de donnĂ©es gĂ©nĂ©rĂ©es par nos activitĂ©s numĂ©riques. Tellement nombreuses qu’on n’essaie mĂȘme plus de les compter. A ce stade, il importe plus de savoir quoi en faire. Combien parmi elles sont susceptibles d’ĂȘtre exploitĂ©es Ă  des fins sanitaires ? Beaucoup assurĂ©ment, toutes peut-ĂȘtre. Certaines semblent pouvoir servir Ă  mieux dĂ©pister une maladie gĂ©nĂ©tique ou Ă  prĂ©voir l’Ă©volution d’une Ă©pidĂ©mie, d’autres Ă  suivre les effets d’une campagne de prĂ©vention ou Ă  influencer les comportements plus ou moins favorables Ă  la santĂ©.

Cela n’a pas Ă©chappĂ© aux organisateurs de la journĂ©e de rĂ©flexion intitulĂ©e « DonnĂ©es massives et santĂ© publique », membres du programme scientifique DataSantĂ© (voir encadrĂ©), qui Ă©crivent : « Les discours favorables des acteurs publics projettent l’Ă©laboration de nouveaux plans de prĂ©vention en santĂ©, des traitements mieux ciblĂ©s pour les patients et l’ouverture de voies de recherche insoupçonnĂ©es en santĂ© publique ». Certes, mais cela ne risque-t-il pas d’Ă©branler les murs de la santĂ© publique ? Si tel est le cas, quel sera son nouveau socle ? Ses mĂ©thodes et ses pratiques devront-elles ĂȘtre reconfigurĂ©es ?

Contre les épidémies

Une cinquantaine de personnes sont rĂ©unies dans l’amphithĂ©Ăątre violet et rouge. Lara Khoury, de l’UniversitĂ© McGill, vient de prĂ©senter le systĂšme quĂ©bĂ©cois de collecte de donnĂ©es des infections liĂ©es aux soins de santĂ© et de divulgation des informations Ă  la population. C’est au tour du Dr Paul VĂ©ron de prendre le micro pour montrer comment le Big data participe Ă  la lutte contre les Ă©pidĂ©mies. « Jusqu’ici, dit-il, les dispositifs mis en place – obligations vaccinales, mises en quarantaine, messages de prĂ©vention, systĂšme de dĂ©claration obligatoire de certaines maladies – Ă©manaient de la puissance publique. »

Mais alors que des donnĂ©es issues des requĂȘtes des internautes concernant la grippe, des discussions sur les rĂ©seaux sociaux ou du trafic aĂ©rien sont gĂ©nĂ©rĂ©es en grand nombre, ceux qui les possĂšdent commencent Ă  investir ce champ en Ă©laborant des outils d’analyse pour identifier la naissance d’un foyer Ă©pidĂ©mique ou dĂ©tecter de nouvelles souches virales en circulation. Le service Google Flu, imaginĂ© par le gĂ©ant de la Silicon Valley en 2008, ne cache pas son ambition de participer au contrĂŽle des Ă©pidĂ©mies, et plus si affinitĂ© (avec les fabricants de vaccins notamment). C’Ă©tait sans compter les critiques sur son algorithme jugĂ© peu fiable, qui a finalement sonnĂ© le glas du service en 2015. Mais la boĂźte de Pandore est ouverte et il va de soi que d’autres outils du mĂȘme genre sont soit dĂ©jĂ  opĂ©rationnels, soit sur les rails.

La médecine prédictive, recto-verso

Avec la mise au point du sĂ©quençage haut-dĂ©bit, la prĂ©vention des maladies gĂ©nĂ©tiques, en particulier celles dites rares en raison de leur faible prĂ©valence (moins d’une personne sur 2000), connaĂźt depuis quelques annĂ©es des avancĂ©es considĂ©rables. La composition de tout ou partie du gĂ©nome devenant accessible, il est dĂ©sormais possible de rechercher toute une sĂ©rie de variants gĂ©nĂ©tiques et, ce faisant, de mettre Ă  jour pour chaque individu des prĂ©dispositions vis-Ă -vis de cancers, de maladies cardiovasculaires, etc. Est-ce pourtant souhaitable en toutes circonstances ? Rien n’est moins sĂ»r. Le Dr Sandra Mercier, gĂ©nĂ©ticienne mĂ©dicale, rappelle qu’une variation gĂ©nĂ©tique peut ĂȘtre bĂ©nigne, voire protectrice.

Qui plus est, l’interprĂ©tation clinique des donnĂ©es gĂ©nomiques Ă©volue rapidement et il est certain que les rĂ©sultats des tests de certains patients changeront avec le temps. Mieux vaut donc apprĂ©hender ces tests (prĂ©-conceptionnels ou rĂ©crĂ©atifs) pour ce qu’ils sont, c’est-Ă -dire des outils de mĂ©decine prĂ©dictive Ă  manier avec prudence et Ă©thique, loin de tout « dĂ©terminisme gĂ©nĂ©tique », tout en prĂ©servant l’autonomie des individus et en respectant le droit de ne pas savoir.

Questions de droit

Sans nier les avancĂ©es considĂ©rables permises par ces technologies en matiĂšre de dĂ©pistage et de connaissance des risques, Emmanuelle Rial-Sebbag, directrice de recherche Ă  l’Inserm*, a tenu Ă  souligner la difficile intĂ©gration, en France, de la gĂ©nomique dans le champ de la santĂ© publique. De fait, si l’utilisation de ces donnĂ©es Ă  des fins de dĂ©pistage ciblĂ© est autorisĂ©e dans ce pays, elle ne l’est pas (encore) pour le dĂ©pistage de masse, preuve que les rĂ©sistances Ă  l’Ă©gard des donnĂ©es massives sont fortes, et les reprĂ©sentations quant Ă  leur potentiel de nuisance Ă  l’Ă©gard des politiques de santĂ© publique bien vivaces. Pour Ma’n H. Zawati, qui dirige le Centre de gĂ©nomique et de politiques de l’UniversitĂ© MacGill, la convergence de bases de donnĂ©es gĂ©nomiques, de rĂ©seaux et d’intelligence artificielle devrait bientĂŽt permettre aux mĂ©decins de recontacter leurs patients en cas de changement de signification d’un test gĂ©nĂ©tique. « Un devoir de recontacter le patient pourrait exister dans le futur », prĂ©voit-il. Avec quelles consĂ©quences sur la relation mĂ©decin-patient et la vie de la personne concernĂ©e 
 ? VoilĂ  la question sur laquelle est restĂ©e l’assemblĂ©e Ă  la fin de la matinĂ©e.

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La seconde partie de la journĂ©e Ă©tait consacrĂ©e Ă  discuter les nouvelles frontiĂšres de la santĂ© publique et plus particuliĂšrement le renouvellement des champs de la nutrition et de l’Ă©ducation alimentaire. David Buckeridge, Ă©pidĂ©miologiste Ă  l’UniversitĂ© MacGill, a rapportĂ© les rĂ©sultats d’un travail visant Ă  affiner la connaissance des habitudes de consommation alimentaire de la population Ă  l’Ă©chelle d’un bassin de vie Ă  partir des donnĂ©es issues du scan des aliments achetĂ©s en magasin et des cartes de fidĂ©litĂ© des clients. « La plupart des causes de dĂ©cĂšs prĂ©maturĂ©s sont liĂ©es Ă  la nutrition, or nous manquons cruellement de donnĂ©es sur ce sujet », a-t-il justifiĂ©. Par exemple, les donnĂ©es extraites permettent d’Ă©tudier quels produits remplacent les sodas aprĂšs une campagne de prĂ©vention incitant Ă  en consommer moins. Et de conclure que le facteur limitant pour ce genre d’Ă©tude n’est pas de collecter les donnĂ©es, gĂ©nĂ©ralement existantes et accessibles (moyennant finances Ă©ventuelles), mais bien de possĂ©der les mĂ©thodes d’analyse qui souvent manquent encore.

Nouvelle norme ?

L’exposĂ© suivant par Marine Friant-Perrot, juriste Ă  l’UniversitĂ© de Nantes, remettait en cause l’idĂ©e selon laquelle les grandes quantitĂ©s de donnĂ©es disponibles concernant la composition des aliments mais aussi les comportements alimentaires des individus, reprĂ©sentent systĂ©matiquement un gain pour la santĂ© et une aide Ă  la dĂ©cision. Et de relever, d’une part « une surresponsabilitĂ© des personnes dans la gestion de leur alimentation et de leur mode de vie, alors que 90% de ce que nous mangeons est dĂ©terminĂ© par l’environnement alimentaire », d’autre part « une captation par le secteur marchand du discours nutritionnel et de prĂ©vention de l’obĂ©sitĂ© et du surpoids », avec Ă  la clĂ© la crĂ©ation d’une nouvelle norme alimentaire nĂ©e dans le giron du Big data.

Un constat partagĂ© par Margo Bernelin, juriste elle aussi, dont les travaux sur les textes de loi en lien avec la santĂ© publique indiquent que la collecte de donnĂ©es est devenue une finalitĂ© en soi, et non plus un outil au service de la santĂ© publique, et que de grandes entreprises investies dans l’hĂ©bergement de donnĂ©es sont entrĂ©es dans un rĂŽle d’acteurs normatifs. Pour sĂ»r, la santĂ© publique n’a pas fini de trembler.

DataSanté, kesako ?

InitiĂ© en 2017 pour une durĂ©e de cinq ans, DataSantĂ© est un programme de recherche visant Ă  Ă©tudier les questions – Ă©thiques, juridiques, mĂ©dicales, mathĂ©matiques – soulevĂ©es par l’utilisation des donnĂ©es massives dans le champ de la santĂ© et l’Ă©mergence de la mĂ©decine personnalisĂ©e. Soutenu par l’UniversitĂ© de Nantes et la RĂ©gion des Pays de la Loire, il s’appuie sur un rĂ©seau interdisciplinaire d’une cinquantaine d’experts en recherche biomĂ©dicale (juristes, philosophes, mĂ©decins, bio-informaticiens, etc.)

De la construction des donnĂ©es aux transformations de la mĂ©decine en passant par la mise au point des algorithmes, leurs travaux couvrent tout le spectre de la transformation Ă  l’oeuvre. Colloques et ateliers sont rĂ©guliĂšrement organisĂ©s pour partager et faire avancer les rĂ©flexions.

Leurs contenus, ainsi qu’une sĂ©rie de vidĂ©os Ă  caractĂšre pĂ©dagogique, sont consultables en ligne : https://www.data-sante.fr/portail-video/

Provac

DĂ©but 2016, une modification lĂ©gislative portant sur l’art infirmier a retenu l’attention de l’équipe interuniversitaire Provac, qui a souhaitĂ© en Ă©valuer les freins et les opportunitĂ©s en termes d’impact sur la mission vaccinale pour la population scolaire desservie par les Ă©quipes PSE.

Plus de 250 professionnels PSE, essentiellement mĂ©decins et infirmier-Ăšres, participants aux rencontres PSE/PROVAC de juin 2016 et 2017 se sont exprimĂ©s sur les impacts potentiels de cette modification dans leurs pratiques vaccinales. Leur rĂ©flexion a aussi portĂ© sur les conditions Ă  rĂ©unir pour que la vaccination par les infirmiĂšres soit porteuse de sens et d’amĂ©lioration de l’offre vaccinale aux populations scolaires sous tutelle.

L’article synthĂ©tise diffĂ©rentes recherches menĂ©es par l’équipe interuniversitaire Provac, dans le cadre de financements de la DG SantĂ© de la FWB puis de l’ONE[4].

La pratique vaccinale des infirmiĂšres en Promotion de la SantĂ© Ă  l’école (PSE) en FWB ? Une innovation Ă  bien rĂ©flĂ©chir...

Que disent les textes de l’arrĂȘtĂ© royal et des diffĂ©rents organes d’avis ?

L’arrĂȘtĂ© royal du 29 fĂ©vrier 2016[5] a modifiĂ© le statut de « la prĂ©paration et l’administration de vaccins », reprises dans la « liste des prestations techniques de l’art infirmier et des actes pouvant ĂȘtre confiĂ©s par un mĂ©decin Ă  des praticiens de l’art infirmier ». Cet acte peut, Ă  prĂ©sent, ĂȘtre exĂ©cutĂ© par l’infirmier-Ăšre sans que la prĂ©sence physique du mĂ©decin ne soit requise. Il n’est dĂšs lors plus considĂ©rĂ© comme un acte « confiĂ© » mais bien comme une « prestation technique de soins infirmiers » requĂ©rant une prescription mĂ©dicale, prestation dite de type B2. Les AcadĂ©mies royales de MĂ©decine de Belgique (flamande et francophone) avaient remis un avis conjoint positif en juin 2015.

« En fonction des besoins de prĂ©vention et de la maximalisation de la protection de populations Ă  risque, la possibilitĂ© de vacciner et l’impact des programmes de vaccination doivent ĂȘtre aussi larges que possible. Pour obtenir un taux important de vaccination de la population, il y a lieu de limiter au mieux les obstacles Ă  cette pratique. Les AcadĂ©mies sont d’avis que la possibilitĂ© de vaccination par le personnel infirmier, sans prĂ©sence physique d’un mĂ©decin, permettra de vacciner en temps utile et promptement. Ceci s’applique Ă©galement pour les tests Ă  la tuberculine intradermique. Ces procĂ©dĂ©s sont en concordance avec la rĂ©glementation et la pratique dans d’autres pays, comme le Royaume-Uni, l’Australie, les États-Unis d’AmĂ©rique, et le Canada. Comme condition, celle ou celui qui administre le vaccin doit avoir participĂ© Ă  une formation continue complĂ©mentaire sur les vaccins et leur administration, comportant en outre le contrĂŽle des effets indĂ©sirables et les premiers soins en cas d’anaphylaxie. ».

L’avis Ă©mettait aussi des recommandations concernant les modalitĂ©s d’exĂ©cution relatives Ă  ces prestations ainsi que les qualifications requises.[6]En septembre 2015, tant le Conseil national de l’Ordre des mĂ©decins que la Commission Technique de l’Art Infirmier[7] (CTAI) se ralliaient Ă  l’avis Ă©mis par les AcadĂ©mies royales de mĂ©decine. La CTAI « recommande qu’infirmier-Ăšre et mĂ©decin dĂ©finissent ensemble une procĂ©dure reprenant les observations et les prĂ©cautions nĂ©cessaires pour un acte de type B2 ».

Quelle vision les acteurs PSE ont-ils de la modification lĂ©gislative autorisant le personnel infirmier Ă  vacciner, sans la prĂ©sence physique d’un mĂ©decin ?

En juin 2016, sur base de la mĂ©thode du MĂ©taplanÂź[8], les opinions, craintes, besoins de formation perçus, et questionnements des acteurs PSE ont Ă©tĂ© dĂ©battus durant des ateliers d’échanges autour de la question « Quelle vision les acteurs PSE ont-ils de la modification lĂ©gislative autorisant le personnel infirmier Ă  vacciner ? ».

Le matĂ©riel rĂ©coltĂ© a Ă©tĂ© encodĂ© et analysĂ© Ă  l’aide du logiciel d’analyse qualitative NVivo, puis synthĂ©tisĂ©, discutĂ© avec le PĂŽle Vaccination de l’ONE en avril 2017, et prĂ©sentĂ© aux professionnels PSE lors des rencontres organisĂ©es en juin 2017.

La prĂ©occupation formulĂ©e par le plus grand nombre de participants interrogeait l’impact de cette modification lĂ©gislative sur la place et les rĂŽles du mĂ©decin en PSE. Etaient mis en tension ses diffĂ©rents rĂŽles, vis-Ă -vis des Ă©lĂšves lors des bilans de santĂ© et envers les Ă©coles. Si le mĂ©decin devait rĂ©aliser moins d’actes vaccinaux, certains professionnels ont Ă©mis l’opinion qu’il serait plus disponible pour d’autres composantes du bilan de santĂ© telles que parler avec l’élĂšve de sa santĂ©, alors que d’autres, au contraire, craignaient qu’il ne diminue le temps de contact avec chaque Ă©lĂšve. Certains disaient qu’il aurait moins d’occasions d’entrer en contact avec les Ă©coles, alors que d’autres, au contraire, le voyaient plus disponible pour y dĂ©velopper de nouveaux projets. Le statut du mĂ©decin a aussi Ă©tĂ© interrogĂ©. Pour ceux sous statut d’indĂ©pendant, l’acte vaccinal est rĂ©munĂ©rĂ© comme tel. Il conviendrait donc de rĂ©flĂ©chir Ă  la rĂ©munĂ©ration liĂ©e Ă  la responsabilitĂ© du mĂ©decin, tant dans l’organisation du protocole de collaboration mĂ©decin/infirmier-Ăšre que des modalitĂ©s de la « prescription vaccinale » pour chaque Ă©lĂšve.

Les professionnels ont aussi largement Ă©voquĂ© les questions de formation et de responsabilitĂ©. Ils ont mentionnĂ© les modifications d’organisation de la pratique vaccinale de l’équipe en lien avec l’augmentation de l’offre vaccinale et le risque d’augmentation de la charge de travail de l’infirmier-Ăšre. Ils ont formulĂ© des craintes liĂ©es Ă  la compĂ©tence pour cet acte technique. Ils se sont Ă©galement montrĂ©s sensibles aux notions de procĂ©dure, de reconnaissance professionnelle de l’infirmier-Ăšre, ainsi que de communication vers les parents. Permettre aux infirmiers-Ăšres de vacciner en l’absence de mĂ©decin constituerait une rĂ©ponse dĂ©guisĂ©e Ă  la pĂ©nurie et au manque de disponibilitĂ© des mĂ©decins.

D’autres prĂ©occupations, plus rares, ont Ă©tĂ© exprimĂ©es en termes de coĂ»ts, d’assurances, de rĂŽles et image de l’infirmiĂšre, de gestion de la charge de travail de l’équipe, de pouvoir dĂ©cisionnel et de gestion d’éventuels refus, de cadre lĂ©gislatif, et de l’existence de cette pratique hors secteur PSE.Ces diffĂ©rents aspects de la vision dĂ©veloppĂ©e par les professionnels de la PSE ont Ă©tĂ© analysĂ©s en termes d’opportunitĂ©s, de freins ou de neutralitĂ© eu Ă©gard Ă  la mise en Ɠuvre de la modification lĂ©gislative. Parmi les 937 idĂ©es Ă©mises, 48,1% ont Ă©tĂ© classĂ©es comme freins par les acteurs eux-mĂȘmes, 29,5% comme opportunitĂ©s, et 22,4% comme neutres (ou inclassables).

La vision qui s’est progressivement dessinĂ©e autour de l’impact de la modification lĂ©gislative sur les pratiques vaccinales en PSE se montre assez complexe, contrastĂ©e et nuancĂ©e. Elle dĂ©passe largement la mission vaccinale et touche de nombreuses facettes de l’organisation de la PSE, dont l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© n’est plus Ă  dĂ©montrer. On n’enregistre ni refus massif, ni franche adhĂ©sion. Toutefois, vacciner ne fait que trĂšs peu partie des actes pratiquĂ©s par les infirmiers-Ăšres de PSE, mĂȘme en prĂ©sence de mĂ©decin. Vacciner est vĂ©cu comme un travail de collaboration du binĂŽme mĂ©decin / infirmier-Ăšre, essentiel Ă  une mĂ©decine prĂ©ventive de qualitĂ© en PSE. Toucher au rĂŽle d’un des membres met en question celui de l’autre, et par lĂ  l’équilibre du binĂŽme.

Champ d’application de la pratique vaccinale infirmier-Ăšre en l’absence physique de mĂ©decin et points d’attention vis-Ă -vis des diffĂ©rentes parties prenantes : proposition de ProvacAu terme d’une rĂ©flexion de deux ans avec le secteur PSE, Provac propose de considĂ©rer que l’intĂ©rĂȘt de cette nouveautĂ© lĂ©gislative rĂ©side dans la flexibilitĂ© du vaccinateur plus que dans la vaccination ‘systĂ©matique’ par l’infirmier-Ăšre, en lieu et place du mĂ©decin, le rĂŽle du mĂ©decin au moment de l’indication et de la ‘prescription’ de la vaccination Ă©tant clairement affirmĂ© et rĂ©munĂ©rĂ©. DĂšs lors, toute premiĂšre dose de vaccin (HPV 1, rattrapage RRO 1, mĂ©ningocoque) resterait administrĂ©e par un mĂ©decin, en bilan de santĂ© ou Ă  l’école. Compte tenu du calendrier vaccinal 2018-19 en PSE, les infirmiers-Ăšres administreraient donc toute vaccination de rappel (TetravacÂź et BoostrixÂź) ainsi que la 2Ăšme dose des vaccins RRO, hĂ©patite B et HPV.

Sur base des freins et des leviers identifiĂ©s avec les professionnels de la PSE, des recommandations Ă©mises dans les diffĂ©rents organes d’avis et de son expertise de la gestion du programme de vaccination, l’équipe Provac a formulĂ© une sĂ©rie de points de vigilance Ă  l’attention des diffĂ©rentes parties prenantes d’une mise en Ɠuvre optimale de cette nouveautĂ© lĂ©gislative dans les pratiques en PSE, dont le but ultime est d’optimaliser la protection vaccinale des enfants et des jeunes, et de limiter au mieux les obstacles Ă  cette pratique.

Provac a identifiĂ© 4 types de parties prenantes : le pouvoir subsidiant ONE, le pĂŽle Vaccination de l’ONE responsable du programme de vaccination de la FWB, les Pouvoirs Organisateurs des services PSE et des centres PMS-CF, les Ă©quipes de professionnels eux-mĂȘmes.

Vis-Ă -vis du pouvoir subsidiant ONE, le principal point d’attention porte sur la nĂ©cessitĂ© d’émettre une circulaire prĂ©cisant que l’ArrĂȘtĂ© royal du 29 fĂ©vrier 2016 est applicable dans la pratique vaccinale en PSE Ă  partir d’une date Ă  fixer. Cette circulaire reprendrait le texte de l’AR, les titres requis pour l’exercice de cet acte technique, le canevas du protocole de collaboration entre mĂ©decins et infirmiers-Ăšres, les modalitĂ©s de formation et de sa prise en charge financiĂšre ou non par le pouvoir subsidiant, ainsi que l’Avis des AcadĂ©mies Royales de MĂ©decine de Belgique et celui de la CTAI.

Vis-à-vis du Pîle Vaccination de l’ONE, les points d’attention portent sur trois dimensions de la gestion d’un programme de vaccination :

  • l’information de l’ensemble des reprĂ©sentants des vaccinateurs et acteurs de la vaccination rĂ©unis au sein du ComitĂ© de Concertation Intersectorielle Vaccination (mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes, pĂ©diatres, AVIQ, COCOF, Sciensano, Question SantĂ©, Groupe Interuniversitaire d’Experts en Vaccinologie (GIEV), MutualitĂ©s
) ;
  • la rĂ©daction d’un rĂ©fĂ©rentiel « Vaccination » auquel chaque service/centre puisse se rĂ©fĂ©rer pour rĂ©diger son protocole de collaboration (conditions d’injection d’un vaccin, rĂ©elles contre-indications gĂ©nĂ©rales et spĂ©cifiques Ă  la vaccination, check-list des contre-indications momentanĂ©es, contenu de la trousse de secours, adaptation pour les PSE de la fiche du CSS[9] permettant la prise en charge d’un choc anaphylactique et dosage d’adrĂ©naline en fonction du poids de l’enfant, prise en charge de la douleur
) ;
  • l’information des parents, via les dĂ©pliants et les autorisations parentales, mentionnant que la vaccination en PSE est rĂ©alisĂ©e par l’Ă©quipe PSE et non plus par le seul mĂ©decin scolaire.

Vis-Ă -vis des pouvoirs organisateurs des services/centres, les points d’attention portent sur des aspects juridico-administratifs : contrat d’assurance obligatoire en ResponsabilitĂ© Civile couvrant toute personne portant le titre d’infirmier-Ăšre (en ce compris la dĂ©fense en justice, non obligatoire), mention de l’administration de vaccins dans le profil de fonction des infirmiers-Ăšres (annexĂ© au rĂšglement de travail) et modalitĂ©s de gestion d’un possible refus d’infirmier-Ăšre (nouveau-elle ou dĂ©jĂ  engagĂ©-e), formation, de base et continue, des infirmiers-Ăšres Ă  l’administration de vaccins et Ă  la gestion du suivi des effets indĂ©sirables sĂ©vĂšres, en ce compris les premiers soins en cas de choc anaphylactique.

Vis-Ă -vis des Ă©quipes de professionnels, les points d’attention comportent plusieurs aspects :

  • la formation : ĂȘtre capable de vacciner, de gĂ©rer d’éventuels effets indĂ©sirables sĂ©vĂšres (rĂ©action vagale), d’administrer les premiers soins en cas de choc anaphylactique, et avoir travaillĂ© et surmontĂ© ses diffĂ©rentes apprĂ©hensions (personnelles, techniques, relationnelles et communicationnelles). Chacun peut, de façon progressive, se familiariser Ă  vacciner (mĂ©decin prĂ©sent dans le local, puis seulement prĂ©sent dans le service/centre, puis Ă  deux avec un-e autre infirmier-Ăšre) ;
  • la rĂ©daction de la procĂ©dure de collaboration entre mĂ©decin et infirmier-Ăšre, sous la responsabilitĂ© du mĂ©decin coordonnateur : chaque Ă©quipe a Ă  rĂ©diger son protocole sur base du rĂ©fĂ©rentiel proposĂ© par l’ONE. L’équipe doit s’organiser pour rĂ©partir la charge de travail de la mission vaccinale entre les diffĂ©rentes professions, dans le respect et en cohĂ©rence avec les responsabilitĂ©s et temps de travail de chacune. En cas de vaccination Ă  l’école pour plusieurs Ă©lĂšves, il faut prĂ©voir que l’infirmier-Ăšre soit accompagnĂ©-e d’un autre membre de l’équipe, mĂ©decin exceptĂ© ;
  • l’information des parents : l’équipe a Ă  communiquer de maniĂšre transparente mais rassurante sur son professionnalisme afin d’éviter que des parents renoncent Ă  faire vacciner leur enfant par la PSE.

En conclusion, la mise en application de la vaccination par les infirmiers-Ăšres en l’absence de mĂ©decin est conditionnĂ©e par un important travail de prĂ©paration qui tient compte du rĂŽle de chacune des parties prenantes concernĂ©es. DĂ©velopper un projet pilote avec quelques services/centres volontaires permettrait l’approfondissement des aspects plus opĂ©rationnels de la mise en Ɠuvre de cette modification lĂ©gislative.


[1] APES-ULiĂšge, mc.miermans@uliege.be

[2] UCLouvain, axelle.vermeeren@uclouvain.be

[3] ULB bswennen@ulb.ac.be

[4] Pour aller plus loin, le rapport complet de ces recherches est accessible sur le lien : http://hdl.handle.net/2268/235240

[5] ArrĂȘtĂ© royal du 29 fĂ©vrier 2016 paru au Moniteur le 30 mars 2016 portant modiïŹcation de l’arrĂȘtĂ© royal du 18 juin 1990 portant ïŹxation de la liste des prestations techniques de l’art infirmier et de la liste des actes pouvant ĂȘtre conïŹĂ©s par un mĂ©decin Ă  des praticiens de l’art inïŹrmier, ainsi que des modalitĂ©s d’exĂ©cution relative Ă  ces prestations et Ă  ces actes et des conditions de qualiïŹcation auxquelles les praticiens de l’art inïŹrmier doivent rĂ©pondre

[6] AcadĂ©mie royale de MĂ©decine de Belgique. Avis sur l’acte de vacciner par le personnel infirmier, Juin 2015

[7] Avis de la Commission Technique de l’Art Infirmier relatif à l’administration des vaccins par les infirmiers, 22 septembre 2015

[9] Conseil Supérieur de la santé, 4 juillet 2012. Avis numéro 8802 sur la prévention et la prise en charge du choc anaphylactique aprÚs vaccinations des enfants.

Notre systĂšme de santĂ© est rĂ©guliĂšrement soumis Ă  un « check up » de ses performances. C’est le Centre fĂ©dĂ©ral d’Expertise des Soins de SantĂ© (KCE) qui tient le stĂ©thoscope, en collaboration avec Sciensano, l’INAMI et le SPF SantĂ© publique. Pour cette quatriĂšme Ă©dition, 121 indicateurs ont Ă©tĂ© passĂ©s au crible. Le rĂ©sultat : une analyse en 5 dimensions transversales et 5 thĂ©matiques spĂ©cifiques, qui constitue un vĂ©ritable tableau de bord du systĂšme. Le rapport signale les points forts et faibles par des feux verts et rouges. Les feux verts vont, par exemple, au taux de survie Ă  5 ans aprĂšs un cancer colorectal, Ă  la mortalitĂ© nĂ©onatale ou au recours aux mĂ©dicaments bon marchĂ©. Les feux rouges nous alertent sur la surconsommation d’antibiotiques, la baisse de la vaccination contre la grippe des personnes ĂągĂ©es ou encore les perspectives de renouvellement en mĂ©decine gĂ©nĂ©rale. Un tableau de bord belge dans un cadre europĂ©en.

Le rapport sur la performance du systĂšme belge de soins de santĂ© (Health system performance assessment – HSPA) s’inscrit dans une dĂ©marche internationale de monitoring des systĂšmes de soins Ă  travers l’Europe. Il permet aux autoritĂ©s des diffĂ©rents pays de planifier leur stratĂ©gie de santĂ©, d’établir des comparaisons entre pays et de se fixer des objectifs Ă  atteindre. L’objectif final Ă©tant de pouvoir offrir Ă  la population un systĂšme de santĂ© de grande qualitĂ© Ă  un coĂ»t abordable.
Le rapport HSPA belge se construit selon cinq dimensions : l’accessibilitĂ©, la qualitĂ©, l’efficience, la soutenabilitĂ© et l’équitĂ© des soins. Par ailleurs, cinq thĂ©matiques de soins particuliĂšres sont mises sous la loupe : les soins prĂ©ventifs, les soins de santĂ© mentale, les soins aux personnes ĂągĂ©es, les soins de fin de vie et – nouveau dans cette Ă©dition – les soins Ă  la mĂšre et au nouveau-nĂ©.

Un site internet dynamique

Autre nouveautĂ© : un site internet healthybelgium.be rĂ©unit le rapport HSPA, celui sur l’état de santĂ© de la population (Health Status Report, rĂ©alisĂ© par Sciensano) et celui sur les variations de pratiques de soins (rĂ©alisĂ© par l’INAMI). Ce site internet permettra Ă  tout un chacun de se renseigner directement sur l’évolution de trĂšs nombreux paramĂštres – dont les 121 indicateurs HSPA – et mĂȘme d’en tĂ©lĂ©charger les donnĂ©es Ă  partir de graphiques dynamiques. Une mine d’informations pour les chercheurs en santĂ© publique, les dĂ©cideurs politiques, les journalistes, les Ă©tudiants et tous les curieux intĂ©ressĂ©s par le sujet.

Des soins efficaces mais souvent peu adéquats

Que montrent les 121 indicateurs qui constituent ce rapport ? En ce qui concerne la qualitĂ© des soins, on notera que leur efficacitĂ© est plutĂŽt bonne, que leur sĂ©curitĂ© est moyenne (avec un feu orange pour les infections nosocomiales) et qu’en ce qui concerne leur adĂ©quation (leur conformitĂ© aux recommandations de bonne pratique), quelques feux rouges doivent attirer notre attention, notamment en matiĂšre de prescription d’antibiotiques. On notera toutefois que plusieurs indicateurs, dont l’utilisation inadĂ©quate de radiographies de la colonne vertĂ©brale, amorcent une tendance vertueuse.

Accessibilité et équité

Les dĂ©penses de santĂ© totales du pays reprĂ©sentent 10 % de notre produit intĂ©rieur brut. Ce chiffre est stable depuis 2009 ; il est lĂ©gĂšrement supĂ©rieur Ă  la moyenne europĂ©enne. Notre systĂšme de santĂ© peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme relativement accessible, grĂące Ă  notre assurance maladie obligatoire, doublĂ©e de filets de sĂ©curitĂ© sociaux pour les revenus les plus faibles (interventions majorĂ©es, maximum Ă  facturer). La contribution personnelle par habitant diminue lĂ©gĂšrement mais la proportion des personnes qui ont dĂ» reporter des consultations mĂ©dicales pour des raisons financiĂšres reste plus Ă©levĂ©e que la moyenne europĂ©enne, surtout pour les catĂ©gories sociales les plus dĂ©favorisĂ©es.Pour ces mĂȘmes catĂ©gories dĂ©favorisĂ©es, certains autres points restent problĂ©matiques : moindre participation au dĂ©pistage du cancer, frĂ©quence moins Ă©levĂ©e de visites chez le dentiste, consommation plus Ă©levĂ©e de mĂ©dicaments. Le KCE publiera plus tard cette annĂ©e des analyses approfondies sur l’équitĂ© dans l’accĂšs aux soins, rĂ©alisĂ©es grĂące au couplage des donnĂ©es de santĂ© Ă  d’autres donnĂ©es socio-Ă©conomiques (revenus, travail).

Trop peu de médecins généralistes

Le chapitre du personnel qualifiĂ© disponible reste dĂ©licat. Les indicateurs relatifs Ă  la mĂ©decine gĂ©nĂ©rale et aux soins infirmiers mettent en question la capacitĂ© de la Belgique Ă  faire face au vieillissement de la population et Ă  l’augmentation des maladies chroniques. Le nombre de mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes en exercice pose problĂšme, mais aussi leur Ăąge moyen. Contrairement aux besoins Ă©valuĂ©s par la commission de planification, les jeunes diplĂŽmĂ©s s’orientent toujours trop vers la mĂ©decine spĂ©cialisĂ©e au dĂ©triment de la mĂ©decine gĂ©nĂ©rale (mais cette situation semble s’amĂ©liorer). Petite consolation : l’utilisation des dossiers mĂ©dicaux informatisĂ©s progresse bien et le recours aux mĂ©dicaments bon marchĂ© continue Ă  augmenter.
Dans les hÎpitaux, les postes en personnel infirmier sont difficiles à pourvoir, de quoi alimenter une réflexion sur la politique de rétention de ce personnel qualifié.

Personnes ùgées : préparer le papy boom

Dans les maisons de repos pour personnes ĂągĂ©es, on prescrit encore trop de mĂ©dicaments (surtout les anticholinergiques, antidĂ©presseurs, neuroleptiques). Par contre, le taux de vaccination contre la grippe y est plus Ă©levĂ© qu’à domicile. Les places disponibles pourraient ĂȘtre mieux utilisĂ©es ; elles sont souvent occupĂ©es par des personnes peu dĂ©pendantes pour qui il serait plus utile de dĂ©velopper des formes alternatives d’hĂ©bergement plus adaptĂ©es. De façon gĂ©nĂ©rale, le nombre de gĂ©riatres reste trop faible dans notre pays.En ce qui concerne les soins en fin de vie, on observe une progression du recours aux soins palliatifs, mais l’hĂŽpital demeure le lieu de dĂ©cĂšs le plus frĂ©quent pour les personnes atteintes de cancer, alors que ce n’est pas le souhait de la majoritĂ© d’entre elles.

Prévention et santé mentale peuvent mieux faire

Les soins de santĂ© mentale restent les parents pauvres du systĂšme, avec des dĂ©lais d’attente parfois considĂ©rables avant un premier contact. Les prescriptions d’antidĂ©presseurs continuent Ă  augmenter, comme partout en Europe, mais les chiffres belges restent plus Ă©levĂ©s que la moyenne, surtout en Wallonie.Les soins prĂ©ventifs dĂ©crochent aussi un score plutĂŽt mĂ©diocre. Seule la couverture vaccinale des nourrissons atteint un niveau acceptable. La vaccination des adolescents contre la rougeole est trop faible en Wallonie et Ă  Bruxelles et celle contre la grippe est insuffisante chez les personnes ĂągĂ©es dans les trois rĂ©gions. Le dĂ©pistage du cancer du sein – surtout le dĂ©pistage organisĂ© – est trop peu suivi, en particulier Ă  Bruxelles et en Wallonie.

MÚre et nouveau-né

En matiĂšre de soins Ă  la mĂšre et au nouveau-nĂ©, notre pays atteint aujourd’hui un taux favorable de mortalitĂ© nĂ©onatale. L’induction de l’accouchement et l’épisiotomie systĂ©matique sont encore trop souvent pratiquĂ©es, mais la situation s’amĂ©liore. Le nombre de visites prĂ©natales est loin d’ĂȘtre optimal, souvent trop Ă©levĂ©, mais parfois aussi trop faible pour les femmes des catĂ©gories sociales les moins favorisĂ©es. Enfin, certains tests de dĂ©pistage en cours de grossesse sont surutilisĂ©s (toxoplasmose, cytomĂ©galovirus).

Vue d’hĂ©licoptĂšre

L’objectif premier d’une Ă©valuation de la performance du systĂšme de santĂ© n’est pas de distribuer des bons et des mauvais points, mais d’offrir une vision large et rĂ©guliĂšrement remise Ă  jour de l’ensemble du systĂšme. Les donnĂ©es analysĂ©es datent parfois de plusieurs annĂ©es, ce qui est un dĂ©lai normal quand on utilise des bases de donnĂ©es administratives. Certes, cela ne permet pas de prendre en compte les modifications rĂ©centes de stratĂ©gie. Il reste nĂ©anmoins intĂ©ressant de voir l’évolution dans le temps des indicateurs, pour vĂ©rifier qu’une politique donnĂ©e porte ses fruits sur le long terme, ou pour constater, au contraire, qu’une situation s’est dĂ©tĂ©riorĂ©e depuis la derniĂšre mesure.

Pour l’avenir : fixer des objectifs et intĂ©grer les donnĂ©es

Un rapport HSPA n’a pas pour vocation de formuler des recommandations sur la politique de santĂ©, mais le KCE insiste tout de mĂȘme sur la nĂ©cessitĂ©, pour notre pays, de se doter d’objectifs de santĂ© mesurables en tenant compte des points d’attention que le rapport met en avant. Une autre recommandation est de continuer Ă  amĂ©liorer l’intĂ©gration des diffĂ©rentes sources de donnĂ©es relatives Ă  la santĂ©. En effet, la qualitĂ© des donnĂ©es et leur disponibilitĂ© en temps utile sont essentielles pour une Ă©valuation telle que celle-ci. Utiliser un identifiant unique pour chaque patient permettrait de suivre chaque personne Ă  travers l’entiĂšretĂ© du systĂšme de soins. Cette intĂ©gration des diffĂ©rentes donnĂ©es relatives aux patients ne peut toutefois pas faire l’économie d’un dĂ©bat autour des enjeux Ă©thiques, juridiques et techniques d’une telle entreprise, qui doit Ă©videmment ĂȘtre conditionnĂ©e Ă  un respect strict des donnĂ©es individuelles et de la vie privĂ©e.

Pour entrer en contact avec les chercheurs du KCE :

Karin Rondia, Communication scientifique KCE
TĂ©l. : +32 (0)2 287 33 48
GSM : +32 (0)475 769 766
Email : press@kce.fgov.be

Le 26 fĂ©vrier dernier, Similes Wallonie et Psytoyens ont tenu, Ă  Namur, un colloque sur la participation en santĂ© mentale. Tout au long de la journĂ©e, le point sur les pratiques participatives et leur Ă©volution a pu ĂȘtre fait devant 150 professionnels et acteurs de la rĂ©forme des soins de santĂ© mentale. Il y a lieu de se rĂ©jouir devant les progrĂšs rĂ©alisĂ©s : la participation des usagers et des proches a bien commencĂ©. Des obstacles doivent cependant encore ĂȘtre levĂ©s, les plus tenaces semblant venir des professionnels de la santĂ©. Rien d’étonnant Ă  cela si l’on regarde l’évolution des mentalitĂ©s qu’exige une telle participation


Participation en santĂ© mentale et RĂ©forme 107 : oĂč en sommes-nous ?

La participation des usagers et des proches en santĂ© mentale est donc bien devenue rĂ©alitĂ©, mĂȘme s’il reste du chemin Ă  faire pour qu’elle soit parfaitement intĂ©grĂ©e dans les mentalitĂ©s. Un bref parcours de l’histoire de la folie, guidĂ© par Christiane Bontemps, directrice du Centre de RĂ©fĂ©renceen SantĂ© Mentale (CRĂ©SaM), montre qu’il n’a pas Ă©tĂ© Ă©vident du tout d’en arriver lĂ  oĂč nous sommes aujourd’hui, Ă  savoir considĂ©rer le patient et ses proches comme des partenaires de soins.

Ainsi, durant le Moyen-Âge et jusqu’au 15Ăšme siĂšcle, la folie relevait de la pensĂ©e philosophique et de pratiques magiques, mais pas de la mĂ©decine. En vertu de « l’Edit royal du Grand renfermement », les « fous » furent ensuite mis sur le mĂȘme pied que les criminels et enfermĂ©s dans un mĂȘme lieu. Les malades mentaux Ă©taient davantage maltraitĂ©s que les criminels et rĂ©duits Ă  des conditions pires que celles des animaux.

Avec la naissance de la psychiatrie au 19Úme siÚcle, qui considérait la folie comme une maladie mentale nécessitant un traitement propre et particularisé, le malade est devenu un sujet social.

L’arrivĂ©e des mĂ©dicaments au milieu du 20Ăšme siĂšcle a radicalement bouleversĂ© l’univers des soins au profit des traitements ambulatoires et de la remise en question de l’asile.

Mai 68 fut marquĂ© par les mouvements antipsychiatriques et par une rĂ©sistance Ă  l’aspect rĂ©pressif de la psychiatrie. Cela a donnĂ© lieu Ă  une diversification des soins : une place fut ainsi faite aux enfants et Ă  la prĂ©vention. Les soins ambulatoires ont fait leur apparition avec la crĂ©ation de centres de santĂ© mentale, de maisons d’habitations protĂ©gĂ©es, de centres de jours, etc. Des associations d’usagers et de familles ont vu le jour.

La place et la participation des usagers ainsi que de leurs proches est progressivement devenue une rĂ©alitĂ© au cours du 21Ăšme siĂšcle. Cette belle Ă©volution a demandĂ© la crĂ©ation d’espaces de dialogue et d’écoute rĂ©ciproque tant au niveau de la relation de soins et des institutions que sur le plan politique.

Citons l’exemple de l’Institut wallon pour la santĂ© mentale – devenu le Centre de RĂ©fĂ©rence en SantĂ© Mentale (CRĂ©SaM) – qui lors d’une rĂ©union de l’ensemble des acteurs de santĂ© mentale de la RĂ©gion, en 2003, a souhaitĂ© faire une place aux usagers et aux familles. Similes, qui reprĂ©sentait les familles, fut invitĂ©. Comme rien n’existait encore dans la RĂ©gion au niveau des usagers, Psytoyens a vu le jour. C’est ainsi que, depuis 15 ans, Psytoyens et Similes sont assis Ă  la table des acteurs wallons de santĂ© mentale.

La participation des usagers et des familles a franchi un nouveau cap lors du dernier renouvellement du conseil d’administration du CrĂ©Sam en juin 2018, avec, pour la premiĂšre fois,Similes Wallonie et Psytoyens, reprĂ©sentĂ©s non pas par leur coordinatrice mais bien par un usager et un proche.

D’autres associations et services ont Ă©galement ouvert leurs portes aux associations d’usagers et de familles, mĂȘme si les initiatives restaient encore trĂšs locales et relativement isolĂ©es.

La solidaritĂ© entre pairs, le soutien procurĂ© au sein des associations et la formation ont permis aux reprĂ©sentants d’usagers et de proches de se faire petit Ă  petit leur place et, avec les autres acteurs, de porter leurs messages Ă  l’attention de la population, des institutions et des organes politiques.

Enfin, au niveau fĂ©dĂ©ral, en 2007, le SPF dĂ©clarait officiellement son soutien au « Projet participation des reprĂ©sentations des usagers et de leurs familles » qui a dĂ©butĂ© avec les projets thĂ©rapeutiques. L’objectif Ă©tait d’amĂ©liorer la reprĂ©sentation des familles et des usagers Ă  l’organisation des soins de santĂ© mentale et d’accroĂźtre cette reprĂ©sentation au niveau politique.

La RĂ©forme 107

A partir de 2010, le « projet participation » s’est poursuivi dans le cadre de la rĂ©forme des soins en santĂ© mentale, appelĂ©e RĂ©forme 107. En cours depuis 2011, la rĂ©forme cible actuellement la prise en charge de la personne malade dans son milieu de vie, quel qu’il soit, et veille Ă  la continuitĂ© des soins par un travail en rĂ©seau des diffĂ©rents acteurs concernĂ©s, y compris le malade et son entourage. La famille est dĂ©sormais envisagĂ©e comme un partenaire de soin indispensable et complĂ©mentaire aux soignants.

Quatre associations de proches et d’usagers sont mandatĂ©es par le SPF SantĂ© publique pour participer Ă  la RĂ©forme 107 : Similes Wallonie (en concertation avec Similes Bruxelles), Similes Vlaanderen, Psytoyens et UilenSpiegel. Ces quatre associations sont aidĂ©es par deux partenaires scientifiques : le Centre de recherche et de consultation en soins de santĂ© (LUCAS, KU Leuven) et l’Agence interrĂ©gionale de guidance et de soins (AIGS).

Dans le cadre de ce mandat, les quatre associations de proches et d’usagers donnent chaque annĂ©e leurs recommandations pour amĂ©liorer la prise en charge des usagers et des proches au sein des diffĂ©rents rĂ©seaux crĂ©Ă©s dans la cadre de la RĂ©forme 107.

MĂȘme s’il y a encore du pain sur la planche, on le voit, la participation se traduit plus concrĂštement dans les faits. Il reste aux professionnels Ă  partager davantage sur leur savoir et Ă  communiquer dans un langage accessible Ă  tous.

Similes, du cĂŽtĂ© des prochesClaire Van Craesbeeck, psychologue et responsable de projet chez Similes Wallonie, le confirme : la rĂ©forme des soins en santĂ© mentale est une avancĂ©e de taille pour les usagers, les proches et les associations qui les soutiennent. « La reconnaissance de la famille comme partenaire de soins est au cƓur de ce que nous dĂ©fendons chez Similes et que nous essayons de faire essaimer dans les rĂ©seaux sous diffĂ©rentes formes. Dans le cadre de la rĂ©forme, Similes s’est vu octroyer un mandat pour former des reprĂ©sentants de familles. Ceux-ci sont dĂ©sormais aux cĂŽtĂ©s des professionnels pour discuter de l’organisation des soins dans les rĂ©seaux. »

Tout n’est pas pour autant facile depuis la rĂ©forme. « Entre l’esprit de la rĂ©forme, la maniĂšre dont elle s’organise et les avancĂ©es sur le terrain, certaines choses vont moins bien. Comme la rĂ©forme a Ă©tĂ© instituĂ©e en haut et que les progrĂšs doivent prendre forme en redescendant sur le terrain, des changements prennent du temps pour se rĂ©aliser. Ainsi, si certaines familles sont associĂ©es pleinement aux soins envers leur proche, d’autres souffrent encore parfois de ne pas ĂȘtre suffisamment reconnues comme partenaires de soins, voire d’ĂȘtre exclues du soin ou Ă©cartĂ©es de leur proche malade. Des familles se disent associĂ©es mais de maniĂšre maladroite. »

Or, les familles peuvent apporter beaucoup, notamment en termes d’efficacitĂ©. Pour cela, elles ont besoin d’ĂȘtre suffisamment informĂ©es sur la pathologie, le traitement, l’évolution et les rechutes possibles, les comportements Ă  adopter ou Ă  Ă©viter. Elles apportent Ă©galement des informationsutiles , notamment sur la situation vĂ©cue en famille et sur les effets des mĂ©dicaments. « Si on ne les associe pas, elles ne pourront pas ĂȘtre efficientes sur le terrain », dĂ©plore Claire Van Craesbeeck.

Il semble que les associations d’usagers et de familles ne soient pas toujours sur la mĂȘme longueur d’onde. « Par exemple, il arrive qu’une association d’usagers revendique le droit des usagers Ă  s’opposer Ă  la participation de leur entourage. Bien sĂ»r, mais il n’est pas pour autant nĂ©cessaire de juger ni de bannir la famille. Des explications peuvent ĂȘtre donnĂ©es aux proches, ou relayĂ©es vers des associations de familles qui se chargeront de les accompagner dans leurs difficultĂ©s. »

Par ailleurs, il n’est pas Ă©vident pour Similes de recruter des proches qui deviendront des reprĂ©sentants au sein de la rĂ©forme. « Ils vont ĂȘtre amenĂ©s Ă  dĂ©fendre le point de vue de tous les proches et pas leur seule opinion. Par ailleurs, ils sont souvent dĂ©jĂ  bien occupĂ©s par leur vie professionnelle. Et prendre soin d’une personne malade au sein de la famille est trĂšs prenant. Il leur est donc difficile de trouver du temps pour s’investir dans une association comme Similes. »

Psytoyens, du cÎté des usagers

MĂȘme son de cloche du cĂŽtĂ© de Psytoyens : « La rĂ©forme constitue un grand progrĂšs, mĂȘme si on se rend compte qu’il reste encore beaucoup de travail, explique AngĂ©lique Vrancken, coordinatrice et chargĂ©e de projet chez Psytoyens. Le fait que les usagers de la santĂ© mentale participent Ă  des rĂ©unions aux cĂŽtĂ©s de professionnels et sont donc davantage entendus qu’auparavant, c’est une grosse Ă©volution. Un changement dans les mentalitĂ©s s’amorce. Par rapport Ă  une dizaine d’annĂ©es auparavant, l’amĂ©lioration est mĂȘme assez importante. » Le ressenti des usagers sur le terrain diffĂšre nĂ©anmoins selon les rĂ©gions.

« Des institutions et comitĂ©s de rĂ©seaux sont plus avant-gardistes que d’autres et ont plus facilement donnĂ© la place aux usagers de la santĂ© mentale. Mais on ressent encore de la rĂ©ticence dans certains lieux. »Les blocages quant Ă  la participation des usagers dans les soins semblentdĂ»s Ă  la peur et Ă  la stigmatisation de la maladie mentale. « Des retours de terrain indiquent que certaines pathologies, notamment les psychoses, font peur car il est difficile de comprendre de quoi il s’agit, d’autant plus qu’il n’y a pas vraiment de signes physiques », tĂ©moigne encore AngĂ©lique Vrancken.

D’autre part, il n’est pas Ă©vident pour tous les professionnels d’accepter un tel changement de mentalitĂ©. « Le fait de dire aux professionnels que les usagers et proches ont droit Ă  la parole peut ĂȘtre vĂ©cu comme une remise en cause de leur pratique mĂ©dicale. Cela peut donner le sentiment que l’on va venir leur dire comment faire leur travail. L’histoire de la psychiatrie montre combien ce domaine est compliquĂ©, Ă  quel point les stĂ©rĂ©otypes sont importants et ont la vie dure. Cela explique pourquoi l’évolution est aussi lente. Un gros travail de sensibilisation reste Ă  faire. Heureusement, des reprĂ©sentants de Psytoyens sont souvent invitĂ©s dans des Ă©coles pour sensibiliser les futurs assistants sociaux et Ă©ducateurs Ă  la participation des usagers dans les soins. On voit bien que ce travail porte ses fruits auprĂšs des jeunes diplĂŽmĂ©s ces derniĂšres annĂ©es. Ils montrent moins d’a priori et de craintes. ça facilite l’amorce du changement. »

En route vers la pair-aidance

L’accent est Ă©galement mis sur la pair-aidance, qui peut constituer un facteur de progrĂšs important, car elle est caractĂ©risĂ©e par la participation de tous : usagers, proches et professionnels, cela au profit de tous.Du cĂŽtĂ© des patients, le principe de la pair-aidance repose sur l’entraide entre personnes en souffrance ou ayant souffert d’une mĂȘme maladie. Le partage du vĂ©cu de la maladie et du parcours de rĂ©tablissement constitue les principes fondamentaux de la pair-aidance. Il s’agit d’une valeur sĂ»re du rĂ©tablissement dans le domaine de la santĂ© mentale, de la prĂ©caritĂ© et des addictions.

La pair-aidance entre proches permet Ă©galement le partage d’expĂ©riences et de connaissances, tout comme la sensibilisation des professionnels Ă  la problĂ©matique des proches. Elle encourage les pratiques plus collaboratives. La pair-aidance entre proches peut par ailleurs mener Ă  des interpellations au niveau politique.

Enfin, pour les professionnels, la pair-aidance apporte un point de vue complĂ©mentaire et relĂšve de la reconnaissance du savoir expĂ©rientiel Ă  cĂŽtĂ© du savoir acadĂ©mique. Dans l’esprit de la RĂ©forme 107, la pair-aidance encourage les professionnels Ă  voir le patient comme un partenaire. Cette pratique devrait donc les aider Ă  faire un pas de plus vers la participation. Un pas trĂšs attendu par les usagers et les proches


Informations supplĂ©mentaires : Le compte-rendu du colloque peut ĂȘtre consultĂ© sur le site de Similes, onglet « Participation ».Contacts : Similes WallonieRue Lairesse 154020 LiĂšgeTĂ©l. : 04/344 45 45Similes BruxellesRue Malibran 491050 BruxellesTĂ©l. : 02/511.06.19Site internet pour Similes Wallonie et Bruxelles : www.similes.orgPsytoyensChaussĂ©e des PrĂ©s 42-444020 LiĂšgeTĂ©l. : 0491/89 17 84Site internet : www.psytoyens.beCRĂ©SamBoulevard de Merckem 75000 NAMURTĂ©l. : 081/25 31 40Site internet : www.cresam.beLigue des usagers des services de santĂ© (LUSS)Site internet : www.luss.beLUSS BruxellesRue Victor Oudart 71030 SCHARRBEEKTĂ©l. : 02/734 13 30LUSS LiĂšgeRue de la Sation 484032 CHENEETĂ©l. : 04/247 30 57

Livre blanc

Georges Legros, membre de Similes Wallonie et reprĂ©sentant de Similes au RĂ©seau 107 de Namur, rappelle qu’en 2004, un livre blanc a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© par Similes. ConsacrĂ© au vĂ©cu de familles de personnes atteintes de troubles psychiques entre 1982 et 2001, cet ouvrage, qui entendait prĂŽner la participation des proches aux soins, montrait Ă  quel point on Ă©tait encore loin du compte.MalgrĂ© d’heureuses Ă©volutions çà et lĂ , l’accueil, la communication et les rencontres dans le milieu hospitalier s’avĂ©raient insatisfaisants. Les proches ne se sentaient ni reconnus ni soutenus dans leur dĂ©sarroi et leur souffrance, ainsi que dans leur rĂŽle d’acteur auprĂšs du patient, et donc de partenaire potentiel des soins. Au contraire, la famille, considĂ©rĂ©e comme toxique, Ă©tait soupçonnĂ©e d’ĂȘtre la source du mal avec une responsabilitĂ© particuliĂšre attribuĂ©e Ă  la mĂšre.Au niveau collectif et institutionnel, oĂč se joue l’élaboration d’une politique des soins, la participation des proches Ă©tait pratiquement nulle. Aucun lieu n’était prĂ©vu Ă  cet effet, que ce soit dans les hĂŽpitaux ou au MinistĂšre de la santĂ©. Si les soignants et les proches visaient le mĂȘme objectif, celui du rĂ©tablissement du patient, de grands obstacles empĂȘchaient la participation des proches : cĂŽtĂ© soignant, la formation n’accordait pas de place au malade en tant que partenaire, ni Ă  son entourage. Le mĂ©decin avait davantage affaire Ă  des maladies qu’à des malades. Ainsi, on parlait de « patients » et non pas d’usagers. Certaines lois et rĂšgles dĂ©ontologiques – comme le secret professionnel, les droits du patient oula protection du colloque singulier – pesaient plus en santĂ© mentale qu’ailleurs. Des obstacles existaient Ă©galement du cĂŽtĂ© du patient : la culture gĂ©nĂ©rale de la sociĂ©tĂ© Ă©tait plus orientĂ©e vers la soumission aux autoritĂ©s et aux compĂ©tences qu’à la revendication d’une participation Ă©galitaire. D’autre part, les familles Ă©taient souvent paralysĂ©es par un grand sentiment d’isolement et d’impuissance, voire de culpabilitĂ© devant des pathologies mal connues et lourdement stigmatisĂ©es. Autres difficultĂ©s : certaines spĂ©cificitĂ©s de la maladie mentale qui modifient profondĂ©ment les liens ordinaires avec l’usager, un dĂ©ni frĂ©quent de la pathologie et un refus des soins, une vision perturbĂ©e du rĂ©el, des reproches ou accusations adressĂ©s Ă  l’entourage de sorte que le dialogue et la collaboration deviennent difficiles mĂȘme avec le premier intĂ©ressĂ©. Tous ces Ă©lĂ©ments contribuaient Ă  installer ou Ă  conforter chez beaucoup de proches une tendance Ă  passer le relais aux professionnels compĂ©tents.Une Ă©volution favorable a, fort heureusement, pu se faire grĂące Ă  deux facteurs. D’une part, la crĂ©ation de certaines associationspour les proches, comme Similesa permis de faire entendre la voix des familles aux soignants et aux responsables politiques. Ces associations ont aussi permis aux familles de sortir de l’isolement, d’échanger entre elles, de recevoir des informations et des formations en psychoĂ©ducation. D’autre part, les autoritĂ©s publiques ont dĂ©cidĂ© d’associer d’emblĂ©e des usagers et des proches Ă  leur RĂ©forme 107 en donnant un mandat explicite Ă  leurs associations reprĂ©sentatives, de sorte que, comme le montrera la suite, c’est paradoxalement par le niveau collectif et institutionnel qu’a commencĂ© Ă  s’inscrire dans les faits un partenariat qui avait Ă©tĂ© souhaitĂ© d’abord dans les pratiques de soins.

L’internement, une mesure inhumaine

Le colloque a Ă©tĂ© l’occasion de rappeler combien le sort des personnes hospitalisĂ©es dans le cadre de la loi de dĂ©fense sociale donne Ă  penser qu’il relĂšve de pratiques inhumaines. Un usager, Johan, est venu tĂ©moigner de son internement qui l’a fortement marquĂ© sur le plan psychologique. Il a pu se reconstruire grĂące Ă  la participation. « Je me suis retrouvĂ© internĂ© Ă  Lantin, stabilisĂ© grĂące au traitement en annexe psychiatrique, raconte Johan. Quand on y entre, on comprend vite qu’il faut s’en sortir car on n’est plus personne. Le systĂšme carcĂ©ral gomme toute marque de singularitĂ©, de personnalitĂ©. J’avais beaucoup de colĂšre en moi. Heureusement, ma famille et mes amis m’ont apportĂ© un grand soutien. Mes proches ont suivi le module de psychoĂ©ducation Profamille, qui fournit des outils pour les aider et m’aider Ă©galement. Cela leur a permis de moins culpabiliser, ils Ă©taient plus armĂ©s Ă  vivre cette situation trĂšs compliquĂ©e. J’ai construit mon projet de sortie avec un avocat spĂ©cialisĂ©. Le fait que je sois stabilisĂ© m’a aidĂ© dans mes dĂ©marches. J’ai Ă©tĂ© libĂ©rĂ© Ă  l’essai mais pas encore de façon dĂ©finitive. J’ai encore une Ă©pĂ©e de DamoclĂšs au-dessus de la tĂȘte
 J’ai eu la chance de retrouver mon ancien emploi. Je me reconstruis mais la lourdeur administrative est toujours lĂ . Je dois me prĂ©senter devant la Commission de dĂ©fense sociale tous les six mois. Aujourd’hui, si je pouvais effacer mon casier judiciaire, je serais l’homme le plus heureux sur terre. »

Le nouveau site de référence belge francophone en matiÚre de vaccination

Bruxelles, le 15 avril 2019 – Le 24 avril 2019, Ă  l’occasion de la Semaine europĂ©enne de la vaccination, l’asbl Question SantĂ©, en collaboration avec l’Agence pour une Vie de QualitĂ©, l’Office de la Naissance et de l’Enfance et le Service public bruxellois francophone, lancera la nouvelle version du site de rĂ©fĂ©rence francophone en matiĂšre de vaccination.

Une question sur la vaccination ? Un réflexe, www.vaccination-info.be Le nouveau site de référence belge francophone en matiÚre de vaccination

En janvier 2019, l’Organisation mondiale de la SantĂ© pointait l’hĂ©sitation vaccinale comme l’une des 10 plus grandes menaces pour la santĂ© de l’humanitĂ©. Cette menace trouve notamment un terrain propice sur internet et sur les rĂ©seaux sociaux, oĂč des croyances et de multiples thĂ©ories d’origines douteuses – maintes fois dĂ©menties par le monde scientifique – continuent de revenir sur le devant de la scĂšne.

La vaccination serait-elle victime de son succĂšs ?

Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui se posent des questions quant Ă  l’utilitĂ© de la vaccination : « Pourquoi vacciner contre des maladies qu’on ne voit plus ? Ne court-on pas plus de risques d’avoir des effets indĂ©sirables suite Ă  une vaccination que d’ĂȘtre un jour confrontĂ© Ă  la maladie et Ă  ses consĂ©quences ? »La gĂ©nĂ©ralisation de la vaccination a permis Ă  la population de se protĂ©ger contre de nombreuses maladies en les Ă©radiquant ou en diminuant fortement leur incidence. Le revers de la mĂ©daille rĂ©side en ce que le public, n’étant plus – ou trĂšs peu – confrontĂ© Ă  ces maladies et Ă  leurs consĂ©quences potentiellement graves, croit qu’elles ont disparu et se vaccine moins, ce qui permet Ă  ces maladies de ressurgir. La rougeole en est un trĂšs bon exemple. Entre janvier et mars 2019, on recensait 54 cas en Wallonie et 80 cas Ă  Bruxelles[1].

Un site web francophone belge de référence

Dans un contexte oĂč circulent de multiples messages provenant de sources parfois peu crĂ©dibles, comment faire la part des choses entre les informations farfelues et celles scientifiquement validĂ©es ? Soucieux de fournir Ă  la population des informations rigoureuses et scientifiques, exprimĂ©es dans un langage clair et comprĂ©hensible par le plus grand nombre, l’AVIQ s’est associĂ©e Ă  la Cocof et Ă  l’ONE pour soutenir la crĂ©ation d’une nouvelle version du site www.vaccination-info.be.Les contenus proposĂ©s se basent sur :

  • les recommandations officielles de santĂ© publique du Conseil SupĂ©rieur de la SantĂ© ;
  • le Programme de vaccination de la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles ;
  • des avis scientifiques et publications reconnues.

Ceux-ci ont fait l’objet d’une relecture scientifique par les institutions partenaires et ne rĂ©percutent pas d’informations basĂ©es sur des expĂ©riences ou opinions personnelles. Le site dĂ©veloppe l’information suivant diffĂ©rents niveaux de lecture afin d’en favoriser l’accessibilitĂ©. D’abord succinctes, les informations sont ensuite complĂ©tĂ©es par des rĂ©fĂ©rences et liens vers des documents scientifiques validĂ©s.

CoordonnĂ© par l’asbl Question SantĂ© et indĂ©pendant de tout intĂ©rĂȘt commercial, le site www.vaccination-info.be poursuit l’ambition d’ĂȘtre la rĂ©fĂ©rence belge francophone en matiĂšre de vaccination. Il est destinĂ© Ă  tous ceux qui s’interrogent sur la vaccination et les vaccins et apporte des rĂ©ponses aux questions les plus communĂ©ment posĂ©es, telles que : « A quoi ça sert de se faire vacciner ? Mon enfant est enrhumĂ©, peut-il se faire vacciner ? Pourquoi vacciner contre plusieurs maladies en mĂȘme temps ? Pourquoi y a-t-il de l’aluminium dans les vaccins ? Le vaccin contre la rougeole, la rubĂ©ole et les oreillons cause-t-il l’autisme ? L’industrie pharmaceutique ne pousse-t-elle pas Ă  ce que tout le monde se fasse vacciner ? ».

On trouve Ă©galement sur www.vaccination-info.be :

  • Des informations sur chaque maladie contre laquelle une vaccination existe : descriptif de la maladie, symptĂŽmes, vaccins recommandĂ©s, contre-indications…
  • Les aspects pratiques de la vaccination : Qui vaccine ? OĂč se faire vacciner ? A quel moment de la vie se faire vacciner ? Les recommandations vaccinales suivant les contextes de vie (voyage, travail, frĂ©quentation d’une collectivitĂ©, etc.)…
  • Un regard sur la vaccination au travers de ses grands principes, de son histoire ou encore du contexte institutionnel dans lequel elle s’imbrique.

A propos de Question Santé

L’asbl Question Santé met en dĂ©bat les enjeux individuels et collectifs de la santé et les traduit en projets et outils, accessibles à des publics variĂ©s. L’asbl Question SantĂ© offre un service de rĂ©fĂ©rence en matiĂšre de communication en promotion de la santĂ© et assure une expertise, des accompagnements mĂ©thodologiques et des ateliers de mise en pratique pour les professionnels qui dĂ©sirent traduire leurs actions et outils en projets de communication. Question SantĂ© rĂ©alise des outils mĂ©thodologiques, d’information et de sensibilisation Ă  destination des professionnels et du grand public. Également active dans le champ de l’Education Permanente, l’asbl Question SantĂ© met en dĂ©bat les questions de sociĂ©tĂ© sur diverses thĂ©matiques liĂ©es aux dĂ©terminants de la santĂ©. En rĂ©sulte chaque annĂ©e une sĂ©rie d’outils, dĂ©clinĂ©s en animations, vĂ©ritables lieux de dĂ©bat et de participation citoyenne.

Plus d’informations sur les activitĂ©s de l’asbl

http://www.questionsante.org

A propos de l’Agence pour une Vie de QualitĂ©

Assurer la santĂ© et le bien-ĂȘtre des Wallons : une compĂ©tence de l’AVIQL’AVIQ est le service public compĂ©tent pour les questions relatives au bien-ĂȘtre et Ă  la santĂ© de tous en rĂ©gion wallonne. L’AVIQ a pour ambition de proposer Ă  chaque Wallon des rĂ©ponses adaptĂ©es Ă  ses besoins en matiĂšre d’aide, d’accompagnement, de bien-ĂȘtre et de santĂ© pour lui permettre de mener une vie de qualitĂ©, tout en simplifiant ses dĂ©marches et en veillant Ă  l’amĂ©lioration constante de la qualitĂ© de ses services.L’Agence pour une Vie de QualitĂ© assure de nombreuses missions pour accompagner les Wallons Ă  chaque Ă©tape de leur vie : informations, Ă©coute, conseils, travail en rĂ©seau, agrĂ©ments, octrois de subsides, dĂ©marche « qualitĂ© » avec ses diffĂ©rents services : services conseil en amĂ©nagements, logements individuels ou collectifs, Ă©tablissements d’hĂ©bergement, achat de matĂ©riel spĂ©cifique, formations professionnelles adaptĂ©es


Plus d’informations sur les missions de l’AVIQ :

https://www.aviq.be

A propos du Service public bruxellois francophone

Le service de la SantĂ© du Service public bruxellois francophone (SPFB-COCOF) est chargĂ© de l’agrĂ©ment et du suivi des services ambulatoires, et met Ɠuvre la politique de Promotion de la santĂ© Ă  Bruxelles (hors PSE). FormalisĂ©e au sein du Plan stratĂ©gique de Promotion de la santĂ©, cette matiĂšre est portĂ©e concrĂštement par des opĂ©rateurs (acteurs, rĂ©seaux et services piliers) financĂ©s pour des projets de trois Ă  cinq ans. Leurs prioritĂ©s d’action comprennent, entre autres : la promotion des environnements favorables en matiĂšre d’alimentation, d’activitĂ© physique, de consommation de tabac ou d’alcool ; la prĂ©vention des IST et la promotion de la santĂ© sexuelle ; la rĂ©duction des risques en matiĂšre d’usage de drogues licites et illicites ; la promotion de la santĂ© des personnes en situation de vulnĂ©rabilitĂ©, etc. Les opĂ©rateurs dĂ©signĂ©s doivent Ă©galement contribuer aux programmes de mĂ©decine prĂ©ventive du dispositif de promotion de la santĂ© bruxellois : dĂ©pistages des cancers du sein et colorectal, dĂ©pistage de la tuberculose.

Plus d’informations sur l’organisation, les acteurs et les enjeux de la promotion de la santĂ© Ă  Bruxelles, voir la rubrique bien-ĂȘtre et santĂ© sur :

https://www.spfb.brussels/

A propos de l’Office de la Naissance et de l’Enfance

L’Office de la Naissance et de l’Enfance est l’organisme de rĂ©fĂ©rence de la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles pour toutes les questions relatives Ă  l’enfance. Cela concerne aussi bien l’organisation d’un accompagnement de l’enfant, dans et en relation avec son milieu familial et son environnement social, que celui de l’accueil de l’enfant en dehors de son milieu familial. L’ONE a Ă©galement pour mission de mener des actions de soutien Ă  la parentalitĂ© et de promotion de la santĂ©, par le biais de l’organisation de consultations prĂ©natales et pour enfants, de l’organisation des visites Ă  domicile, et des services de promotion de la santĂ© Ă  l’Ă©cole. ParallĂšlement aux missions de base d’accompagnement de l’enfant dans son environnement familial et d’accueil du jeune enfant, l’ONE dĂ©veloppe des missions transversales communes Ă  ses deux grands secteurs.

En plus du soutien Ă  la parentalitĂ© et l’information des parents, la promotion de la santĂ© et l’Ă©ducation de celle-ci, il s’agit de la promotion de la formation continue des acteurs des politiques de l’enfance, la rĂ©alisation de recherches, l’Ă©valuation des besoins et des expĂ©riences innovantes.

Plus d’informations sur les missions de l’ONE :

http://www.one.be


[1] Chiffres non exhaustifs au 5 avril 2019. 68,52% en Wallonie et 80% Ă  Bruxelles des suspicions de cas de rougeole ont Ă©tĂ© confirmĂ©es par un laboratoire. 11,11% en Wallonie et 6,25% Ă  Bruxelles des suspicions sont des cas probables de rougeole, c’est-Ă -dire qu’ils prĂ©sentent une clinique compatible Ă  celle de la rougeole ainsi qu’un lien clairement Ă©tabli avec une personne qui a prĂ©sentĂ© une rougeole avĂ©rĂ©e endĂ©ans la pĂ©riode d’incubation.

Depuis quelques temps, la thĂ©orie du nudge et sa mise en application prennent une relative ampleur dans le champ de la santĂ© publique. Le nudgingNote bas de page tutoie un vieux rĂȘve libĂ©ral, celui de faire adopter, par des moyens ingĂ©nieux et modestes, les bons comportements sans sanctionner, faire la morale ni altĂ©rer la libertĂ© de choix. Mais, les nudges sont-ils compatibles avec une Ă©thique de promotion de la santĂ© ? Constituent-ils des outils efficaces pour rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© ? Ne dĂ©douaneraient-ils pas l’État de prendre des dispositions plus coĂ»teuses budgĂ©tairement, mais plus impactantes sur la santĂ© des populations ? Coup d’Ɠil sur le phĂ©nomĂšne.

Nudges - promotion de la santé : ligne à haute tension

Qu’est-ce qu’un nudge ?

Ça y est ! La SNCF a enfin pu dissuader les voyageurs d’une de ses gares, de prendre Ă  contresens un couloir qu’ils empruntaient allĂšgrement pour accĂ©der aux quais. Comment ? En remplaçant simplement le panneau « sens interdit » par la signalĂ©tique « voie sans issue ». Autre dĂ©cision Ă©tonnante, celle d’une municipalitĂ© asiatique qui a repeint les marches d’un escalier public en indiquant sur chacune d’elles le nombre de calories consommĂ©es Ă  chaque franchissement. Pourquoi ? Pour soutenir le choix de l’effort physique et encourager une mobilitĂ© bĂ©nĂ©fique pour la santĂ©, sans toutefois supprimer l’alternative de l’escalator. Encore un exemple de nudge : vous circulez en voiture lorsqu’un panneau lumineux vous rappelle d’ĂȘtre prudent ou vous remercie vertement pour le caractĂšre adaptĂ© de votre vitesse. Et la liste pourrait ĂȘtre longue


Un « nudge », littĂ©ralement « un petit coup de coude », est un dispositif technique mis en place pour inciter un individu ou un groupe d’individus Ă  adopter sans obligation un comportement souhaitĂ©. Le principe est d’établir une « voie royale » vers le meilleur choix et/ou de dresser des obstacles sur la route de la mauvaise option. C’est une forme d’automatisation du comportement de la personne qui est visĂ©e. Quand elle s’y conforme, elle le fait malgrĂ© elle, souvent inconsciente du mĂ©canisme sur lequel il repose. SĂ©curitĂ© routiĂšre, lutte contre les incivilitĂ©s, Ă©cologie, don d’organes, fiscalité  Ces dispositifs graphiques, sonores, urbanistiques, sĂ©mantiques, ludiques, numĂ©riques sont utilisĂ©s dans le vaste champ des politiques publiques pour amener le citoyen Ă  suivre une norme dans son propre intĂ©rĂȘt et dans celui de la collectivitĂ©.

Sur quoi se base le nudge ?

C’est Ă  la science des comportements qu’on doit le nudging. Son principal thĂ©oricien, l’économiste nobĂ©lisĂ© Richard ThalerNote bas de page, s’est appuyĂ© sur le constat suivant : la rationalitĂ© de nos dĂ©cisions est souvent mise Ă  mal par des Ă©motions et des paramĂštres environnementaux. Chaque nudge est alors crĂ©Ă© Ă  partir d’une analyse de nos biais cognitifs. Il s’agit d’exploiter cette irrationnalitĂ© mais aussi le caractĂšre prĂ©visible de nos comportements pour modifier l’environnement de choix. Premier exemple, avec le biais de cadrage. Celui-ci renvoie Ă  la maniĂšre dont les choix nous sont prĂ©sentĂ©s. En rĂ©duisant la taille d’une assiette contenant une certaine quantitĂ© d’aliments, la satiĂ©tĂ© pourra ĂȘtre plus vite atteinte qu’en utilisant un plus grand format proposant le mĂȘme contenu. Ici, la taille de l’assiette influence la perception de la quantitĂ© d’aliments qu’elle contient. Le biais de dotation constitue un deuxiĂšme exemple. L’exploitation de ce biais se concrĂ©tise par les formulaires prĂ©remplis. Comme nous avons gĂ©nĂ©ralement tendance Ă  donner plus de valeur Ă  ce qui nous est attribuĂ© d’office, de nombreux services publics orientent nos choix en cochant des cases par dĂ©faut (opting-out)Note bas de page.

Ainsi, aux États-Unis, un plan d’épargne proposĂ© automatiquement aux salariĂ©s a permis d’augmenter sensiblement le taux d’épargne. TroisiĂšme et dernier exemple, le biais de conformitĂ©. L’individu a tendance Ă  ĂȘtre rassurĂ©, motivĂ© ou responsabilisĂ© par les expĂ©riences du plus grand nombre constituant dĂšs lors pour lui un point de rĂ©fĂ©rence. Le ministĂšre des impĂŽts au Royaume Uni s’est appuyĂ© sur ce biais en envoyant un sms prĂ©cisant que « 90% des contribuables rendent leur feuille d’impĂŽt dans les temps », ce qui a permis de diminuer le retard des dossiers.

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Notre cerveau parfois nous gruge. Y a-t-il une flùche plus longue que l’autre ?

Le nudge en santĂ© publique : l’exemple du Nutri-score

Les suggestions subtiles, indirectes voire subliminales qui influencent la prise de dĂ©cision servent depuis longtemps les intĂ©rĂȘts et la communication du secteur marchand, Ă  travers l’ingĂ©nierie marketing. La thĂ©orie du nudge a, quant Ă  elle, Ă©tĂ© pensĂ©e dans une optique de service public. Diminution de la prĂ©valence des maladies chroniques, augmentation de l’activitĂ© physique, limitation de la consommation d’alcool
 : l’amĂ©lioration de la santĂ© de la population fait partie des multiples engagements de l’État. Mais, les politiques de santĂ© peinent actuellement Ă  atteindre leurs objectifs. Toujours focalisĂ©s sur la modification des comportements, limitĂ©s sur le plan budgĂ©taire et poussĂ©s par le manque de rĂ©sultat des campagnes de communication, les responsables de la prĂ©vention voient dans le nudging une stratĂ©gie Ă  investir.

Le Nutri-score, adoptĂ© rĂ©cemment par la Ministre fĂ©dĂ©rale de la santĂ©, entre dans cette logique de nudge. Ce logo nutritionnel qui est apposĂ© sur certains emballages de produits alimentairesNote bas de page entend faciliter les choix santĂ© du consommateur, classant les produits du vert (A), les plus qualitatifs d’un point de vue nutritionnel, au rouge (E), les produits Ă  consommer de maniĂšre mesurĂ©e. À travers une pondĂ©ration d’indicateurs nutritionnels, il constitue une simplification de l’information. L’étiquetage obligatoire actuel noie effectivement le consommateur dans un ocĂ©an de chiffres et de signes, impossibles Ă  dĂ©crypter sans prĂ©alable Ă©ducatif. Le Nutri-score rĂ©pond Ă  cela en apparaissant comme une clĂ© de clarification. Mais, cet Ă©tiquetage est plus qu’informatif, il vise clairement Ă  Ă©tablir un comportement-rĂ©flexe Ă  l’aide d’un rĂ©fĂ©rent culturel intĂ©riorisĂ© : le signal vert est associĂ© Ă  ce qui est autorisĂ©, le rouge, Ă  ce qui est interdit. DĂšs lors, consommer un aliment classĂ© rouge s’assimilerait Ă  braver un interdit. Dans une perspective de santĂ© publique, le Nutri-score est une avancĂ©e dans le sens oĂč il permet d’une part, de faire pression sur les industriels – la plupart hostiles vis-Ă -vis de la mesure – pour amĂ©liorer la qualitĂ© de leurs produits, et d’autre part, d’amener les consommateurs Ă  s’intĂ©resser un peu plus Ă  la qualitĂ© nutritionnelle des aliments. Mais, le principe gĂ©nĂ©ral de nudging sur lequel le dispositif repose, charrie une sĂ©rie de questions Ă©thiques au regard des approches dĂ©fendues en promotion de la santĂ©.

La santĂ©, ressource Ă©minemment intime et subjective, se construit Ă  partir d’un ensemble d’élĂ©ments socio-environnementaux relevant d’une responsabilitĂ© multiple, non exclusivement individuelle. Pour atteindre une meilleure santĂ©, la promotion de la santĂ© mobilise plusieurs stratĂ©gies d’actions, s’appuyant sur une sĂ©rie de valeurs parmi lesquelles on retrouve l’autodĂ©termination, l’émancipation et l’engagement collectif. DĂšs lors, la thĂ©orie du nudge est-elle compatible avec ce cadre de valeurs ?

Premier point de tension Ă©thique : le conditionnement

Intervenir Ă  l’aide d’un nudge revient Ă  modifier l’architecture du choix, Ă  pousser le citoyen vers la bonne dĂ©cision en utilisant ses failles cognitives. Le but, l’adoption du comportement souhaitĂ©, prĂ©vaut sur la prise de conscience de ses tenants et aboutissants. En d’autres mots, la fin justifie les moyens. Si les stratĂ©gies Ă©ducatives en promotion de la santĂ© cherchent Ă  maximiser les connaissances et les compĂ©tences en vue d’une autodĂ©termination des choix pris par la personne quels qu’ils soient, le nudge vise, lui, pour reprendre les mots de Linda Cambon, Ă  « Ă©conomiser ses ressources mentales afin qu’elle puisse prendre des dĂ©cisions rapides allant dans le sens voulu par la puissance publiqueNote bas de page ». On s’éloigne nettement de la citoyennetĂ© critique revendiquĂ©e par les acteurs de promotion de la santĂ©. MĂȘme si ces influences discrĂštes et subtiles sont pensĂ©es et mises en Ɠuvre de maniĂšre bienveillante, elles nous amĂšnent sur une pente glissante, celle d’un conditionnement de nos pensĂ©es et de nos actes.

DeuxiĂšme point de tension Ă©thique : le paternalisme

Le paternalisme est mort, vive le paternalisme ! Puisque les citoyens ne font pas les meilleurs choix pour leur santĂ©, l’autoritĂ© publique les y aidera. Les thĂ©oriciens du nudge se rĂ©clament d’une forme de paternalisme, le paternalisme libĂ©ral. Si, par ses apparences non-contraignantes et son caractĂšre non-autoritaire, il semblerait plus acceptable qu’un paternalisme frontal et assumĂ©, ce courant reste basĂ© sur une posture en surplomb, dĂ©finissant a priori la norme Ă  suivre et le bien commun, et faisant fi des systĂšmes de valeurs propres Ă  chaque individu. Et s’il ne remet pas en cause la libertĂ© de chacun, le nudge crĂ©e les conditions d’une culpabilisation voire d’une stigmatisation des personnes qui rĂ©sistent. La sanction sociale est latente.

SollicitĂ© de toute part par une sĂ©rie de nudges, l’individu qui prendrait, malgrĂ© tout et pour de bonnes raisons (se faire plaisir, par exemple), la mauvaise dĂ©cision pourrait entendre cette petite voix intĂ©rieure, ou la voix plus tangible de ses pairs, lui rappeler qu’il s’égare voire qu’il y met de la mauvaise volontĂ©. La promotion de la santĂ© nous apprend au contraire que ce qui est juste n’est pas toujours ce que l’on croit bon pour l’autre. Elle invite Ă  comprendre le monde dans lequel chaque personne Ă©volue. Se dĂ©gager des assignations, donner du sens aux normes voire les reconfigurer, s’approprier du pouvoir, voilĂ  les balises d’une philosophie tĂ©lescopant Ă  maints Ă©gards les principes paternalistes, fussent-ils libĂ©raux.

TroisiĂšme point de tension Ă©thique : l’individualisme

Faire le choix du nudge c’est donner plus de poids Ă  la responsabilitĂ© individuelle. David Cameron, quand il Ă©tait encore premier ministre conservateur britannique, voyait dans le nudgeNote bas de page un des outils de mise en Ɠuvre de son idĂ©ologie politique, la Big Society. Son dessein Ă©tait de remplacer l’action de l’État par l’agglomĂ©ration des (bonnes) volontĂ©s individuelles, postulant que la sociĂ©tĂ© est bien capable de s’occuper d’elle-mĂȘme et qu’elle a seulement besoin de petits coups de pouce pour se responsabiliser. Plusieurs dĂ©cennies de recherche en santĂ© publique ont mis en Ă©vidence que la voie du comportementalisme ne permet pas d’amĂ©liorer durablement la santĂ© de toutes et tous, et que ce sont les dĂ©terminants de santĂ© structurels, dĂ©pendant avant tout de l’action publique, qui pĂšsent majoritairement sur la santĂ©.

NudgĂ©es dans l’espace social, les personnes contraintes par des rĂ©alitĂ©s sociales, Ă©conomiques et culturelles ne se trouveront pas moins en difficultĂ© face Ă  des normes comportementales tĂ©lĂ©guidĂ©es. Par exemple, si le Nutri-score n’est pas associĂ© Ă  d’autres stratĂ©gies, si le pouvoir public ne se penche pas simultanĂ©ment sur la qualitĂ© de l’offre alimentaire et sur son coĂ»t, s’il n’agit pas sur les conditions de vie dans lesquelles s’inscrivent les choix, ce nudge nourrira une forme de marginalisation. RĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© se fonde sur un investissement de l’État et un accroissement des responsabilitĂ©s collectives, tout l’inverse de l’objectif avouĂ© de la Big society qui visait surtout Ă  les rĂ©duire.

Conclusion : un usage sous conditions

Un nudge n’est pas l’autre et un contexte d’utilisation n’est pas l’autre. Mais, pour qu’il soit Ă©thique dans le champ de la santĂ© publique, le nudge doit ĂȘtre assorti d’une sĂ©rie de conditions, mĂȘme si celles-ci tendraient peut-ĂȘtre Ă  le dĂ©naturer.

  • PremiĂšrement, la transparence doit prĂ©valoir dans le dispositif. MĂȘme si des tenants du nudge disent qu’une fois dĂ©voilĂ©, il perdrait de son efficacitĂ©, une politique publique dans un espace dĂ©mocratique ne peut se fonder sur une manipulation, mĂȘme douce et bienveillante. L’autoritĂ© doit donc expliciter les intentions qui l’amĂšne Ă  mettre en place le nudge ainsi que les mĂ©canismes qui le tissent.
  • DeuxiĂšmement, avant de lancer un nudge dans l’espace social, il y a lieu de rĂ©flĂ©chir Ă  la norme que le nudge encourage Ă  suivre. Quel sens a-t-elle ? Comment est-elle partagĂ©e au sein de la population et des diffĂ©rentes couches qui la composent ? Quels sont les freins, autres que ceux d’ordre psychologique, et les coĂ»ts liĂ©s Ă  son adoption par les personnes ? En faisant ressortir ce contexte de sociĂ©tĂ© et les divers registres des valeurs et de prĂ©fĂ©rence, la rĂ©flexion permettra d’estimer la pertinence de la stratĂ©gie.
  • La troisiĂšme condition se situe dans le prolongement de la prĂ©cĂ©dente : le nudge ne doit aucunement nuire. Il est donc indispensable de penser en amont (notamment Ă  travers des ballons d’essai) Ă  ses effets collatĂ©raux et Ă  la distribution de ces effets au sein de la population afin qu’il ne soit pas contre-productif (sentiment d’impuissance, disqualification, stigmatisation
) et ne devienne un facteur aggravant les inĂ©galitĂ©s.
  • QuatriĂšmement, le nudge doit, s’il rĂ©pond aux conditions prĂ©cĂ©dentes, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un outil parmi d’autres et s’inscrire dans un ensemble de mesures parmi lesquelles la mise en place de dĂ©marches Ă©ducatives nourrissant l’empowerment et la rĂ©flexion.

Dans tous les cas, les nudges ne doivent pas ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme la clĂ© de voĂ»te des politiques de prĂ©vention. Faire le choix exclusif de stratĂ©gies d’activation des individus serait une erreur. Cela reviendrait Ă  limiter les problĂšmes sociaux Ă  l’origine des disparitĂ©s de santĂ© Ă  des comportements individuels et Ă  nier la complexitĂ© des interventions utiles pour promouvoir la santĂ© qui ont, plus que jamais, besoin de soutiens et d’investissements publics.

Bibliographie

BERGERON H., CASTEL P. et al., Le Biais comportementaliste, Presses Sciences Po, 2018, 128p.CAMBON L., Le nudge en prĂ©vention
 troisiĂšme voie ou sortie de route?, in : SantĂ© Publique, 2016/1 (vol 28), pp. 43-48DEHOUCK L., TRONTIN C. & GAMASSOU C.E., Les nudges un coup de pouce pour votre santĂ©, in : The conversation.com, novembre 2017,DRIEU LA ROCHELLE M., La thĂ©orie du nudge en santĂ© publique : Quelles perspectives et limites pour l’avenir en France?, ThĂšse, UniversitĂ© de Poitiers, FacultĂ© de MĂ©decine et de Pharmacie, 2018, 96p.FRENKIEL E., La main invisible du nudge, in : Sciences Humaines, n°225, avril 2011, pp. 48-49JOURNET N., Comportements sous influence, in : Sciences Humaines, n°312, mars 2019, pp. 8-9SUNSTEIN C. & THALER R., Nudge, comment inspirer la bonne dĂ©cision, Pocket, 2012, 480p.SUSSAN R., La manipulation bienveillante, in : Sciences Humaines, n°287, dĂ©cembre 2016, pp. 48-49

Le fait de crĂ©er des nudges et de les placer dans l’espace social.

Il a Ă©ditĂ© en 2008 avec son co-auteur Cass Sunstein l’ouvrage de rĂ©fĂ©rence « Nudge : La mĂ©thode douce pour inspirer la bonne dĂ©cision ».

Notons que l’efficacitĂ© de l’exploitation de ce biais est relativisĂ©e par des mĂ©canismes de rĂ©sistance face Ă  des choix proposĂ©s par dĂ©faut (SUSSAN R., Nudge, la manipulation bienveillante, Sciences Humaines, 2016).

Aucune disposition contraignante n’a Ă©tĂ© prise par le lĂ©gislateur. L’industrie est donc libre de placer ou non l’étiquetage sur les emballages.

Le nudge et les sciences du comportement : l’avenir des politiques publiques?, confĂ©rence, mars 2019, sciencespo.fr

Il a crĂ©Ă© en 2010 la Behaviourial Insights Team, un cabinet d’experts se penchant sur les nudges.

La BOX Hypersexualisation

Description selon l’Ă©diteur

Matériel

9 outils qui abordent diffĂ©rentes thĂ©matiques :1) PublisextĂ© : publicitĂ©s sexistes2) Chatroom : phĂ©nomĂšne du sexting3) Miroir, miroir : l’image corporelle. Sept cartes ‘scĂ©narios’ pour diffĂ©rents jeux de rĂŽle4) Le rideau tombe : la pornographie. Jeu mĂ©mory de 22 cartes5) Shop moi : impact des logiciels de retouche de photos6) Distop : harcĂšlement de rue. 16 cartes7) Paroles aux jeunes : EVRAS (Education Ă  la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle)Qui est qui ? : stĂ©rĂ©otypes de genre. 11 cartesUne image vaut mieux que des mots : diffĂ©rents sujets. 20 dessins humoristiquesVision Ă©largie : questions de sociĂ©tĂ©. ClĂ© USB avec plusieurs capsules vidĂ©oGuide pĂ©dagogique

Concept

La BOX est une mallette pĂ©dagogique abordant la thĂ©matique de l’hypersexualisation au sens large. Elle se compose de neuf outils qui abordent diffĂ©rentes thĂ©matiques ainsi qu’un guide pĂ©dagogique qui reprend certains repĂšres thĂ©oriques. Pour chacun des supports, vous trouverez une farde avec une fiche contenant des informations utiles Ă  la mise en place des animations : dĂ©roulement de l’animation, variantes possibles, questions de relance, matĂ©riel nĂ©cessaire, objectifs, etc.Cette BOX s’adresse Ă  tout.e.s les professionnel.le.s qui souhaitent aborder la thĂ©matique de l’hypersexualisation auprĂšs d’un public d’adolescent.e.s.

Objectifs

Identifier et dĂ©construire les messages vĂ©hiculĂ©s dans les mĂ©dias, notamment les stĂ©rĂ©otypes liĂ©s au genre, la rĂ©fĂ©rence Ă  la pornographieDĂ©velopper son esprit critique par rapport aux intentions des mĂ©dias et de la sociĂ©tĂ© de consommation dans laquelle nous Ă©voluonsIdentifier les consĂ©quences de l’hpersexualisation sur son image corporelle et son identitĂ©Renforcer son estime de soiPromouvoir le respect, la responsabilitĂ© envers soi et les autres, le libre choix et l’égalitĂ© dans les relations et les pratiques sexuellesDĂ©velopper une vision positive de la sexualitĂ© et valoriser la diversitĂ© des vĂ©cus et pratiques sexuelles selon sa personnalitĂ© et ses prĂ©fĂ©rences

Bon Ă  savoir

Cet outil a été créé par le Centre de planning familial Infor-Femmes LiÚge, en collaboration avec la FCPPF.Commande via Infor-Femmes ou via la FCPPF

L’avis de Pipsa (www.pipsa.be)

Appréciation globale

L’hypersexualisation, phĂ©nomĂšne omniprĂ©sent et actuel dans notre sociĂ©tĂ©, est questionnĂ©e au travers d’un dossier pĂ©dagogique clair et concis, mettant en lumiĂšre deux de ses dĂ©terminants : le capitalisme et la consommation.Cet outil trĂšs accessible, tant aux adultes qu’aux jeunes, reflĂšte avec rĂ©alisme les difficultĂ©s relationnelles et comportementales de ces pratiques. Au travers des 9 activitĂ©s proposĂ©es (modulables/adaptables selon le groupe), le thĂšme est abordĂ© sous diffĂ©rentes facettes et de maniĂšre globale.Les activitĂ©s questionnent la rĂ©alitĂ© sans jugement, l’implication collective est sollicitĂ©e par le dĂ©bat et la construction du groupe. CrĂ©Ă©es par des professionnels de terrain, militants pour l’égalitĂ©, elles tĂ©moignent de la rĂ©alitĂ© et du vĂ©cu des jeunes.L’outil, riche en crĂ©ativitĂ©, permet de faire vivre l’EVRAS en transversalitĂ© : certaines activitĂ©s peuvent ĂȘtre prises en charge par des acteurs scolaires, d’autant que les fiches sont directement opĂ©rationnelles, claires et efficaces.Une activitĂ© autour de l’identification des jeux de pouvoir et des rapports de domination (indĂ©pendantes du genre), aurait Ă©tĂ© bienvenue dans la mesure oĂč ces questions sont transversales aux thĂ©matiques dĂ©veloppĂ©es par l’outil.

Objectifs

Prendre conscience de ses reprĂ©sentations liĂ©es au genre et la sexualitĂ©Identifier et dĂ©construire les messages vĂ©hiculĂ©s dans les mĂ©dias, notamment les stĂ©rĂ©otypes liĂ©s au genre, la rĂ©fĂ©rence Ă  la pornographieDĂ©velopper son esprit critique par rapport aux intentions des mĂ©dias et de la sociĂ©tĂ© de consommation dans laquelle nous Ă©voluonsIdentifier les consĂ©quences de l’hypersexualisation sur son image corporelle et son identitĂ©

Public cible

A partir de 12 ans

Utilisation conseillée

– Certaines activitĂ©s sont plus accessibles pour 14 ans- Tester le dĂ©roulĂ© des activitĂ©s avant utilisation avec les jeunes- Lire le guide avant les animations pour dĂ©finitions clĂ© (sexting notamment).- La dĂ©marche de dĂ©construction stĂ©rĂ©otype (p.7 du guide) mĂ©rite d’ĂȘtre travaillĂ©e avec les jeunes- Penser Ă  informer les parents : leur fonction est le rappel de la loi.

Points forts

Concis et opĂ©rationnel, rĂ©aliste, accessible, trĂšs soutenant pour l’animateur.

Sujets abordés

Hypersexualisation, image de soi, genre, image corporelle, médias, pornographie.

Complémentarité

La réputation

OĂč trouver l’outil

Chez l’Ă©diteur :FCPPFAvenue Emile de BĂ©co 109 1050 – Ixelles Belgique +32 (0)2 514 61 03 – info@fcppf.behttp://www.fcppf.be – https://www.facebook.com/fcppfInfor-Femmes LiĂšge10 rue TrappĂ© 4000 – LiĂšge Belgique +32 (0)4 222 39 65 – inforfemmesliege@gmail.comhttp://www.inforfemmesliege.beDans les centres de prĂȘt :Centre liĂ©geois de promotion de la santĂ© +32 (0)4 349 51 44 – promotion.sante@clps.behttp://www.clps.beCatalogue : http://www.clps.be/outils-pĂ©dagogiquesCentre local de promotion de la santĂ© en province de Luxembourg +32 (0)84 31 05 04 – clps.lux@skynet.behttp://www.clps-lux.beCatalogue : http://bit.ly/1AfCwMDCEDIF, Centre de Documentation et d’Information (FLCPF) 02 / 502 68 00 – cedif@planningfamilial.nethttp://www.planningfamilial.net/

L’éducation sexuelle Ă  l’école : diversitĂ© des pratiques

En Suisse, l’éducation sexuelle s’est dĂ©veloppĂ©e de maniĂšre diverse et Ă  des rythmes diffĂ©rents en fonction des rĂ©gions. Comme ailleurs en Europe, l’éducation sexuelle Ă  l’école s’est vraiment institutionnalisĂ©e aprĂšs la rĂ©volution sexuelle, lorsqu’il s’est avĂ©rĂ© nĂ©cessaire d’informer les jeunes sur la contraception et le couple. Mais c’est vĂ©ritablement l’arrivĂ©e de l’épidĂ©mie du VIH qui a dĂ©clenchĂ© la gĂ©nĂ©ralisation des cours d’éducation sexuelle dans tous les cantons en Suisse. Aujourd’hui, la situation reste trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšne dans sa mise en Ɠuvre.

SANTÉ SEXUELLE Suisse, l’organisation qui fĂ©dĂšre les centres de conseil en santĂ© sexuelle et services d’éducation sexuelle ainsi que les associations professionnelles concernĂ©es, promeut en Suisse une Ă©ducation sexuelle holistique selon les standards OMS Europe[1]. Elle attache beaucoup d’importance Ă  la qualitĂ© des cours donnĂ©s dans le cadre scolaire, et participe dans ce sens Ă  la formation des professionnel(le)s. Toutefois, sur le terrain, les cours proposĂ©s aux enfants et aux jeunes sont diffĂ©rents d’une rĂ©gion Ă  l’autre, voire d’une Ă©cole Ă  l’autre. Ainsi, en Suisse romande, ce sont des spĂ©cialistes externes en santĂ© sexuelle qui interviennent dans les Ă©coles pour assurer une Ă©ducation sexuelle continue. Ce modĂšle a fait ses preuves depuis plus de 30 ans. Il est trĂšs bien accueilli et apprĂ©ciĂ© par les parents.

En Suisse alĂ©manique, ce sont le plus souvent les enseignant(e)s qui sont responsables de la mise en Ɠuvre de l’éducation sexuelle et de nombreux modĂšles existent, en fonction des Ă©coles ou des enseignant(e)s : ceux proposant des prestations trĂšs complĂštes, mais aussi ceux transmettant seulement le strict minimum, la plupart du temps sous forme de cours de biologie et reproduction, en laissant de cĂŽtĂ© les aspects relationnels et sociaux. Un modĂšle de coopĂ©ration entre le personnel enseignant et le personnel spĂ©cialisĂ© en santĂ© sexuelle serait incontestablement souhaitable et garantirait la qualitĂ© des cours dispensĂ©s. Au Tessin, la partie italophone de la Suisse, les enseignant(e)s sont responsables de l’éducation sexuelle. Ils sont soutenus dans leur tĂąche Ă©ducative par des coachs spĂ©cifiquement formĂ©s. Au secondaire et post-obligatoire, les spĂ©cialistes externes en santĂ© sexuelle interviennent pour complĂ©ter l’éducation Ă  la santĂ© sexuelle.[2]

Tour d’horizon et enjeux de l’éducation sexuelle en Suisse

Le cours d’éducation sexuelle par un(e) spĂ©cialiste en santĂ© sexuelle: une approche interactive et participative

Comme mentionnĂ©, il existe diffĂ©rentes approches pour les cours d’éducation sexuelle Ă  l’école. Nous choisissons ici de dĂ©crire un cours type donnĂ© par un ou une spĂ©cialiste en santĂ© sexuelle, ayant Ă  la fois une formation professionnelle en Ă©ducation sexuelle ainsi qu’une expĂ©rience en la matiĂšre.ConcrĂštement, ce cours d’éducation sexuelle s’intĂšgre dans la vie de l’école : les parents sont informĂ©s par une lettre et conviĂ©s Ă  une sĂ©ance de prĂ©sentation de l’intervention. Les enseignant(e)s sont associĂ©(e)s Ă  la dĂ©marche avant et aprĂšs le cours car leur rĂŽle est fondamental pour que l’intervention se dĂ©roule dans de bonnes conditions. Pour soutenir cette approche de coopĂ©ration, SANTÉ SEXUELLE Suisse dĂ©veloppe des outils d’information pour les parents et les professionnel(le)s (voir la liste sur le site www.sante-sexuelle.ch).

Selon l’ñge des Ă©lĂšves, diffĂ©rentes mĂ©thodes pĂ©dagogiques sont utilisĂ©es, avec ou sans support prĂ©Ă©tabli, et une place importante est donnĂ©e Ă  la discussion de groupe. La rĂ©colte de questions anonymes, avant ou en dĂ©but de cours, est souvent privilĂ©giĂ©e pour les Ă©lĂšves de l’école secondaire car elles leur permettent de poser leurs rĂ©elles demandes sans risque de s’exposer trop personnellement. C’est aussi une maniĂšre pour l’intervenant(e) de savoir oĂč en sont les Ă©lĂšves, ce qui les intĂ©resse et les prĂ©occupe.

L’entrĂ©e en matiĂšre du dĂ©but de cours est fondamentale car l’éducateur/trice ne connaĂźt gĂ©nĂ©ralement pas la classe. Des petits jeux « brise-glace » sont habituellement utilisĂ©s pour permettre de parler trĂšs spontanĂ©ment d’amour, d’amitiĂ©, de sexualitĂ©. Ces exercices offrent aux Ă©lĂšves un espace d’expression assez libre qui permet de poser les Ă©motions ou tensions Ă©ventuelles et de s’ancrer dans le moment. Il permet Ă©galement d’instaurer un rapport de confiance entre l’intervenant(e) et la classe. Ensuite, en fonction des prioritĂ©s et de la classe, diffĂ©rents supports pĂ©dagogiques sont utilisĂ©s : dessins, images, sĂ©quences vidĂ©os, planches anatomiques, objets symboliques, moyens de contraception, brochures, etc.

SANTÉ SEXUELLE Suisse dĂ©veloppe, avec son rĂ©seau partenaire des supports d’information et d’éducation, par exemple des brochures pour les adolescent(e)s (HĂ© les filles HĂ© les gars, Crac crac boum boum), ou des films de tĂ©moignage (Body Talk) permettant de lancer une discussion sur une grande diversitĂ© de thĂ©matiques.

Un accent important est mis sur l’interaction et l’échange, dans une perspective positive de la sexualitĂ© et selon une approche basĂ©e sur les droits humains. Chaque Ă©lĂšve est libre de dĂ©cider dans quelle mesure il/elle veut participer.

L’éducation sexuelle est aussi proposĂ©e aux Ă©lĂšves en situation de handicap, quel que soit leur lieu d’étude ou de vie. Cette Ă©ducation s’appuie sur les mĂȘmes bases que l’éducation sexuelle holistique tout en mettant l’accent sur les besoins spĂ©cifiques et l’écoute de chaque enfant ou jeune.

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L’éducation sexuelle pour les jeunes enfants

SANTÉ SEXUELLE Suisse promeut une Ă©ducation sexuelle dĂšs le plus jeune Ăąge. Chez les enfants en Ăąge prĂ©-scolaire (0-4 ans), l’approche proposĂ©e associe d’abord les parents et les Ă©ducateurs/trices de la petite enfance. A l’exemple du projet proposĂ© par l’Association pour l’Education Familiale du canton de Fribourg, l’éducation sexuelle est avant tout une Ă©ducation familiale oĂč adultes et enfants apprennent ensemble Ă  Ă©changer autour de thĂšmes de l’éducation quotidienne dont la sexualitĂ© fait partie. L’un des principaux dĂ©fis est d’apprendre aux adultes Ă  se mettre Ă  la place des enfants car la sexualitĂ© exprimĂ©e dans la petite enfance n’est souvent sexuĂ©e que dans le regard des adultes. Pour les enfants, la dĂ©couverte du corps est globale. Elle se fait par les sensations, le toucher et les mots, et n’est pas spĂ©cifique aux parties intimes.

L’éducation sexuelle est gĂ©nĂ©ralement intĂ©grĂ©e sous forme de programme dĂšs l’entrĂ©e Ă  l’école. Dans les petits degrĂ©s il s’agit de poser un cadre permettant la socialisation de l’enfant, notamment par l’apprentissage des rĂšgles de vie en sociĂ©tĂ© et des droits de l’enfant. Dans le contexte de la sexualitĂ©, cela se concrĂ©tise par l’apprentissage des diffĂ©rences entre les activitĂ©s qui relĂšvent du domaine privĂ© de celles qui ont leur place en public. Ceci nĂ©cessite une connaissance et un respect de son propre corps ainsi que de ses Ă©motions.

L’enseignement des Ă©motions est une partie importante de la prĂ©vention des abus sexuels. Les enfants apprennent Ă  les reconnaĂźtre, Ă  les exprimer. DĂšs les premiĂšres annĂ©es d’école, l’éducation sexuelle aborde aussi la question des diffĂ©rents modĂšles familiaux et relationnels et travaille avec les enfants sur leurs reprĂ©sentations. Les grands thĂšmes de l’éducation sexuelle comme la reproduction humaine, l’identitĂ© sexuĂ©e et de genre, ou encore les normes sociales sur la sexualitĂ© sont aussi abordĂ©s sous forme d’histoires, de jeux ou encore de dessins.

Les dĂ©fis de demain pour l’éducation sexuelle en Suisse

Les enfants et les jeunes grandissent dans une sociĂ©tĂ© oĂč l’exercice de leurs droits ne va pas de soi (ex. droit Ă  l’intĂ©gritĂ© sexuelle, droit Ă  la vie privĂ©e, droit Ă  l’égalitĂ© pour les personnes en situation de handicap). L’éducation est la meilleure porte d’entrĂ©e pour apprendre les droits et commencer Ă  les exercer. Or, selon une Ă©tude en voie de publication[3], ni les parents, ni l’école dans son ensemble ne dispensent une Ă©ducation tout Ă  fait holistique au sens des standards europĂ©ens de l’OMS.

Sur la base de ce constat, SANTÉ SEXUELLE Suisse a identifiĂ© au moins trois dĂ©fis. L’école devrait dĂ©velopper un programme d’éducation sexuelle holistique basĂ© sur les droits humains en se basant sur l’expertise des spĂ©cialistes en santĂ© sexuelle. Ce programme devrait ĂȘtre mis en Ɠuvre par les spĂ©cialistes en santĂ© sexuelle tout en impliquant de maniĂšre complĂ©mentaire d’autres intervenant(e)s comme, par exemple, l’infirmiĂšr(e) scolaire, l’enseignant(e) de biologie ou l’intervenant(e) en travail social scolaire.

L’ensemble de ces professionnel(le)s devrait aussi se donner l’occasion d’expliquer et de rappeler les droits fondamentaux lorsqu’ils/elles abordent des questions de contraception ou d’interruption de grossesse, rĂšglent l’utilisation du smartphone Ă  l’école ou rĂ©agissent Ă  des injures homophobes. L’éducation sexuelle participe en effet Ă  l’éducation citoyenne et tous les intervenant(e)s scolaires devraient bĂ©nĂ©ficier d’une formation pour assurer la qualitĂ© de leur cours. L’éducation sexuelle devrait faire partie de l’éducation de l’élĂšve au mĂȘme titre que les autres contenus, y compris pour l’élĂšve en situation(s) de handicap.

Qu’ils le souhaitent ou non, les parents sont en premiĂšre ligne dans l’éducation sexuelle. MĂȘme de bonne volontĂ©, ils ne parviennent que difficilement Ă  faire l’éducation sexuelle de leur enfant. Tout comme la sexualitĂ©, l’éducation sexuelle nĂ©cessite un apprentissage. Les parents devraient pouvoir bĂ©nĂ©ficier d’offres Ă  bas seuil oĂč l’on Ă©change sur la sexualitĂ© comme l’on parle d’alimentation ou de gestion des devoirs Ă  domicile. Les pĂšres en particulier devraient prendre une place dans cette Ă©ducation, de laquelle ils sont quasiment absents, selon les Ă©tudes scientifiques. Les enfants et les adolescent(e)s sont les bĂ©nĂ©ficiaires de l’éducation sexuelle mais les parents et les professionnel(le)s ne leur accordent pas souvent la parole pour exprimer leurs besoins sur l’Ă©ducation sexuelle. Si en gĂ©nĂ©ral les approches pĂ©dagogiques des intervenant(e)s externes Ă  l’Ă©cole sont interactives et favorisent la participation des jeunes au cours, l’étude sur l’éducation sexuelle et les droits montre que le droit Ă  la participation est surtout compris comme la participation des parents mais pas celle des adolescent(e)s.

L’approche des droits de l’enfant n’est donc clairement pas appliquĂ©e. Le droit d’ĂȘtre entendu(e)s devrait s’appliquer aux enfants et aux jeunes lors de la conception et de la mise en Ɠuvre des programmes. Ils devraient pouvoir donner leur avis sur les sujets Ă  dĂ©velopper et les approches pĂ©dagogiques. Le principe de participation inscrit dans la Convention des Droits de l’Enfant devrait ĂȘtre appliquĂ© Ă  l’éducation sexuelle. Ceci permettrait de mieux Ă©quilibrer les contenus entre mandat de prĂ©vention et discussion sur des sujets qui prĂ©occupent les Ă©lĂšves au quotidien (ex. identitĂ© et orientation sexuelle, stĂ©rĂ©otypes et sexisme, plaisir et sexualitĂ©, consentement et zone grise, etc.). Ceci permettrait aussi de complĂ©ter les cours d’éducation sexuelle par des approches diffĂ©rentes telles que l’approche par les pairs.


[1] OMS Bureau rĂ©gional pour l’Europe et BZgA (2010/2013 version française), Standards pour l’Ă©ducation sexuelle en Europe, https://www.alliance-educationsexuelle.ch/jt_files/jt_files_filename_0005_1202974180.pdf, consultĂ© le 18.02.2019

[2] Questions rĂ©ponses sur l’éducation sexuelle Ă  l’école auprĂšs des enfants et des jeunes, www.alliance-educationsexuelle.ch, consultĂ© le 18.02.2019

[3] Charmillot, M. (UNIGE), Földhazi, A. (HETS GenĂšve), Jacot-Descombes, C. (SSCH), Kunz, D. (HSLU), Roth, N. (HSLU) (en voie de publication). Parler des droits sexuels Ă  l’école ? Une Ă©vidence, un idĂ©al ou un luxe ? Perceptions et pratiques des parents, des jeunes, des enseignant.e.s et des spĂ©cialistes de l’éducation sexuelle.

[4] Voir par exemple : Barrense-Dias Y., Akre C., Berchtold A., Leeners B., Morselli D., Suris J-C. (2018). Sexual health and behavior of young people in Switzerland. Lausanne: Institut universitaire de médecine sociale et préventive. Zugriff 19.03.2019 : http://dx.doi.org/10.16908/issn.1660-7104/291

[5] Charmillot et al. Op cit.

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« La premiĂšre fois que votre bĂ©bĂ© vous dit « Maman », c’est le plus beau jour de votre vie. Aujourd’hui, ce n’est plus un mot que je suis heureuse d’entendre. « Maman », c’est devenu un mot de torture. »

TĂ©moignage d’un parent Ă©puisĂ©

Quand on devient parent, nombreuses sont les attentes autour de la parentalitĂ©. En gĂ©nĂ©ral, on pense que celle-ci va apporter majoritairement de l’Ă©panouissement et des Ă©motions positives. La sociĂ©tĂ© et l’entourage renforcent cette image biaisĂ©e. Pourtant, la parentalitĂ© est loin d’ĂȘtre un long fleuve tranquille. Elle est un « mĂ©tier » Ă  la fois complexe et stressant. Etre parent, c’est aussi souvent un travail exigeant dont on ne peut jamais dĂ©missionner. Les pĂšres et les mĂšres n’ont jamais Ă©tĂ© aussi conscients du rĂŽle qu’ils jouent dans le dĂ©veloppement de leur enfant. Ils ne se sont jamais autant posĂ© de questions sur « comment ĂȘtre un bon parent ». Jamais dans l’histoire la pression sociale n’a Ă©tĂ© aussi forte envers eux.

Face Ă  ces nombreux dĂ©fis, il peut arriver que les parents craquent. Pour certains, durablement. Ces pĂšres et ces mĂšres se retrouvent en souffrance. Ils sont passĂ©s du stress ordinaire Ă  un Ă©puisement intense dans leur rĂŽle de parent. C’est ce qu’on appelle le burnout parental (BOP).

Face Ă  ce constat, la MutualitĂ© chrĂ©tienne (MC) a souhaitĂ© s’inscrire rĂ©solument dans la voie du soutien Ă  la parentalitĂ©. C’est donc tout naturellement qu’elle a rĂ©pondu favorablement Ă  la demande du DĂ©partement de Psychologie de l’UCLouvain de participer activement Ă  ses Ă©tudes relatives Ă  la prĂ©valence et aux consĂ©quences du BOPNote bas de page. La collaboration UCLouvain/MC s’est ensuite poursuivie via la participation Ă  une recherche visant la prise en charge des parents touchĂ©s par le burnout parental. Cette recherche, qui constitue une premiĂšre mondiale, a pris la forme de cycles d’atelier pour parents en burnout, en huit sĂ©ances animĂ©es par des psychologues. L’objectif Ă©tait de mesurer l’efficacitĂ© de deux protocoles de prise en charge distincts. Nous y reviendrons plus loin dans cet article.

Une collaboration solide entre la MC et l’UCLouvain s’est donc dĂ©veloppĂ©e au fil des annĂ©es autour de trois dimensions du burnout parental : la recherche, le thĂ©rapeutique et la prĂ©vention.

Le burnout parental, c’est quoi ?

Le burnout parental est un syndrome qui touche tous les parents exposés à un stress parental chronique. Il présente plusieurs facettesNote bas de page :

L’épuisement

C’est la facette qui apparaĂźt le plus souvent en premier. Le parent a le sentiment d’ĂȘtre Ă©puisĂ©, vidĂ©, au bout du rouleau. Cet Ă©puisement peut se manifester au niveau Ă©motionnel (sentiment de ne plus en pouvoir), cognitif (impression de ne plus arriver Ă  rĂ©flĂ©chir correctement) et/ou physique (fatigue).

La distanciation affective avec les enfants

Image

Il s’agit probablement d’un mĂ©canisme de dĂ©fense vis-Ă -vis de l’épuisement. Le parent n’a plus l’énergie de s’investir autant qu’avant dans sa relation avec ses enfants : il prĂȘte moins d’attention Ă  ce qu’ils lui racontent ; il accorde moins d’importance Ă  ce qu’ils vivent et ressentent, il fait le minimum pour leur bien-ĂȘtre (trajets, repas, coucher…) mais n’a plus le courage d’en faire plus.

La perte d’efficacitĂ© et d’épanouissement dans son rĂŽle de parent

​Le parent n’en peut plus d’assumer son rĂŽle de pĂšre ou de mĂšre, rĂŽle dans lequel il ne s’épanouit plus. Il a l’impression que ce rĂŽle lui demande « trop » et il ne le supporte plus. Ce n’est pas tant les enfants qui sont directement en cause mais plutĂŽt l’identitĂ© parentale elle-mĂȘme.

Le contraste

Cette autre facette du burnout parental correspond Ă  une prise de conscience : le parent n’est plus le parent qu’il a Ă©tĂ©. Il se sent « diffĂ©rent », Ă  cĂŽtĂ© de lui-mĂȘme. Lorsqu’il interagit avec ses enfants, il ne se reconnaĂźt plus. Il pense qu’il n’est plus le bon pĂšre/la bonne mĂšre qu’il a Ă©tĂ© pour ses enfants. De cette prise de conscience dĂ©coulent honte et perte de fiertĂ©. On retrouve bien l’idĂ©e d’un contraste entre un avant (le parent idĂ©al auquel on a voulu ressembler) et un aprĂšs (le parent Ă©puisĂ©, distant et saturĂ© qu’on est devenu).Notons qu’il n’est pas nĂ©cessaire que toutes les facettes (Ă©puisement, distanciation, saturation et contraste) soient prĂ©sentes pour qu’on parle de burnout parental. Il suffit que 60% des symptĂŽmes soient suffisamment sĂ©vĂšres et frĂ©quents pour qu’on parle identifie de burnout parental. On l’aura compris, chaque histoire de burnout parental est singuliĂšre.

« J’étais Ă©puisĂ©e, j’étais juste incapable de rĂ©pondre aux sollicitations de mon aĂźnĂ©e. La moindre chose Ă  faire me demandait vraiment trop d’énergie et je n’en avais plus. Vraiment plus. J’étais juste en mode survie. »

Facteurs de risque versus Facteurs de protection

Le burnout parental est une maladie du spectre du stress. On peut le considĂ©rer comme le rĂ©sultat d’un dĂ©sĂ©quilibre entre des facteurs de stress spĂ©cifiques Ă  la parentalitĂ© (les stresseurs parentaux) et des ressources incapables de compenser les effets dĂ©lĂ©tĂšres de ces stresseurs (les ressources parentales)Note bas de page.

On distingue cinq catégories de stresseurs :

  1. Stresseurs dĂ©mographiques : le nombre d’enfants, la taille de l’habitation, le manque de revenus

  2. Stresseurs situationnels : liĂ©s Ă  la situation prĂ©sente, ils peuvent ĂȘtre compliquĂ©s par une maladie ou un handicap de l’enfant.
  3. Stresseurs personnels : liés à la personnalité du parent. Les parents perfectionnistes éprouvent plus de difficultés à trouver leur équilibre.
  4. Stresseurs liĂ©s Ă  la relation avec l’enfant : la maniĂšre dont on se comporte avec l’enfant peut augmenter le stress quotidien (Ă©ducation inconsistanteNote bas de page
).
  5. Stresseurs liĂ©s au couple: si les deux parents ne s’accordent pas sur la maniĂšre d’Ă©lever les enfants ou si l’un des deux doit rĂ©guliĂšrement s’absenter


Les Ă©tudes de l’UCLouvain ont montrĂ© que tous les stresseurs/ressources n’avaient pas la mĂȘme importance. Ce sont les stresseurs personnels, ceux liĂ©s Ă  la relation Ă  l’enfant et ceux liĂ©s au couple, qui sont les plus dĂ©terminants pour le burnout, alors que les stresseurs/ressources sociodĂ©mographiques et situationnels ont moins d’importance.

Ces rĂ©sultats sont rassurants car, contrairement Ă  la plupart des facteurs sociodĂ©mographiques et situationnels, les stresseurs personnels, ceux liĂ©s Ă  la relation Ă  l’enfant et ceux liĂ©s au couple, sont des facteurs sur lesquels on peut agir pour Ă©viter le burnout ou en sortir.

En Belgique, la prĂ©valence estimĂ©e des parents en situation de burnout parental est de 5 Ă  8%. Cela signifie qu’à l’heure prĂ©cise de ce rapport, entre 150.000 et 210.000 parents seraient donc concernĂ©s par cette problĂ©matiqueNote bas de page.

Conséquences du burnout parentalNote bas de page

Le burnout parental est avant tout une affaire d’accumulation. Il n’apparaüt pas subitement, mais est davantage un processus, un cercle vicieux.

Le burnout peut avoir des conséquences graves :

  • sur le parent lui-mĂȘme : problĂšmes de santĂ©, addictions, intentions suicidaires… Par comparaison avec le burnout professionnel, on retrouve beaucoup plus d’idĂ©es suicidaires et d’envies de fuir en cas de burnout parental. sur le couple : irritabilitĂ©, augmentation des conflits…
  • sur la relation parent-enfant : augmentation des comportements de nĂ©gligence et de violence Ă  l’encontre des enfants. Le burnout parental multiplie par 13 le risque de nĂ©gliger ses enfants et par 20 le risque de les violenter (en comparaison, le burnout professionnel multiplie ces risques de 1.3 concernant la nĂ©gligence et de 0.6 concernant la violence).

Et, gĂ©nĂ©ralement, la personne qui en est victime se sent trĂšs coupable. Les consĂ©quences et les symptĂŽmes prĂ©sentĂ©s ne sont pas prĂ©sents chez tous les parents. A noter Ă©galement que c’est le contraste qui importe. Par exemple, un parent qui a toujours Ă©tĂ© nĂ©gligent, colĂ©rique ou violent n’est pas en burnout parental.

Dans ce contexte, le dĂ©veloppement d’interventions ciblĂ©es et efficaces pour soutenir les parents en burnout devient prioritaire. C’est Ă  ce besoin que vise Ă  rĂ©pondre la prise en charge spĂ©cifique que nous aborderons plus loin dans cet article.

Comment agir face au burnout parental ?

Le burnout parental se combat, d’une part, via la sensibilisation/la prĂ©vention et, d’autre part, par une prise en charge spĂ©cifique.

C’est parce que ces deux aspects sont complĂ©mentaires que le partenariat MC – UCLouvain est si pertinent, si porteur de sens. La combinaison de ces deux niveaux d’action permet une approche globale du problĂšme.

Avant toute intervention : la sensibilisation et la prévention

Comment combattre quelque chose qui n’est pas reconnu, pas identifiĂ© ? Comment savoir si on est malade quand la maladie n’est pas nommĂ©e ? Une premiĂšre Ă©tape consiste donc Ă  lever le voile sur la problĂ©matique du burnout parental et de la porter Ă  la connaissance du grand public et des professionnels de la santĂ©. Pour Ɠuvrer Ă  cette tĂąche, les deux institutions ont joint leurs forces.

La MC a mis sur pied en 2015 un vaste programme autour du bien-ĂȘtre psychologique intitulĂ© « je pense aussi Ă  moi », mettant en avant la nĂ©cessitĂ© de prĂ©server un espace de bien-ĂȘtre personnel, un Ă©quilibre entre tous les rĂŽles que chacun est amenĂ© Ă  jouer dans sa vie, et notamment le rĂŽle de parents parents. Ainsi, dans le cadre de ce projet, nous avons mobilisĂ© des experts du bien-ĂȘtre mental pour sensibiliser, dans un premier temps, la population globale et, dans un second temps, spĂ©cifiquement les parents Ă  se questionner sur leur rĂ©alitĂ© quotidienne.

L’UCLouvain nous a alors apportĂ© son expertise de recherche et dĂ©montrĂ© statistiquement, pour la premiĂšre fois, l’existence et la prĂ©valence du burnout parental en Belgique. Ceci nous a permis d’énoncer des messages spĂ©cifiques de sensibilisation Ă  l’égard des parents, au travers de plusieurs outils: site internet, rĂ©seaux sociaux, cartes postales, Ă©vĂ©nements
Nous avons poursuivi notre collaboration pour mettre en place des actions prĂ©ventives Ă  destination des parents :

  • des confĂ©rences avec Isabelle Roskam et MoĂŻra Mikolajczak portant sur les dĂ©fis de la parentalitĂ© et le risque de burnout parental dans la partie francophone et germanophone du pays (plus de 900 personnes ont assistĂ© Ă  ces confĂ©rences) ;
  • des ateliers ciblĂ©s « familles » permettant de faire face Ă  des situations difficiles pouvant plonger les parents dans le burnout : gestion des Ă©motions, enfants difficiles, relations parent-enfant
;
  • la publication d’un carnet de bord pour les parents, avec une large contribution d’Isabelle Roskam, sur les « ficelles » du mĂ©tier de parents et les piĂšges Ă  Ă©viter ;
  • un site internet avec des contenus ciblant le burnout parental, et des solutions concrĂštes pour ne pas s’y enliser (www.jepenseaussiamoi.be) + un site internet dĂ©diĂ© au burnout parental (www.burnoutparental.com)
  • des Ă©missions radios et des passages tĂ©lĂ©visĂ©s pour les chercheuses de l’UCL, avec des questions de parents en direct.

La prise en charge des parents en détresse

Le deuxiĂšme volet consiste Ă  apporter directement de l’aide aux parents en Ă©puisement. Comme dit plus haut, actuellement en Belgique, cette rĂ©alitĂ© est celle de 5 Ă  8% des parents.

Une prise en charge spécifique pour le burnout parental : premiÚres avancées au niveau mondialNote bas de page !

Au vue de l’importance et de l’urgence des demandes d’aide autour de la problĂ©matique du burnout parental, les chercheuses ont souhaitĂ© Ă©tudier une prise en charge spĂ©cifique et tester l’efficacitĂ© de prises en charge de groupes. Il s’agit d’une premiĂšre mondiale sur le sujet. Des groupes d’accompagnement pour parents en burnout ont Ă©tĂ© proposĂ©s gratuitement en Wallonie et Ă  Bruxelles entre fĂ©vrier et juin 2018.

Cette Ă©tude a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e grĂące Ă  la collaboration entre L’UCLouvain et la MC.Sur base des recherches menĂ©es sur le vĂ©cu et les facteurs de risque du burnout parental, deux types d’interventions de groupeNote bas de page ont Ă©tĂ© proposĂ©es :

  • Une intervention qu’on pourrait appeler « intervention structurĂ©e », plus directive, dĂ©veloppĂ©e sur la base du modĂšle Ă©tiologique du burnout parental, la balance des risques et des ressources. Le burnout parental rĂ©sulte en effet d’un dĂ©sĂ©quilibre entre les facteurs qui augmentent le stress parental (= risques) et les facteurs qui le diminuent (= ressources). L’objectif de l’intervention est de rĂ©Ă©quilibrer leparent en allĂ©geant les stresseurs et/ou en optimisant les ressources.
  • Une intervention appelĂ©e « intervention de type groupe de parole », plus libre, dans laquelle les intervenants adressent aux parents des questions ouvertes afin de leur permettre d’extĂ©rioriser leur souffrance, de mieux la comprendre et la soulager avec l’aide du groupe. Dans ce cas-ci, l’objectif est de favoriser la conscientisation des parents, de les amener Ă  trouver leurs propres solutions : « les parents savent, mais ils ne savent pas qu’ils savent ».

Les deux interventions ont exactement les mĂȘmes caractĂ©ristiques formelles : elles se dĂ©veloppent en 8 sĂ©ances d’une durĂ©e de 2 heures environ, une fois par semaine, en groupe de 12-15 parents, animĂ©es par des psychologues spĂ©cifiquement formĂ©s.

MĂ©thodologie

L’objectif principal de l’étude Ă©tait de tester l’efficacitĂ© de prises en charge de groupe dans les cas de burnout parental. Pour ce faire, le travail de prĂ©paration et collecte des donnĂ©es s’est dĂ©roulĂ© en plusieurs Ă©tapes :

1. Formation des intervenants : une Ă©quipe de 22 psychologues a Ă©tĂ© formĂ©e aux deux types d’intervention par l’équipe de l’UCL (Isabelle Roskam, MoĂŻra Mikolajczak et Maria Elena Brianda).

2. Actions d’information et sensibilisation du grand public autour du burnout parental et de cette initiative.

3. Recrutement des participants : les parents intĂ©ressĂ©s se sont inscrits aux groupes via un formulaire en ligne. Les seuls critĂšres d’inclusion Ă©taient avoir au moins un enfant vivant encore au domicile et ressentir les symptĂŽmes principaux de l’épuisement parental.

4. RĂ©alisation des groupes et collecte des donnĂ©es : 14 groupes ont Ă©tĂ© finalement animĂ©s (8 interventions « structurĂ©es » et 6 interventions de type « groupe de parole »). Tous les participants ont complĂ©tĂ© un protocole d’évaluation avant le dĂ©but de la prise en charge (temps 1), immĂ©diatement aprĂšs (temps 2) et trois mois aprĂšs la fin des sĂ©ances (temps 3). L’évaluation a consistĂ© en la prise des mesures suivantes :

  • des mesures auto-rapportĂ©es par questionnaire (telles que la sĂ©vĂ©ritĂ© des symptĂŽmes de burnout parental, les comportements de nĂ©gligence et violence Ă  l’égard des enfants
) ;
  • des mesures auto-rapportĂ©es par enregistrements (le parent est invitĂ© Ă  parler pendant 5 minutes de sa parentalitĂ© et pendant 5 minutes de son travail) ;
  • des mesures hĂ©tĂ©ro-rapportĂ©es par le conjoint ou un proche (sĂ©vĂ©ritĂ© perçue des symptĂŽmes de burnout parental, irritabilitĂ©) ;
  • des mesures biologiques (analyse des niveaux de cortisol capillaire, qui permet de mesurer le stress accumulĂ© au cours des trois derniers mois).

Des résultats éloquents

La prĂ©sentation des rĂ©sultats de cette Ă©tude se focalise essentiellement sur les effets des deux types d’interventions proposĂ©es sur le niveau du burnout parental des participants et la frĂ©quence des comportements de nĂ©gligence et de violence envers les enfants.

Analyse du groupe contrĂŽle de type « liste d’attente »

Par l’observation du groupe contrĂŽle, nous pouvons vĂ©rifier si le niveau de burnout parental et la prĂ©sence de comportements de nĂ©gligence et de violence se modifient spontanĂ©ment avec le temps, en l’absence de l’intervention, au cours d’une pĂ©riode de 8 semaines (ce qui correspond Ă  la durĂ©e des groupes d’accompagnement proposĂ©s dans le cadre de cette Ă©tude). Les rĂ©sultats sur un Ă©chantillon de 40 parents montrent qu’en l’absence d’intervention, les niveaux de burnout parental, de nĂ©gligence et de violence restent stables entre les deux temps de mesure : les symptĂŽmes ne se rĂ©duisent pas spontanĂ©ment avec le temps.

Analyses des effets des interventions de groupe sur le niveau de burnout parental

Les changements des niveaux de burnout parental entre le temps 1 (juste avant le début des groupes) et le temps 2 (immédiatement aprÚs la fin des groupes), dans le cadre des deux différentes interventions (« structurée » et « groupe de parole ») ont été analysés.

  • Chez les parents qui ont participĂ© aux groupes d’intervention de type « groupe de parole », les symptĂŽmes du burnout parental rĂ©gressent de 22.67% (rĂ©duction significative du score moyen au questionnaire d’évaluation du burnout parental, qui passe de 84.21 Ă  65.12, c’est-Ă -dire en dessous du seuil clinique du burnout parental).
  • Chez les parents qui ont participĂ© aux groupes d’intervention « structurĂ©e », les symptĂŽmes du burnout parental rĂ©gressent de 32.42% (rĂ©duction significative du score moyen qui passe de 89.85 Ă  60.72, c’est-Ă -dire en dessous du seuil clinique du burnout parental).
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Analyses des effets des interventions de groupe sur les comportements de négligence et de violence envers les enfants

La présence de comportements de négligence et violence envers les enfants au temps 1 (juste avant le début des groupes) et au temps 2 (immédiatement aprÚs la fin des groupes), dans le cadre des deux différentes interventions (« structurée » et « groupe de parole ») ont été analysés.

  • Les comportements de nĂ©gligence diminuent significativement entre les temps 1 et 2 dans les deux types d’intervention. Plus en dĂ©tail, les parents qui ont suivi l’intervention de type « groupe de parole » montrent une rĂ©duction des comportements de nĂ©gligence de 21.49% (rĂ©duction significative du score moyen qui passe de 23.17 Ă  18.19 ; chez les parents qui ont suivi l’intervention « structurĂ©e » on observe une rĂ©duction lĂ©gĂšrement supĂ©rieure de 24.92% (le score moyen passe de 22.23 Ă  16.69).
  • De mĂȘme, les comportements de violence diminuent significativement entre les temps 1 et 2 dans les deux types d’intervention. Plus en dĂ©tail, les parents qui ont suivi l’intervention de type « groupe de parole » montrent une rĂ©duction des comportements de violence de 23.08% (le score moyen de violence envers les enfants passe de 21,79 Ă  16,76) ; chez les parents qui ont suivi l’intervention « structurĂ©e » on observe une rĂ©duction lĂ©gĂšrement supĂ©rieure de 28.2% (le score moyen passe de 21.56 Ă  15.48 ).
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Analyses des effets des interventions de groupe sur le long terme

Nous avons invitĂ© les participants Ă  complĂ©ter une derniĂšre fois le protocole d’évaluation trois mois aprĂšs la fin des sĂ©ances (temps 3), afin de vĂ©rifier si les effets observĂ©s immĂ©diatement aprĂšs la fin de l’intervention (temps 2) se maintiennent sur le long terme. 67 parents ont acceptĂ© de remplir les mesures demandĂ©es au temps 3 .

  • Le niveau du burnout parental des participants continue Ă  dĂ©croĂźtre significativement jusqu’au temps 3, dans les deux types d’intervention : par rapport Ă  la ligne de base, on observe une rĂ©duction du niveau de burnout parental de 27.56% au temps 2 et de 37.64% au temps 3. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, on observe une rĂ©duction plus marquĂ©e entre le temps 2 et le temps 3 pour les parents qui ont suivi l’intervention de type « groupe de parole » par rapport Ă  l’intervention « structurĂ©e ».
  • La prĂ©sence de comportements de nĂ©gligence envers les enfants continue Ă  dĂ©croĂźtre significativement jusqu’au temps 3, mais seulement auprĂšs des parents qui ont suivi l’intervention de type « structurĂ©e ». La chute des comportements de nĂ©gligence envers les enfants s’interrompt entre le temps 2 et le temps 3 chez les parents qui ont suivi l’intervention de type « groupe de parole ». Au contraire, pour les parents faisant partie des groupes d’intervention « structurĂ©e », le score de nĂ©gligence envers les enfants continue Ă  baisser : on observe une rĂ©duction de 27.62% au temps 2 qui devient de 36.56% des symptĂŽmes au temps 3.
  • La prĂ©sence de comportements de violence envers les enfants continue Ă  dĂ©croĂźtre significativement jusqu’au temps 3, dans les deux types d’intervention : par rapport Ă  la ligne de base, on observe une rĂ©duction des comportements maltraitants de 24.20% au temps 2 et de 28.64% au temps 3.
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Des suites déjà prévues

Forte de ces avancĂ©es, l’UCLouvain souhaite Ă©valuer l’efficacitĂ© d’un programme amĂ©liorĂ© d’accompagnement pour parents en burnout. La MC a donc tout naturellement souhaitĂ© se mobiliser autour de cette nouvelle recherche. Ainsi, 6 nouveaux cycles de prise en charge pour parents en burnout seront proposĂ©s, dans ces 4 rĂ©gions : Bruxelles, Brabant-Wallon, Namur et Hainaut. Les parents peuvent s’inscrire gratuitement sur www.mc.be/burnout-parent. Les rĂ©sultats seront attendus pour la fin de l’annĂ©e 2019.

Qui prend en charge les parents ?

Maintenant que nous savons que les protocoles de prise en charge fonctionnent, se pose lĂ©gitimement la question du « qui ». Quels professionnels sont en mesure de comprendre la dĂ©tresse des parents et de les aider Ă  retrouver leur Ă©quilibre ?La problĂ©matique du burnout parental Ă©tant assez neuve, il s’avĂšre nĂ©cessaire de sensibiliser d’une part, et de former d’autre part les professionnels qui entourent les parents.

Des conférences pour sensibiliser, des formations pour développer le réseau

Pour relever le dĂ©fi, les Ă©quipes de la MCont contactĂ© les professionnels de leur rĂ©gion afin d’attirer leur attention sur la problĂ©matique : mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes, ONE, sages-femmes, travailleurs sociaux, SAJ (Services de l’Aide Ă  la Jeunesse), pĂ©diatres, et bien entendu psychologues et psychiatres, et bien d’autres encore ont Ă©tĂ© invitĂ©s Ă  6 confĂ©rences sur la thĂ©matique du burnout parental, dispensĂ©es par MoĂŻra Mikolajczak, Isabelle Roskam et Maria-Elena Brianda. Ce ne sont pas moins de 500 professionnels qui ont ainsi Ă©tĂ© sensibilisĂ©s et informĂ©s au cours de ce mois de dĂ©cembre 2018.

Toujours dans le mĂȘme esprit de synergie des formations certifiĂ©es seront organisĂ©es au printemps 2019. Elles permettront la constitution d’un panel de professionnels formĂ©s Ă  la dĂ©tection et Ă  la prise en charge du burnout parental dans chaque rĂ©gion, y compris dans les centres de planning et dans les centres de santĂ© mentale (structures plus accessibles d’un point de vue financier).

  • Pour les professionnels dits de « premiĂšre ligne » (psys, AS, mĂ©decins, sages-femmes, Ă©ducateurs, puĂ©ricultrices, accueillantes d’enfants.
), il s’agira de repĂ©rer les parents et de les orienter.
  • Pour les professionnels dits de « deuxiĂšme ligne » (psychologues et psychothĂ©rapeutes), il s’agira de s’outiller pour prendre en charge le burnout parental.

Ces formations seront assurĂ©es par les Ă©quipes de l’UCLouvain et donneront accĂšs Ă  une certification. Les inscriptions sont d’ores et dĂ©jĂ  ouvertes (www.mc.be/burnout-parent), et plus de 50 professionnels ont dĂ©jĂ  manifestĂ© leur intĂ©rĂȘt Ă  ĂȘtre formĂ©s.

Conclusions

Cette Ă©tude, est la premiĂšre Ă©tude au monde visant l’efficacitĂ© d’une prise en charge spĂ©cifique pour le burnout parental. Le burnout parental Ă©tant un syndrome spĂ©cifique (diffĂ©rent du stress parental, de la dĂ©pression et du burnout professionnel), avec des consĂ©quences spĂ©cifiques (notamment l’apparition de comportements de nĂ©gligence et violence envers les enfants), il est nĂ©cessaire de concevoir des accompagnements ciblĂ©s pour rĂ©duire ses symptĂŽmes.

Les rĂ©sultats indiquent que les interventions de groupe conçues dans le cadre de cette Ă©tude rĂ©duisent significativement les symptĂŽmes du burnout parental, ainsi que l’apparition de comportements de nĂ©gligence et violence envers les enfants, plus particuliĂšrement encore dans le cas de l’intervention que nous avons appelĂ©e « structurĂ©e ». Ces effets positifs ont Ă©tĂ© constatĂ©s immĂ©diatement aprĂšs la fin des 8 sĂ©ances de l’accompagnement et ils tendent Ă  augmenter au fil du temps, pour les deux types d’intervention.

La MC, via son service de promotion de la santĂ©, poursuit le travail de soutien Ă  la parentalitĂ©. Cette prĂ©vention a un impact primordial sur la santĂ©. Elle agit comme un rempart contre la nĂ©gligence et la maltraitance Ă  l’égard des enfants, et impacte positivement les parents souffrant de burnout. En effet, le diagnostic rapide et un accompagnement adĂ©quat peut permettre de prĂ©venir le suicide, la consommation d’alcool, les problĂšmes de sommeil, etc.

Dans un premier temps, le rĂŽle de la MC a Ă©tĂ© essentiellement d’informer, de faire parler du sujet et de sensibiliser la sociĂ©tĂ© et plus spĂ©cifiquement les parents au burnout sur base des connaissances accumulĂ©es. L’objectif est bien de lever le tabou, mettre des mots sur la souffrance et lĂ©gitimer auprĂšs des parents la demande d’aide. Ce travail constitue la trame de fond et est toujours d’actualitĂ©, mĂȘme si le dialogue est dĂ©sormais plus ouvert sur le burnout parental.

Dans un second temps, la MC a tenu Ă  endosser son rĂŽle de partenaire santĂ© de rĂ©fĂ©rence auprĂšs des professionnels pour, lĂ  aussi, amĂ©liorer la prĂ©vention et la promotion de la santĂ©. Cela s’est traduit, d’une part, par la mise en place des confĂ©rences pour informer et sensibiliser les professionnels/prestataires. Et d’autre part, par la mise en place des formations certifiĂ©es au printemps 2019, qui permettront la constitution d’un panel de professionnels formĂ©s Ă  la dĂ©tection et Ă  la prise en charge du burnout parental en Wallonie et Ă  Bruxelles.

Retrouvez le projet Je pense aussi Ă  moi de la MutualitĂ© ChrĂ©tienne sur le site http://www.jepenseaussiamoi.be/ ou dans le numĂ©ro 341 d’Education SantĂ© https://educationsante.be/article/je-pense-aussi-a-moi-des-outils-pour-ne-pas-soublier/

 

Travaux de recherches des docteures et professeures Isabelle Roskam et MoĂŻra Mikolajczak.

Pourquoi opter pour un dispositif de groupe ? Celui-ci a une fonction de « normalisation » et de « soulagement » de la souffrance, par la prĂ©sence d’autres parents dans la mĂȘme situation.

Brianda M-E., Mikolajczak M., Roskam I., Une prise en charge spécifique pour le burn-out parental. PremiÚre étude au monde sur le sujet. Louvain-la-Neuve, 2018.

Mikolajczak M., Roskam I., Le burn-out parental. Comprendre, diagnostiquer et prendre en charge, Louvain-la-Neuve, 2018.

Il est important de noter que cette prĂ©valence[5] de 5 Ă  8% est calculĂ©e sur un temps « T » dĂ©fini, mais en rĂ©alitĂ©, il semblerait qu’au moins 15 Ă  20% des parents soient en difficultĂ© Ă  un moment de leur parentalitĂ©.

« Ça veut dire que certains jours, vous dites oui pour quelque chose et d’autres jours, le contraire. Cela augmente les demandes et donc le stress parce que l’enfant comprend que si il insiste, il peut obtenir ce qu’il veut ». – http://www.jepenseaussiamoi.be/

Mikolajczak M., Roskam I., Le burn-out parental. Comprendre, diagnostiquer et prendre en charge, Louvain-la-Neuve, 2018.

Mikolajczak M., Roskam I., Le burn-out parental. Comprendre, diagnostiquer et prendre en charge, Louvain-la-Neuve, 2018.

Pour le ComitĂ© de Pilotage des Rencontres « Ensemble pour la santĂ© – Samen voor gezhondheid », http://www.samenvoorlasante.be

Dans le numĂ©ro 340 d’Education SantĂ©, Manon Gobeaux est l’auteure d’un article faisant suite aux Rencontres ‘Ensemble pour la santĂ©’, organisĂ©es les 1ier et 2 dĂ©cembre 2017.

L’objectif gĂ©nĂ©ral de ces Rencontres Ă©tait de « promouvoir les actions locales et participatives sur les dĂ©terminants sociaux de la santĂ© afin d’amĂ©liorer la santĂ© des populations et de rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©. » De leur organisation jusqu’à leur Ă©valuation, ces Rencontres Ă©taient placĂ©es sous le signe de la participation d’acteurs de la santĂ©, qu’ils soient professionnels – politiques – citoyens (Retrouvez plus de contenu sur l’évaluation dans l’article d’Estelle Georgin et de Chantal Vandoorne dans le numĂ©ro 353).

Outre le fait que la participation soit la thĂ©matique des Rencontres, il s’agissait de la considĂ©rer comme une fin en soi, c’est-Ă -dire de voir dans le processus participatif un intĂ©rĂȘt tout aussi important que le rĂ©sultat final, Ă  savoir l’émergence d’un corpus de connaissances partagĂ©es. Ces deux aspects sont reflĂ©tĂ©s dans la conclusion de l’article de Manon Gobeaux: « [
] ce n’est pas tant l’apport de nouvelles connaissances qui a marquĂ© cette premiĂšre Ă©dition d’ « Ensemble pour la santĂ© » mais bien la prise de conscience de l’importance du processus en lui-mĂȘme ! ».

Un an aprĂšs, nous revenons sur ces Rencontres par le biais d’une mindmap, co-construite lors d’un des ateliers de l’évĂšnement, dont nous souhaitons mettre en avant le processus de construction ainsi que son contenu. L’atelier en question visait Ă  rĂ©flĂ©chir et Ă  Ă©changer sur les conditions au dĂ©veloppement d’actions locales, participatives et citoyennes.

Pour rĂ©flĂ©chir cette question, l’ensemble des participant(-es) a Ă©tĂ© rĂ©parti en groupes d’une dizaine de personnes. Dans chaque groupe, 2 personnes Ă©taient des « contributeurs/contributrices », c’est-Ă -dire des reprĂ©sentant(-es) d’actions locales et participatives menĂ©es sur le terrain belge.

Dans un premier temps, les contributeurs/contributrices ont partagé leur expérience à leur groupe, ils ont expliqué en quoi consiste leur action, comment elle est née, pour qui et par qui elle est menée, etc.

Dans un deuxiĂšme temps, sur base de l’expĂ©rience de ces deux initiatives et de l’expĂ©rience des personnes, chaque groupe Ă©tait invitĂ© Ă  trouver des rĂ©ponses aux trois questions suivantes :

  • Quels sont les points communs entre les deux initiatives prĂ©sentĂ©es ?
  • Quels sont les leviers Ă  la mise en place d’initiatives locales et participatives ?
  • Quels sont les freins Ă  la mise en place d’initiatives locales et participatives ?

La consigne Ă©tait d’inscrire les rĂ©ponses sur des post-it de couleur (bleu pour les points communs, vert pour les leviers et jaune pour les freins) qui allaient ensuite ĂȘtre reportĂ©es et organisĂ©es sur une toile par un animateur en intelligence collective[1]. Cette animation a permis d’aboutir Ă  la mindmap ci-dessous. Les Ă©lĂ©ments qui la composent ont donc Ă©tĂ© proposĂ©s par les 150 participant(es).

Cette forme d’animation a Ă©tĂ© bĂ©nĂ©fique Ă  plusieurs Ă©gards et fait l’objet d’une analyse pointue dans le rapport d’évaluation de l’APES-ULG[2].

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photographie de la mindmap aprĂšs l’Ă©vĂšnement

Quelque temps aprĂšs l’évĂšnement, un groupe de travail au sein des organisateurs des Rencontres a ressorti la toile et s’est penchĂ© sur sa traduction graphique pour en faire un outil interactif par lequel diffuser les rĂ©sultats des Ă©changes aux participant(-es), mais plus largement aussi, Ă  toutes personnes dĂ©sireuses d’ĂȘtre acteurs/actrices du changement. Ce travail impliquait aussi de se plonger dans le contenu de la mindmap et d’en faire Ă©merger des constats.

Pour ce faire, nous avons travaillĂ© avec un graphiste et un informaticien. Nous leur apportions le contenu et ils le mettaient en action. Ainsi, la mindmap a vu le jour sur l’internet 2.0. Le principe est simple : lorsque l’on passe sa souris sur les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments du dessin, le contenu des post-it apparait. Mais, pour garantir la lisibilitĂ© de la mindmap, il a fallu regrouper les post-it en catĂ©gories en fonction du dessin de fond. Ce dernier, imaginĂ© par l’animateur en intelligence collective simultanĂ©ment Ă  la rĂ©ception des post-it, a quant Ă  lui Ă©tĂ© redessinĂ© graphiquement (Ă  l’identique) comme on le voit sur l’illustration ci-dessous.

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Que nous dit la mindmap sur les freins et leviers au dĂ©veloppement d’actions locales et participatives ?

D’abord, qu’au commencement, un certain nombre de facteurs peuvent venir freiner la participation des individus Ă  des actions collectives : pour participer il faut se comprendre et donc, parler la mĂȘme langue ; il faut avoir la volontĂ© de participer et se sentir en confiance ; il faut avoir les informations, et puis il faut comprendre l’intĂ©rĂȘt des actions locales et participatives. En rĂ©ponse Ă  ces freins, des leviers ayant trait Ă  une posture individuelle ont Ă©tĂ© identifiĂ©s : s’engager, s’investir, ĂȘtre motivĂ©, croire en, ĂȘtre tenace


A l’analyse de la mindmap, on tombe Ă  plusieurs reprises sur un post-it qui renvoie Ă  une question bien connue de toutes et tous : comment susciter la participation des publics prĂ©caires, comment les atteindre ? Les leviers relevĂ©s par les participant(-es) ? CrĂ©er des espaces collectifs de proximitĂ©, encourager la mixitĂ© dans les groupes collectifs, faire preuve de flexibilitĂ© et de tĂ©nacitĂ©, poser un cadre qui favorise la confiance et le respect, prendre le temps de la participation, dĂ©velopper des actions autour de rĂ©seaux. Un grand nombre de freins fait rĂ©fĂ©rence aux aspects financiers des actions locales et participatives ainsi qu’au cadre institutionnel et politique dans lequel elles s’inscrivent. Les leviers existent pour les surpasser : adopter une vision globale de la santĂ©, ne plus travailler en silo, penser Ă  la santĂ© dans toutes les politiques, etc.

Il ne s’agit lĂ  que de quelques tendances parmi les Ă©lĂ©ments apportĂ©s par les participant(es). Pour parcourir la mindmap et ainsi en savoir davantage sur le contenu des Ă©changes, nous vous invitons Ă  vous rendre sur le site des Rencontres « Ensemble pour la SantĂ© » : http://www.samenvoorlasante.be/fr/mindmap/

La transformation d’un brainstorming semi-Ă©crit Ă  un outil de connaissances partagĂ©es, est un processus enrichissant pour remettre en perspective le contenu. La diffusion de cet outil permet aussi de faire Ă©cho aux Ă©changes au-delĂ  de l’évĂšnement. La question Ă  se poser maintenant est comment faire Ă©voluer cet outil, et surtout les rĂ©flexions qui en sont l’objet ? Le comitĂ© de pilotage se penche actuellement sur les suites Ă  donner aux Rencontres.


[1] Pour l’animation de l’évĂšnement, les organisateurs ont fait appel Ă  deux associations : Collectiv-a et Periferia.

Sélection de ressources « Genre et promotion de la santé »

Ouvrages

« La Tyrannie du genre »

« Un dĂ©guisement de princesse et un aspirateur pour les filles, un chĂąteau fort et une voiture radiocommandĂ©e pour les garçons
 On pourrait penser qu’un choix de jouets aussi stĂ©rĂ©otypĂ© appartiendrait au passĂ©. Il n’en est rien. Une sexualisation de plus en plus marquĂ©e s’observe dans l’éducation comme dans tous les domaines de la vie sociale. Ces traitements diffĂ©renciĂ©s ne sont pas systĂ©matiquement perçus comme des inĂ©galitĂ©s. Ils sont justifiĂ©s par des croyances en des distinctions essentielles, d’ordre « naturel », entre femmes et hommes. Un ensemble de discours psychologisants, de normes et de symboles en dĂ©coule, qui a des consĂ©quences multiformes sur les rĂŽles assignĂ©s Ă  chacun et chacune. Alors que la notion de genre a Ă©tĂ© promue par les sociologues pour rĂ©vĂ©ler les rapports de domination, l’invoquer Ă  tout propos, qu’il s’agisse de fĂ©miniser la langue ou de prĂŽner la paritĂ©, instille l’idĂ©e que femmes et hommes sont toujours, partout et avant tout, non des personnes uniques mais des prototypes de leur groupe de sexe. »

  • DURU-BELLAT M., La Tyrannie du genre, Paris, Presses de Sciences Po, 2017, 308 p.
  • Disponible Ă  la BibliothĂšque des sciences Ă©conomiques, sociales, politiques et de communication de l’UCL Ă  Louvain-la-Neuve.

« Partager la ville, Genre et espace public en Belgique francophone »

« La question du sexisme dans l’espace public occupe le devant de la scĂšne politique et mĂ©diatique. On sait toutefois peu de choses sur la situation en Belgique francophone. Cet ouvrage pionnier offre un regard inĂ©dit sur la situation en FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles. Loin de se cantonner Ă  la question du harcĂšlement sexiste, il analyse comment femmes et hommes expĂ©rimentent l’espace public diffĂ©remment. Il relate aussi plusieurs expĂ©riences de terrain visant Ă  un meilleur partage de l’espace public. »

  • Sacco, M. Paternotte, D. Partager la ville, Genre et espace public en Belgique francophone, Louvain-La-Neuve, L’harmattan Academia, 2018, 202 p.
  • Disponible Ă  la BibliothĂšque des Sciences Humaines, Sciences sociales et politiques de l’ULB.

« Les stĂ©rĂ©otypes de genre nuisent Ă  la santĂ© des femmes
 et des hommes »

« En matiĂšre de santĂ©, femmes et hommes ne sont pas logĂ©s Ă  la mĂȘme enseigne. Le livre coĂ©crit par Catherine Vidal et Muriel Salle « Femmes et santĂ©, encore une affaire d’hommes ? » (Ă©dition Belin) se donne l’objectif de tordre le cou aux idĂ©es reçues, chez les soignants comme chez les patients, sur la santĂ© des femmes et des hommes. L’article proposĂ© ici en prĂ©sente un extrait. Les chiffres de l’infographie et le quiz sont Ă©galement tirĂ©s de l’ouvrage. Les vidĂ©os qui illustrent les propos ont Ă©tĂ© coproduites par l’Inserm, le CNRS et l’universitĂ© Paris Diderot. »

Revues, numéros thématique de revue, articles


La revue « Genre, sexualité & société »

Cette revue francophone Ă  comitĂ© de lecture, consacrĂ©e Ă  la sexualitĂ© et aux questions de genre, a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e en 2009 par un groupe de jeunes chercheur-e-s en sciences humaines et sociales. La revue se revendique comme un espace de dialogues et d’échanges, ouverte Ă  diffĂ©rentes approches disciplinaires.

« Le genre, représentations et réalités »

« L’intrication « sexe et sociĂ©tĂ© » traverse l’actualitĂ© dans ses institutions : famille, mariage, filiation, parentalitĂ©, Ă©cole, Ă©glise, entreprise, partis politiques. Le genre, comme systĂšme de reprĂ©sentation sociale du masculin et du fĂ©minin, fait de la diffĂ©rence anatomique des sexes le marqueur selon lequel une sociĂ©tĂ© ordonne et hiĂ©rarchise ce que l’on est censĂ© ĂȘtre ou faire afin d’ĂȘtre reconnu en tant qu’homme ou femme dans les Ă©tapes de la vie et les domaines d’expĂ©rience, assignant rĂŽles et formes autorisĂ©es comme faits de nature, et stigmatisant ceux qui adoptent une sexualitĂ© ou des modes de vie non conformes. Dans une perspective psychosociale, la question se pose dans les termes de la subjectivitĂ© et dans ceux des systĂšmes sociaux, voire du discours de la science « marquĂ© » par le genre, qui relĂšvent de l’indivision conflictuelle entre nature et culture. Les auteurs interrogent la place assignĂ©e aux sexes et particuliĂšrement celle faite aux femmes non seulement dans leur sexualitĂ© mais dans la vie sociale et professionnelle, en termes de pouvoir et de travail. Cela concerne la formation, l’intervention, l’analyse des reprĂ©sentations et des assignations dans les pratiques les relations et les fonctions, terrains sur lesquels se mesurent biologie, religion, psychanalyse et sciences sociales. Comment les psychosociologues, eux-mĂȘmes traversĂ©s par ces questions, prennent-ils part au dĂ©bat social qui met en question les reprĂ©sentations et les relations dans leurs traditions les plus ancrĂ©es ? »

  • Nouvelle revue de psychosociologie 2014/1 (n° 17), 232 p.
  • Disponible au centre de documentation du Centre d’études et de documentation sociales (CDES) Ă  LiĂšge.

“Quelle politique de santĂ© pour les mineurs trans ?”

« La santĂ© des mineurs trans, c’est-Ă -dire des enfants et adolescents qui ne se sentent pas appartenir au sexe assignĂ© Ă  la naissance, reste un angle mort des politiques de santĂ© nationales. La littĂ©rature portant sur les transidentitĂ©s permet de mieux connaĂźtre cette population et esquisse ce qu’il est envisageable de rĂ©aliser dans le cadre des parcours scolaires de ces jeunes, afin d’amĂ©liorer leur participation scolaire et veiller Ă  leur santĂ© globale. »

  • Arnaud Alessandrin, Quelle politique de santĂ© pour les mineurs trans ?, SantĂ© scolaire et universitaire, n° 45, 2017, pp. 29-30.
  • Disponible au centre de documentation UCL/IRSS-RESO

« Genre et santé »

« Le genre : dĂ©terminant social de la santĂ©. Le genre est un rĂ©vĂ©lateur des multiples rapports de pouvoir qui structurent la sociĂ©tĂ© [
] : femmes et hommes ne vivent pas les mĂȘmes expĂ©riences (socialisation, inĂ©galitĂ©s, discriminations) selon leur classe sociale, leur couleur de peau, leur religion, leur orientation sexuelle, leur Ăąge, etc. DĂšs lors, le genre, en tant que systĂšme de diffĂ©renciation et de hiĂ©rarchisation, contribue – entre autres facteurs − Ă  expliquer la permanence des inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©, mais il permet Ă©galement, comme concept et catĂ©gorie d’analyse critique, d’identifier et de prĂ©coniser les marges d’action, les pistes d’amĂ©lioration, notamment dans le domaine de la santĂ©. »

« L’enfant en non-conformitĂ© de genre et sa famille : une approche systĂ©mique »

« Cet article analyse les rĂ©actions parentales face aux dĂ©veloppements non conformes du genre de leur enfant et avance que les mandats parentaux de protection et d’acceptation deviennent problĂ©matiques du fait des diffĂ©rences qui existent entre les normes de genre de l’enfant et celles de sa famille, aussi bien qu’entre celles de l’enfant et celles de son environnement. Au travers de multiples modalitĂ©s thĂ©rapeutiques – Ă©ducation et accompagnement parental, groupes de soutien de parents, thĂ©rapie de l’enfant et thĂ©rapie familiale – l’auteur illustre des interventions soutenant Ă  la fois les parents et les enfants prĂ©-pubĂšres dans leur façon de nĂ©gocier les liens familiaux et la fluiditĂ© du genre. »

  • Malpas J., Bosman S., « L’enfant en non-conformitĂ© de genre et sa famille : une approche systĂ©mique », Cahiers critiques de thĂ©rapie familiale et de pratiques de rĂ©seaux, Vol. 52 (1), 2014, pp. 139-165
  • Au centre de documentation UCL/IRSS-RESO et au centre de documentation du Centre d’Ă©tudes et de documentation sociales (CEDS) Ă  LiĂšge

Web-documentaire

« L’école du Genre »

Le web-documentaire L’Ă©cole du genre est le rĂ©sultat d’un travail qui aura durĂ© deux ans et lors duquel des dizaines d’experts furent interrogĂ©s mais aussi des familles, des Ă©lĂšves et des Ă©quipes pĂ©dagogiques Ă  travers toute la France. Ce webdoc, qui s’interroge sur la construction et la transmission des stĂ©rĂ©otypes de genre dans notre sociĂ©tĂ© actuelle, comprend 8 Ă©pisodes qui sont complĂ©tĂ©s par des vidĂ©os bonus permettant d’approfondir les questions investiguĂ©es.http://www.ecoledugenre.com/#Accueil

Réseaux sociaux et changement de comportement alimentaire : quel potentiel ?

PremiĂšre publication dans La SantĂ© en action n°444 – juin 2018Note bas de pagePour les organismes publics, les rĂ©seaux sociaux sont un outil de promotion de la santĂ© publique dans tous les domaines, nutrition incluse. La littĂ©rature scientifique montre que, pour ĂȘtre efficaces, les interventions doivent se fonder sur les thĂ©ories psychosociales afin d’influer sur les comportements. Les rĂ©seaux sociaux (par exemple, Facebook, Youtube, Google+, Twitter, Snapchat ou Instagram) font partie des mĂ©dias sociaux au mĂȘme titre que les applications mobiles, blogs, forums santĂ©, jeux en ligne, etc. Cependant, ils s’en diffĂ©rencient grĂące Ă  leurs fonctionnalitĂ©s permettant aux internautes de crĂ©er un vĂ©ritable rĂ©seau d’individus (crĂ©ation de profils d’utilisateurs et communication avec d’autres personnes connectĂ©es). Les mĂ©dias sociaux peuvent ĂȘtre des vecteurs d’information intĂ©ressants pour promouvoir des comportements favorables Ă  la santĂ©. En France, selon le CREDOC (baromĂštres du numĂ©rique 2017 et 2018), les rĂ©seaux sociaux sont de plus en plus utilisĂ©s (59 % de la population en 2017 contre 48 % en 2014). Cette progression est plus Ă©levĂ©e parmi les personnes les moins connectĂ©es : peu diplĂŽmĂ©es et/ou disposant de faibles revenus et habitant en zones rurales. Cependant, des inĂ©galitĂ©s sociales subsistent : en 2017, les 18-24 ans et les plus diplĂŽmĂ©s Ă©taient les internautes les plus connectĂ©s.Face Ă  cet engouement, de plus en plus d’organismes de santĂ© publique utilisent les rĂ©seaux sociaux pour atteindre leurs publics lors d’interventions en santĂ© telles que des campagnes de prĂ©vention et de promotion de la santĂ©.En ce qui concerne le sujet de la nutrition plus spĂ©cifiquement, l’alimentation et les boissons reprĂ©sentaient, en 2017, le troisiĂšme thĂšme de recherche des internautes le plus frĂ©quent sur le moteur de recherche Google, aprĂšs le sport et les voyages. Sur les rĂ©seaux sociaux, 208 millions de posts (messages) sont estampillĂ©s #food (hashtag « alimentation »), faisant de ce hashtag – outil qui permet de marquer un contenu avec un motclĂ© plus ou moins partagĂ© – l’un des plus populaires. En effet, 29 % des internautes partagent des photos de plats (50 % pour les 18-24 ans) et 39 % donnent leur avis sur les marques et produits alimentairesNote bas de page.

IntĂ©rĂȘts des rĂ©seaux sociaux lors d’interventions en santĂ©

Comprendre les comportements et attentes des internautes

Les rĂ©seaux sociaux permettent d’analyser en temps rĂ©el les pensĂ©es des individus. Les organismes publics peuvent donc s’appuyer sur l’analyse des conversations et des commentaires des internautes pour Ă©laborer des messages rĂ©pondant aux besoins et attentes de leur(s) cibles(s).

Diffuser et partager de l’information

Les rĂ©seaux sociaux permettent de diffuser des messages Ă  un nombre Ă©levĂ© de personnes, « lĂ  oĂč les gens sont », c’est-Ă -dire dans un espace dĂ©jĂ  occupĂ© par les internautes. Ces messages pourront alors ĂȘtre partagĂ©s entre les individus. Le partage d’information sur ce support Ă©tant gratuit, les campagnes de santĂ© publique peuvent alors facilement se propager d’un « ami » Ă  l’autre, et permettre, a priori, un plus grand impact des messages de santĂ© publique. Au-delĂ  de l’intĂ©rĂȘt du partage massif, cette action est particuliĂšrement importante car le bouche-Ă -oreille est un moyen puissant d’accroĂźtre la confiance des internautes. Il a d’ailleurs Ă©tĂ© montrĂ© que les personnes partagent de l’information sur Facebook quand elles pensent que celle-ci est bĂ©nĂ©fique pour les autresNote bas de page.

CrĂ©er de l’engagement

Les fonctions like (aimer), share (partager) et post (poster) des rĂ©seaux sociaux permettent des interactions et conversations entre internautes, mais Ă©galement entre ces rĂ©seaux et les structures de santĂ© publique. Le fait de recourir plus ou moins aux diverses fonctionnalitĂ©s des rĂ©seaux sociaux constitue un engagement plus ou moins fort des utilisateurs pour le rĂ©seau social en question. Par exemple, une personne qui n’utilise que la fonction like est considĂ©rĂ©e comme moins engagĂ©e qu’une personne qui partage des publications. Tout l’enjeu des organismes de santĂ© publique est donc de crĂ©er un haut degrĂ© d’engagement chez ses internautes ; cet engagement influe positivement sur la motivation des individus, sur leur volontĂ© Ă  suivre l’intervention en santĂ© jusqu’à sa fin et leur capacitĂ© Ă  se sentir aptes Ă  adopter des comportements sainsNote bas de page.

Points de vigilance lors d’interventions en santĂ© sur les rĂ©seaux sociaux

La surcharge d’information

La grande disponibilitĂ© des rĂ©seaux sociaux induit un accroissement de l’exposition Ă  une diversitĂ© de messages qui peut impliquer une surcharge d’informationsNote bas de page et conduire Ă  une exposition aux messages de santĂ© publique plus difficileNote bas de page. Cette abondance d’informations peut Ă©galement ĂȘtre dĂ©lĂ©tĂšre pour l’utilisateur qui se trouve face Ă  des discours parfois discordants et des informations erronĂ©es, mais Ă©galement pour les organismes de santĂ© publique qui doivent s’assurer que l’information dĂ©livrĂ©e est correctement comprise par les internautes et correctement reprise, c’est-Ă -dire que les messages diffusĂ©s ne sont pas dĂ©formĂ©sNote bas de page.

Le manque d’engagement et l’attrition

La plupart des Ă©tudes qui Ă©valuent les interventions en santĂ© menĂ©es via les rĂ©seaux sociaux n’attestent d’un bon niveau d’engagement que sur une courte durĂ©e (moins de 4 semaines) avec une diminution progressive de la participation sur cette pĂ©riodeNote bas de page. Ce dĂ©clin rapide de l’engagement est probablement dĂ» Ă  la difficultĂ© de motiver les internautes dans un environnement Ă©voluant sans cesse et dans lequel les organismes doivent toujours ĂȘtre en interaction avec les utilisateurs. Du fait des consĂ©quences nĂ©gatives d’un manque d’engagement sur l’efficacitĂ© des interventions, les organismes de santĂ© doivent donc rester vigilants face Ă  cette problĂ©matique et Ă  l’attrition Ă©levĂ©e qui peut en dĂ©couler (fait de perdre des internautes durant la durĂ©e de l’intervention)Note bas de page.

Agir sur les comportements alimentaires via les réseaux sociaux

Ce que dit la rechercheImage

Des recherches bibliographiques non exhaustives rĂ©alisĂ©es dĂ©but 2017 n’ont pas permis d’identifier d’étude traitant uniquement de l’efficacitĂ© des rĂ©seaux sociaux sur les changements de comportements alimentaires. Ceci peut-ĂȘtre dĂ» Ă  la complexitĂ© du recueil de donnĂ©es sur l’alimentation des individus. Cependant, des rĂ©sultats sur d’autres thĂ©matiques, telle l’activitĂ© physique, semblent encourageants pour accroĂźtre le niveau des connaissances, crĂ©er de l’engagement, favoriser le soutien social et induire des changements de comportement.Afin de dĂ©velopper des interventions efficaces reposant sur les rĂ©seaux sociaux, la littĂ©rature suggĂšre que celles-ci se fondent sur au moins une thĂ©orie psychosociale de la santĂ© et s’appuient sur des techniques de changement de comportement. Les thĂ©ories psychosociales permettent d’identifier les facteurs psychosociaux susceptibles d’influencer le comportement et d’adapter ainsi les interventions. La thĂ©orie de l’action planifiĂ©e d’Ajzen (TAP) et la thĂ©orie sociale cognitive de Bandura (TSC) semblent ĂȘtre les thĂ©ories les plus efficaces dans le changement de comportement alimentaireNote bas de page. La TAP stipule que l’intention d’une personne d’adopter ou non un comportement est dĂ©terminĂ©e par son attitude Ă  l’égard du comportement, par l’importance accordĂ©e Ă  l’opinion des personnes qui l’entourent (normes subjectives) et par la perception de son contrĂŽle sur un comportement donnĂ©Note bas de page. La TSC reprend aussi l’importance de l’environnement social mais aborde deux notions supplĂ©mentaires : l’apprentissage social (expĂ©riences antĂ©rieures et observation de son entourage)Note bas de page et l’efficacitĂ© personnelle (efficacitĂ© du comportement pour obtenir le rĂ©sultat dĂ©sirĂ© et sa propre efficacitĂ© Ă  adopter ce comportement)Note bas de page.En parallĂšle, des techniques de changement de comportement ont Ă©tĂ© identifiĂ©es comme particuliĂšrement efficaces en nutritionNote bas de page ; il s’agit du soutien social (apportĂ© par ses proches ou ses pairs), de la comparaison sociale (Ă©valuation de son comportement en fonction de celui des autres), des retours d’expĂ©rience et de l’auto-surveillanceNote bas de page.En conclusion, les rĂ©seaux sociaux se caractĂ©risent par l’interaction sociale et le partage d’informations. Ce sont deux leviers majeurs pour agir. Ainsi, lors d’interventions via ce mĂ©dia, la sensibilitĂ© d’un individu aux opinions des personnes qui l’entourent (normes subjectives) est la variable psychosociale la plus susceptible d’influencer son comportement. Enfin, le soutien social est la technique de changement de comportement la plus efficace.

Perspectives

Que cela soit dans le domaine de l’alimentation ou de la santĂ© en gĂ©nĂ©ral, des Ă©tudes robustes, telles que des essais contrĂŽlĂ©s randomisĂ©s, menĂ©es sur une longue pĂ©riode et tenant compte des caractĂ©ristiques des publics et des diffĂ©rents types de rĂ©seaux sociaux, semblent intĂ©ressantes Ă  conduire pour mieux comprendre le potentiel des rĂ©seaux sociaux, les clĂ©s de l’efficacitĂ© et remĂ©dier aux problĂ©matiques du manque d’engagement. Cependant, Ă©tant donnĂ© le nombre croissant d’informations diffusĂ©es sur les rĂ©seaux sociaux, notamment dans le domaine de l’alimentation, et l’augmentation du temps passĂ© par les Français sur ces mĂ©dia, il semble judicieux que les organismes de santĂ© publique les incluent rapidement dans leurs programmes de santĂ© pour Ă©viter Ă  d’autres structures de combler le manque d’informations par des donnĂ©es non fiables.

Collectif, Le MarchĂ© food and drink sur les mĂ©dias sociaux, Étude Digimind 2017, en ligne : https://blog.digimind.com/fr/tendances/nouvelle-etude-food-drink-moments-deconsommation-sujets-plus-partages-surreseaux-sociaux

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Idem note 3

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Idem note 9

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