La formation de relais communautaires comme outil d’empowerment – analyse d’un projet du GAMS Belgique

A travers des formations de relais, « Community Voices », le GAMS cherche Ă  renforcer les capacitĂ©s de femmes et d’hommes issu.e.s des communautĂ©s pratiquant les mutilations gĂ©nitales fĂ©minines afin qu’ils.elles puissent lutter contre ces pratiques et soutenir celles qui les ont subies. Cette action communautaire a pour finalitĂ© de prĂ©venir les MGF en Belgique et d’amĂ©liorer le bien-ĂȘtre des femmes et filles concernĂ©es. Dans cet article nous analysons l’impact positif de cette action sur le pouvoir d’agir et le bien-ĂȘtre des participant.e.s elles- et eux-mĂȘmes.La derniĂšre Ă©tude belge de prĂ©valence des mutilations gĂ©nitales fĂ©minines (MGF), publiĂ©e en 2018Note bas de page, estime que presque 26.000 filles et femmes vivant en Belgique sont concernĂ©es par les mutilations gĂ©nitales fĂ©minines, soit parce qu’elles en ont dĂ©jĂ  subies (17.273) soit parce qu’elles risquent d’y ĂȘtre confrontĂ©es (8.644). Le GAMS Belgique est la principale organisation belge Ɠuvrant pour la prĂ©vention des MGF et dans la prise en charge psycho-sociale des personnes concernĂ©es par ces pratiques. Depuis 2014, l’association organise des formations pour les femmes et hommes originaires de pays oĂč les MGF sont pratiquĂ©es, en vue de devenir des relais dans la sensibilisation et l’accompagnement de personnes concernĂ©es par ces pratiques.

Une formation « GAMS Community Voices » : Pourquoi ? Pour qui ? Comment ?

La formation, d’environ 8 demi-journĂ©es permet d’acquĂ©rir une meilleure connaissance des MGF, de savoir les analyser en tant que violation des droits humains des femmes et d’en connaitre les consĂ©quences sur la santĂ© des filles et des femmes. Les relais apprennent Ă  aborder les MGF avec les personnes concernĂ©es de maniĂšre non-stigmatisante, dans le but d’entraĂźner un changement d’opinion et de comportement. La formation permet Ă©galement aux participant.e.s d’acquĂ©rir des connaissances sur des sujets connexes tels que la sexualitĂ©, la contraception, l’égalitĂ© femmes-hommes et les (autres types) de violences de genre.Une fois la formation terminĂ©e, ces relais travaillent de maniĂšre bĂ©nĂ©vole dans l’accompagnement et la traduction lors d’entretiens psychologiques, mĂ©dicaux ou sociaux des femmes concernĂ©es par les MGF, ainsi que lors d’actions de sensibilisation auprĂšs des communautĂ©s affectĂ©es.Le projet de formation de relais communautaires participe ainsi Ă  la finalitĂ© du GAMS Belgique qui est de prĂ©venir les MGF dans la sociĂ©tĂ© belge (y compris en cas de retour au pays d’origine) et d’amĂ©liorer la santĂ© et le bien-ĂȘtre des femmes et filles concernĂ©es, Ă  travers une prise en charge holistique des personnes. Tout comme d’autres interventions dans le champ des MGFNote bas de page, la dĂ©marche du GAMS Belgique s’inscrit dans une approche communautaire, basĂ©e sur la conviction que les communautĂ©s concernĂ©es par les MGF doivent elles-mĂȘmes ĂȘtre au centre des interventions visant un changement de comportement. La formation de relais vise ainsi Ă  permettre Ă  des « leaders communautaires » d’acquĂ©rir les connaissances, les compĂ©tences et le pouvoir d’agir sur leurs propres communautĂ©sNote bas de page.

Une analyse qualitative pour Ă©valuer les acquis

Cet article se base sur les rĂ©sultats de l’évaluation d’une session de formation de 19 relais francophones, tenue entre fĂ©vrier et mai 2017 grĂące Ă  un financement par la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles.Les thĂšmes suivants Ă©taient abordĂ©s lors de la formation :

  • Approche de la problĂ©matique de genre
  • SantĂ© sexuelle
  • Connaissances de base sur les MGF
  • Mariages forcĂ©s et Droits des femmes migrantes
  • ConsĂ©quences psychologiques des MGF
  • Techniques de communication et d’animation – approche socio-culturelle
  • StratĂ©gies de mobilisation
  • L’entretien individuel et l’animation de groupes
  • Le viol (sĂ©ance optionnelle)
  • La masculinitĂ© (sĂ©ance optionnelle)

Les 19 personnes formĂ©es (16 femmes et 3 hommes) sont originaires d’Afrique subsaharienne (8 originaires de la GuinĂ©e-Conakry, 7 de la Somalie, 3 originaires de Djibouti, une du SĂ©nĂ©gal et une du Niger), dont la grande majoritĂ© de communautĂ©s pratiquant les MGF. Beaucoup d’entre elles et eux Ă©taient demandeur.e.s d’asile ou sans-papiers au moment de la formation.L’évaluation de la session de formation des relais communautaires 2017 a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e grĂące au

  • recueil de donnĂ©es via des observations pendant la formation,
  • des Focus groupes,
  • des entretiens individuels
  • des questionnaires auprĂšs des formateurs et formatrices.

Nous vous prĂ©sentons ici les rĂ©sultats de cette Ă©valuation au regard des attentes et motivations des participants d’une part, et sur l’acquisition tant des connaissances que des savoir- faire et savoir-ĂȘtre au sujet des MGF, et plus largement sur la santĂ© sexuelle et l’égalitĂ© de genre. Ceci nous amĂšnera Ă  analyser le potentiel d’une dynamique d’empowerment Ă  l’Ɠuvre grĂące Ă  la formation.

Les attentes, les craintes et la motivation

Les attentes :

ImageAu dĂ©but de la formation, les participant.e.sNote bas de page ont exprimĂ© des attentes de celle-ci en matiĂšre de l’acquisition

  • d’un savoir : comprendre la problĂ©matique des violences de genre et des MGF ;
  • d’un savoir-faire : aborder les MGF, rĂ©pondre aux besoins et attentes des femmes, sensibiliser sans offenser, dĂ©passer les tabous autour de la pratique ;
  • d’un savoir-ĂȘtre : ĂȘtre professionnel.le, avoir des compĂ©tences en matiĂšre de multiculturalitĂ©.

Lors de la formation, la personne relais est perçue de maniĂšre positive par les futur.e.s relais et considĂ©rĂ©e comme importante au sein de la communautĂ©, bĂ©nĂ©ficiant d’un savoir-faire, savoir-ĂȘtre et « savoir dire » au sujet des MGF.

Les craintes :

Les premiĂšres craintes exprimĂ©es sont liĂ©es aux capacitĂ©s linguistiques personnelles, Ă  une peur d’ĂȘtre mal vu.e.s, d’offenser la communautĂ© (d’origine) voire mĂȘme d’ĂȘtre rejetĂ©.e.s de celle-ci. Certaines incertitudes ont Ă©galement Ă©tĂ© mentionnĂ©es quant Ă  la capacitĂ© d’aborder le sujet des MGF publiquement ou de ne pas savoir comment agir face Ă  une victime pour crĂ©er un lien de confiance et de confidentialitĂ©.Des craintes au niveau de la capacitĂ© Ă  assurer la formation ont Ă©galement Ă©tĂ© citĂ©es (peur de rater un module, d’ĂȘtre en retard), au niveau des relations entre collĂšgues ainsi que des craintes liĂ©es Ă  la future mission de relais.En plus des craintes, les participants ont relevĂ© un certain nombre de freins Ă  la participation : le fait que les formations se dĂ©roulaient le week-end, le cumul avec une activitĂ© salariĂ©e, l’aspect bĂ©nĂ©vole du travail, ainsi que la pudeur et les Ă©motions liĂ©es Ă  la thĂ©matique.

La motivation :

La motivation pour participer Ă  la formation est quant Ă  elle souvent liĂ©e Ă  une expĂ©rience personnelle en tant que femme excisĂ©e, ou en tant que personne ayant des proches Ă  risque :« J’ai 9 petites sƓurs. J’ai subi quelque chose qui est horrible (
) je veux pas que mes sƓurs subissent la mĂȘme chose. » (une participante)La formation au GAMS est alors vue comme un moyen de trouver des arguments et le courage de s’opposer Ă  une pratique trĂšs ancrĂ©e dans la communautĂ©. Une participante souhaitait ainsi pouvoir justifier pourquoi elle n’a pas fait exciser ses filles, pointant le poids de la pression de la communautĂ©, au pays d’origine comme en Europe, Ă  perpĂ©tuer cette pratique considĂ©rĂ©e comme nĂ©cessaire.

La plupart des relais semblent ainsi avoir Ă©tĂ© motivĂ©.e.s par leur conviction personnelle de la nĂ©cessitĂ© de combattre les MGF, l’envie de produire un changement, d’apprendre, de sensibiliser, d’« aider les femmes Ă  ĂȘtre plus indĂ©pendantes et Ă©mancipĂ©es pour pouvoir choisir et dĂ©cider de leur corps », de lutter contre les violences ou de protĂ©ger leurs filles/amies/voisines. Toutefois, pour certaines personnes, la formation Ă©tait Ă©galement (du moins au dĂ©but) un moyen d’amĂ©liorer leur situation professionnelle et/ou administrative (demande d’asile ou de nationalitĂ©), ou simplement d’avoir une activitĂ© en dehors du centre de demandeurs d’asile. Si la mixitĂ© du groupe, en termes de genre et d’ñge, a Ă©tĂ© vĂ©cue comme une barriĂšre par certain.e.s au dĂ©but de la formation, la confiance instaurĂ©e au fur et Ă  mesure avec les autres participant.e.s et les animateurs/trices a permis Ă  chacun.e de se sentir suffisamment Ă  l’aise pour aborder des sujets considĂ©rĂ©s comme tabous, tels que la sexualitĂ© et l’excision.

L’acquisition de savoirs, savoir-ĂȘtre, savoir-faire

Lors des focus groupes et d’entretiens individuels, nous avons cherchĂ© Ă  comprendre quels savoirs, savoir-ĂȘtre et savoir-faire Ă©taient acquis par les personnes grĂące Ă  la formation relais.Fort heureusement, les futur.e.s relais ont estimĂ© avoir acquis de nouvelles connaissances sur les MGF : les diffĂ©rents types et notamment l’existence de l’infibulation (type 3 selon la dĂ©finition de l’OMS), les pays oĂč elles se pratiquent, leurs consĂ©quences (y compris psychologiques), les lois et les moyens de prĂ©vention. « Avant de faire cette formation je n’avais pas tellement considĂ©rĂ© la gravitĂ© des mutilations, je me disais juste que c’était coutumier. Mais grĂące Ă  cette formation j’ai dĂ©couvert que les femmes souffrent tellement. » (un participant)En plus de la connaissance spĂ©cifique aux MGF, les participant.e.s ont acquis des connaissances plus gĂ©nĂ©rales sur l’appareil gĂ©nital fĂ©minin, les violences de genre (notamment le mariage forcĂ©) et les moyens de contraception. Plusieurs personnes ont dit vouloir continuer Ă  se former sur d’autres sujets aprĂšs la formation.En termes de savoir-faire, les participant.e.s ont exprimĂ© avoir acquis les compĂ©tences nĂ©cessaires pour parler des MGF et d’autres violences envers les femmes : la capacitĂ© d’écoute active et d’accompagnement d’une personne dans la recherche de solutions concrĂštes Ă  son problĂšme, le repĂ©rage de signes du syndrome de stress post-traumatique et des capacitĂ©s de dialogue avec la personne concernĂ©e. Les participant.e.s ont appris Ă  parler de sujets jusqu’alors considĂ©rĂ©s comme tabous et ont acquis des connaissances sur les moyens de communication efficaces afin de sensibiliser au sujet des MGF sans offenser.Des observations pendant les sĂ©ances ont aussi montrĂ© que les participant.e.s s’exprimaient, pour la plupart, librement sur des sujets « sensibles », notamment sur la sexualitĂ©. Parmi les savoir-ĂȘtre que les participant.e.s ont rapportĂ©s, on compte entre autres : la confiance et le courage, la capacitĂ© d’ĂȘtre Ă  l’écoute et attentif.ve Ă  l’histoire d’une personne, la patience, la capacitĂ© de se remettre en question et de prendre du recul par rapport Ă  son histoire, et s’en servir pour parler aux gens. Les participant.e.s rapportent Ă©galement des acquis au niveau du respect des points de vue des autres ainsi qu’une plus grande ouverture d’esprit. Un homme a exprimĂ© que la formation lui a permis de changer la façon dont il perçoit les femmes. Cependant, l’implication en tant que relais communautaire du GAMS n’est pas facile pour tout le monde, Ă©tant donnĂ© la sensibilitĂ© du sujet dans certaines communautĂ©s migrantes originaires de pays oĂč les MGF sont pratiquĂ©es, comme le montre cet exemple: « ils me disaient ‘tu pars lĂ -bas, pour parler des trucs de femmes ? qu’est-ce qui va pas, c’est Ă  cause du stress ? (
), tu es fou » un participant djiboutien

Analyse d’une dynamique d’empowerment

La notion d’empowerment nous permet d’examiner l’impact de la formation en termes de renforcement du pouvoir d’action des personnes l’ayant suivie. Parmi les nombreuses dĂ©finitions de ce terme, nous empruntons celle de l’association Le Monde selon les Femmes : « le fait que les individus, femmes et hommes sont acteurs-trices de changements. [La notion d’empowerment] fait rĂ©fĂ©rence Ă  l’individu, au pouvoir qu’il peut avoir sur sa propre vie, au dĂ©veloppement de son identitĂ© ainsi qu’au collectif, au pouvoir des individus au sein du groupe dans une vision collective de gestion de la sociĂ©tĂ©, de la politique. Note bas de page» En promotion de la santĂ©, l’empowerment peut ĂȘtre dĂ©fini comme « un processus par lequel les individus et les communautĂ©s acquiĂšrent la capacitĂ© Ă  prendre en charge eux-mĂȘmes les questions de santĂ© qui les concernent. Note bas de page»HofmannNote bas de page propose une dĂ©finition du processus d’empowerment des femmes selon quatre niveaux, qui doivent tous ĂȘtre inclus :

  1. « le niveau cognitif oĂč l’attention est centrĂ©e sur la prise de conscience de la rĂ©alitĂ© et des causes de la domination masculine ;
  2. le niveau psychologique, en relation avec le dĂ©veloppement des sentiments d’estime de soi et de confiance en soi, nĂ©cessaires pour prendre des dĂ©cisions ;
  3. le niveau Ă©conomique, en relation avec l’importance d’avoir des activitĂ©s permettant de gĂ©nĂ©rer un revenu et d’assurer un certain niveau d’indĂ©pendance Ă©conomique (non seulement un accĂšs Ă  des ressources ou des bĂ©nĂ©fices, mais aussi le contrĂŽle de ceux-ci) ;
  4. le niveau politique, impliquant la capacitĂ© d’analyser et de mobiliser son milieu social afin d’y introduire des changements. »

Nous pensons que la formation de relais communautaires peut avoir un effet positif sur l’empowerment individuel ainsi que collectif. Bien que l’impact d’un projet sur le processus d’empowerment est difficile Ă  mesurerNote bas de page, nous avons tentĂ© de classifier les rĂ©sultats de l’évaluation selon les diffĂ©rentes composantes ci-dessus. Nous pouvons ainsi estimer si et comment la formation contribue Ă  un tel processus de renforcement du pouvoir d’agir pour les participant.e.s.

Une prise de conscience de la réalité sociale
Les relais ont signalĂ© avoir pris conscience de la rĂ©alitĂ© des MGF et d’autres violences faites aux femmes. La formation leur a ainsi permis de dĂ©construire l’obligation, dans leur communautĂ©, de pratiquer les MGF. Les hommes du groupe ont exprimĂ© que le dialogue avec les femmes, ainsi que les apports thĂ©oriques, leur ont permis de saisir l’importance de cette violence de genre et la souffrance qu’elle inflige aux femmes concernĂ©es. De plus, la formation semble Ă©galement avoir permis dans une certaine mesure de dĂ©construire les idĂ©es prĂ©conçues sur la virginitĂ© fĂ©minine, la contraception ou encore et la fĂ©conditĂ© et la stĂ©rilitĂ©. La formation a permis aux femmes de se libĂ©rer de certaines normes qui leur sont imposĂ©es. « J’ai appris, par rapport Ă  l’hymen, que c’est pas toutes les femmes qui saignent (pendant le premier rapport sexuel), (
) alors qu’elles sont vierges ! Franchement ça je suis contente de l’apprendre et je vais expliquer ça aussi Ă  ma communautĂ© parce que y a tellement de pression (
) ça me soulage (tout le monde est d’accord avec elle). Et j’ai aussi appris que toutes les femmes n’ont pas le mĂȘme hymen, que tous les hymens sont diffĂ©rents. » (une participante guinĂ©enne)

Le GAMS permet aux personnes de trouver un espace sĂ»r (« safe ») pour dialoguer sur ces sujets difficiles. « Le GAMS est le seul endroit, (
) en tant qu’usager et (
) futur relais communautaire (
) oĂč on peut se retrouver et parler de choses vraiment sans tabou et sans complexes. »
(une participante)

Le dĂ©veloppement de l’estime de soi
En permettant d’aborder des sujets tabou, la formation « Community Voices » pourrait permettre aux participant.e.s de dĂ©velopper les aspects psychologiques de l’empowerment Ă  travers la diminution des sentiments de honte, de culpabilitĂ© et de peurs liĂ©es Ă  la pratique des MGF et d’autres violence de genre, de mĂȘme que le dĂ©veloppement d’un sentiment d’aise par rapport au fait de parler de leur vĂ©cu de ces violences. Des personnes ont aussi exprimĂ© que l’expĂ©rience leur a permis d’avoir une meilleure confiance en elles, de se sentir plus Ă  mĂȘme de s’exprimer sur des sujets sensibles (notamment dans un groupe mixte) et se sentir plus fort.e.s et courageux/euses.

Le renforcement du pouvoir d’agir

Le volet politique de l’empowerment concerne le fait d’ĂȘtre en mesure d’apporter du changement dans la sociĂ©tĂ©. Lors des FGD, les personnes ont exprimĂ© Ă  quel point la formation leur a permis de renforcer leur militantisme et leur conviction qu’il est nĂ©cessaire de se battre contre les MGF et d’autres violences faites aux femmes. Les personnes estimaient avoir acquis les outils nĂ©cessaires pour intervenir et aborder ce sujet dans leur communautĂ©, y compris une connaissance des associations Ɠuvrant dans ce domaine et la loi belge la concernant.

« Avant j’avais peur du regard des gens, quand ça parle de l’excision et de choses comme ça, pour moi c’était silence radio, je parlais pas, lĂ  maintenant j’ai appris que je peux parler sans crainte, sans avoir honte. » (une participante)

« [La formation] m’a d’abord permis de me libĂ©rer, parce qu’avant je n’arrivais pas Ă  parler de l’excision ou des violences faites aux femmes. » (une participante). Certain.e.s Ă©voquent le sentiment de pouvoir faire quelque chose de positif pour la communautĂ©. De plus, dans le cas d’une participante anglophone, le fait de participer Ă  la formation lui a permis de renforcer son niveau de français, augmentant sa capacitĂ© d’agir dans la sociĂ©tĂ© francophone.Les relais se sentent gĂ©nĂ©ralement confiantes quant Ă  leur futur mission en tant que relais et bien prĂ©parĂ©es pour mener des actions de sensibilisation sur les MGF. « AprĂšs cette formation, on a cette envie d’aider les gens, de s’impliquer, et bien qu’il y ait une certaine peur (
) il y a une certaine force qui nous a Ă©tĂ© donnĂ©e et on se sent vraiment courageux, on veut tout aborder. » (une participante)

Des questions en suspens et des perspectives

Le projet de formation de relais n’aborde pas directement la composante Ă©conomique de l’empowerment. Nous pouvons nous demander dans quelle mesure les savoirs et savoir-faire acquis dans le cadre de la formation peuvent avoir un effet positif pour la capacitĂ© des personnes Ă  acquĂ©rir une activitĂ© salariĂ©e. Pareillement, les problĂšmes liĂ©s au manque de droit de sĂ©jour a une influence sur la capacitĂ© d’agir des participant.e.s et mĂ©riterait peut-ĂȘtre plus d’attention dans notre analyse du projet.ImageDans une perspective d’analyse genrĂ©e, nous pouvons questionner l’impact du projet sur l’empowerment gĂ©nĂ©ral des participantes dans la sociĂ©tĂ© patriarcale. Dans quelle mesure la participation Ă  la formation peut-elle avoir un effet positif sur le pouvoir qu’elles occupent au sein de leurs familles, couples et communautĂ©s ? Sont-elles en meilleure capacitĂ© de participer et d’influencer leur communautĂ©, que ce soit sur l’excision ou dans d’autres domaines ? Auraient-elles plus de pouvoir pour rĂ©sister aux violences sexistes dont elles peuvent ĂȘtre victimes ? ParallĂšlement, nous pouvons espĂ©rer, mais pas prouver, que des hommes formĂ©s sur les questions de violence de genre sont moins enclins Ă  ĂȘtre auteurs de violences sexistes. Peut-il, par exemple, aussi y avoir un rĂ©sultat positif sur leur capacitĂ© Ă  remettre en question une division traditionnellement genrĂ©e des tĂąches au sein de leurs couples et de leurs familles ?Aussi, des questions se posent naturellement par rapport Ă  la maniĂšre dont des professionnel.le.s en tant que groupe relativement privilĂ©giĂ© comparĂ© aux personnes visĂ©es par cette action, peuvent contribuer Ă  l’empowerment de ces derniĂšres. Une premiĂšre rĂ©ponse rĂ©side dans le fait de servir de ressource et de facilitateur du dialogueNote bas de page. NĂ©anmoins, c’est une question Ă  laquelle nous nous devons d’ĂȘtre vigilant.e.s.Enfin, comment pourrait-on mesurer et Ă©viter d’éventuels effets adverses d’un projet comme celui-ci, sur l’empowerment justement ? De nombreuses expĂ©riences de projets de dĂ©veloppement montrent que ceux-ci peuvent, aussi, avoir des effets nĂ©gatifs pour les femmes en augmentant leur charge de travail, y compris le travail de careNote bas de page. Quels sont les impacts de notre projet et comment pourrait-on mettre en place des stratĂ©gies pour rĂ©duire un tel impact (garde pour les enfants pendant la formation, dĂ©centralisation des sĂ©ances, prise en compte de l’agenda des participant.e.s) ?En conclusion, notre analyse permet d’illustrer l’enrichissement personnel et le potentiel d’empowerment de ce type de formations de relais dans les domaines de la promotion de la santĂ© des femmes, et des hommes, et de la rĂ©duction des violences sexistes. Un bĂ©nĂ©fice du projet qui pourrait sans doute ĂȘtre d’autant plus fort si l’empowerment constituait un objectif bien prĂ©cis dĂšs le dĂ©but du projet et que la dĂ©finition de cette notion Ă©tait faite avec les participant.e.s elles/eux-mĂȘmesNote bas de page.

Pour en savoir plus :www.gams.be

Crédit photos: Bea Uhart

Nous adoptons une écriture « inclusive » permettant de mettre les hommes et les femmes à égalité

Richard, F et Dubourg D. (2018) Estimation de la prĂ©valence des filles et femmes excisĂ©es ayant subi ou Ă  risque de subir une mutilation gĂ©nitale fĂ©minine vivant en Belgique, 2018 – Mise Ă  jour au 31 dĂ©cembre 2016 , SPF SantĂ© public et IEFH. Accessible : http://www.strategiesconcertees-mgf.be/wp-content/uploads/20180302_FGM_PrevalenceStudy_12-pages_FR.pdf (17/05/2018)

Barrett, H (2018) Researching Female Genital Mutilation / Cutting, eds. Leye, E, Coene, G. VUB Brussels University Press ; Barrett, H. & Alhassan, Y. (2016) Community Mapping with FGM Affected African Communities in the EU – PRACTICAL HANDBOOK, Coventry University; Barrett, H. & Alhassan, Y. (2016) The REPLACE Community Readiness to

End FGM Assessment PRACTICAL HANDBOOK, Coventry University

Barrett, H (2018) Researching Female Genital Mutilation / Cutting, eds. Leye, E, Coene, G. VUB Brussels University Press ; Barrett, H. & Alhassan, Y. (2016) Community Mapping with FGM Affected African Communities in the EU – PRACTICAL HANDBOOK, Coventry University; Barrett, H. & Alhassan, Y. (2016) The REPLACE Community Readiness to

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Le Monde Selon les Femmes, Les Essentiels du Genre, N°10 – Empowerment

Breton, Jabot, Pommier, Sherlaw (2017) La promotion de la santĂ© – comprendre pour agir dans le monde francophone, Rennes : Presses de l’EHESP.

Hofmann E. (2003) Comment Ă©valuer l’empowerment des femmes dĂ©favorisĂ©es?, Genre en action. (www.genreenaction.net, 15 juni 2008)

Bishop, D. and Bowlan, K. (2014) Still learning: a critical reflection on three years of measuring women’s empowerment in Oxfam, Gender & Development, 22:2, 253-269

Wallerstein, N., Bernstein E. (1994) “Introduction to community empowerment, participatory education, and health, Health education quarterly, 21 (2), p. 141-148.

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« Réduire les risques, maximiser la promotion de la santé »

A l’occasion du premier Forum europĂ©en « Addictions et SociĂ©tĂ© » qui s’est tenu en octobre Ă  Bruxelles, des actrices du champ de la RĂ©duction des Risques (RdR) ont partagĂ© leurs expĂ©riences passĂ©es, prĂ©sentes et leurs rĂ©flexions et souhaits sur le futur du secteur. Revenons sur les points essentiels abordĂ©s lors de cette session intitulĂ©e « RĂ©duire les risques, maximiser la promotion de la santĂ© ».

Un regard sur le passé

C’est tout d’abord Anne Coppel qui ouvre la danse. Sociologue dans le champ des drogues, elle est l’une des pionniĂšres de la RdR liĂ©s aux usages de drogues en France. Au travers de son expĂ©rience, elle retrace l’émergence d’une prise de conscience trĂšs (trop) lente face Ă  l’épidĂ©mie du VIH-Sida liĂ© Ă  l’usage de drogues, ‘une catastrophe sanitaire et sociale’ (comme le soulignera le rapport de la Commission Henrion en 1994, soit avec une dizaine d’annĂ©es de retard). Il y avait peut-ĂȘtre, au dĂ©but des annĂ©es ’80, un consensus sur le fait que la toxicomanie et la propagation du VIH Ă©taient un problĂšme de sociĂ©tĂ©, mais aucun consensus par rapport Ă  la question de santĂ© publique que cela entraĂźnait (notamment l’accĂšs Ă  un traitement de dĂ©pendance aux opiacĂ©s). Le tabou reste trĂšs prĂ©gnant Ă  l’heure actuelle, insiste-t-elle
 mais un glissement dans les croyances collectives a fait doucement du chemin et lie dĂ©sormais davantage la problĂ©matique de la toxicomanie Ă  une question de santĂ© publique. D’ailleurs, « le changement des croyances collectives ne s’est pas fait dans le dĂ©bat public mais dans les pratiques ». Au dĂ©part faites dans l’illĂ©galitĂ©, les premiĂšres actions de RdR Ă©taient des pratiques purement empiristes mises en place par des personnes « proches du terrain, et nĂ©cessairement moins insĂ©rĂ©es dans les dispositifs institutionnels » : des mĂ©decins, des militants dans des associations (MĂ©decins du Monde, par exemple, fait figure de pionnier en France), des pharmaciens et d’autres professionnels de la santĂ©. Toutefois, pour appuyer ce basculement des croyances, il a fallu Ă©galement l’appui et la mĂ©diation d’experts internationaux. Anne Coppel a depuis lors publiĂ© plusieurs ouvrages sur l’émergence de la RdR en France et son Ă©volutionNote bas de page.

Transition vers aujourd’hui

Les deux oratrices suivantes partagent ensuite leurs expĂ©riences de projets menĂ©s actuellement en Belgique et dans le Nord-Pas-de-Calais. En premier lieu, Laurence PrzyluckiNote bas de page nous parle du Comptoir Ă  Charleroi qui a ouvert ses portes il y a 17 ans. Contrairement Ă  la France, l’association a attendu l’arrivĂ©e d’un ArrĂȘtĂ© royalNote bas de page autorisant la distribution de matĂ©riel stĂ©rile d’injection pour ouvrir ses portes. Le point principal que nous retiendrons de sa prĂ©sentation et de l’activitĂ© du Comptoir est qu’il s’agit avant tout d’un lieu d’accueil et d’écoute. Toute l’attention et l’énergie de l’équipe ne se concentre pas uniquement sur la problĂ©matique de consommation mais aussi sur l’importance de « tisser du lien ». Les activitĂ©s variĂ©es qui ont progressivement vu le jour dans les murs du Comptoir « le sont en fonction d’une rĂ©alitĂ© plus que d’un idĂ©al ». En effet, le travail rĂ©alisĂ© sur place avec les usagers permet Ă  Laurence Przylucki et son Ă©quipe de constater l’ampleur des besoins non couverts chez les usagers : l’absence de liens affectifs, des conditions de vie dĂ©plorables, une grande prĂ©caritĂ© financiĂšre, un cadre de vie non sĂ©curisant
 « Les reprĂ©sentations autour de la toxicomanie ont Ă©voluĂ© mais on reste dans une perception trĂšs limitĂ©e de la rĂ©alitĂ© de ces personnes ». Ce trait reste persistant, ajoute-t-elle, et le changement des mentalitĂ©s a encore du chemin devant lui : « nos actions sont encore perçues comme des incitations Ă  la consommation. Le droit Ă  la santĂ© est pourtant un fondement
 » Pour conclure son intervention, elle souhaite souligner qu’on n’a pas encore atteint un seuil suffisant dans la rĂ©ponse apportĂ©e en Belgique et qu’il est nĂ©cessaire d’évoluer vers la possibilitĂ© d’allier prĂ©vention et prise en charge de la toxicomanie et des usages de drogues. Pour en apprendre davantage sur le projet et les activitĂ©s du Comptoir, n’hĂ©sitez pas Ă  consulter leur site http://www.lecomptoirdecharleroi.net/.

Audrey Senon nous parle de la RDR « 2Ăšme gĂ©nĂ©ration », avec la prĂ©sentation de la « Spiritek » active Ă  Lille et dans ses environs. Avec l’émergence de la musique Ă©lectronique (des musiques, corrigerons les connaisseurs), l’arrivĂ©e de nouveaux stimulants de synthĂšse, dans un contexte de fĂȘtes de type rave party
 une nouvelle forme de RdR voit le jour, qui se focalise moins sur la problĂ©matique du VIH et des consommations de drogue par voie intraveineuse mais davantage sur les pratiques festives au sens plus large : les consommations, les impacts liĂ©s Ă  l’environnement (les sons, les lumiĂšres
), les rencontres qui s’y font, etc. A ce propos, elle applaudit le pragmatisme belge qui les a fort inspirĂ©s au dĂ©part.

L’association est d’ailleurs accompagnĂ©e par Modus Vivendi pour la mise en place des labels « Quality Night ». Cette initiative leur a permis d’amĂ©liorer les compĂ©tences et l’inclusion d’une co-responsabilitĂ© des gĂ©rants de milieux festifs.

L’accompagnement, la sensibilisation et la formation des gĂ©rants ou des organisateurs de temps festifs en tout genre, qu’ils soient reconnus ou non, des professionnels, des Ă©tudiants
 est l’un des axes clĂ©s de leur travail. On retiendra par exemple quelques outils aux noms marrants, originaux et Ă©vocateurs mis Ă  leur disposition tels que la « Borne to be alive » (qui propose un ensemble d’outils tels que des Ă©thylotests, des « roule-ta-paille », des prĂ©servatifs, des bouchons d’oreille…) et les « kiff » (des kits pour faire la fĂȘte, disponibles pour toute personne qui organise une fĂȘte chez elle avec quelques amis). Nous vous invitons Ă  dĂ©couvrir plus largement le travail et l’accompagnement rĂ©alisĂ©s par l’équipe de la Spiritek sur le site de l’association www.spiritek-asso.com.

Les enjeux futurs

La parole revient ensuite Ă  Catherine Van Huyck. Forte de son expĂ©rience de terrain, la directrice de Modus Vivendi revient sur les dĂ©fis et les points d’attention pour le secteur. La RdR est aujourd’hui reconnue, tant par les politiques que par les usagers. Le secteur s’est peu Ă  peu institutionnalisĂ© et peut enfin « dire son nom » ! Le cadre de travail reste fragile mais est devenu plus pĂ©renne, le cadre lĂ©gal Ă©volue parfois positivement (c’est le cas par exemple pour les comptoirs d’échange de matĂ©riel stĂ©rile, pour le transport de produits vers des laboratoires pour du testing
) mĂȘme si, ne nous leurrons pas, nous sommes loin (trĂšs loin !) d’un cadre lĂ©gal porteur et favorable. Un projet comme la salle de consommation Ă  moindre risque (SCMR) a vu le jour derniĂšrement Ă  LiĂšge. Et le secteur peut jouir d’une excellente expertise en termes d’évaluation et d’ ‘evidence-based’
 Tous ces points positifs ne sont pas Ă  balayer d’un revers de la main.

Pourtant, le secteur de la RdR, analyse-t-elle, se trouve aujourd’hui en tension entre deux courants : d’une part sa reconnaissance et son institutionnalisation, et d’autre part le mĂ©pris de ses principes. Catherine Van Huyck nous liste ici cinq points d’attention pour l’avenirNote bas de page :

  1. « Nous devons faire attention Ă  ne pas devenir des gestionnaires, pour rester avant tout au service des personnes ». Pour cela, elle recommande aux acteurs de « sortir de leur milieu », de retourner se confronter aux rĂ©alitĂ©s changeantes du terrain, de rester au plus proche des usagers. Valoriser le temps du contact humain et ne pas se cantonner Ă  un rĂŽle de distributeur de matĂ©riel
 voilĂ  un dĂ©fi et une tension frustrante et usante auxquels sont confrontĂ©s les travailleurs, qui se trouvent Ă  courir derriĂšre les chiffres de leur file active plutĂŽt que d’avoir du temps pour tisser du lien et travailler sur les autres dĂ©terminants, comme le soulignait Laurence Przylucki avec Le Comptoir.
  2. D’un point de vue Ă©thique, il est essentiel de « ramener le dĂ©bat au sein de la collectivitĂ© sur la reprĂ©sentation des drogues mais aussi sur la responsabilitĂ© collective – commune, civique et politique – toujours plus fragilisĂ©e de nos jours ».
  3. Dans le mĂȘme ordre d’idĂ©e, elle insiste sur la responsabilisation individuelle toujours plus prĂ©gnante dans l’imaginaire et le discours collectif. Pourtant, tout le monde n’est pas Ă©gal face aux produits, face Ă  l’accĂšs aux soins, etc. « Il faut se mettre dans une vision de justice sociale ».
  4. Le point d’attention suivant porte sur les usagers et sur la reconnaissance de leurs savoirs. Une reconnaissance mutuelle entre professionnels et usagers est centrale et ne doit pas ĂȘtre oubliĂ©e. Elle cite des exemples comme le fait que les pairs-aidants sont parfois moins considĂ©rĂ©s dans des Ă©quipes de travailleurs ou le manque de confiance qu’on peut tĂ©moigner face aux usagers concernant l’usage de produits tels que le Naloxone (un antidote utilisĂ© en cas d’overdose aux opiacĂ©s tels que l’hĂ©roĂŻne).
  5. Et enfin, bien qu’il faille porter une attention aux dĂ©terminants de la santĂ©, c’est aussi le cadre prohibitionniste en Belgique qu’il faudrait rĂ©former, souligne-t-elle (applaudissements dans la salle). Sortir du camp systĂ©matique de l’opposition pour construire une nouvelle politique et pouvoir se mettre dans la posture « avec qui et pourquoi travaillons-nous, plutĂŽt que contre qui et pourquoi » apporterait beaucoup au secteur.

En guise de conclusion, nous citerons Anne Coppel : « La rĂ©duction des risques, c’est en fait le principe de base de toute prĂ©vention. ‘Si tu fais de la moto, mets un casque’ par exemple. Il s’agit pourtant de quelque chose de banal appliquĂ© Ă  un contexte spĂ©cifique : celui de la consommation de drogues
 au fond, ce n’est que ça. MalgrĂ© tout, nous n’arrivons pas Ă  changer le caractĂšre d’exception de cette politique. Une fois qu’on a basculĂ© dans ce principe, c’est une Ă©vidence.»

Pour en savoir plus :

Directrice de l’asbl Le Comptoir

ArrĂȘtĂ© Royal du 05/06/2000 relatif Ă  l’exercice des professions de soins de santĂ©

Nous vous invitons Ă  lire son analyse plus dĂ©taillĂ©e et approfondie dans l’article « RDR et prohibition : quel sens donner Ă  l’action ? » paru dans Prospective Jeunesse, n°78, novembre 2017.

Penser la santé autrement : vers une approche globale et féministe ?

Aujourd’hui, la mĂ©decine se rĂ©vĂšle de plus en plus divisĂ©e en spĂ©cialisations multiples et la santĂ©[1] de chacun-e n’est plus que trĂšs rarement analysĂ©e dans sa globalitĂ©. C’est l’approche biomĂ©dicale qui s’impose principalement, proposant une vision de la personne, de la santĂ© et de la maladie axĂ©e sur la biologie. Pourtant, d’autres approches de la santĂ© ont toujours coexistĂ© et continuent de se dĂ©velopper un peu partout, et tout particuliĂšrement au QuĂ©bec. Celles-ci remettent en cause le modĂšle biomĂ©dical dominant. Le prĂ©sent article se focalise sur une thĂ©orie quĂ©bĂ©coise, dite de l’approche globale et fĂ©ministe de la santĂ©.

ParticuliĂšrement utile pour rĂ©aliser des diagnostics, le modĂšle biomĂ©dical rĂ©duit la santĂ© Ă  l’absence ou Ă  la gestion de la maladie, alors qu’il s’agit d’un concept bien plus large. Il se focalise sur des facteurs biologiques pour expliquer une maladie, sans inclure des facteurs sociaux et psychologiques ni prendre en compte les interactions rĂ©ciproques entre le physique et le mental. Ce systĂšme s’inscrit dans une mĂ©dicalisation croissante de la santĂ©, soutenue par le poids toujours plus important des firmes pharmaceutiques, notamment au travers des publicitĂ©s.

Depuis toujours, d’autres approches de la santĂ© remettent en cause ce modĂšle biomĂ©dical, estimant, entre autres, que celui-ci est dĂ©passĂ© au vu de l’évolution du secteur de la santĂ© : si pendant longtemps les principales causes de dĂ©cĂšs Ă©taient des maladies infectieuses, pour lesquelles le diagnostic Ă©tait fondamental (tuberculose, pneumonie, grippe, etc.), aujourd’hui ce sont les maladies chroniques, dites « de sociĂ©tĂ© » (c’est-Ă -dire liĂ©es Ă  nos modes de vie), qui sont en hausse (crises cardiaques, cancers, accidents cardio-vasculaires, etc.). À cela s’ajoute Ă©galement les maladies mentales, de plus en plus identifiĂ©es et mĂ©dicalisĂ©es. Celles-ci sont par contre encore parfois considĂ©rĂ©es comme moins graves que des maladies physiques, le biomĂ©dical Ă©tablissant une sorte de « hiĂ©rarchie » du corps sur le mental.

Une approche globale, genrée et inclusive ?

Outre les soins, la santĂ© englobe Ă©galement le bien-ĂȘtre, le bien-vivre, la santĂ© mentale, et bien d’autres Ă©lĂ©ments. Pour l’apprĂ©hender dans sa globalitĂ©, toutes les facettes de la santĂ© doivent ĂȘtre prises en compte de maniĂšre Ă©quivalente et complĂ©mentaire : tout le monde gagnerait Ă  ce que notre systĂšme de santĂ© soit moins « compartimentĂ© ».

Afin de dĂ©velopper une approche globale, il est Ă©galement nĂ©cessaire de prendre en compte divers facteurs fondamentaux (sociaux, environnementaux, Ă©conomiques, etc.), oubliĂ©s du systĂšme biomĂ©dical. Parmi ceux-ci figure le genre. On ne le rĂ©pĂštera jamais assez : l’égalitĂ© entre les femmes et les hommes est encore loin d’ĂȘtre acquise et le domaine de la santĂ© n’échappe pas Ă  ce constat. Report plus frĂ©quent des soins de santĂ©, plus forte consommation d’antidĂ©presseurs, etc.

Divers Ă©lĂ©ments indiquent des diffĂ©rences significatives entre les femmes et les hommes en matiĂšre de santĂ©, qui ne sont pourtant que peu (voire pas du tout) prises en compte dans notre systĂšme de santĂ©. Certains pans de la santĂ© des femmes (notamment en matiĂšre de santĂ© sexuelle, comme l’endomĂ©triose ou encore le vaginisme) ne sont encore que trĂšs peu explorĂ©s. De plus, l’approche biomĂ©dicale a tendance Ă  ne pas considĂ©rer l’influence du patriarcat et des phĂ©nomĂšnes sociaux dans le dĂ©veloppement d’un Ă©ventuel mal-ĂȘtre, axant la santĂ© sur l’aspect curatif et interventionniste, au dĂ©triment de la prĂ©vention et de la promotion de la santĂ©.

L’ approche globale et fĂ©ministe de la santĂ©

Cette thĂ©orie quĂ©bĂ©coise s’articule autour de huit axes fondateurs.

  1. Concevoir l’ĂȘtre humain comme un tout

PlutĂŽt que de segmenter la personne au travers d’une conception mĂ©caniste du corps, une approche globale de la santĂ© se base sur la conception de l’ĂȘtre humain comme un tout (physique et mental), en perpĂ©tuelle interaction avec son environnement social et physique. La santĂ© est dĂšs lors considĂ©rĂ©e aussi comme le rĂ©sultat de rapports sociaux et est dĂ©finie de maniĂšre holistique, c’est-Ă -dire considĂ©rant l’humain comme un tout indivisible.

  1. PrĂŽner l’intersectionnalitĂ©

Dans cette logique holistique, l’approche globale et fĂ©ministe remet Ă©galement en question la vision « uniformisante » de la santĂ© : les spĂ©cificitĂ©s physiologiques et sociales de chaque sexe et de chaque genre doivent ĂȘtre prises en compte. Cela peut se faire au travers de l’intersectionnalitĂ©, un concept utilisĂ© principalement en sociologie pour « croiser » diffĂ©rentes caractĂ©ristiques d’une personne qui peut alors faire face Ă  des discriminations multiples et/ou Ă  des rapports de domination divers. C’est par exemple le cas du sexe, du genre, de l’orientation sexuelle, du niveau de vie, d’un Ă©ventuel handicap, de la religion ou encore de l’origine ethnique. Cette notion est particuliĂšrement utilisĂ©e par les militant-e-s antiracistes et par les fĂ©ministes car il permet de penser les discriminations dans des cadres plus larges et, Ă  nouveau, moins segmentĂ©s.

  1. Prendre en compte les déterminants sociaux

Selon toute approche globale de la santĂ©, il est nĂ©cessaire de prendre en compte une sĂ©rie de dĂ©terminants sociaux, c’est-Ă -dire des facteurs dĂ©finissables qui influencent l’état de santĂ© d’une personne ou qui y sont associĂ©s. En interagissant entre eux, ces dĂ©terminants engendrent des conditions de vie qui ont une influence sur la santĂ© de chacun-e. Ces facteurs peuvent ĂȘtre classĂ©s de diverses façons, en voici un exemple[2] :

  • Le niveau de revenus et le statut social
  • Les rĂ©seaux de soutien social
  • L’éducation
  • L’emploi et les conditions de travail
  • Les environnements sociaux
  • Les environnements physiques
  • Les habitudes de santĂ© et la capacitĂ© d’adaptation personnelle
  • Le dĂ©veloppement de la petite enfance
  • Le patrimoine biologique et gĂ©nĂ©tique
  • Les services de santĂ©
  • Le sexe
  • La culture

Parmi ceux-ci, les dĂ©terminants sociaux sont l’une des principales causes d’inĂ©galitĂ©s en matiĂšre de santĂ©, car ils conditionnent les circonstances dans lesquelles chacun-e naĂźt, grandit, vit, travaille et vieillit, influençant ainsi la façon dont chaque personne peut faire face Ă  une Ă©ventuelle maladie.

  1. Privilégier la prévention et la promotion de la santé à une médecine interventionniste et curative

DĂšs le moment oĂč l’on apprĂ©hende la santĂ© de maniĂšre plus large que les maladies, il est Ă©galement nĂ©cessaire de ne pas considĂ©rer la mĂ©decine interventionniste et curative comme l’unique solution. C’est dans ce cadre que la prĂ©vention et la promotion de la santĂ© jouent un rĂŽle fondamental.

L’Organisation Mondiale de la SantĂ© (OMS) dĂ©finit la promotion de la santĂ© comme « le processus qui confĂšre aux populations les moyens d’assurer un plus grand contrĂŽle sur leur propre santĂ©, et d’amĂ©liorer celle‑ci ». DĂšs lors, la santĂ© est considĂ©rĂ©e comme une ressource de la vie quotidienne (et non comme le but de la vie) ; c’est un concept positif qui met en valeur les ressources sociales, individuelles et les capacitĂ©s physiques. Au-delĂ  de prĂŽner des modes de vie sains, la promotion de la santĂ© vise le bien-ĂȘtre : la santĂ© n’est donc pas rĂ©duite au secteur sanitaire.

Dans ce cadre, l’approche globale et fĂ©ministe de la santĂ© considĂšre que « la santĂ© est affaire de justice sociale. C’est pourquoi les pouvoirs publics ne doivent pas abdiquer leur devoir de lĂ©gifĂ©rer et de rĂšglementer dans tous les domaines qui touchent les dĂ©terminants de la santĂ©[3] ».

  1. DĂ©velopper l’autosantĂ©

L’autosantĂ© implique une dĂ©marche personnelle permettant Ă  chacun-e de percevoir les liens entre sa santĂ© et sa situation de vie. L’autosantĂ© est trop souvent rĂ©duite Ă  l’autodiagnostic (autopalpations, autotests permettant le dĂ©pistage de certaines pathologies, etc.), mais ce concept est plus large : il implique que chaque personne puisse agir sur elle-mĂȘme et sur son environnement dans le but d’amĂ©liorer son Ă©tat de santĂ© et sa qualitĂ© de vie. L’autosantĂ© n’est pourtant pas qu’une dĂ©marche individuelle, elle peut Ă©galement ĂȘtre collective. De tous temps, les femmes en particulier, se transmettaient des connaissances pratiques, de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration, au sujet de la santĂ© fĂ©minine, mais ces traditions se sont petit Ă  petit perdues, Ă  l’avantage du savoir mĂ©dical.

L’autosantĂ© s’inscrit dans le dĂ©veloppement global de l’empowerment, soit « la prise en charge de l’individu par lui-mĂȘme, de sa destinĂ©e Ă©conomique, professionnelle, familiale et sociale[4] ». L’empowerment en matiĂšre de santĂ© recouvre notamment l’éducation thĂ©rapeutique du patient, dĂ©crit par l’OMS comme « un processus continu, intĂ©grĂ© dans la dĂ©marche de soins et centrĂ© sur le patient. Il comprend des activitĂ©s organisĂ©es de sensibilisation, d’information, d’apprentissage et d’accompagnement psychosocial concernant la maladie, le traitement prescrit, les soins, l’hospitalisation et les autres institutions de soins concernĂ©es. Ce processus Ă©ducatif vise Ă  aider le patient et son entourage Ă  comprendre la maladie et le traitement, Ă  mieux coopĂ©rer avec les soignants et Ă  maintenir ou Ă  amĂ©liorer sa qualitĂ© de vie » [5].

Promouvoir l’empowerment en matiĂšre de santĂ© permet de rendre chacun-e vĂ©ritablement actrice/teur de santĂ© et ce mĂȘme en-dehors de toute prise en charge, par exemple en dĂ©veloppant de saines habitudes de vie. PrĂ©venir des problĂ©matiques de santĂ© s’inscrit dans une attention aux attitudes et aux comportements qui construisent la santĂ© (privilĂ©gier une alimentation saine et Ă©quilibrĂ©e, veiller Ă  conserver une activitĂ© physique quotidienne et modĂ©rĂ©e, accorder de l’importance Ă  la relaxation, limiter la consommation de tabac et d’alcool, etc.). Les patient-e-s sont dĂšs lors partie prenante de leur santĂ© mais cela ne les en rend pas responsables pour autant : l’empowerment doit toujours s’inscrire dans un cadre d’accompagnement professionnel psycho-mĂ©dico-social et n’exclut en rien la possibilitĂ© de recourir Ă  la mĂ©decine « classique ».

  1. Favoriser l’autonomie des patient-e-s et respecter leur droit au consentement Ă©clairĂ©

Cet axe est une illustration « miroir » du prĂ©cĂ©dent : si l’autosantĂ© se dĂ©veloppe, le corps mĂ©dical se doit de respecter cette autonomie croissante des patient-e-s et de s’y adapter. En Belgique, depuis 2002, une loi est consacrĂ©e aux droits des patient-e-s. Celle-ci reprend entre autres le droit au consentement Ă©clairĂ©, qui est un droit fondamental, signifiant que toute l’information disponible doit ĂȘtre transmise aux patient-e-s afin de leur permettre de prendre une dĂ©cision en toute connaissance de cause et de comprendre chaque acte mĂ©dical posĂ©.

  1. Développer un sens critique face aux savoirs à prétention universelle

L’empowerment rĂ©el et efficace des patient-e-s ne peut se faire qu’à travers une dĂ©mocratisation du savoir (dans une logique de prĂ©vention) ainsi qu’une remise en question des savoirs Ă  prĂ©tention universelle tels que la religion, la politique et la mĂ©decine. Cette derniĂšre se fonde encore fortement sur des savoirs biomĂ©dicaux qui doivent ĂȘtre analysĂ©s avec un sens critique, notamment au vu de la norme masculine, blanche et hĂ©tĂ©rosexuelle qui reste la rĂ©fĂ©rence.CouplĂ© au droit au consentement Ă©clairĂ©, le dĂ©veloppement de ce sens critique permet Ă©galement d’instaurer une relation plus Ă©galitaire entre les patient-e-s et les thĂ©rapeutes. Il ne s’agit nullement ici de dire que les patient-e-s doivent se substituer aux mĂ©decins ou ne plus croire ce que celles/ceux-ci disent, mais bien de permettre une discussion plus Ă©quilibrĂ©e entre le savoir du corps mĂ©dical et les volontĂ©s, souhaits, prĂ©fĂ©rences de chaque patient-e afin de trouver ensemble la solution la plus appropriĂ©e Ă  chaque situation.

  1. Favoriser l’ouverture aux approches alternatives

Toujours dans une logique d’adopter l’approche la plus adĂ©quate pour chacun-e, il peut s’avĂ©rer utile d’ĂȘtre ouvert-e aux approches alternatives. Il ne s’agit pas de dire qu’il faut les prĂ©fĂ©rer Ă  l’approche « traditionnelle », mais qu’il faut ĂȘtre conscient-e que certaines d’entre elles conviennent mieux que d’autres Ă  certaines personnes, ce que l’approche mĂ©dicale dominante fait relativement peu.Nous insistons toutefois sur le fait que celles-ci doivent nĂ©cessairement ĂȘtre encadrĂ©es et rĂšglementĂ©es de maniĂšre Ă  assurer le respect total des droits de la personne, tout en lui offrant une solution de qualitĂ©, ayant fait ses preuves. Nous prĂŽnons donc la complĂ©mentaritĂ© des approches plutĂŽt qu’une approche unique.

Des clefs pour penser la santé autrement

La santĂ© est un domaine complexe dont on oublie trop souvent les multiples dĂ©terminants pour se concentrer sur les soins de santĂ©. Ils sont bien entendu un aspect fondamental de la santĂ©, mais celle-ci ne doit pas ĂȘtre rĂ©duite Ă  cette dimension. Les influences rĂ©ciproques du social et de la santĂ© doivent impĂ©rativement ĂȘtre prises en compte pour tendre vers plus d’égalitĂ© en la matiĂšre.

L’approche globale et fĂ©ministe de la santĂ© prĂ©sente des clefs pour l’apprĂ©hender diffĂ©remment et permettre Ă  chacun-e de se l’approprier pour en devenir actrice/teur Ă  part entiĂšre. Cela ne signifie pas pour autant qu’elle soit parfaite ni que les autres approches soient Ă  rejeter. Si les huit axes autour desquels elle s’articule sont pertinents, certains doivent ĂȘtre appliquĂ©s avec prĂ©caution. C’est notamment le cas de l’autosantĂ©, qui doit s’inscrire dans un encadrement professionnel du secteur psycho-mĂ©dico-social, ou encore des approches alternatives, qui doivent ĂȘtre rĂšglementĂ©es.

Il est important de prĂ©ciser que l’approche globale et fĂ©ministe n’est pas contradictoire avec l’approche biomĂ©dicale, et que cette derniĂšre ne doit donc en aucun cas ĂȘtre « rejetĂ©e en bloc », la mĂ©decine curative et interventionniste sauvant de nombreuses vies. Il s’agit plutĂŽt d’une alternative pouvant s’avĂ©rer complĂ©mentaire Ă  l’approche biomĂ©dicale dominante.

Les mouvements fĂ©ministes ont toujours jouĂ© un rĂŽle fondamental dans la remise en question et la contestation de l’approche biomĂ©dicale, celle-ci Ă©tant trĂšs « andronormĂ©e », c’est-Ă -dire que les hommes y constituent la norme. C’est pourquoi il est nĂ©cessaire que les soins de santĂ©, et plus largement la vision de la santĂ©, soient adaptĂ©s aux spĂ©cificitĂ©s de genre. Cet aspect n’est encore que trop peu pris en compte, en ce compris dans les actions de prĂ©vention et de rĂ©colte des donnĂ©es. Afin d’agir Ă©galement sur le plan collectif, nous porterons cette revendication afin que ces Ă©lĂ©ments puissent transparaĂźtre dans les futures dĂ©clarations politiques gouvernementales en matiĂšre de santĂ©.

Pour aller plus loin :


[1] Nous utiliserons ici le terme « santĂ© » dans son sens le plus global, sans connotation ni positive, ni nĂ©gative. Nous ne suivons donc pas ici la dĂ©finition de l’OMS qui considĂšre la santĂ© comme un concept positif : « La santĂ© est un Ă©tat de complet bien-ĂȘtre physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmitĂ©. ». Pour plus d’information, voir www.who.int.

[2] Agence de la SantĂ© publique du Canada, « Qu’est-ce qui dĂ©termine la santĂ© ? », sur www.phac-aspc.gc.ca, URL : http://www.phac-aspc.gc.ca/ph-sp/determinants/index-fra.php#key_determinants.

[3] Isabelle Mimeault, SynthÚse du cadre de référence en santé des femmes. Changeons de lunettes ! Pour une approche globale et féministe de la santé, 2008, p. 7, URL : http://rqasf.qc.ca/files/RQASF-Synthese_Cadre_PS_2009.pdf.

[4] Frédéric Orobon, « Promotion de la santé et empowerment : quelques ambiguïtés », Carnets de Santé, URL : http://www.carnetsdesante.fr/Promotion-de-la-sante-et.

[5] OMS-Europe, Therapeutic Patient Education – Continuing Education Programmes for Health Care Providers in the Field of Prevention of Chronic Disease, 1998, URL : http://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0007/145294/E63674.pdf.

Femmes, genre et promotion de la santé : origine et perspectives du réseau

En 2018, Femmes et SantĂ© asbl est mandatĂ©e par la Cocof pour crĂ©er et renforcer un rĂ©seau « Femmes, genre et promotion de la santĂ© » sur le territoire bruxellois. La mise en place de ce rĂ©seau prĂ©vue par le plan stratĂ©gique de promotion de la santĂ© 2018-2022, rĂ©pond Ă  l’objectif transversal « lutter contre les inĂ©galitĂ©s basĂ©es sur le genre ». Nous vous proposons ici de (re)dĂ©couvrir Femmes et SantĂ© asbl, la Plateforme pour Promouvoir la SantĂ© des Femmes, l’articulation entre ces entitĂ©s et la nouvelle mission de rĂ©seau, ainsi que les projets portĂ©s par celui-ci.

L’ADN de Femmes et SantĂ©

Femmes et santĂ© est une asbl qui opĂšre depuis plus d’une quinzaine d’annĂ©es sur le territoire de la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles, en proposant des ateliers de promotion de la santĂ© et des actions communautaires en santĂ© majoritairement Ă  destination de femmes cisgenres[1].La mise en place de ce type d’ateliers rĂ©pondait Ă  plusieurs constats :

  • La surmĂ©dicalisation du corps des femmes tout au long de leurs cycles de vie : les rĂšgles, la grossesse, l’accouchement, la pĂ©riode autour de la cinquantaine sont autant de processus naturels qui sont souvent pathologisĂ©s et dĂšs lors majoritairement pris en charge par des consultations mĂ©dicales ou psychologiques ou par la prescription de mĂ©dicaments.
  • Les rapports de pouvoir entre les soignant.e.s et les soignĂ©es : la mĂ©decine occidentale place les soignant.e.s dans le rĂŽle d’expert.e.s, tandis qu’une forme de discrĂ©dit est accordĂ© aux soignĂ©es. On ne prend pas suffisamment en compte les savoirs populaires et l’expertise des personnes sur leur propre corps. La consultation mĂ©dicale peut rapidement devenir un espace de pouvoir oĂč l’on va dire ce qui est bon de faire, oĂč le consentement Ă©clairĂ© n’est plus systĂ©matique
 aboutissant parfois Ă  des violences mĂ©dicales et institutionnelles qui peuvent ĂȘtre lourdes de consĂ©quences pour la santĂ© des femmes.
  • Un manque de comprĂ©hension systĂ©mique de la santĂ© des femmes : la santĂ© est conditionnĂ©e par de nombreux dĂ©terminants sociaux, dont le genre, le fait d’ĂȘtre racisĂ©.e, l’accĂšs aux ressources socioĂ©conomiques, l’accĂšs aux droits culturels, le fait de disposer d’un rĂ©seau social ou d’ĂȘtre isolĂ©.e, etc. La consultation mĂ©dicale dispose souvent de trop peu de temps pour intĂ©grer ces dimensions et ne peut rĂ©pondre Ă  elle seule Ă  l’ensemble de ces facteurs sociaux qui se rĂ©percutent sur la santĂ©. En ce qui concerne la santĂ© des femmes, une comprĂ©hension de la spĂ©cificitĂ© de leur statut dans la sociĂ©tĂ© est nĂ©cessaire pour mieux les accompagner dans leurs cycles de vie, mais Ă©galement pour favoriser leur autonomie, leur auto-dĂ©termination et les liens de solidaritĂ©s intergĂ©nĂ©rationnels.

De la mise en place d’ateliers Ă  l’élaboration d’outils de transmission

Les ateliers de promotion de la santĂ© des femmes ont Ă©tĂ© mis en place par Catherine Markstein, mĂ©decin fondatrice et ancienne coordinatrice de l’ASBL. Plusieurs animatrices l’ont accompagnĂ© dans ce projet. Ensemble, elles se sont pleinement inspirĂ©es des dynamiques de self-help, que l’on peut traduire par auto-santĂ©, dĂ©veloppĂ©es par les mouvements fĂ©ministes dans les annĂ©es 70’.

Par ces dynamiques, on sort du colloque singulier entre mĂ©decin et patiente pour envisager la santĂ© de maniĂšre collective et participative. Chacun.e a une expertise Ă  apporter au groupe ; l’autogestion du groupe est garante de la bienveillance et du recoupement des informations. Ces ateliers visent Ă  recrĂ©er une culture de transmission entre les femmes par l’échange de leurs savoirs et compĂ©tences propres, de leurs expĂ©riences et vĂ©cus. Elles en ressortent plus informĂ©es et affirmĂ©es pour Ă©changer avec le corps mĂ©dical. Les grandes recommandations de santĂ© publique peuvent ĂȘtre des balises, mais en aucun cas, une rĂ©ponse systĂ©matique : chaque femme doit trouver les rĂ©ponses qui lui conviennent Ă©tant donnĂ© ses conditions de vie.Catherine Markstein s’est appliquĂ©e Ă  traduire sa pratique et ses rĂ©flexions autour de la santĂ© des femmes en deux outils de transmission.

  1. Le rĂ©fĂ©rentiel Auto-santĂ© des femmes[2] : Il encourage la mise en place d’ateliers de santĂ© auto-gĂ©rĂ©s, au sein d’associations ou dans la sphĂšre citoyenne. Il fournit des canevas d’ateliers autour de l’immunitĂ©, de la santĂ© des seins, du pĂ©rinĂ©e, du sommeil, la pĂ©riode autour de la cinquantaine, etc. afin de soutenir les groupes concernĂ©s dans leur dĂ©marche.
  2. La confĂ©rence gesticulĂ©e « La place n’était pas vide
 » : cette confĂ©rence (1h20’) est un outil d’éducation populaire (France) qui mĂ©lange des savoirs scientifiques et les savoirs expĂ©rientiels. En fil rouge de son expĂ©rience personnelle, Catherine Markstein greffe ses rĂ©flexions et interrogations vis-Ă -vis d’une pratique mĂ©dicale patriarcale, raciste et nĂ©olibĂ©rale. Elle propose des pistes pour une pratique mĂ©dicale moins normative, plus inclusive et participative[3].

La Plateforme pour Promouvoir la Santé des Femmes : un espace de renforcement et de plaidoyer

En parallĂšle des ateliers de promotion de la santĂ© et des actions en santĂ© communautaire s’est dĂ©veloppĂ© une plateforme de femmes et d’associations concernĂ©es par la santĂ© des femmes et dĂ©sireuses de dĂ©fendre l’intĂ©gration de l’approche de genre dans les recherches, les actions et les politiques de promotion de la santĂ©. La « Plateforme pour Promouvoir la SantĂ© des Femmes » (PPSF), a la caractĂ©ristique de croiser des regards (citoyennes et professionnelles), des secteurs (promotion de la santĂ©, Ă©ducation permanente, coopĂ©ration au dĂ©veloppement, etc.), des tĂ©moignages, constats et observations autour de la santĂ© des femmes.

La PPSF a Ă©tĂ© un lieu de renforcement des femmes et des associations dĂ©sireuses de porter ces questions, alors mĂȘme que persistent de nombreuses rĂ©sistances Ă  parler de genre et de nombreux questionnements sur la maniĂšre d’opĂ©rationnaliser le genre en promotion de la santĂ©.Au cours de ces dix derniĂšres annĂ©es, la PPSF a portĂ© une rĂ©flexion autour de :

  • l’auto-santĂ© : en continuum des actions prĂ©sentĂ©es prĂ©cĂ©demment, la PPSF soutient les femmes dans la rĂ©appropriation de leur corps, leur santĂ© et leur sexualitĂ© tout au long de leurs cycles de vie par l’échange de savoirs et d’expĂ©riences entre elles. Cette thĂ©matique a ainsi constituĂ© le cƓur du premier Ă©vĂšnement grand public organisĂ© par la PPSF en mai 2013.
  • les violences faites aux femmes : elles ne concernent pas seulement la violence entre partenaires ou intrafamiliale, mais des formes de violence beaucoup plus systĂ©miques et liĂ©e Ă  une sociĂ©tĂ© patriarcale. Les femmes subissent des discriminations du fait de leur identitĂ© de genre, qui se rĂ©percutent au niveau de l’accĂšs Ă  l’emploi, des salaires, mais Ă©galement dans l’espace public (sexisme, harcĂšlement), dans les pratiques mĂ©dicales (violences gynĂ©cologiques ou obstĂ©tricales), dans leur sexualitĂ© (violences sexuelles, viols).
  • la place du Care[4] dans notre sociĂ©tĂ© : un nombre important de femmes tĂ©moignent que malgrĂ© certaines avancĂ©es en termes d’égalitĂ© au niveau professionnel, les stĂ©rĂ©otypes ont la vie dure au sein de la sphĂšre privĂ©e. Dans les couples hĂ©tĂ©rosexuels, les femmes pointent du doigt l’inĂ©gale rĂ©partition des tĂąches liĂ©es aux soins (de la maison, des enfants, des parents, etc.) et le poids que cela suppose sur leur santĂ©. Le Care comme grille de lecture a aussi l’avantage de questionner les valeurs et les rythmes de nos sociĂ©tĂ©s : une sociĂ©tĂ© de la performance et de la productivitĂ© est-elle capable de valoriser les tĂąches liĂ©es au Care, Ă  la fois invisibles, souvent non-monĂ©tarisĂ©es et pourtant essentielles au maintien de la vie humaine ?
  • la maternitĂ© : elle est souvent identifiĂ©e par les femmes elles-mĂȘmes comme un moment de fracture dans leur vie. La pĂ©riode prĂ©natale est trĂšs investie, voire surinvestie au niveau mĂ©dical, alors que la pĂ©riode postnatale est souvent caractĂ©risĂ©e par une forme d’isolement, en plus de l’extrĂȘme fatigue et des multiples questionnements propres Ă  l’arrivĂ©e d’un nouveau-nĂ©. La vie des femmes devenues mĂšres doit se rĂ©organiser drastiquement mĂȘme au-delĂ  du post-partum, ce qui a beaucoup d’impacts sur leur santĂ© physique et mentale. Ce moment est, en ce sens, un moment de vulnĂ©rabilitĂ© en termes de vĂ©cus des violences et des inĂ©galitĂ©s.

Nos rĂ©flexions se sont accompagnĂ©es de dynamiques de plaidoyer telles que la sensibilisation et la rencontre avec des Ă©lu.e.s
mais pas uniquement ! Nous tentons d’amener des professionnels d’autres secteurs Ă  s’approprier notre approche et nos rĂ©flexions, les complĂ©ter et les complexifier afin d’étendre l’intĂ©gration d’une dĂ©marche fĂ©ministe de promotion de la santĂ©.

Ainsi, la grille d’analyse du Care attend encore d’ĂȘtre dĂ©clinĂ©e sur de nombreuses thĂ©matiques et problĂ©matiques comme une rĂ©flexion sur les dispositifs de sĂ©curitĂ© sociale avec des mouvements syndicalistes, le soutien du bien-ĂȘtre et le statut des aidant.e.s proches,ou encore les liens entre le genre et les assuĂ©tudes.Image

Un nouveau financement, une nouvelle mission, un nouveau réseau

Le 28 mai 2018 (journĂ©e internationale d’action pour la santĂ© des femmes), nous fĂȘtions les 10 ans d’existence de la PPSF. L’octroi d’une subvention strictement allouĂ©e Ă  la constitution et au renforcement d’un rĂ©seau « Femmes, genre et promotion de la santĂ© » est pour nous une grande joie et un signe de reconnaissance par rapport Ă  l’ampleur du travail jusqu’ici accompli de maniĂšre militante. 2018 sonne donc un tournant : la fin des ateliers de promotion de la santĂ© d’une part et l’institutionnalisation du rĂ©seau bruxellois d’autre part. L’appellation Plateforme pour Promouvoir la SantĂ© des Femmes (PPSF) disparait au profit du vocable « rĂ©seau ».

Lors du 28 mai, une trentaine de femmes issues de la PPSF et du secteur de promotion de la santĂ© Ă  Bruxelles se sont rencontrĂ©es. Dans un premier temps, les membres fondatrices et actives de la PPSF ont exprimĂ© la place qu’elles avaient accordĂ© Ă  ce rĂ©seau dans leurs actions citoyennes ou professionnelles.

Dans un second temps, nous avons abordĂ© les pistes de rĂ©flexions et d’actions que la PPSF pensait ouvrir au fil de ces trois annĂ©es. Enfin, les participantes ont Ă©tĂ© invitĂ©es Ă  s’exprimer sur leurs ressentis et leurs attentes par rapport Ă  la mise en place d’un tel rĂ©seau.

Cette rencontre a Ă©tĂ© l’occasion de relever de nombreux dĂ©fis pour le futur rĂ©seau bruxellois Ă  diffĂ©rents niveaux :

  • la reprĂ©sentativitĂ© : penser la mixitĂ©, l’inclusion des personnes transgenres et assurer la prĂ©sence de non-professionnel.le.s dans le rĂ©seau
  • des cadres d’analyse : Ă©largir les rĂ©flexions Ă  d’autres fĂ©minismes, penser de maniĂšre intersectionnelle comme intĂ©grer l’afrofĂ©minisme, les transfĂ©minismes

  • des missions potentielles :
    • rĂ©aliser un diagnostic des vĂ©cus des femmes dans les quartiers et donner de la lĂ©gitimitĂ© Ă  la parole des usagĂšres dans les associations de promotion de la santĂ©
    • construire un plaidoyer (intersectionnel) en veillant Ă  ce que les personnes concernĂ©es soient directement impliquĂ©es
    • relayer des activitĂ©s rĂ©alisĂ©es par ses membres, et inversement ceux-ci deviennent relais du rĂ©seau
    • construire et proposer une formation autour de l’approche de genre en promotion de la santĂ©
    • accompagner et soutenir les compĂ©tences psychosociales nĂ©cessaires au Care
  • accompagner la rĂ©flexion sur diffĂ©rentes thĂ©matiques de travail :
    • la mixitĂ© ou la non-mixitĂ© (l’importance des espaces « safe »)
    • les rapports de pouvoir entre les professionnel.le.s et les bĂ©nĂ©ficiaires (soignant.e/soignĂ©.e, personnes blanches/racisĂ©es, etc.)
    • l’engagement/la militance dans les pratiques (l’articulation des Ă©chelles de valeurs)
    • la promotion de la santĂ© des personnes malades
    • le lien avec les aidant.e.s proches
    • l’opĂ©rationnalisation de la grille d’analyse du Care dans les pratiques (avec les publics mais aussi dans les institutions elles-mĂȘmes)

Etant donnĂ© que le rĂ©seau bruxellois ne dispose que d’une coordinatrice mi-temps, nous ne pourrons rĂ©pondre Ă  toutes ces attentes endĂ©ans les trois annĂ©es de convention, mais celles-ci suggĂšrent l’ampleur du travail Ă  mener Ă  l’avenir.

Les actions du réseau en 2018

Une photographie du secteur de la promotion de la santé sous le regard du genre

Nos rencontres avec les acteurs et actrices de terrain depuis le dĂ©but de l’annĂ©e nous montrent leur intĂ©rĂȘt Ă  prendre en compte la dimension du genre dans les pratiques, mĂȘme si certaines difficultĂ©s Ă  la traduire en actions concrĂštes sont frĂ©quemment exprimĂ©es.

Afin d’avoir une vision globale du secteur autour de ces questions, nous avons proposĂ© trois rencontres collectives dans le courant du mois d’octobre 2018. Celles-ci ont eu pour objectif d’identifier les reprĂ©sentations des associations autour de ce sujet, la maniĂšre dont cela se traduit sur le terrain dans les pratiques professionnelles et les Ă©changes avec les bĂ©nĂ©ficiaires, d’identifier avec eux/elles leurs questionnements et besoins Ă  faire rĂ©seau autour des questions de genre et santĂ© des femmes.

Nous avons privilĂ©giĂ© un rĂ©sultat « photographique » plutĂŽt qu’un Ă©tat des lieux (plus exhaustif). En effet, le dispositif de rĂ©colte d’informations se veut « lĂ©ger » afin de ne pas surcharger le secteur lors de cette premiĂšre annĂ©e. Une rencontre est prĂ©vue afin de prĂ©senter ces rĂ©sultats au secteur, d’en discuter et de pouvoir dĂ©gager de nouvelles pistes d’action et de travail.

Des rencontres

  • La PPSF s’est toujours rencontrĂ©e mensuellement de septembre Ă  juin. Lors de la photographie, les personnes rencontrĂ©es ont exprimĂ©es leurs besoins d’échanges sur les questions liĂ©es au genre. Le nouveau rĂ©seau doit donc s’approprier cet espace de rencontre, en dĂ©terminer l’objectif, les questions et les thĂ©matiques Ă  aborder ainsi que la frĂ©quence.
  • Le 28 mai, journĂ©e internationale d’action pour la santĂ© des femmes, constituait la rencontre annuelle de la PPSF, Ă  destination du grand public et du monde politique. Le 28 mai restera la date de rassemblement des associations belges francophones qui dĂ©fendent une approche fĂ©ministe de promotion de la santĂ© des femmes.
  • Tout au long de l’annĂ©e, la coordinatrice du rĂ©seau rĂ©pond aux sollicitations du secteur : rĂ©daction d’articles, rencontres, Ă©changes, co-construction d’une action (Ă©vĂšnements, outils, interventions).

Un site internet interactif

Femmes et santĂ© dispose aujourd’hui de deux sites Internet qui rĂ©pondent aux deux missions historiques. A l’avenir, seul le site www.femmesetsante.be (plus connu et plus usitĂ©) persistera et sera entiĂšrement revu dans sa structure, ses contenus et son identitĂ© graphique.

Le futur site a pour objectif d’ĂȘtre une interface interactive autour de la dĂ©marche d’auto-santĂ© et de l’appproche de genre en santĂ©. Nous espĂ©rons qu’il soutiendra toute association et tout collectif dĂ©sireux d’intĂ©grer le genre dans ses recherches, actions et politiques. Le site proposera Ă  la fois des canevas mĂ©thodologiques, des publications de rĂ©fĂ©rence et des ressources autour de diffĂ©rents thĂšmes. Ce site sera Ă©galement l’occasion de valoriser les initiatives, les publications et les actions menĂ©es par d’autres associations.

Des personnes-ressources, des collectifs citoyens ainsi que des associations belges et françaises s’ancrent dans ce mouvement pour la santĂ© des femmes. Un travail de centralisation de ces informations va ĂȘtre rĂ©alisĂ© et diffusĂ© via le nouveau site internet de Femmes et santĂ©, de telle maniĂšre que ce rĂ©seau soit visible et joignable. Ainsi, des personnes qui dĂ©sirent participer Ă  cette dĂ©marche, peuvent identifier un groupe sur leur territoire, de mĂȘme que des personnes dĂ©sireuses de mettre en place ce type d’ateliers, peuvent Ă©galement prendre contact et s’informer auprĂšs des personnes/lieux-ressources.

Et en Wallonie ?

Le transfert des compĂ©tences a le dĂ©savantage de faire vivre notre pays Ă  deux vitesses. En octobre 2018, nous avons relancĂ© des femmes et des associations wallonnes Ă  se rĂ©unir autour de la philosophie de Femmes et SantĂ©. Nous dĂ©sirons renouer des liens de solidaritĂ©, recrĂ©er un espace d’échanges et de renforcement pour les personnes qui s’interrogent sur la santĂ© des femmes et l’intĂ©gration de l’approche de genre en santé et ainsi crĂ©er un rĂ©seau spĂ©cifique en Wallonie en lien avec nos intĂ©rĂȘts et nos thĂ©matiques.

Pour plus d’informations

Pour aller plus loin


Quelques publications autour de ces sujets

Des outils pédagogiques

  • Le Care, une grille d’analyse des rapports sociaux, publiĂ© par la FĂ©dĂ©ration des centres pluralistes de planning familial, 2017. Celui-ci s’inspire de la recherche rĂ©alisĂ©e par la PPSF en 2016 et d’un document-plaidoyer rĂ©digĂ© Ă  l’occasion d’une rencontre avec des politiques en juin 2017. Disponible sur le site de la fĂ©dĂ©ration : http://www.fcppf.be/portfolio/items/le-care/
  • Femmes et SantĂ© et Le Monde selon les femmes finalisent la co-Ă©criture d’une publication dans la collection DĂ©clic du Monde selon les Femmes, dont l’objectif est d’accompagner les associations Ă  intĂ©grer la grille d’analyse du genre dans des projets de santĂ©. Disponible Ă  la fin de l’annĂ©e 2018.

[1] Dont l’identitĂ© de genre assignĂ© Ă  la naissance concorde avec leur sexe biologique.

[2] co-Ă©crit et co-Ă©ditĂ© avec Le monde selon les femmes et la FĂ©dĂ©ration des Centres Pluralistes de Planning Familial. Le rĂ©fĂ©rentiel est disponible en format papier auprĂšs de l’asbl, ainsi qu’en format tĂ©lĂ©chargeable sur le site du Monde selon les femmes : http://mondefemmes.be/genre-developpement-outils_theorie-analyse_declics-genre_r-f-rentiel-auto-sant-des-femmes.htm

[3] Catherine continue de rencontrer des associations et collectifs par le biais de sa confĂ©rence gesticulĂ©e. Si vous ĂȘtes intĂ©ressĂ©.e.s Ă  la recevoir, n’hĂ©sitez pas Ă  contacter l’asbl. Par ailleurs, La confĂ©rence sera bientĂŽt disponible en format vidĂ©o.

[4] Terme anglais qu’on peut traduire par sollicitude, le « prendre soin » des autres, de soi, de son environnement. Il comprend un ensemble de savoir-ĂȘtre et de tĂąches « que nous faisons pour maintenir, rĂ©parer et perpĂ©tuer notre monde, afin que nous puissions y vivre aussi bien que possible. Ce monde comprend nos corps, nos personnes et notre environnement. » (Joan Tronto, 2013).

Contraception : oĂč sont les hommes ?

Aujourd’hui, en Belgique, les femmes sont majoritairement en charge de la contraception. Les hommes ne partagent pas, ou trĂšs peu, cette responsabilitĂ©. La question est mĂȘme rarement abordĂ©e au sein des couples, tant elle semble naturellement incomber aux femmes. Pourtant, un partage des responsabilitĂ©s aurait de nombreux avantages. Quels sont alors les freins Ă  plus d’égalitĂ© en la matiĂšre et comment les dĂ©passer ?

Le partage des responsabilitĂ©s, une question de santĂ© et d’égalitĂ©

Selon une Ă©tude[1] rĂ©cente menĂ©e en Belgique, 68% des femmes et 33% des hommes dĂ©clarent utiliser un moyen de contraception. Une femme sur deux se dit seule Ă  dĂ©cider de la contraception de son couple. On retrouve ce mĂȘme dĂ©sĂ©quilibre au niveau financier : 87% des femmes payent personnellement leur contraceptif[2]. Cette responsabilitĂ© inĂ©gale se traduit aussi par une forme de travail invisibilisĂ©[3] et naturalisĂ©. Les femmes portent la charge mentale qu’implique ce travail souvent quotidien. C’est Ă  elles que revient la responsabilitĂ© de la bonne utilisation de la contraception : prendre son comprimĂ© Ă  heure et Ă  temps, placer correctement, et au bon moment, un nouveau patch ou un nouvel anneau, etc. Elles sont aussi contraintes de se plier Ă  un suivi mĂ©dical rĂ©gulier Ă©tant donnĂ© que la majoritĂ© des contraceptions sont prescrites aprĂšs consultation.

Encore une charge financiĂšre et mĂȘme horaire (rendez-vous chez un·e practicien·ne, visite Ă  la pharmacie…). Ce travail influence Ă©galement la sexualitĂ© et le dĂ©sir dans le couple : le travail des femmes anticipe les relations sexuelles et crĂ©e toutes les conditions pour que le dĂ©sir des hommes puisse, lui, ĂȘtre spontanĂ©, sans qu’ils doivent se soucier de la contraception. On le voit : que ce soit techniquement, financiĂšrement ou mentalement, la contraception est majoritairement Ă  charge des femmes. Les hommes sont souvent absents comme s’ils n’étaient pas fĂ©conds ou concernĂ©s par les consĂ©quences possibles d’une relation sexuelle non contraceptĂ©e : la naissance d’un enfant, devenir pĂšre.

Leur vie reproductive est pourtant plus longue que celle des femmes et, contrairement Ă  elles, ils sont fertiles tous les jours du mois. Ce n’est d’ailleurs que depuis sa mĂ©dicalisation dans les annĂ©es 1960 que la contraception s’est fĂ©minisĂ©e[4]. Auparavant, le retrait Ă©tait la mĂ©thode la plus utilisĂ©e en Europe. Pourtant, si les hommes « se contraceptaient », les bĂ©nĂ©fices d’un partage Ă©quitable seraient socialement importants.

Des avantages conséquents

D’un point de vue de santĂ© publique, une alternance contraceptive pourrait diminuer les risques liĂ©s aux effets secondaires potentiels de la contraception hormonale que les femmes sont actuellement seules Ă  supporter : risques d’accidents thromboemboliques veineux et artĂ©riels, douleurs, cĂ©phalĂ©es, rĂšgles plus longues et plus abondantes, tensions mammaires, trouble de l’humeur, acné 

« Une contraception va peut-ĂȘtre convenir parfaitement Ă  une femme et d’autres vont s’en plaindre, explique Yannick Manigart, gynĂ©cologue-obstĂ©tricien au CHU Saint-Pierre et spĂ©cialiste de la contraception fĂ©minine. Pour certaines patientes, beaucoup, rien ne convient. Et c’est un vrai problĂšme. Je me retrouve souvent Ă  me demander ce que je vais leur prescrire. Elles expulsent leur stĂ©rilet, elles ne peuvent pas prendre ceci, la ligature des trompes implique un risque
 S’il existait une alternative pour les hommes, ce serait bien ! »

Une prise en charge masculine reprĂ©senterait aussi une possibilitĂ© supplĂ©mentaire de rĂ©duire le nombre de grossesses non dĂ©sirĂ©es et d’avortements. La moitiĂ© des femmes souhaitant avorter utilisaient en effet une contraception[5], ce qui dĂ©montre l’ampleur des Ă©checs contraceptifs, dus Ă  une mauvaise utilisation ou au pourcentage d’échec de la mĂ©thode utilisĂ©e.

Enfin, en Ă©tant « contraceptĂ©s », les hommes pourraient contrĂŽler plus efficacement leur propre fertilitĂ© et choisir plus concrĂštement et de maniĂšre responsable le moment de devenir pĂšre. Par ailleurs, de nombreux couples souhaiteraient partager plus Ă©quitablement la contraception. 39% des hommes se disent prĂȘts Ă  utiliser une contraception masculine et 51% des femmes y sont favorables[6]. Si les avantages d’une responsabilitĂ© partagĂ©e sont nombreux, si une volontĂ© des couples se dessine, quelles sont alors les raisons de ce dĂ©sĂ©quilibre systĂ©matique ?

Etat des lieux

Une premiĂšre raison rĂ©guliĂšrement invoquĂ©e est le manque de moyens contraceptifs masculins. En Belgique, n’existent que le prĂ©servatif externe et la vasectomie, considĂ©rĂ©e le plus souvent comme une contraception dĂ©finitive. En France, deux autres contraceptions[7] sont disponibles : une contraception hormonale par injection, validĂ©e par l’Organisation Mondiale de la SantĂ©, et une contraception thermique qui prend la forme d’un slip permettant d’augmenter la tempĂ©rature des testicules et, ce faisant, de suspendre la production de spermatozoĂŻdes. L’utilisation de ces mĂ©thodes est loin d’ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©e. Le prĂ©servatif est rapidement abandonnĂ© par les couples qui entrent dans une relation stable[8]. La vasectomie connait une progression intĂ©ressante en Belgique (10.000 hommes ont Ă©tĂ© vasectomisĂ©s en 2017 contre 8000 en 2007, dont une large majoritĂ© en Flandre[9]) mais timide en regard des pays anglo-saxons. Les mĂ©thodes alternatives utilisĂ©es en France le sont de maniĂšre encore trĂšs marginale.

RĂ©guliĂšrement, on voit poindre dans la presse des titres accrocheurs affirmant l’arrivĂ©e imminente d’une pilule contraceptive pour hommes
 qui n’arrive jamais. Une piste qui ne serait toutefois pas une solution-miracle vu le nombre d’échecs contraceptifs dus Ă  une mauvaise utilisation dĂ©jĂ  constatĂ©e pour la pilule pour femmes. Daniel Murillo, gynĂ©cologue et andrologue au CHU Saint-Pierre, spĂ©cialiste de la fertilitĂ©, attend quant Ă  lui beaucoup du Vasalgel, un gel injectĂ© dans les canaux dĂ©fĂ©rents et qui, tel un bouchon, bloque les spermatozoĂŻdes. Il peut ensuite ĂȘtre dissous grĂące Ă  une deuxiĂšme injection, sans que la fonction des testicules ne soit altĂ©rĂ©e. Mais cette mĂ©thode ne sera sans doute pas disponible avant minimum cinq ans.

« Ça n’intĂ©resse pas les investisseurs. La Fondation Parsemus, qui dĂ©veloppe le Vasalgel, est une fondation sans but lucratif. La Big pharma n’est pas intĂ©ressĂ©e car ce n’est pas rentable du tout. On va faire deux injections et le patient est parti pour des annĂ©es ! Ce qu’elle prĂ©fĂšre, c’est vendre des pilules car c’est rentable. On est donc obligĂ© de passer par des associations non gouvernementales dont la capacitĂ© financiĂšre est Ă©videmment rĂ©duite. Ça prend beaucoup plus de temps pour obtenir des fonds et dĂ©velopper les Ă©tudes ».

Freins techniques et professionnels

Au dĂ©sintĂ©rĂȘt de l’industrie pharmaceutique, s’ajoutent celui de la mĂ©decine et des pouvoirs publics, le doute quant Ă  la volontĂ© des hommes d’utiliser une contraception
 et donc le manque de moyens allouĂ©s aux Ă©tudes sur la fĂ©conditĂ© masculine[10]. Ces budgets ont toujours Ă©tĂ© trĂšs limitĂ©s. Les contraintes et les effets secondaires potentiels sont aussi citĂ©s pour expliquer l’échec de la diffusion des contraceptions masculines hormonales et thermiques.

Une Ă©tude commanditĂ©e par l’OMS justifie ainsi la dĂ©cision de ne pas mettre sur le marchĂ© un nouveau contraceptif masculin hormonal en raison d’effets secondaires subis par vingt hommes
 sur 320[11]. Les effets secondaires citĂ©s sont pourtant comparables Ă  ceux subis par les femmes, ce qui pose par ailleurs la question de la hiĂ©rarchisation sexuĂ©e de la santĂ©, Ă  court ou long terme[12].

Un autre facteur consĂ©quent qui freine l’utilisation de la contraception masculine est Ă  trouver du cĂŽtĂ© des conseils dispensĂ©s par les professionnel·le·s de la santĂ©. Une recherche[13] comparative entre les prescripteurs français et anglais est Ă  cet Ă©gard trĂšs explicite. En France, 15% des femmes entre 15 et 49 ans dĂ©clarent bĂ©nĂ©ficier de mĂ©thodes considĂ©rĂ©es comme masculines (prĂ©servatifs, vasectomie et retrait) tandis que, au Royaume-Uni, elles sont 54%. Pourquoi une telle diffĂ©rence ? Cette Ă©tude dĂ©montre que les recommandations contraceptives diffĂšrent fortement en fonction du contexte national : mode de rĂ©tribution des praticien·ne·s, historique lĂ©gal des mĂ©thodes, encadrement des formations, des pratiques et de l’information donnĂ©e Ă  la patientĂšle
 ainsi que la reprĂ©sentation genrĂ©e de la contraception qui influence l’ensemble des mĂ©decins, tant français·e·s qu’anglais·e·s. Iels[14] partagent en effet la vision d’une responsabilitĂ© majoritairement fĂ©minine, avec toutefois des tendances trĂšs diffĂ©rentes. Les Français·e·s prĂ©sentent une perception plus naturalisante (les femmes seraient naturellement plus concernĂ©es que les hommes), tandis que les Britanniques abordent gĂ©nĂ©ralement le sujet comme une question de sociĂ©tĂ© et d’éducation, avec une possibilitĂ© d’évolution.

Proposer une contraception masculine n’est pas non plus une Ă©vidence en Belgique. « Ce n’est pas facile, mĂȘme pour moi, concĂšde Yannick Manigart. Souvent, le partenaire n’est pas prĂ©sent. C’est clair que je propose une vasectomie quand on se trouve dans un cul de sac au niveau des possibilitĂ©s. (
) LĂ , ça vient tout de suite Ă  l’idĂ©e. Mais j’avoue sans problĂšme que je n’y pense pas facilement non plus. Parfois ça dĂ©pend des patientes. Si on est en ligature, je propose directement la vasectomie. Maintenant, si on n’est pas dans ce cas-lĂ , que la patiente n’en parle pas, c’est vrai que je ne vais pas dire systĂ©matiquement ÊșEt votre mari ?Êș. Et pourtant, je pourrais, Ă  partir de 40 ans ».

Du cĂŽtĂ© des centres de planning familial, malgrĂ© la production de quelques analyses et d’une campagne en 2017 mettant en avant la responsabilitĂ© partagĂ©e, le sujet semble Ă©galement peu abordĂ©.Image

Les rĂŽles de genre en cause

A la vue de ces Ă©lĂ©ments rapidement brossĂ©s, l’argument de l’évidence de la contraception fĂ©minine s’étiole. Pour la sociologue CĂ©cile Ventola, «l’usage de la contraception est une pratique sociale, influencĂ©e par les rapports sociaux, notamment de sexe, dans lesquels les individu·e·s se situent, et par leur socialisation en matiĂšre de sexualitĂ© et de contraception »[15].

Pour de nombreux·ses chercheur·e·s, le dĂ©sĂ©quilibre contraceptif trouve en effet son origine dans les reprĂ©sentations des rapports sociaux de genre, c’est-Ă -dire les rĂŽles spĂ©cifiques attribuĂ©s aux femmes et aux hommes, des constructions sociales qui dessinent la masculinitĂ© et la fĂ©minitĂ©, variables dans le temps et l’espace.

La division sexuelle du travail[16] en est un enjeu essentiel : les tĂąches sont sĂ©parĂ©es selon le genre et hiĂ©rarchisĂ©es, celles dites masculines Ă©tant davantage valorisĂ©es. La contraception mĂ©dicale est ainsi socialement liĂ©e Ă  la sphĂšre reproductive elle-mĂȘme attachĂ©e aux femmes. Ces principes de sĂ©paration et de hiĂ©rarchie Ă©tant bien ancrĂ©s, il est plus facile de comprendre pourquoi il s’agit pour les hommes, en matiĂšre de contraception aussi, de se diffĂ©rencier Ă  tout prix des femmes, afin d’affirmer une identitĂ© sociale masculine.

La socialisation genrĂ©e est un outil puissant pour construire ces identitĂ©s. La famille, l’école, les pairs, les mĂ©dias
 autant d’agents de socialisation qui peuvent influencer les individu·e·s dans leur adoption des rĂŽles de genre, en matiĂšre de sexualitĂ©, de contraception et dans tout autre domaine. C’est ainsi que l’on rencontre rĂ©guliĂšrement l’argument de l’homme irresponsable[17], ne pouvant pas ĂȘtre enceint, auquel la femme ne pourrait faire confiance, quand on Ă©voque la contraception masculine. Une vision naturalisante qui freine les avancĂ©es vers plus d’égalitĂ©, infantilise et dĂ©douane les hommes de leurs responsabilitĂ©s, et pĂšse au final sur les femmes. Ces constructions sociales doivent donc Ă©voluer vers d’autres modĂšles pour que les hommes se sentent soucieux et responsables de leur fertilitĂ©[18].

Par ailleurs, l’une des rĂ©sistances principales Ă  la contraception masculine se trouverait dans la symbolique du lieu-mĂȘme de son action: le phallus, symbole suprĂȘme de la virilitĂ©. Daniel Murillo pointe ce facteur pour expliquer le refus de la vasectomie. « Il faut dĂ©mystifier le concept. Parce qu’on se fait vasectomiser, on devient un eunuque et on se fait chĂątrer. Le grand fantasme des hommes, c’est qu’on est chĂątrĂ© comme un chat. Un fantasme trĂšs prĂ©sent en Belgique. (
) Tout est encore un concept par rapport Ă  la masculinitĂ©, la virilitĂ© ». Perte d’érection, de libido, peur de devenir un sous-homme
 les craintes imaginaires sont encore bien ancrĂ©es et liĂ©es Ă  une certaine vision de la masculinitĂ©[19].

Des hommes en action

Si la majoritĂ© des hommes ne s’implique pas en matiĂšre de contraception, il existe pourtant diverses actions possibles : se renseigner sur l’offre contraceptive et s’impliquer dans la dĂ©cision, participer Ă©quitablement aux frais, se rendre Ă  la pharmacie, partager la charge mentale du rappel de la prise de pilule, questionner la pĂ©nĂ©tration comme condition obligatoire d’un rapport sexuel


Certains hommes vont plus loin : ils ont dĂ©cidĂ© de « se contracepter » et de militer en faveur de la contraception masculine. C’est le cas, en France, de l’association ARDECOM[20] qui, dans les annĂ©es 1980, a dĂ©veloppĂ© les contraceptifs hormonaux et thermiques pour hommes. A nouveau active, elle travaille aux cĂŽtĂ©s des centres de planning familial. C’est le cas aussi du collectif breton Thomas BouloĂč[21] qui organise des ateliers et soirĂ©es d’information, et collabore Ă©galement avec les professionnel·le·s de la promotion de la santĂ©.

Une menace pour les femmes ?

Une majoritĂ© de femmes semble dĂ©sormais favorable au partage de la contraception mais certaines restent rĂ©ticentes. Il faut rappeler que la contraception mĂ©dicale, et en particulier la pilule, est considĂ©rĂ©e comme une victoire fondamentale pour les femmes. Certaines craignent donc que cette libertĂ© leur Ă©chappe avec la contraception masculine. Le risque est en effet que certains hommes, forts des rapports de pouvoir en leur faveur, instrumentalisent l’égalitĂ© contraceptive pour contrĂŽler la contraception des femmes, leur imposer une grossesse et limiter leur droit Ă  disposer de leur corps[22].

LĂ  encore, il apparaĂźt primordial de dĂ©construire les rapports sociaux de genre qui subordonnent les unes aux autres. Les mĂȘmes rapports qui assignent solidement les femmes Ă  la responsabilitĂ© contraceptive et plombent l’utilisation et le dĂ©veloppement de la contraception masculine. Ces rĂŽles de genre ne sont toutefois pas immuables puisqu’ils sont construits. Les domaines d’action sont nombreux et les professionnel.le.s de la santĂ© y ont un rĂŽle Ă  jouer. L’éducation des plus jeunes, via notamment une Ă©ducation Ă  la vie relationnelle, affective et sexuelle (EVRAS) homogĂ©nĂ©isĂ©e, obligatoire et Ă©galitaire, est essentielle pour amorcer une prise de conscience, connaĂźtre son corps, dĂ©construire les stĂ©rĂ©otypes de genre et faire Ă©merger de nouveaux modĂšles de responsabilitĂ©s.

Les adultes aussi doivent ĂȘtre Ă©duqué·e·s et s’éduquer. La formation des professionnel·le·s de la santĂ© doit s’enrichir en matiĂšre de contraception pour suivre ces mĂȘmes objectifs. Les pouvoirs publics doivent Ă©galement soutenir ces programmes ainsi que les initiatives de la sociĂ©tĂ© civile. La gratuitĂ© de la contraception doit enfin ĂȘtre organisĂ©e pour bĂ©nĂ©ficier au plus grand nombre. Assumer chacun·e ses responsabilitĂ©s et sa fertilitĂ©, alterner la charge contraceptive, partager les risques et le plaisir, ne pourra ĂȘtre envisagĂ© qu’en provoquant une transformation radicale de nos scĂ©narios culturels.


[1] EnquĂȘte « Contraception 2017 », Solidaris, 2017.

[2] Campagne Fifty-fity, FCPF-FPS, 2017.

[3] Thomé Cécile, Jouir sans entraves ? Analyse des effets sur la sexualité de la féminisation de la contraception, Bruxelles, Observatoire du Sida et des Sexualités, 27 février 2018.

[4] Le Guen Mireille et al., « Cinquante ans de contraception légale en France : diffusion, médicalisation, féminisation », dans Population et Sociétés, n°549, 2017.

[5] Braun FrĂ©dou, DĂ©passer le pour/contre : l’avortement vu autrement, Louvain-la-Neuve, Centre d’Education et de Formation en Alternance, 2012.

[6] EnquĂȘte « Contraception 2017 », Solidaris, 2017.

[7] Plus d’infos : http://www.contraceptionmasculine.fr/

[8] ThomĂ© CĂ©cile, « D’un objet d’hommes Ă  une responsabilitĂ© de femmes. Entre sexualitĂ©, santĂ© et genre, analyser la mĂ©tamorphose du prĂ©servatif masculin », dans SociĂ©tĂ©s contemporaines, n°104, 2016, 4, pp. 67-94.

[9] INAMI, 2018.

[10] Spencer Brenda, « La contraception pour les hommes – une cause perdue ? », dans Andrologie, n°22, 2012, 3, pp. 205-210.

[11] Cannone Robin, Contraception hormonale masculine : des résultats prometteurs, Le Figaro, novembre 2016.

[12] Picarat Marine et Mieusset Roger, « La contraception masculine, méthodes nouvelles et résistances », dans Chronique féministe, n° 114, 2014, 2, pp. 55-59.

[13] Ventola Cécile, « Le genre de la contraception : représentations et pratiques des prescripteurs en France et en Angleterre », dans Cahiers du Genre, n°60, 2016, 1, pp. 101-122.

[14] Combinaison de « il » et « elle ».

[15] Ibid, p. 103.

[16] Kergoat DaniÚle, « Division sexuelle au travail et rapports sociaux de sexe », dans Dictionnaire critique du féminisme, Hirata Helena, Laborie Françoise, Le Doaré HélÚne, Senotier DaniÚle, Paris, PUF, 2000, pp. 35-44.

[17] Spencer Brenda, « La femme sans sexualitĂ© et l’homme irresponsable », dans Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 128, 1999, pp. 29-33.

[18] Oudshoorn Nelly, « Technologies de la reproduction et identitĂ©s des usagers : une co-construction. Le cas de la pilule masculine », dans Reproduire le genre, Dorlin Elsa et Fassin Eric (dir.), Paris, BibliothĂšque publique d’information Centre Pompidou, 2010, pp. 35-45.

[19] Kalampalikis Nikos et Buschini Fabrice, « La contraception masculine médicalisée : enjeux psychosociaux et craintes imaginaires », dans Nouvelle revue de psychologie, 2007, 4, pp.89-104.

[20] Lien vers le site web de l’assoc’ http://www.contraceptionmasculine.fr/

[21] Idem : www Ils n’ont pas de site web ni de page facebook. Mais un e-mail : thomasboulouetcie@riseup.net

[22] Andro Armelle et Desgree Du Loû Annabel, « La place des hommes dans la santé sexuelle et reproductive : enjeux et difficultés », dans Autrepart, n°52, 2009, 4, pp. 3-12.

Trois journées à Toulouse pour nourrir l’action en vue de réduire les inégalités sociales de santé

Les 23, 24 et 25 mai derniers, un colloque organisĂ© par l’IFERISSNote bas de page en collaboration avec l’Association des Ă©pidĂ©miologistes de langue française (Adelf), l’Association française de droit de la santĂ© (AFDS) et la SociĂ©tĂ© française de santĂ© publique (SFSP) s’est tenu Ă  Toulouse, sous l’intitulĂ© SantĂ© : Ă©quitĂ© ou Ă©galitĂ© ? DĂ©finir, mesurer, agir. Cet article propose de revenir sur quelques thĂ©matiques fortes mises en exergue lors de ces trois journĂ©esNote bas de page, Ă  travers le point de vue d’un acteur belge de promotion de la santĂ©.Quelque 120 participants, chercheurs mais aussi praticiens et professionnels de la santĂ© publique, ont pris place dans les salles de l’HĂŽtel-Dieu Saint Jacques, lieu chargĂ© d’histoire qui se dresse sur la rive gauche de la Garonne. Le colloque avait pour but de faire le point sur les travaux et les perspectives de recherche dĂ©veloppĂ©s dans les pays francophones sur les questions d’inĂ©galitĂ©s sociales et territoriales de santĂ©. Le comitĂ© organisateur avait pour ambition d’aller au-delĂ  des constats pour investiguer les solutions possibles Ă  diffĂ©rents niveaux. OrganisĂ©s Ă  travers une logique interdisciplinaire, ces trois jours ont surtout Ă©tĂ© intĂ©ressants par le rĂ©cit d’expĂ©riences de terrain (recherches et interventions) et la mise en perspective d’enjeux sous-jacents Ă  la question centrale.

Soins

MĂȘme si les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© se construisent essentiellement Ă  partir de dĂ©terminants non-mĂ©dicaux, le soin aura eu la part belle lors de ces Ă©changes toulousains. Nombreux orateurs ont mis en avant les inĂ©galitĂ©s prĂ©sentes dans ce domaine qui, comme nous le rappelait Pierre ChauvinNote bas de page Ă  travers l’exemple de la prise en charge du cancer, ne se rĂ©sument pas Ă  des disparitĂ©s d’accĂšs Ă  l’offre curative. Elles s’inscrivent tout au long du parcours de soins et sont dĂ©terminĂ©es par de nombreux facteurs sociaux et culturels. DĂ©lai de diagnostic, dispositif d’annonce de la maladie, qualitĂ© de la relation thĂ©rapeutique, traitements proposĂ©s, accĂšs Ă  l’innovation mĂ©dicale, proposition de soins de support
 : les pratiques mĂ©dicales se rĂ©vĂšlent fortement inĂ©galitaires et corrĂ©lĂ©es au milieu social du patient. Pour rĂ©duire ces inĂ©galitĂ©s, l’universalisme proportionnĂ© est requis. Il ne s’agit pas de soigner tout le monde de la mĂȘme maniĂšre mais d’adapter l’offre et les pratiques en fonction des rĂ©alitĂ©s et besoins de chacun. L’appel Ă  des mĂ©diateurs pairs ou Ă  des navigateurs de soins, la mise en rĂ©seau d’acteurs de champs ou de territoires diffĂ©rents auront Ă©tĂ© des pistes de solution Ă©voquĂ©es lors des dĂ©bats.

Intersectorialité

Une des confĂ©rences marquantes a Ă©tĂ© celle portant sur l’intersectorialitĂ© de Marina HontaNote bas de page. La sociologue de l’action publique a soulignĂ© d’emblĂ©e que l’organisation politique et les choix posĂ©s en France n’invitent guĂšre Ă  l’adoption d’une grammaire partenariale et horizontale indispensable pour rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©. Il existe un vĂ©ritable enjeu de diffusion des avancĂ©es scientifiques qui portent sur le dĂ©cryptage de ces inĂ©galitĂ©s (leur caractĂšre systĂ©mique et transversal, en l’occurrence). Cependant, le travail d’acculturation du politique dans ce domaine est particuliĂšrement difficile. Les politiques s’engagent sur des voies qui se rĂ©vĂšlent peu efficaces pour atteindre plus d’équitĂ©. Tout d’abord, il y a la prĂ©dominance des stratĂ©gies de moralisation des comportements ; avec de nombreux acteurs politiques qui ignorent les mĂ©canismes sociaux Ă  l’origine des usages diffĂ©renciĂ©s du corps et de la prise en compte ou non des injonctions relatives Ă  la santĂ©. Du cĂŽtĂ© des financements, l’heure est Ă  la mise en concurrence des acteurs (au moyen d’appels Ă  projets) ainsi qu’à des budgets octroyĂ©s Ă  court-terme et peu stables. Enfin, le pouvoir politique et les administrations sont organisĂ©s pour dĂ©fendre des intĂ©rĂȘts sectoriels et se montrent trĂšs rĂ©ticents Ă  fondre leurs actions par peur de perdre de la visibilitĂ©. Il faudra sans doute encore du temps pour que les politiques sortent de leur prĂ©-carrĂ© et coordonnent leurs efforts. Pour les acteurs de promotion de la santĂ©, il est plus que jamais utile d’endosser ce rĂŽle d’entrepreneur de cause et de plaider un changement de vision. Les projets d’évaluation d’impact en santĂ©Note bas de page qui ont fait l’objet de communications lors de ce colloque pourraient constituer un levier pour fĂ©dĂ©rer autour d’objectifs de santĂ© et d’équitĂ© une diversitĂ© d’intervenants politiques ou autres provenant de diffĂ©rents domaines et disciplines.

Territoires

Les inĂ©galitĂ©s de santĂ© se structurent sous le prisme du territoire, autre thĂšme largement discutĂ© lors du colloqueNote bas de page. De nombreuses Ă©tudes gĂ©ographiques ont montrĂ© les profondes disparitĂ©s apparaissant sur le plan social et de la santĂ© entre diffĂ©rentes zones territoriales. Une approche par territoire semble donc pertinente pour rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©. Dans cette perspective, les cartes montrant les sĂ©grĂ©gations socio-spatiales se rĂ©vĂšlent utiles pour prioriser et Ă©chafauder des actions.Cependant, deux Ă©lĂ©ments sont Ă  prendre en compte quand ces supports sont utilisĂ©s. PremiĂšrement le fait, qu’on ne cerne pas Ă  travers elles les micro-fractures qui existent au sein d’un mĂȘme territoire (souvent fruit d’un dĂ©coupage administratif) : il peut y avoir des mini-dĂ©serts mĂ©dicaux dans des rĂ©gions pourvues sur le plan de l’offre socio-sanitaire ou des poches de pauvretĂ© au sein de quartiers rĂ©putĂ©s favorisĂ©s Ă©conomiquement. DeuxiĂšmement, les cartes constituent gĂ©nĂ©ralement des rĂ©fĂ©rentiels domo-centrĂ©s c’est-Ă -dire qu’elles se focalisent sur la rĂ©sidence et ne prennent pas en compte la mobilitĂ© quotidienne des personnes. En effet, une personne habitant dans un quartier peu dotĂ© en ressources socio-mĂ©dicales pourrait frĂ©quenter un quartier voisin bĂ©nĂ©ficiant d’offres multiples. Il est dĂšs lors intĂ©ressant d’adopter une vision non-statique des territoires. Questionner les reprĂ©sentations spatiales et la pratique des territoires des habitants permettra d’établir des diagnostics plus fins et d’agir de maniĂšre plus adaptĂ©e sur les dĂ©terminants de santĂ©.

Big data

L’organisateur a eu l’excellente idĂ©e de mettre les nouvelles technologies de l’information au menu du colloque. Mis en regard du thĂšme de l’équitĂ© en santĂ©, elles constituent un creuset de rĂ©flexions qu’il serait judicieux d’investir plus intensĂ©ment en Belgique. Les donnĂ©es massives (big data) rĂ©sultent du potentiel technologique numĂ©rique actuel (calculateurs hyperpuissants et objets connectĂ©s) qui permet d’amonceler rapidement une grande quantitĂ© de donnĂ©es et de les traiter. Dans le champ de la santĂ© publique, elles constituent une opportunitĂ© pour mieux comprendre les comportements et les facteurs influençant l’état de santĂ© et ouvrent, grĂące Ă  des algorithmes dĂ©cisionnels et en s’appuyant sur une forme de solidaritĂ© numĂ©rique, des possibilitĂ©s de prĂ©diction et de gestion de la santĂ© (moyens d’anticiper la santĂ©). Mais, est-ce que ce dĂ©veloppement technologique va contribuer Ă  rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s en matiĂšre de santĂ© ? Paul-Loup Weil-DulucNote bas de page est plutĂŽt sceptique sur la question. Ces technologies permettraient, au mieux, de rĂ©parer quelques dĂ©fauts de l’organisation sociale mais ne remettraient certainement pas en cause les injustices. Pire, l’e-santĂ© rendrait les inĂ©galitĂ©s sociales acceptables dans le sens oĂč elle aurait vocation Ă  transfĂ©rer la responsabilitĂ© de la santĂ© du collectif vers l’individuNote bas de page. Les applications d’auto-quantification qui recueillent les donnĂ©es biologiques personnelles en vue de guider un comportement l’illustrent bien (ex : pisteur d’activitĂ© physique, de sommeil, tensiomĂštre, glucomĂštre
). Avec l’hĂ©gĂ©monie de ces outils, on peut certes s’attendre Ă  une rĂ©duction de l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des modes de vie mais ils ne vont pas Ă  eux seuls accroĂźtre fondamentalement les capacitĂ©s des personnes les plus fragiles Ă  se conformer aux attitudes saines.

Conclusion

Dans des sociĂ©tĂ©s prospĂšres et bĂ©nĂ©ficiant de systĂšmes de santĂ© hautement performants comme la France ou la Belgique, la lutte contre les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© devrait ĂȘtre placĂ©e au rang de prioritĂ© absolue. Traversant l’ensemble du corps social, elles interrogent notre responsabilitĂ© collective et notre capacitĂ© Ă  agir sur des causes fondamentales qui dĂ©passent largement l’univers du soin et de la prĂ©vention des maladies. C’est donc Ă  l’ensemble des politiques publiques de se penser comme acteur de santĂ© et de justice sociale. Pour les praticiens de la promotion de la santĂ© qui dĂ©veloppent dĂ©jĂ  des interventions complexes en vue de rĂ©duire ces inĂ©galitĂ©s, l’enjeu actuel est de contribuer Ă  essaimer des donnĂ©es prometteuses ou probantes en mettant en avant la maniĂšre dont leurs propres pratiques fonctionnent et en dĂ©crivant le contexte spĂ©cifique dans lequel elles s’inscrivent. PrĂ©sentĂ© lors du colloque, l’ouvrage collectif Ă©ditĂ© aux Presses universitaires du Midi, RĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© : Une approche interdisciplinaire de l’évaluationNote bas de page peut ĂȘtre dĂ©clencheur d’une rĂ©flexion sur l’évaluation et la transfĂ©rabilitĂ©Note bas de page des interventions.Ce colloque extrĂȘmement dense a bien mis en Ă©vidence certains champs explorĂ©s actuellement par la recherche dans le domaine. Il ouvre la voie Ă  de nouvelles actions Ă  mener et encourage l’utilisation des connaissances issues de la recherche dans le travail quotidien des opĂ©rateurs. NĂ©anmoins, on pourra regretter des communications trop centrĂ©es sur le soin, la faible reprĂ©sentation des acteurs de promotion de la santĂ© au programme et dans les rangĂ©es des auditoires, ainsi que l’absence de vĂ©ritable discussion sur l’intitulĂ© de la rencontre. Une nouvelle Ă©dition s’impose donc pour creuser notamment le sujet du meilleur modĂšle stratĂ©gique Ă  adopter pour rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© : Ă©quitĂ© ou Ă©galitĂ© ?

Institut FĂ©dĂ©ratif d’Études et de Recherches Interdisciplinaires SantĂ© SociĂ©tĂ©.

Vous pouvez retrouver les diaporamas des communications orales sur le site de l’évĂ©nement : http://www.iferiss.org/index.php/fr/colloques/communications-orales-colloque-2018#session4.

Pierre Chauvin est directeur de recherche Ă  l’Institut national de la santĂ© et de la recherche mĂ©dicale (Inserm). Pour en connaĂźtre plus sur le travail de recherche exposĂ©, veuillez consulter le rapport de l’ARS Ile-de-France Les inĂ©galitĂ©s sociales en soins de cancĂ©rologie : comprendre pour adapter les pratiques http://www.iplesp.upmc.fr/eres/files/Plaidoyer_ISS_cancer_ARS_vfinale.pdf

Professeure des universités au Centre Emile-Durkheim

Ensemble de procĂ©dures, mĂ©thodes et outils qui vise Ă  Ă©valuer les effets positifs et nĂ©gatifs potentiels d’un projet, d’un programme ou d’une politique sur la santĂ©, ainsi que la distribution de ces effets au sein de la population.

Notamment les interventions de Yan Kestens (Université de Montréal) et de Julie Vallée (CNRS).

Chercheur en Ă©thique auprĂšs d’Espace Ă©thique.

Sans parler (dans le pire des cas), de la question de l’utilisation de ces donnĂ©es par le pouvoir public ou des organismes assureurs pour faire le tri entre des personnes diagnostiquĂ©es Ă  risque et coĂ»tant cher Ă  la sociĂ©tĂ©, et les autres.

Nadine Haschar-NoĂ© et Thierry Lang (dir.), RĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© : Une approche interdisciplinaire de l’évaluation, Toulouse, PUM, 2017, 522p.

Reproduction non seulement de la mise en Ɠuvre d’une intervention mais aussi de ses rĂ©sultats dans un nouveau contexte.

Enquête sur l’activité physique et la sédentarité des jeunes du Hainaut

En mai dernier, l’Observatoire de la SantĂ© du Hainaut (OSH) a dĂ©voilĂ© les rĂ©sultats d’une enquĂȘte menĂ©e en 2012-2014 sur l’activitĂ© physique et la sĂ©dentaritĂ© des jeunes. Cette enquĂȘte a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e auprĂšs de1 669 jeunes de l’enseignement primaire et secondaire « Regard sur la santĂ© des jeunes – SantĂ© en Hainaut n°13 ». Elle analyse les Ă©volutions dans le temps et propose des pistes de rĂ©flexion et des outils de promotion de la santĂ© Ă  ce sujet.

L’enquĂȘte en quelques mots


L’activitĂ© physique contribue Ă  l’état de santĂ© gĂ©nĂ©ral et au bien-ĂȘtre physique, mental et social des individus (OMS, 2013)Note bas de page. Elle intervient dans la lutte contre les maladies chroniques (diabĂšte de type 2, maladies cardiovasculaires, cancers
). En parallĂšle, la sĂ©dentaritĂ© a un effet dĂ©lĂ©tĂšre sur la santĂ© que ne contrebalancent pas totalement les bienfaits d’une Ă©ventuelle activitĂ© physique. Il s’agit lĂ  d’un enjeu majeur de santĂ© publique pour les annĂ©es Ă  venir. Le manque d’activitĂ© physique et de trop longues pĂ©riodes de sĂ©dentaritĂ© reprĂ©sentent une des premiĂšres causes de maladie et de handicap dans les pays occidentaux.L’enquĂȘte a Ă©tĂ© menĂ©e en collaboration avec le rĂ©seau des Centres de SantĂ© Scolaire Vigies (CSSV). Celui-ci est composĂ© de services de Promotion de la SantĂ© Ă  l’école (PSE). Cette derniĂšre dĂ©crit la situation tant au niveau de l’école que dans les temps extrascolaires (au foyer ou en dehors).Divers facteurs sont analysĂ©s : l’influence de l’entourage ainsi que le lien avec l’environnement physique (infrastructures scolaires, Ă©quipements sportifs, amĂ©nagements favorisant ou non les dĂ©placements actifs Ă  pied ou Ă  vĂ©lo).Dans le cadre de cette enquĂȘte, l’OSH a organisĂ© des tests d’aptitude physique inspirĂ©s de ceux utilisĂ©s par l’Administration de l’Éducation Physique et des Sports (ADEPS) (Heyters, Marique, 2013)Note bas de page. Ces tests auprĂšs d’Hainuyers de 15 Ă  17 ans ont aidĂ© Ă  Ă©valuer leurs capacitĂ©s physiques. Ils ont aussi mis en lumiĂšre l’ensemble des facteurs influençant les aptitudes physiques de ces jeunes.L’étude a permis de constater que, globalement, les jeunes pratiquent trop peu d’activitĂ© physique et accumulent de longues pĂ©riodes de sĂ©dentaritĂ© (longues heures en position assise devant les Ă©crans
).L’étude met en avant les liens entre les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© en matiĂšre de pratique de l’activitĂ© physique (et d’accĂšs aux infrastructures sportives) et la santĂ© des jeunes Hainuyers. En effet, lorsque la situation socio-Ă©conomique dans laquelle les jeunes Ă©voluent est relativement dĂ©favorable, alors les jeunes tendent Ă  avoir des comportements davantage sĂ©dentaires et nĂ©fastes pour leur santĂ© (tabagisme
).Face Ă  ces constats, la littĂ©rature et des Ă©lĂ©ments de l’enquĂȘte proposent des pistes d’actions qui peuvent amĂ©liorer la situation, Ă  la fois Ă©conomiquement et en termes de santĂ© de la population.

Comment intervenir ?

Afin de mener des actions de promotion de l’activitĂ© physique efficace et inclusive, cinq pistes d’action ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©es par l’OSH. L’objectif est d’encourager dĂ©cideurs, professionnels, citoyens Ă  agir pour promouvoir l’activitĂ© physique des jeunes et lutter contre la sĂ©dentaritĂ©.L’étude souligne que le niveau d’activitĂ© physique reste faible pour la plupart des jeunes malgrĂ© une lĂ©gĂšre amĂ©lioration chez les filles. En effet, un jeune sur 5 (21 %) dĂ©clare n’avoir effectuĂ© aucune sĂ©ance d’activitĂ© physique d’au moins 30 minutes d’affilĂ©e la semaine prĂ©cĂ©dant l’enquĂȘte. Pourtant, en 2014, 51 % des jeunes signalent faire partie d’un club sportif.Cependant, cette proportion diminue avec l’ñge. Un certain nombre d’adolescents abandonnent leur sport favori parce que l’activitĂ© de leur club est trop orientĂ©e vers la compĂ©tition. L’étude a Ă©galement mis en relation l’importance de la prĂ©sence de clubs sportifs partenaires de l’école. De fait, les Ă©lĂšves sont plus actifs lorsque leur Ă©cole partage ses infrastructures avec des clubs. Pour maintenir ces jeunes physiquement actifs, il est important de repenser l’offre sportive et ses finalitĂ©s : dĂ©velopper le sport pour tous dĂšs le plus jeune Ăąge plutĂŽt que favoriser l’émergence d’une Ă©lite prestigieuse, mais minoritaire. L’ensemble des parties prenantes (Ă©cole, clubs, parents, professionnels de la santé ) peuvent Ɠuvrer collectivement Ă  la rĂ©orientation des services et Ă  la crĂ©ation d’actions collectives en faveur de l’activitĂ© physique.L’étude a Ă©galement permis de souligner le rĂŽle dĂ©terminant de l’entourage immĂ©diat des jeunes dans leur niveau d’activitĂ© physique et de sĂ©dentaritĂ©. La pratique d’activitĂ© physique augmente avec les encouragements qu’ils reçoivent de leurs parents et a fortiori la pratique sportive de ces derniers. Les encouragements du mĂ©decin gĂ©nĂ©raliste y contribuent Ă©galement. Les jeunes sont Ă©galement plus actifs en dehors de l’école lorsqu’ils sont entourĂ©s d’amis. DĂšs lors utiliser leur environnement immĂ©diat (parents, mĂ©decins, professionnels de la santĂ©, amis
) reprĂ©sente un levier d’action pour intervenir. C’est en dĂ©veloppant des environnements favorables (espaces publics des villes et communes, Ă©coles et infrastructures) Ă  l’activitĂ© physique et en les rendant plus accessibles que les enfants et les adolescents amĂ©lioreront leur comportement de santĂ©.L’attrait pour le cours d’éducation physique dispensĂ© dans les Ă©coles est en lien avec le niveau d’activitĂ© physique. En effet, les jeunes pour qui ce cours est exercĂ© avec plaisir se montrent plus actifs en dehors de l’école. Or, un certain nombre d’écoles ne disposent pas d’infrastructures adĂ©quates pour le cours d’éducation physique. En effet, 19 Ă©coles secondaires sur 34 interrogĂ©es se plaignent de ne pas avoir suffisamment de salles pour organiser leurs cours. AmĂ©liorer l’infrastructure, rendre ce cours plus attrayant et lutter contre les dispenses trop frĂ©quentes sont d’autres voies pour favoriser l’activitĂ© physique. Les Ă©lĂšves frĂ©quentant l’enseignement de qualification se trouvent frĂ©quemment dans une situation moins favorable et il importe que des efforts plus importants soient consentis dans ces Ă©coles.Pour aller Ă  l’école, les jeunes sont peu actifs. Moins d’un enfant sur 4 (23 %) de 11 ans se rend Ă  pied et/ou Ă  vĂ©lo Ă  l’école et cette proportion diminue Ă  11 % chez les adolescents de 13 ans et Ă  14 % chez les 16 ans. L’amĂ©nagement du territoire incite aux dĂ©placements actifs dans un cadre sĂ©curisĂ© et accessibles Ă  tout un chacun.ImageParallĂšlement, le temps de loisirs sĂ©dentaires passĂ© face aux Ă©crans (de tĂ©lĂ©vision, d’ordinateur, de console de jeux ou de tĂ©lĂ©phone
) continue d’augmenter. Entre 2004 et 2014, alors que le temps passĂ© devant la tĂ©lĂ©vision est restĂ© relativement stable, la proportion de jeunes tous Ăąges confondus qui consacrent quotidiennement 4 heures et plus Ă  l’ordinateur ou la console de jeux les jours sans Ă©cole a augmentĂ©. Ces proportions passent de 15 % Ă  27 % pour les 11 ans et de 30 % Ă  environ 55 % pour les 13 et 16 ans. Pas moins de 86 % des 11 ans et 98 % des 13 et 16 ans surfent sur internet, majoritairement, pour des activitĂ©s audiovisuelles (vidĂ©os, musique
) ou les rĂ©seaux sociaux (Facebook, Snapchat, Instagram
). Seuls 66 % des jeunes sont informĂ©s par leurs parents des dangers d’internet et 45 % dĂ©clarent que leurs parents s’intĂ©ressent Ă  leurs activitĂ©s sur le net. DĂšs lors, il convient de sensibiliser les jeunes et leur entourage (familles, amis
) aux effets nĂ©fastes des loisirs sĂ©dentaires tout en promouvant les activitĂ©s sportives ou physiques.Globalement, un niveau d’activitĂ© physique ou sportive Ă©levĂ© est associĂ© Ă  des comportements favorables Ă  la santĂ© : un rĂ©gime alimentaire Ă©quilibrĂ©, une absence de consommation de tabac chez les aĂźnĂ©s, un sommeil suffisant et rĂ©parateur. Les jeunes plus sĂ©dentaires (avec un niveau d’activitĂ© physique ou sportive plus faible) ont quant Ă  eux un rĂ©gime alimentaire moins Ă©quilibrĂ©, s’orientent plus facilement vers des consommations plus ou moins rĂ©guliĂšres de tabac ou d’alcool mais souffrent Ă©galement d’une insuffisance de sommeil.Enfin, l’enquĂȘte montre que les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© sont des obstacles Ă  l’activitĂ© physique en gĂ©nĂ©ral. Plus leur situation socio-Ă©conomique est dĂ©favorable, plus leur niveau d’activitĂ© physique diminue et plus leur sĂ©dentaritĂ© augmente. La lutte contre les inĂ©galitĂ©s sociales est un Ă©lĂ©ment important pour amĂ©liorer la santĂ© des populations.

Que retenir ?

À l’issue de cette Ă©tude, il apparaĂźt que le niveau d’activitĂ© physique reste faible chez les plupart des jeunes malgrĂ© une lĂ©gĂšre amĂ©lioration chez les filles. ParallĂšlement, le temps de loisirs sĂ©dentaires passĂ© devant les Ă©crans (de tĂ©lĂ©vision, d’ordinateur, de console de jeux ou de tĂ©lĂ©phone
) continue d’augmenter.La santĂ© des jeunes est une responsabilitĂ© collective et pas seulement une responsabilitĂ© individuelle. Il est possible Ă  tout niveau de contribuer Ă  son amĂ©lioration gĂ©nĂ©rale.Le niveau bas d’activitĂ© physique et la sĂ©dentaritĂ© croissante reprĂ©sentent un dĂ©fi majeur pour la sociĂ©tĂ© actuelle, mais les moyens d’intervention existent et doivent inciter Ă  passer Ă  l’action.

Retrouvez les rĂ©sultats de l’enquĂȘte dans une synthĂšse et une version intĂ©grale sur notre site http://observatoiresante.hainaut.be

Organisation mondiale de la Santé (OMS). La sédentarité : un problÚme de santé publique mondial. OMS. 2013.

Heyters C, Marique T. Le BaromĂštre de la condition physique des jeunes de 2 Ă  18 ans. Avec la collaboration de UniversitĂ© libre de Bruxelles – UniversitĂ© catholique de Louvain. ADEPS – FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles. Direction gĂ©nĂ©rale du sport, Ă©d. 2013. Consultable sur : http://www.sport-adeps.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash= 540858e3ed4822e093a3433ded608e4771d51bd8&file=fileadmin/sites/adeps/upload/adeps_ super_editor/adeps_editor/images/articles/Amelie/Barometre_de_la_condition_ physique_2013.pdf

Communiqué de presse

La ministre de la SantĂ© publique, Maggie De Block, a pris la dĂ©cision d’introduire le nutri-score comme label alimentaire en Belgique. Les consommateurs pourront ainsi obtenir plus facilement des informations leur permettant de savoir dans quelle mesure un aliment fait partie d’une alimentation Ă©quilibrĂ©e.

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La ministre De Block: « De cette façon, nous facilitons le choix d’une alimentation saine. »

Cette dĂ©cision intervient aprĂšs une longue consultation des parties prenantes concernĂ©es : organisations de consommateurs, experts dans le domaine de l’alimentation, l’industrie alimentaire et les distributeurs.

Le nutri-score est un score global (allant de -15 pour les produits « les plus sains » à +40 pour les produits « les moins sains »). Sur la base de ce score, le produit reçoit une lettre avec le code couleur correspondant : du vert foncé (A) au rouge foncé (F).

L’algorithme sur la base duquel le score est calculĂ© tient compte Ă  la fois des Ă©lĂ©ments positifs et nĂ©gatifs : la teneur en sucres, en acides gras saturĂ©s, en sel et les calories ont une influence nĂ©gative sur le score, tandis que la teneur en fruits, lĂ©gumes, fibres ou protĂ©ines peut amĂ©liorer le score.

La ministre De Block prĂ©fĂšre le nutri-score Ă  d’autres systĂšmes comme le systĂšme britannique traffic lights pour plusieurs raisons :

  • Le nutri-score a Ă©tĂ© testĂ© en France. Les tests ont dĂ©montrĂ© qu’il avait un impact plus important sur le comportement d’achat des consommateurs que d’autres systĂšmes. En d’autres termes, il est fondĂ© sur des donnĂ©es scientifiquement fondĂ©es ;
  • Ce systĂšme simple (un score pour l’ensemble du produit) permet au consommateur d’avoir une Ă©valuation globale du produit en un coup d’Ɠil. Il l’aide ainsi Ă  faire un choix sain plus facilement, comme le demande l’Organisation mondiale de la santĂ© ;
  • Le soutien d’experts alimentaires, d’acteurs majeurs de la distribution en Belgique et des entitĂ©s fĂ©dĂ©rĂ©es. Enfin, un label n’aura l’effet souhaitĂ© que si toutes les parties prenantes sont impliquĂ©es.

La ministre souligne que l’utilisation du nutri-score reste volontaire : aucun producteur ou distributeur d’aliments ne sera obligĂ© de l’utiliser. Elle espĂšre toutefois que le plus grand nombre possible d’entreprises concernĂ©es adopteront le label.

Pour plus d’informations : https://www.deblock.belgien.be/fr/l%C3%A9tiquetage-nutritionnel-nutri-score-sera-introduit-en-belgique

« Le paquet à 25 euros ? C’est l’option choisie par les autorités australiennes »

Le 23 AoĂ»t 2018A partir du 1er septembre, en Australie, le paquet de 30 cigarettes vaudra plus ou moins 25 euros selon la marque ! Cette mesure s’inscrit dans une politique volontariste de lutte contre le tabagisme.

L’Australie est certainement le pays le plus ferme en termes de tabagisme. Le gouvernement y a mis en place un ensemble de mesures pour le faire reculer : il a dĂ©cidĂ© d’augmenter annuellement, entre 2017 et 2020, le montant des taxes et accises sur les paquets de cigarettes de 12,5% (1-2) ; le paquet neutre (paquet de couleur uniforme) comportant comme seule illustration les images choc des mĂ©faits du tabac et les messages sanitaires y est imposĂ© depuis 2012 ; il est interdit d’exposer les paquets dans les magasins ainsi que de faire rentrer dans le pays plus de 25 cigarettes par voyageur (via les aĂ©roports et les produits dĂ©taxĂ©s, par exemple)
 Et certains Etats australiens renforcent encore ces mesures en interdisant la vente aux moins de 18 ans ou en proscrivant la cigarette Ă  l’extĂ©rieur (aux arrĂȘts de bus, dans les festivals, dans les aires rĂ©servĂ©es aux enfants, dans les rues piĂ©tonniĂšres, sur les plages
), par exemple. La liste est longue, tant la dĂ©termination des autoritĂ©s est grande. (3)

Commentaire de la Fondation contre le Cancer

Dr. Anne Boucquiau, Manager Experts & Porte-Parole, et RĂ©gine Colot, Psychologue tabacologueL’augmentation majeure du prix du paquet de cigarettes est l’une des mesures phares et donne des rĂ©sultats : en Australie, le nombre de fumeurs est ainsi passĂ© de 27% dans les annĂ©es 90 Ă  14% en 2016. Les autoritĂ©s aimeraient voir Ă©merger la premiĂšre GĂ©nĂ©ration sans Tabac, Ă  savoir des enfants qui ne verraient jamais de cigarette dans leur enfance. Certains quartiers sont en effet totalement non-fumeurs ! C’est prĂ©cisĂ©ment l’objectif que s’est aussi fixĂ© la Fondation en partenariat avec d’autres associations actives en matiĂšre de lutte contre le tabagisme (www.generationssanstabac.be).Pour que l’augmentation des taxes sur le tabac soit efficace, elle doit provoquer une forte Ă©lĂ©vation du prix du paquet de cigarettes : ainsi selon l’OMS, le prix du paquet croĂźt de 10%, cela s’accompagne d’une diminution de 4% de la consommation tabagique. Mais attention : cette augmentation de prix doit s’appliquer Ă  tous les produits du tabac, pour Ă©viter des alternatives moins chĂšres, comme le tabac Ă  rouler.

Suivre l’exemple australien

En Belgique malheureusement, les augmentations de prix sont trop faibles pour avoir un impact sur la prĂ©valence du tabagisme
 Soulignons cependant que d’autres mesures ont Ă©tĂ© prises telles que l’interdiction de fumer dans les lieux publics fermĂ©s ou les images choc sur les paquets de cigarettes, notamment. Mais nous sommes loin d’avoir une politique volontariste comme les Australiens
C’est pourquoi la Fondation contre le cancer est en contact permanent avec nos dĂ©cideurs politiques actuels pour que toutes les mesures prĂ©vues dans le Plan Tabac soient mises en place sous cette lĂ©gislature. La Fondation travaille aussi Ă  ce que soient intĂ©grĂ©es dans les programmes Ă©lectoraux les mesures qui ont fait leurs preuves en termes de prĂ©vention du tabagisme dans d’autres pays, dont l’augmentation forte des prix des paquets.

La Fondation vous aide Ă  arrĂȘter

Diminuer le nombre de nouveaux fumeurs est une chose ; arrĂȘter de fumer en est une autre
 C’est pourquoi la Fondation est aux cĂŽtĂ©s des fumeurs pour les soutenir dans leur souhait de sevrage tabagique via Tabacstop, un programme soutenu par les autoritĂ©s rĂ©gionales (www.tabacstop.be ; 0800 111 00). LĂ  aussi la Fondation plaide auprĂšs des autoritĂ©s pour que soient mieux remboursĂ©es les aides reconnues comme efficaces dans le sevrage tabagique, parmi lesquelles les substituts nicotiniques.

Les défis de la recherche en promotion de la santé : vers une science des solutions

Un matin ensoleillĂ© aux prĂ©mices de l’étĂ©, les acteurs du secteur de la promotion de la santĂ© se sont retrouvĂ©s sur les bancs du campus bruxellois de l’UCL. ConviĂ©s par le RESO (le service universitaire de promotion de la santĂ© de l’UCL) pour une matinĂ©e d’échange, nous Ă©tions impatients de venir Ă©couter cette grande dame de la promotion de la santĂ©, Christine FerronNote bas de page. Au programme, une ambitieuse question : « Partenariats acteurs-chercheurs-citoyens et dĂ©cideurs politiques : pourquoi et comment travailler ensemble ? ». Avec la contribution du RESO, Education SantĂ© vous propose un retour sur cette matinĂ©e.

Des données probantes, une absolue nécessité

« Pourquoi travailler ensemble ? Pour produire et diffuser des donnĂ©es probantes en promotion de la santĂ© », c’est ainsi que dĂ©marre la prĂ©sentation de Christine Ferron. Tout sourire et d’une façon toute professorale (dans son riche parcours, elle a aussi enseignĂ©), la premiĂšre partie de son exposĂ© porte sur ces donnĂ©es probantes et les enjeux capitaux qu’elles reprĂ©sentent en promotion de la santĂ©. La prĂ©occupation n’est pas nouvelle bien entendu, mais il est indĂ©niable que les termes « evidence-basedNote bas de page », « programmes modĂšles », « fondĂ©s sur la science »… sont en vogue, notamment auprĂšs des politiques et autres pouvoirs subsidiants. L’OMS dĂ©finit ces donnĂ©es fondĂ©es sur des preuves comme « des conclusions tirĂ©es de recherches et autres connaissances qui peuvent servir de base utile Ă  la prise de dĂ©cision dans le domaine de la santĂ© publique et des soins de santĂ© ».Suivant cette dĂ©finition, ces donnĂ©es peuvent ĂȘtre issues d’autres lieux que la recherche scientifique. Christine Ferron revient de long en large sur ces « autres lieux » tels que la littĂ©rature griseNote bas de page, ou encore sur leurs diverses natures (des donnĂ©es tacites issues de l’expĂ©rience des acteurs de terrain, des donnĂ©es contextuelles, etc.). On parle d’ « evidence ice-bergNote bas de page » pour dĂ©signer la quantitĂ© gigantesque de donnĂ©es probantes existantes et « tout l’enjeu de faire remonter Ă  la surface ces donnĂ©es issues de l’expĂ©rience, en gĂ©nĂ©ral mal connues, mal diffusĂ©es mais nĂ©anmoins essentielles ». Pour cela, des partenariats entre acteurs, chercheurs et dĂ©cideurs devront se mettre en place
ImageLes enjeux pour le secteur sont en effet gigantesques, que ce soit pour prouver l’efficacitĂ© de la promotion de la santĂ© (« HĂ© oui, on en est encore lĂ  aujourd’hui » soupire Mme Ferron avec un air goguenard), l’augmenter et amĂ©liorer ses actions, etc. On ne vous apprend rien en affirmant que notre secteur souffre encore parfois d’un manque de crĂ©dibilitĂ©. Par ailleurs, l’enjeu est aussi Ă©thique : « Une dĂ©marche non probante peut ĂȘtre une dĂ©marche inutile, inefficace, voire dĂ©lĂ©tĂšre. Prenons par exemple le cas des recommandations de couchage des bĂ©bĂ©s dans les annĂ©es ’80 – sur le ventre – qui Ă©taient intuitives mais pas basĂ©es sur des preuves
 et il s’est avĂ©rĂ© que ces recommandations Ă©taient dĂ©lĂ©tĂšres pour les cas de mort subite du nourrisson. »La notion d’utilitĂ© se pose aussi d’emblĂ©e lorsqu’on parle de donnĂ©es probantes. En effet, dĂ©ployer des moyens considĂ©rables pour tirer des conclusions « de bon sens » ne nous avancera pas beaucoup. Mais il faut aussi que les recommandations issues des rĂ©sultats des recherches « collent » avec les rĂ©alitĂ©s de terrain et les pratiques, et soient jugĂ©s Ă©thiquement acceptables. L’utilisation de la peur auprĂšs du public par exemple est depuis longtemps remise en cause. Pour Ă©viter d’entendre « ceux du terrain » dire « tout ça, ce n’est que de la thĂ©orie de labo », pour Ă©viter que des programmes complexes soient mal compris et rĂ©duits Ă  quelques rĂ©sultats attendus dans les conclusions d’une recherche, la rencontre entre les personnes issues de la recherche et ceux qui mettent en place des projets de promotion de la santĂ© est absolument nĂ©cessaire. Christine Ferron parle mĂȘme d’une nĂ©cessaire « acculturation et reconnaissance rĂ©ciproque aux principes mĂ©thodologiques et Ă©thiques de leurs secteurs d’intervention respectifs, et Ă  leurs contraintes et ressources respectives ».Avant de revenir sur ces incontournables rencontres entre acteurs (dans le but de crĂ©er des partenariats de recherche, qui vont guider l’action avec des donnĂ©es probantes, donc utiles
 vous me suivez ?), Christine Ferron assure nos bases thĂ©oriques et nous explique la recherche interventionnelle.

Vers une science des solutions

« Il existe un mythe tenace et pernicieux en santĂ© publique, selon lequel la connaissance des mĂ©canismes et des facteurs de risque des maladies constitue un savoir suffisant pour planifier des interventions de prĂ©vention et de promotion de la santĂ© des populationsNote bas de page », expriment trĂšs justement Louise Potvin et consorts. Et Christine Ferron d’ajouter : « Louise Potvin l’explique comme tel : il existe une science des problĂšmes, fortement investiguĂ©e, et une science des solutions. Tout un pan de la recherche actuelle va s’intĂ©resser Ă  tester des solutions, c’est-Ă -dire tester la mise en Ɠuvre d’actions pour rĂ©pondre aux problĂšmes identifiĂ©s, optimiser les modalitĂ©s d’implantation de ces actions, etc. La recherche interventionnelle en promotion de la santĂ© se positionne dans le cadre de cette science des solutions et plutĂŽt du cĂŽtĂ© des approches populationnelles, voire environnementales ou sur les Ă©cosystĂšmes. »La recherche interventionnelle en promotion de la santĂ© regroupe en soi tous types de recherches, allant de l’épidĂ©miologie sociale Ă  la recherche Ă©valuative, en passant par la recherche en sciences sociales
 L’éventail est large. Peu importe le type, du moment que cette recherche « utilise des mĂ©thodes scientifiques pour produire des connaissances sur les interventions, les programmes ou les politiques (que ce soit dans le secteur de la santĂ© ou d’autres) dont les finalitĂ©s sont

  • d’avoir un impact favorable sur les dĂ©terminants sociaux, culturels et environnementaux de la santĂ© dans une population ;
  • d’agir sur la rĂ©partition des facteurs de risque et de protection dans cette population, de rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©Note bas de page. »

La recherche interventionnelle s’applique Ă  des interventions de nature complexe, qui caractĂ©risent les approches en promotion de la santĂ©. Elle peut porter sur toutes les Ă©tapes de la rĂ©solution des problĂšmes (et donc de la mise en place des solutions
) : la pertinence et la cohĂ©rence des interventions, son adaptation dans le contexte local et l’évolution de ce contexte suite Ă  l’application du projet ou programme, ou plutĂŽt l’objectivation du lien entre l’évolution du contexte et l’intervention en elle-mĂȘme.Car la question de la transfĂ©rabilitĂ© de l’intervention est tout Ă  fait centrale et Ă©tudiĂ©e explicitement. La recherche interventionnelle ne se concentre pas tant sur l’évaluation des rĂ©sultats obtenus d’une intervention en promotion de la santĂ© que sur l’analyse et la comprĂ©hension des effets, des processus et des mĂ©canismes Ă  l’Ɠuvre. Elle se distingue ainsi des recherches Ă©valuatives, Ă  ce jour plus courantes dans le milieu.

La recherche interventionnelle, vecteur de partenariat acteur-chercheur

Revenons donc Ă  la question centrale, celle du partenariat entre acteurs, chercheurs, citoyens et dĂ©cideurs politiques. Christine Ferron nous emmĂšne au Pays de Redon, en Bretagne, pour nous conter l’expĂ©rience formidable qui y a Ă©tĂ© menĂ©e. Une vaste intervention intersectorielle de promotion de la santĂ© a Ă©tĂ© montĂ©e sur plusieurs annĂ©es, sous-tendue dĂšs sa conception par une recherche interventionnelle. Cela a abouti notamment Ă  la mise en place d’une assemblĂ©e locale de santĂ© qui regroupe des dĂ©cideurs, des citoyens, des acteurs
 Nous ne dĂ©taillerons pas ici toute l’expĂ©rience mais sachez que celle-ci est dĂ©cryptĂ©e dans l’ouvrage « Intervenir localement en promotion de la santĂ©. Les enseignements de l’expĂ©rience du Pays de Redon – Bretagne du Sud »Note bas de page.La question des partenariats entre les diffĂ©rentes parties prenantes se trouve donc Ă  la source, tout au long du processus, et dans le rĂ©sultat et la pĂ©rennisation du programme. Questions-rĂ©ponses avec la salle.

La participation citoyenne

D’emblĂ©e, une personne interpelle Christine Ferron sur la question de l’implication des citoyens de maniĂšre gĂ©nĂ©rale, comment procĂ©der ? « Toutes ces questions mobilisent notre expertise en promotion de la santĂ©. En tant qu’acteurs de promotion de la santĂ©, on dispose dĂ©jĂ  de nombreux outils et d’un savoir-faire pour impliquer les personnes dans nos projets. Dans le cadre d’une recherche interventionnelle, on peut s’appuyer sur les mĂȘmes ressources, les acteurs-relais, etc. L’enjeu sera plutĂŽt de maintenir leur intĂ©rĂȘt pour le projet, ce qui veut dire qu’à aucun moment, ils ne doivent se sentir exclus, manipulĂ©s ou instrumentalisĂ©s. »

Quid des rapports de pouvoir ?

« C’est vrai pour la recherche interventionnelle mais aussi pour les recherches participatives, collaboratives
 : ça change les relations entre les acteurs concernĂ©s ! On ne peut pas monter ce type de projet en maintenant des hiĂ©rarchies fortes et descendantes. La co-construction est un Ă©lĂ©ment-clĂ©, avec un effet relativement durable d’aprĂšs mon expĂ©rience. C’est aussi pour cela qu’il est indispensable au dĂ©part de travailler nos reprĂ©sentations rĂ©ciproques. »

Comment impliquer les décideurs et les chercheurs ?

L’implication des dĂ©cideurs n’est pas une Ă©vidence
 en tant qu’acteurs de promotion de la santĂ©, on le sait dĂ©jĂ . Mais avec l’expĂ©rience du Pays de Redon, Christine Ferron nous donne une note d’optimisme : « Ils n’ont pas tout de suite saisi l’enjeu et l’intĂ©rĂȘt de la dĂ©marche. Les dĂ©cideurs membres du comitĂ© local – des Ă©lus pour la plupart, sont venus par curiositĂ© et ont beaucoup appris en prenant part au projet. Mais faute de temps leur prĂ©sence Ă©tait intermittente
 L’Agence rĂ©gionale de santĂ© (les services de l’Etat en rĂ©gion) a trouvĂ© progressivement sa place au sein du comitĂ© de pilotage. C’est en prenant une part active aux Ă©changes et Ă  la prise de dĂ©cision que ses reprĂ©sentants se sont appropriĂ©s le projet, et l’ont valorisĂ© comme un gain significatif pour le territoire. C’est lĂ  que c’est devenu trĂšs intĂ©ressant. Ces dĂ©cideurs se sont vraiment impliquĂ©s au moment-clĂ© du projet oĂč les chercheurs ont commencĂ© Ă  cĂ©der leur place et oĂč il s’agissait de penser la suite. »« Selon moi, l’enjeu est plutĂŽt de faire entrer les chercheurs dans cette dynamique participative. Ils n’ont en gĂ©nĂ©ral pas l’habitude d’avoir en face d’eux des citoyens ou des reprĂ©sentants de la population auxquels on donne l’opportunitĂ© de donner un avis sur un protocole de recherche, sur la façon dont certaines dimensions sont explorĂ©es
 »

Un traducteur-coordinateur

« A chaque Ă©tape, il s’agit d’ĂȘtre attentif Ă  la comprĂ©hension et Ă  la validation des donnĂ©es thĂ©oriques, des choix mĂ©thodologiques, de constructions d’hypothĂšses, etc. Evidemment, cela prend du temps mais la rĂ©ussite du projet en dĂ©pend. Il ne faut pas hĂ©siter Ă  faire en permanence des aller-retour Ă  chaque Ă©tape du projet pour s’assurer que chacun est d’accord et a entiĂšrement saisi ce qui se passe, le pourquoi, la formulation
Tout doit ĂȘtre trĂšs explicite. D’oĂč l’enjeu de mettre en place dĂšs le dĂ©part une fonction de traduction et de coordination. »« De mon expĂ©rience, ce rĂŽle (de traducteur-coordinateur) est jouĂ© par le pilote de l’intervention. Ne fĂ»t-ce que parce que nous autres, acteurs de la promotion de la santĂ©, avons l’habitude des partenariats complexes, d’animer des dynamiques de groupe, de veiller Ă  l’implication de tous. »« Bien que ce rĂŽle Ă©choit souvent aux acteurs de la promotion de la santĂ©, une formation supplĂ©mentaire est tout de mĂȘme requise. Pour jouer un rĂŽle de traducteur, il faut maĂźtriser les deux langues et donc ĂȘtre un minimum formĂ© Ă  la recherche de maniĂšre Ă  maĂźtriser le vocabulaire, les mĂ©thodes, la comprĂ©hension des concepts scientifiques. En France, ce type de formation de base Ă  la recherche se dĂ©veloppe de plus en plus. Attention toutefois, il n’est pas demandĂ© aux chargĂ©s de projet de changer de mĂ©tier, mais de s’équiper pour mener Ă  bien ce nouveau type de partenariat. »Pour conclure, l’absolue nĂ©cessitĂ© de fournir des donnĂ©es probantes sur les actions et programmes en promotion de la santĂ© n’est plus Ă  dĂ©montrer. Mais au cours de cette matinĂ©e, Christine Ferron nous a fourni des pistes sur le « comment ». Basculer vers une science des solutions, un dĂ©fi de taille Ă  relever pour le secteur !

Portfolio de ressources proposé par le RESONote bas de page

  1. Intervenir localement en promotion de la santĂ©. Les enseignements de l’expĂ©rience du Pays Redon-Bretagne Sud.

You C., Joanny R., Ferron C., Breton E. Rennes (France) : Ecole des hautes études en santé publique (EHESP). 2017. 191p.https://www.ehesp.fr

  1. Promotion de la santĂ© : une dynamique d’échanges entre chercheurs et intervenants du terrain

Sourimont M. Rennes (France) : Instance rĂ©gionale d’éducation et de promotion de la santĂ© (IREPS) Bretagne. Horizon pluriel. 2013/25. p.16.http://irepsbretagne.fr

  1. Recherche interventionnelle en santé publique : quand chercheurs et acteurs de terrain travaillent ensemble

Ferron C., Breton E., Guichard A. Saint-Denis (France) : Institut national de prĂ©vention et d’éducation pour la santĂ© (INPES). SantĂ© en Action. 2013/245. pp.10-41.http://inpes.santepubliquefrance.fr

  1. Collaborer entre chercheurs et acteurs de terrain ? RĂ©flexions, points d’attention et questions Ă  se poser pour une collaboration fructueuse

Periferia asbl. Bruxelles (Belgique). 2014https://periferia.be/collaborer-entre-chercheurs-et-acteurs-de-terrain

  1. Développer un projet de recherche interventionnelle en promotion de la santé : principes, outils, place et rÎle de chacun

Sizaret A., Sandon A. Dijon (France): Instance rĂ©gionale d’éducation et de promotion de la santĂ© (IREPS) Bourgogne Franche-ComtĂ©. 2018. p.28http://ireps-bfc.org

  1. Recherche interventionnelle en santĂ© publique, transfert de connaissances et collaboration entre acteurs, dĂ©cideurs et chercheurs – le dĂ©fi français de l’innovation

Cambon L., Alla F. Montrouge (France) : Institut de Recherche en Santé Publique. Questions de Santé Publique. 2014/4 (Vol.27). pp.1-4https://sites.uclouvain.be/reso/opac_css/index.php

  1. Recommandations pour l’élaboration d’un projet de recherche interventionnelle en promotion de la santĂ©

Joanny R. Rennes (France) : Instance rĂ©gionale d’éducation et de promotion de la santĂ© (IREPS) Bretagne. 2014. p.60http://www.cres-paca.org

  1. La recherche en promotion de la santé. Actes du colloque du PÎle régional de compétences Lyon, janvier 2015

Berger D., Boussouar M. Lyon (France) : Editions des archives contemporaines. 2016. p.94

  1. Global health promotion and population health intervention research

Jackson S. New-York (USA): Sage Publishing. Global Health Promotion. 2017/3 (Vol.24). pp.3-4

  1. Ce que l’intervention fait Ă  la recherchĂ© dans un contexte de maladie grave

Marchand A., Rollin Z. Laxou (France) : Société Française de Santé Publique (SFSP). Santé Publique. 2015/3 (Vol.27). pp.331-338

  1. Valoriser les résultats de la recherche auprÚs des acteurs de terrain

Paris (France) : Fondation Internationale de la Recherche Appliquée sur le Handicap (Firah). 2018. p.76http://www.firah.org

  1. Promotion de la santé basée sur des données probantes : un domaine émergeant

Juneau C-E., Jones C., McQueen D., et al. New-York (USA) : Sage Publishing. Global Health Promotion. 2011/1 (Vol.18). pp. 122-133

  1. Analyser la transfĂ©rabilitĂ© d’une intervention: application du modĂšle fonctions clĂ©s/ implĂ©mentation/ contexte Ă  un programme de prĂ©vention du diabĂšte

Fianu A., Villeval M., Naty N., et al. Laxou (France) : Société Française de Santé Publique (SFSP). Santé Publique. 2017/4 (Vol. 29). pp. 525-534

  1. La complexité : concept et enjeux pour les interventions de santé publique

Pagani V., Kivits J., Minary L., et al. Laxou (France) : Société Française de Santé Publique (SFSP). Santé Publique. 2017/1 (Vol. 29). pp. 31-39https://www.cairn.info

  1. Unpacking Black Boxes : Mechanisms and Theory Building in Evaluation

Astbury B., Leeuw F. New-York (USA): Sage Publishing. American Journal of Evaluation. 2010/3 (Vol.31). pp.363-381

DĂ©lĂ©guĂ©e gĂ©nĂ©rale de la FĂ©dĂ©ration Nationale d’Education et de promotion de la santĂ© (FNES) en France.

« Fondé sur des preuves » en anglais

On entend par lĂ  toute la masse de publications « non conventionnelles » (non gĂ©rĂ©es par l’édition) comme les rapports de rĂ©union, les mĂ©moires Ă©tudiants, etc.

UIPES, 2004.

Cfr. Recherche interventionnelle en santé publique : Quand chercheurs et acteurs de terrain travaillent ensemble : portfolio ci-dessous

Hawe P., Potvin L. (2009) What is population health intervention research? Revue canadienne de santé publique, 100 http://journal.cpha.ca/index.php/cjph/article/view/1748/1933

Cfr. portfolio ci-dessous

Toutes les ressources mentionnĂ©es sont disponibles au centre documentaire UCL/IRSS – RESO et/ou en ligne

Pour une meilleure qualité de vie en Régions wallonne et bruxelloise : place à la santé dans toutes les politiques !

Carte blanche

Notre sociĂ©tĂ© actuelle est marquĂ©e par des transformations sociales rapides. Les structures familiales se diversifient, l’accĂšs Ă  un revenu dĂ©cent se fragilise et la population vieillit.Nous, professionnel.le.s de la promotion de la santĂ© qui Ɠuvrons dans les domaines de la santĂ© publique, de l’éducation pour la santĂ©, de la santĂ© communautaire, de la prĂ©vention des conduites Ă  risques,
, sommes convaincu.e.s qu’accorder une place Ă  la santĂ© dans toutes les politiques est dĂ©terminant pour faire face Ă  ces nouveaux dĂ©fis.En effet, la santĂ© ne dĂ©pend pas uniquement des aptitudes individuelles Ă  rester en bonne santĂ©, mais relĂšve trĂšs largement d’autres conditions : l’accĂšs Ă  un logement de qualitĂ©, la proximitĂ© des services de santĂ©, de transports en commun et d’infrastructures sportives, des environnements scolaires et de travail sains, la cohĂ©sion sociale, etc.Le combat pour promouvoir la santĂ© globale et positive est Ă  l’heure actuelle encore trĂšs peu connu et trop peu soutenu par les instances politiques. Nous considĂ©rons que nos Ă©lu.e.s communaux.ales doivent prendre leurs responsabilitĂ©s en ce sens.

Des chiffres inquiétants !

  • Environ 18% de la population wallonne vit sous le seuil de pauvretĂ©, cela concerne plus particuliĂšrement les familles monoparentales, les enfants, et les pensionnĂ©sNote bas de page.

  • 22% des mĂ©nages bruxellois Ă©voquent au moins un des problĂšmes suivant concernant leur logement : surpeuplement, incapacitĂ© Ă  chauffer convenablement, problĂšmes d’humiditĂ© ou de moisissuresNote bas de page.

  • Un tiers des 18-24 ans en Wallonie (27,9 %) qui ne sont pas scolarisĂ©s ou en formation sont au chĂŽmageNote bas de page.

  • ÂŒ des mĂ©nages bruxellois (22,5%) dĂ©clarent avoir reportĂ© des soins de santĂ© pour des raisons financiĂšresNote bas de page.

Nous sommes tou.te.s susceptibles d’ĂȘtre confrontĂ©.e.s Ă  des facteurs de vulnĂ©rabilitĂ© (chĂŽmage, frais mĂ©dicaux, endettement, etc.). Cependant, les personnes socio-Ă©conomiquement dĂ©favorisĂ©es ont davantage de risque de dĂ©velopper des problĂšmes de santĂ©, pourtant Ă©vitables.Selon une recherche canadienne de 2012, le systĂšme de santĂ© ne contribuerait qu’à hauteur de 25% dans ce qui fait la santĂ©Note bas de page. Il est grand temps d’investir dans des stratĂ©gies visant les autres dĂ©terminants de la santĂ©, comme l’évoquait rĂ©cemment la Ministre wallonne de la santĂ©, Alda GrĂ©oliNote bas de page. C’est lĂ  que se situe le cƓur du travail en promotion de la santĂ© : crĂ©er des environnements de vie et de travail favorables Ă  la santĂ©, renforcer l’action communautaire, dĂ©velopper les connaissances et compĂ©tences individuelles et collectives sont quelques-unes des stratĂ©gies que nous mettons en Ɠuvre au quotidien dans notre travail. Reconnues par la communautĂ© internationaleNote bas de page, elles ont un rĂ©el impact sur la santĂ© des citoyen.ne.s.

Les communes : autant de leviers locaux pour agir pour, et sur, la santé et la qualité de vie de tous les habitants.

Durant ces derniĂšres annĂ©es, des programmes ont Ă©tĂ© mis en place au sein de nombreuses communes Ă  Bruxelles et en Wallonie.Certains projets sont dĂ©crits sur les sites internet de nos fĂ©dĂ©rations : www.fwpsante.be et www.fbpsante.brussels.La promotion de la santĂ© renforce la capacitĂ© des populations Ă  faire face aux dĂ©fis nouveaux en matiĂšre de santĂ© tout en visant Ă  attĂ©nuer les inĂ©galitĂ©s sociales. La finalitĂ© de la promotion de la santĂ© est de leur donner une prise sur les conditions de leur santĂ© et leur bien-ĂȘtre, tout au long de leur vie. Cependant, la volontĂ© de nos responsables d’élaborer des politiques publiques saines ou de crĂ©er des environnements davantage favorables Ă  la santĂ© est encore trop faible.En Wallonie, cela fait plus de quatre ans que nous attendons un nouveau cadre dĂ©crĂ©tal. Sans celui-ci, nous ne pouvons agir dans une perspective Ă  long terme. De son cĂŽtĂ©, Bruxelles s’est rĂ©cemment dotĂ©e d’un dispositif pour organiser la promotion de la santĂ© : un dĂ©cret et un budget ont Ă©tĂ© adoptĂ©s. MalgrĂ© ces mouvements, la promotion de la santĂ© fait toujours figure de parent pauvre des politiques de santĂ© en Wallonie, comme Ă  Bruxelles. Nous constatons Ă©galement que l’impact sur la santĂ© des dĂ©cisions prises dans de nombreux domaines (Ă©ducation, emploi, mobilitĂ©, environnement, logement, citoyennetĂ©, etc.) n’est que trop rarement pris en compte.

Accorder une place à la promotion de la santé, cela passe aussi par les urnes.

À la veille des Ă©lections communales du 14 octobre prochain, nous, acteurs du terrain, estimions nĂ©cessaire de faire un Ă©tat de la situation et de rĂ©clamer plus de place pour la promotion de la santĂ© au niveau local. Actions de promotion de la santĂ© et politiques communales se jouent dans la proximitĂ© et constituent d’importants leviers pour dĂ©velopper des environnements favorables Ă  la santĂ© des citoyen.ne.s.Accorder cette place Ă  la promotion de la santĂ©, c’est aussi s’appuyer sur l’expertise d’un rĂ©seau d’acteurs publics et du non-marchandNote bas de page pour une meilleure qualitĂ© de vie en RĂ©gions wallonne et bruxelloise.Nous lançons donc cet appel Ă  nos futur.e.s Ă©lu.e.s mais Ă©galement Ă  celles et ceux qui leur font confiance, car la santĂ©, c’est notre affaire Ă  tou.te.s !

Signataires :Les membres de la FĂ©dĂ©ration Wallonne de Promotion de la SantĂ© et de la FĂ©dĂ©ration Bruxelloise de Promotion de la SantĂ© :Alias ; Alliance Nationale des MutualitĂ©s chrĂ©tiennes – Revue Education SantĂ© ; Association de Recherche Action en faveur des personnes handicapĂ©es ; Centre Bruxellois de Promotion de la SantĂ© ; Centre Communautaire de RĂ©fĂ©rence pour le dĂ©pistage des cancers ; Citadelle – Projet pĂ©riscope ; CLPS de Charleroi-Thuin ; CLPS de Huy-Waremme ; CLPS de LiĂšge ; CLPS de Verviers ; CLPS des Arrondissements de Mons-Soignies ; CLPS du Brabant wallon ; CLPS du Hainaut Occidental ; CLPS du Luxembourg ; CLPS en province de Namur ; Comme chez nous ; Coordination Education & SantĂ© ; Cultures et SantĂ© ; De Bouche Ă  Oreille – Li Cramignon ; Educa SantĂ© ; Entr’Aide des Marolles ; Espace P
 ; Eurotox ; Ex ĂŠquo ; FĂ©dĂ©ration des centres pluralistes de Planning Familial ; FĂ©dĂ©ration LaĂŻque des Centres de Planning Familial ; FĂ©dĂ©ration des maisons mĂ©dicales et collectifs de santĂ© francophones ; Femmes et SantĂ© ; Fonds des Affections Respiratoires ; Forest-Quartiers SantĂ© ; Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles Belgique ; I Care ; Icar Wallonie ; Infor-Drogues ; Le MĂ©ridien ; Le PĂ©lican ; Les Pissenlits ; Ligue des Usagers des Services de SantĂ© ; MĂ©decins du Monde ; Modus Vivendi ; Nadja ; Observatoire du Sida et des SexualitĂ©s ; Plate-forme prĂ©vention Sida ; Point Culture ; Promo SantĂ© & MĂ©decine GĂ©nĂ©rale ; Prospective Jeunesse ; Question SantĂ© ; RepĂšres ; RĂ©seau SantĂ© DiabĂšte ; SantĂ©-CommunautĂ©-Participation ; Service de SantĂ© Mentale ALFA ; Service de santĂ© mentale de Verviers – A.V.A.T. ; Service d’Information Promotion Education SantĂ© ; Service Education pour la SantĂ©-Promotion santĂ© en milieu carcĂ©ral ; Service Universitaire de Promotion de la SantĂ© de l’UCL/IRSS-RESO ; Sida IST Charleroi Mons ; Sida Sol ; Sida SOS ; Solidaris Pipsa ; Union Nationale des MutualitĂ©s Socialistes ; Univers SantĂ© ; UniversitĂ© de LiĂšge-APES ; Ville de Mons – Service de prĂ©vention et de rĂ©duction des risques liĂ©s aux usages de drogues

Personnes de contact :Pour la FBPSanté, www.fbpsante.be:Bruno Vankelegom, président, bruno.vankelegom@f-q-s.beCaroline Rasson, vice-présidente, caroline.rasson@fares.bePour la FWPSanté, www.fwpsante.be:Chantal Leva, présidente, chantal.leva@clps.beYves Gosselain, vice-président, yves.gosselain@fmm.be

L’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS), DonnĂ©es sur les niveaux et conditions de vie, disponible sur https://www.iweps.be/indicateurs-statistiques/?fwp_is_categories=niveaux-et-conditions-de-vie, consultĂ© le 30-05-2018

L’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS), DonnĂ©es sur les niveaux et conditions de vie, disponible sur https://www.iweps.be/indicateurs-statistiques/?fwp_is_categories=niveaux-et-conditions-de-vie, consultĂ© le 30-05-2018

L’Observatoire de la SantĂ© et du Social de Bruxelles-Capitale (2017). BaromĂštre social 2017. Bruxelles : Commission communautaire commune.

L’Observatoire de la SantĂ© et du Social de Bruxelles-Capitale (2017). BaromĂštre social 2017. Bruxelles : Commission communautaire commune.

Marmot M., Allen J.J. (2014) « Social determinants of health equity », American Journal of Public Health, vol. 104, S4, p.S517-S519 citĂ© dans Breton E., et al., (2017) « La promotion de la santĂ© – comprendre pour agir dans le monde francophone », Presses de l’EHESP.

Charte d’Ottawa, OMS 1986.

Ainsi font font font... les villes pour tenter de réduire les inégalités sociales de santé

Le RĂ©seau français des Villes-SantĂ© de l’OMS organisait le 24 mai dernier Ă  Angers son colloque annuel intitulĂ© “Petite enfance, inĂ©galitĂ©s, villes”. L’occasion d’Ă©changer autour des nombreuses initiatives locales imaginĂ©es aux quatre coins de la France dans le but de promouvoir la santĂ© dĂšs le plus jeune Ăąge mais aussi de constater combien il est dĂ©licat d’en mesurer les effets sur les inĂ©galitĂ©s de santĂ©. Au printemps, le parc d’attraction du vĂ©gĂ©tal Terra Botanica situĂ© en plein coeur de l’Anjou regorge de couleurs, d’odeurs et de fleurs. Des allĂ©es de roses, plantes exotiques et autres nĂ©nuphars, les 132 Ă©lus et professionnels de la petite enfance venus assister le 24 mai Ă  la rencontre ‘Petite enfance, inĂ©galitĂ©s, villes’ ont pu apprĂ©cier les effluves avant de s’engouffrer dans le centre d’affaires adossĂ© au parc. C’est ici que le rĂ©seau français des Villes-santĂ© de l’OMS tenait cette annĂ©e son dĂ©sormais traditionnel colloque national. Au programme : confĂ©rence introductive, table ronde, ateliers thĂ©matiques en sous-gtroupes, re-confĂ©rence. Le tout entrecoupĂ© de pastilles humoristiques croquĂ©es sur le vif par le dessinateur Eric AppĂ©rĂ©. Sur l’estrade, la prĂ©sidente Charlotte Marchandise-Franquet, Ă©lue Ă  la santĂ© de la Ville de Rennes, commence par rappeler que la lutte contre les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© est au coeur des prĂ©occupations des quelque 90 communes qui composent le RĂ©seau. Et d’inciter les communes Ă  s’engager dans la voie de l’action au niveau local. ‘Cela fonctionne!’, assure-t-elle.Ce n’est pas Julie Poissant, docteure en psychologie communautaire, chercheure Ă  l’Institut National de SantĂ© Publique du QuĂ©bec et experte pour le MinistĂšre de la SantĂ© et des Services sociaux du QuĂ©bec, qui dira le contraire, elle qui travaille sur les interventions permettant de rĂ©duire ces inĂ©galitĂ©s dĂšs le plus jeune Ăąge. C’est Ă  elle que revient la tĂąche de prononcer la confĂ©rence d’ouverture et de convaincre, donnĂ©es scientifiques Ă  l’appui, de la nĂ©cessitĂ© d’agir tĂŽt dans la vie pour avoir un maximum d’impact sur ce qu’elle prĂ©fĂšre appeler des inĂ©quitĂ©s en santĂ© plutĂŽt que des inĂ©galitĂ©s dans la mesure oĂč elles sont injustes et Ă©vitables. Jouant de son accent et de quelques truculentes expressions quĂ©bĂ©coises, elle a fait montre de pĂ©dagogie, rappelant d’abord que 1. les inĂ©galitĂ©s de santĂ© sont visibles dĂšs la naissance, avec par exemple plus de bĂ©bĂ©s de faible poids chez les femmes sans ressources ou vivant d’aides sociales que chez celles qui travaillent, 2. qu’elles se rĂ©partissent selon un gradient et 3. qu’elles sont sous la coupe de multiples dĂ©terminants (milieux de vie, interactions sociales, possibilitĂ©s individuelles) eux-mĂȘmes influencĂ©s par des contextes. Julie Poissant s’est fait l’Ă©cho auprĂšs des Ă©lus et professionnels prĂ©sents de ce que les travaux menĂ©s ces derniĂšres annĂ©es mettent en lumiĂšre, Ă  savoir que les expĂ©riences vĂ©cues pendant la petite enfance – statut social, envionnement affectif, ressources Ă©conomiques – laissent des traces indĂ©lĂ©biles et influencent la santĂ© tout au long de la vie. Seconde certitude relayĂ©e par l’experte : l’action sur plusieurs dĂ©terminants sociaux selon le principe de l’universalisme proportionnĂ© (chacun selon ses besoins) est la plus efficace pour soutenir le dĂ©veloppement de l’enfant dans une logique d’Ă©quitĂ©. ‘Les communes disposent de nombreux leviers pour agir en ce sens, que ce soit en direction de l’enfant et de sa famille mais aussi dans la communautĂ© au sein de laquelle les vies sont liĂ©es, sur les milieux de vie ou via des dĂ©cisions politiques.’ Le RĂ©seau en est lui aussi persuadĂ© et propose un document de synthĂšseNote bas de page de ce qu’est la stratĂ©gie de l’universalisme proportionnĂ© et de la maniĂšre dont les villes peuvent la promouvoir ou la mettre en oeuvre. Mais revenons Ă  Julie Poissant, qui veut encore insister sur la nĂ©cessitĂ© de mieux mesurer l’impact des actions entreprises Ă  l’Ă©chelle locale. Car, dit-elle, ‘ce qui se mesure s’amĂ©liore’. D’accord, mais comment? Dans la salle, il se murmure que l’expertise et les outils manquent souvent aux acteurs pour observer les effets produits par leurs actions.

‘Comment savoir si on rĂ©duit vraiment les inĂ©galitĂ©s de santĂ©?’

La session suivante, format table ronde, fournit quelques exemples d’actions locales initiĂ©es dans le but de rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© au moment de la petite enfance : actions de soutien Ă  la parentalitĂ© Ă  travers la construction d’une bande-dessinĂ©e et la rĂ©alisation d’un reportage vidĂ©o dans des micro-crĂšches de la commune de St-Joseph Ă  la RĂ©union, dispositifs passerelles Ă  Angers pour faciliter la transition vers l’Ă©cole maternelle des enfants et de leurs parents. Le directeur de l’Agence rĂ©gionale de santĂ© des Pays-de-la-Loire, Jean-Jacques Coiplet, a quant Ă  lui rĂ©affirmĂ©, au nom de la lutte contre les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ©, le soutien de son institution aux projets visant Ă  dĂ©ployer les compĂ©tences psycho-sociales chez les plus jeunes ‘pour qu’ils deviennent des citoyens agissant plutĂŽt que subissant’, Ă  permettre aux professionnels de la petite enfance d’aller au domicile des familles, Ă  soutenir les contrats locaux santĂ©. Tandis que s’installe un dĂ©bat sur la participation des familles et la posture des professionnels vis-Ă -vis de leurs compĂ©tences, une voix s’Ă©lĂšve dans la salle et pose LA question fort Ă -propos compte tenu du thĂšme de la journĂ©e : ‘Comment savoir si on rĂ©duit vraiment les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© avec tous ces dispositifs?’ Pas de rĂ©ponse…AprĂšs une furtive incursion dans les verts paysages alentours, l’aprĂšs-midi dĂ©bute en ateliers : quatre groupes, quatre thĂšmes, quatre discussions autour d’expĂ©riences de terrain. Celle consacrĂ©e aux cadres de vie et Ă  la santĂ© des jeunes enfants fait d’abord escale Ă  la Rochelle, plus exactement dans l’Ă©cole-crĂšche associative Petit Ă  petit qui depuis 2015 s’est lancĂ© dans une dĂ©marche participative pour mieux prendre en compte la santĂ© environnementale et le dĂ©veloppement durable. ‘Une dĂ©marche qui se veut vivante et nous incite tous, enfants, parents et personnels, Ă  participer, nous adapter, observer. A ĂȘtre bien avec soi, avec les autres et avec son environnement, autrement dit Ă  ĂȘtre en bonne santĂ©’, rĂ©sume Anne de Chalendar, la directrice de la crĂšche. A Brest, la co-construction par les professionnel.les et les parents d’un jardin sensoriel attenant au multi-accueil Pen Ar Creach a pour objectif d’offrir aux enfants la possibilitĂ© de faire le plein d’expĂ©riences sensorielles mais aussi de favoriser l’inclusion en ouvrant cet espace aux habitants et structures du quartier. DerniĂšre Ă©tape Ă  Grenoble qui a enfin rĂ©ussi Ă  atteindre le but que s’Ă©tait fixĂ© son service d’action sociale petite enfance : avoir de la mixitĂ© sociale dans toutes les crĂšches, aussi bien celles du centre-ville que celles des quartiers pĂ©riphĂ©riques. Son directeur se lance dans un rĂ©cit du chemin parcouru en dix ans pour affiner les critĂšres de prioritĂ© et mettre au point la politique d’accĂšs aux places de crĂšches la plus en phase avec la sociologie de la ville. A l’Ă©couter expliquer les enjeux de cette rĂ©flexion, on se dit qu’on est enfin au coeur de la lutte contre les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© telle que les villes peuvent la mener.

La santé des jeunes enfants, levier de transformation sociale?

Pour la derniĂšre sĂ©quence de la journĂ©e, la parole est Ă  Didier Jourdan, professeur en sciences de l’Ă©ducation et dĂ©tenteur de la toute nouvelle chaire de l’Unesco ‘Ă©ducations et santĂ©’ (inauguration prĂ©vue le 10 octobre 2018 Ă  Paris). Son intervention porte sur l’accompagnement des enfants vulnĂ©rables Ă  l’Ăąge de l’entrĂ©e Ă  l’Ă©cole, dont il martĂšle l’un des principaux enjeux Ă  ses yeux : ‘s’occuper de la santĂ© des petits enfants revient Ă  s’occuper de la santĂ© des individus tout au long de la vie ainsi que de leurs descendants.’ Pour lui, une vĂ©ritable stratĂ©gie d’action en matiĂšre de lutte contre les inĂ©galitĂ©s de santĂ© dans la petite enfance ne saurait se passer d’une rĂ©flexion sur la durabilitĂ©, la soutenabilitĂ© et la gĂ©nĂ©ralisation des dispositifs. Elle engage Ă  tout le moins un vĂ©ritable processus de transformation du systĂšme Ă©ducatif, une rĂ©flexion sur la formation, la charge de travail et la cohĂ©rence des professionnel.le.s, un rencentrage sur l’Ă©co-systĂšme de vie des enfants dans lequel ‘le digital doit dĂ©sormais ĂȘtre pensĂ© comme un Ă©lĂ©ment du local’. A la question ‘comment faire?’, il rĂ©pond mĂ©diation via le langage notamment, et dispositifs structurants tels que le temps pĂ©riscolaire ‘qui mĂ©rite d’ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un temps possible d’Ă©ducation Ă  la santĂ©’. Et de conclure : ‘La santĂ© de la petite enfance est l’un des meilleurs atouts dans le champ de la santĂ© publique car elle fait l’objet d’une vision assez unanime. C’est un levier de transformation pour inventer un nouveau systĂšme de santĂ© mieux adaptĂ© Ă  la rĂ©alitĂ© actuelle.’A l’issue de cette journĂ©e, Charlotte Marchandise-Franquet promet de transmettre une synthĂšse des Ă©changes de la journĂ©e aux parlementaires français pour ‘valoriser et faire connaĂźtre le travail des villes qui s’engagent pour la santĂ©’. Les plus curieux d’entre eux y trouveront un riche panorama d’initiatives Ă  mĂȘme de promouvoir la santĂ© de tous dĂšs le plus jeune Ăąge. Pour ce qui est de leur efficacitĂ© Ă  rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales de santĂ© en revanche, il est probable qu’eux aussi restent un peu sur la faim.

La plupart des communications de ce colloque sont accessibles en ligne sur le site du rĂ©seau français des Villes-santĂ© de l’OMS : http://www.villes-sante.com/colloques-et-seminaires/colloque-petite-enfance-inegalites-villes-2/

La réduction des risques pour les usagers de drogues, une stratégie complémentaire en promotion de la santé

Le sujet revient rĂ©guliĂšrement au cƓur de l’actualité : les salles de consommations Ă  moindre risque font de plus en plus parler d’elles et divisent l’opinion. La Belgique se dotera-t-elle de ce dispositif Ă  l’instar de nos voisins (France, Allemagne, Luxembourg, Pays-Bas pour ne citer qu’eux). Une Ă©tude BELSPO rĂ©alisĂ©e avec l’UniversitĂ© de Gand et l’UniversitĂ© Catholique de Louvain  sur la faisabilitĂ© de leur installation en Belgique vient de paraĂźtre, le dĂ©bat enflamme le politique et la sphĂšre publique. Il s’agit lĂ  d’une des voies parmi d’autres pour dĂ©velopper une approche de rĂ©duction des risques. Au travers de cet article, nous souhaitons revenir sur les origines, l’explication et les objectifs de cette approche encore parfois mĂ©connue, ce « troisiĂšme pilier » dans la prise en charge de la question des drogues. En guise d’introduction, avant de vous plonger vous aussi dans le dĂ©bat


RĂ©duc
 quoi ?

On ne parle pas de tous les usages mais bien des usages « à risques », c’est-Ă -dire qui peuvent entraĂźner un dommage (qu’il soit physique, psychique ou social). Les usages Ă  risques ne se limitent pas uniquement aux situations de dĂ©pendance ou aux usages nocifs, mais Ă  toute consommation qui comporte un risque.

Mettre en place une approche de RĂ©duction des Risques (RdR) signifie dĂ©velopper un ensemble de stratĂ©gies diffĂ©rentes et complĂ©mentaires de santĂ© publique qui ont pour objectif premier de limiter les risques et les dommages sanitaires et psycho-sociaux liĂ©s Ă  l’usage de drogues. Comme nous le verrons par la suite, les objectifs de cette approche vont s’Ă©largir avec le temps, au mĂȘme titre que la notion de drogue.

Il s’agit d’une approche complĂ©mentaire (on la dĂ©signe comme « le troisiĂšme pilier ») dans la politique globale contre les drogues. Les autres piliers sont en gĂ©nĂ©ral la prĂ©vention (pour rĂ©duire l’incidence des usages dans la population), la thĂ©rapie (les traitements pour opĂ©rer un changement sanitaire et/ou psycho-social auprĂšs de la personne), et par ailleurs la rĂ©pression (le volet sĂ©curitaire).

Mais comment cette approche s’est-elle dĂ©veloppĂ©e ?

Émergence dans l’urgence

Avant les annĂ©es ’80, une personne usagĂšre de drogue n’avait accĂšs Ă  des soins spĂ©cifiques qu’à la condition d’ĂȘtre prĂȘte Ă  arrĂȘter de consommer. L’abstinence Ă©tait une clĂ© pour l’accĂšs aux soins. Cela avait des consĂ©quences terribles pour les usagers qui ne voulaient ou ne pouvaient arrĂȘter, exclues des systĂšmes de soins ‘classiques’, avec tout la spirale d’exclusion que cela peut engendrer. Un constat d’échec rĂ©current Ă©tait la donne. Mais pire encore : une aggravation des risques et des dommages auprĂšs de ce public-lĂ , de leur entourage, des nuisances dans l’espace public
 Quelques voix s’élĂšvent toutefois, comme le Dr. Claude Olievenstein en France, pour faire avancer les mentalitĂ©s. Celui-ci met l’accent, par exemple, sur la personnalitĂ© de l’usager et l’importance de son contexte de vie.

Il faudra attendre une urgence sanitaire majeure pour faire un pas de gĂ©ant dans l’évolution des mentalitĂ©s et des pratiques, et pour que le monde politique prenne enfin en compte ce public mis au ban de la sociĂ©tĂ©. Au tournant des annĂ©es ’80, les ravages du Sida mais aussi la prĂ©valence des hĂ©patites auprĂšs du public des ‘injecteurs’ particuliĂšrement touchĂ©, pousse les intervenants et les politiques Ă  rĂ©agir. Il faut absolument mettre en place une politique de santĂ© publique qui permette aux usagers de se prĂ©munir des risques infectieux en ciblant leurs besoins immĂ©diats. Ainsi, un tournant majeur s’opĂšre : l’usager de drogues est Ă  nouveau considĂ©rĂ© comme faisant partie de la sociĂ©tĂ©, comme citoyen. Outre les distributions massives de prĂ©servatifs, une mesure phare de cette Ă©poque a Ă©tĂ© la mise Ă  disposition de matĂ©riel stĂ©rile d’injection. L’approche de la RĂ©duction des Risques (RdR) auprĂšs des usagers de drogues est nĂ©e et prend de l’essor.

Progressivement, dĂšs les annĂ©es ’90, le champ de la RdR va s’élargir : ce n’est plus la problĂ©matique seule des risques d’infection qui est prise en compte mais tous les risques physiques, psychologiques et sociaux liĂ©s Ă  la consommation. ParallĂšlement, le public-cible des ‘injecteurs’ s’élargit Ă  toutes les personnes qui consomment des drogues, que celles-ci soient lĂ©gales ou non, et que l’usage soit occasionnel, rĂ©gulier, que la personne soit dĂ©pendante ou non. L’addictologie est une discipline qui s’est installĂ©e, on ne fait plus de distinction aussi tranchĂ©e qu’avant entre les drogues lĂ©gales ou illĂ©gales. Tous les publics sont concernĂ©s. D’un outil hygiĂ©niste, on Ă©volue rapidement vers la prise en compte de l’usager comme expert de son vĂ©cu, vers la rencontre entre celui-ci et le soignant, dans une dĂ©marche d’ empowerment plus que d’assistance passive. L’importance de la rencontre et du lien avec la personne devient centrale. On voit par exemple des lieux d’accueil ‘à bas seuil’ se dĂ©velopper.

Les rĂ©sultats de toutes ces initiatives RdR ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s et documentĂ©s au fil des ans : une diminution des overdoses et des contaminations, une (re)prise de contact avec un public marginalisĂ© et un meilleur accĂšs aux soins, mais Ă©galement des effets positifs dans l’environnement et les espaces publics, etc.

Les postulats de départ

Penser une approche de rĂ©duction des risques pour les usages de drogues implique d’accepter au dĂ©part certains postulats tels qu’un monde sans drogues n’existe pas, tout comme le risque zĂ©ro n’existe pas non plus. La prise de risque fait partie du reste de l’existence humaine. Ensuite, les risques sont maximisĂ©s dans un contexte de prohibition des drogues : les rĂ©seaux se criminalisent, les usagers sont amenĂ©s Ă  se cacher et Ă  consommer de maniĂšre plus risquĂ©e, cela pousse aussi Ă  la marginalisation et Ă  le perte de liens, etc.

Les intervenants du secteur prĂŽnent aussi qu’une information objective ou la mise Ă  disposition de moyens pour un usage Ă  moindre risque ne sont pas des incitateurs Ă  la consommation. Du reste, une approche RdR s’adresse spĂ©cifiquement aux personnes en situation de consommation.

Des objectifs et des champs Ă©largis

Au vu de son Ă©volution, l’approche de la RdR s’inscrit davantage dans une approche de santĂ© globale de la personne, mais de son environnement Ă©galement. Les objectifs sont les suivants :

  • rĂ©duire la morbiditĂ© et les comorbiditĂ©s ;
  • amĂ©liorer l’état de santĂ© des usagers ;
  • favoriser l’accĂšs aux soins, Ă  l’accompagnement et aux droits des usagers ;
  • favoriser la rĂ©insertion sociale ;
  • rĂ©duire les nuisances publiques.

A tout niveau et oĂč que se trouve la personne dans son parcours de consommation, aller Ă  la rencontre de la personne (plutĂŽt qu’attendre une demande), le dialogue, l’établissement d’un lien de confiance, l’accueil, sans jugement moral, sont des valeurs et une condition sine qua non.

Les initiatives en RdR dans le milieu considĂšrent l’usager comme un partenaire, il est amenĂ© Ă  mobiliser ses ressources tant pour sa santĂ© que celle des autres, par exemple via des programmes d’information par les paires. Mais bien au-delĂ  parfois avec un projet entiĂšrement pensĂ© par les usagers, gĂ©rĂ© par les usagers.

Comme nous l’avons vu, le champs de la RdR pour les usagers de drogues s’est considĂ©rablement Ă©largi. Certains milieux sont dĂ©signĂ©s comme prioritaires vu la prĂ©valence importante de consommation ou d’exposition aux risques, comme le milieu festif ou le milieu carcĂ©ral.

Quelques exemples d’actions

Sans ĂȘtre exhaustif, voici quelques exemples de projets ou de programmes inscrits dans une politique de RdR liĂ©s aux consommations de drogues :

  • La distribution de matĂ©riel stĂ©rile d’injection via des comptoirs d’échange de seringues
  • La distribution de prĂ©servatifs
  • Les salles de consommation Ă  moindre risque (SCMR)
  • Le testing de substances dans un lieu festif tel qu’un festival
  • Les tests de dĂ©pistage rapide
  • L’information en milieu festif
  • 


Pour en savoir plus : https://reductiondesrisques.be/

Utiliser le jeu de société comme outil de prévention de la santé

Plus de 1.200 jeux de sociĂ©tĂ© sortent chaque annĂ©e et ce pour tous les publics. Jeux traditionnels, abstraits, collaboratifs, coopĂ©ratifs, linguistiques, musicaux ; jeux Ă  jouer seul en petits ou grands groupes ; jeux simples ou complexes.Depuis quelques annĂ©es, le monde du jeu est en pleine croissance. Les magasins et les festivals sont de plus en plus nombreux, la Haute-Ecole Bruxelles Brabant organise une annĂ©e de spĂ©cialisation en sciences et techniques du jeu depuis 5 ans et des ouvrages rĂ©flĂ©chissant sur l’utilisation du jeu comme outil d’apprentissage paraissent peu Ă  peu ci et lĂ .C’est donc tout naturellement qu’est venue l’idĂ©e de porter un regard ludique sur la thĂ©matique de la santĂ©. Nous distinguons deux types de jeux :

  • les jeux Ă©ducatifs qui sont peu ludiques mais qui sont vraiment intĂ©ressant au niveau de leur contenu

  • les jeux de sociĂ©tĂ© qui sont trĂšs ludiques, peu informatifs, mais qui facilitent la discussion sursujet.

Dans le domaine de la santĂ©, la plupart des jeux sont Ă©ducatifs. Le matĂ©riel est donc limitĂ© et se compose essentiellement de cartes. En consĂ©quence, les parties sont de courtes durĂ©es et l’utilisation de ces outils avec des enfants est aisĂ©e.Ne nous arrĂȘtons pas uniquement sur le cĂ©lĂšbre jeu Docteur Maboul et partons Ă  la dĂ©couverte de nouveaux jeux sur la santĂ©. Le jeu Apprenons le corps humain Ă©ditĂ© par Educa va dĂ©jĂ  plus loin. Ce jeu est composĂ© de piĂšces de puzzles. Il permet aux joueurs de dĂ©couvrir les diffĂ©rentes parties du corps humain, les organes et les os.Toujours dans les jeux Ă©ducatifs, Abeilles Ă©ditions est un Ă©diteur qui publie diffĂ©rents jeu sur la santĂ© et l’alimentation. Parmi eux, on retrouve entre autres Ta santĂ© au quotidien, jeu agrĂ©able pour sensibiliser les enfants aux questions de santĂ© et de prudence. Le jeu comporte sept familles qui s’intĂ©ressent Ă  l’alimentation, Ă  l’activitĂ© physique, au sommeil, Ă  l’hygiĂšne, Ă  la sĂ©curitĂ© routiĂšre, aux accidents domestiques et au respect. Chaque carte propose un petit quizz.Abeilles Ă©ditions Ă©dite aussi le jeu Ababo sur la thĂ©matique du « don d’organes ». Le pitch de ce jeu est simple : les laboratoires des savants grouillent de crĂ©atures farfelues que le joueur devra sauver en les greffant. Une cornĂ©e, un poumon, un coeur… Une fois greffĂ©s, il faudra prĂ©server les crĂ©atures en Ă©vitant les rejets et en usant des pouvoirs de chaque savant.Dans le mĂȘme style la Direction DĂ©partementale de la Jeunesse et des Sports de Caen a crĂ©Ă© une sĂ©rie de jeux de 7 familles dont un qui se nomme tout simplement Sport et santĂ©. Ce type de jeux est dĂ©clinĂ© sous de nombreuses thĂ©matiques : l’alimentationNote bas de page, les bons gestes, etc.La mutualitĂ© ChrĂ©tienne propose quant Ă  elle un jeu de l’oie Phil chez le dentisteNote bas de page sur l’hygiĂšne bucco-dentaire et les soins dentaires. Passons aux jeux de sociĂ©tĂ© ludiques, dont l’objectif premier est d’assurer un moment de plaisir aux joueurs. Le jeu Infarkt de l’éditeur Czech Board Games sensibilise les joueurs Ă  nos excĂšs liĂ©s Ă  la vie dans une sociĂ©tĂ© de consommation. Le principe de base du jeu rĂ©side dans l’amĂ©lioration ou la dĂ©tĂ©rioration de son Ă©tat de santĂ© en fonction des Ă©vĂ©nements auxquels nous devons faire face. Tout au long de la partie, notre Ă©tat de santĂ© est reprĂ©sentĂ© sur le plateau Ă  travers diffĂ©rents indicateurs de santĂ©.Dans les jeux d’ambiance, on retrouve aussi les jeux Docteur Pilule et Doctor Panic. Le jeu Docteur Pilule, Ă©ditĂ© par Fantastic Lombric, est certes plus un jeu d’ambiance qu’un jeu Ă©ducatif. Il est toutefois un outil intĂ©ressant d’introduction Ă  une discussion sur le stress et le burn-out. Doctor Panic, Ă©ditĂ© par Repos Prod, est quant Ă  lui un jeu de coopĂ©ration et d’ambiance totalement dĂ©jantĂ©, exigeant au niveau de la concentration et de la coordination. Il permet d’avoir une discussion avec un enfant qui pourrait stresser parce qu’il doit se faire opĂ©rer.Si certains jeux sont clairement Ă©ducatifs et ciblent les enfants, quelques jeux de sociĂ©tĂ© favorisent la discussion sur un sujet qui peut ĂȘtre difficile pour un enfant ou un adolescent. Afin que le jeu puisse ĂȘtre un mĂ©dia efficace d’apprentissage, de sensibilisation ou de discussion, l’animation et le dĂ©briefing seront essentiels pendant et aprĂšs la sĂ©ance de jeu.Nous vous invitons Ă  dĂ©couvrir ces jeux en rendant une petite visite Ă  la ludothĂšque de votre quartier, Ă  y jouer et Ă  demander des conseils Ă  votre ludothĂ©caire .Jouez bien !


http://www.wesco-eshop.fr/28128020-jeu-de-7-familles-les-bons-gestes-alimentation.html#tab-details

http://www.mc.be/binaries/Phil_jeu_oie_tcm377-135826.pdf

Le festival ImagĂ©santĂ© basĂ© au cƓur de la citĂ© ardente a rĂ©uni, pour son Ă©dition 2018, 25 documentaires en provenance de diffĂ©rents coins du monde. Durant 5 jours, au travers des films mais aussi de dĂ©bats, cet Ă©vĂšnement nous invite Ă  rĂ©flĂ©chir Ă  la santĂ© et au bien-ĂȘtre. RĂ©partis en trois catĂ©gories (« compĂ©tition internationale », « soulever des montagnes » et « nouveaux horizons »), le jury a parlĂ© pour rĂ©vĂ©ler le palmarĂšs :- Still tomorrow de Jian FAN- CarrĂ© 35 d’Eric CARAVACA (primĂ© deux fois)- Entre deux sexes de RĂ©gine ABADIA- Congo Paradiso de Benjamin GEMINEL et Tristan THILEducation SantĂ© Ă©tait prĂ©sent et vous parle de deux projections.

Pour en savoir plus sur Imagésanté, rendez-vous sur le site du festival : https://www.imagesante.be/fr

Jackson

M. Crow, 92’, Etats-Unis, 2016« L’avortement reste lĂ©gal aux États-Unis, mais les efforts anti-avortement ont rĂ©ussi Ă  le rendre pratiquement inaccessible dans certains endroits et, dans le sud profond, souvent impensable. Autrefois, le Mississippi avait quatorze cliniques d’avortement. Maintenant il en demeure plus qu’une. Depuis le passage de Roe V. Wade il y a plus de quatre dĂ©cennies, le mouvement auto-marquĂ© ‘pro-vie’ a remportĂ© d’importantes batailles culturelles, politiques et juridiques. Maintenant, le stigmate de l’avortement est majeur au Mississippi et les femmes en situation de prĂ©caritĂ©, et souvent de couleur, sont particuliĂšrement vulnĂ©rables.Jackson est marquĂ© par les diffĂ©rentes strates sociales, raciales et religieuses du Sud profond et explore la nature nuancĂ©e de l’avortement dans la ceinture biblique d’AmĂ©rique. »ImageA mi-chemin entre le reportage et le film, Jackson nous emmĂšne en plein cƓur du Mississipi pour suivre le quotidien de trois femmes : Shannon Brewer, Barbara Beaver et April Jackson.Shannon est la directrice de la Jackson Women’s Health Organization, « la maison rose » comme elle est surnommĂ©e, en rĂ©fĂ©rence Ă  la couleur de ses murs. C’est le dernier bastion du droit d’accĂšs Ă  l’interruption volontaire de grossesse (IVG) pour les femmes de l’Etat. A l’intĂ©rieur de cette clinique Ă  la « pink touch » on trouve une Ă©quipe mĂ©dicale qui se dĂ©mĂšne pour ne pas plier sous les menaces de leur dĂ©tracteurs et la pression de fermeture. Les menaces sont telles que la clinique est entourĂ©e de grilles devant lesquelles on trouve chaque jour des partisans du mouvement « Pro-vie » Ă©quipĂ©s de pancartes, chapelets, bibles, chants religieux ou encore discours criĂ©s comme celui d’un homme qui scandait « Mummy, mummy, please don’t kill me mummy »Note bas de page.Tout proche de la clinique, on trouve le Center for Pregnancy Choices dirigĂ© par Barbara qui est une figure emblĂ©matique du mouvement anti-avortement au Mississipi. Ce lieu a pour objectif de guider les femmes enceintes, et particuliĂšrement celles dont la grossesse n’était pas prĂ©vue. On leur explique les diffĂ©rentes options qui s’offrent Ă  elles : mener une grossesse Ă  terme, l’adoption ou l’avortement. Ça, c’est la description officielle. Tout au long du film, on entend un discours orientĂ© anti-avortement et pro-religieux, on observe des regards culpabilisateurs sur les femmes ayant dĂ©jĂ  interrompu une grossesse.

« Je ne pense pas qu’on puisse retirer toute l’éducation sexuelle aux gens et leur retirer l’option de l’avortement »

C’est dans ce centre qu’April, mĂšre cĂ©libataire enceinte de son 4Ăšme enfant, se rend en dĂ©but de grossesse. Elle vit chez sa maman, peine Ă  joindre les deux bouts et trouve refuge et conseils au centre. Enfin des ‘conseils’
 presque une doctrine. Barbara n’hĂ©site pas Ă  diaboliser la contraception et Ă  glorifier l’abstinence pour vivre « sainement ». A coup de chiffres internes Ă  l’institution, « le prĂ©servatif, mĂȘme bien utilisĂ©, n’est efficace qu’à 80%… » dĂ©clare-t-elle. On est stupĂ©fait d’observer l’ingĂ©rence de ce centre dans la vie des femmes.Bien que le contexte amĂ©ricain ne soit pas comparable au nĂŽtre, les intervenantsNote bas de page prĂ©sents aprĂšs la projection soulignent tout de mĂȘme deux points communs : la honte et la culpabilitĂ©. L’obĂ©dience chrĂ©tienne est bien moins forte dans notre pays laĂŻcisĂ© mais il y a encore trop peu d’espace pour que les femmes concernĂ©es puissent dire ouvertement que l’avortement Ă©tait un choix clair, et parfois un choix facile, que c’est un droit et qu’elles l’utilisent. Rappelons Ă©galement que l’IVG est toujours inscrite au code pĂ©nal, ce qui alimente le sentiment de honte dans la sociĂ©tĂ©. Cela rend aussi ce droit fragile, notamment au regard du contexte ambiant dans certains pays voisins oĂč les prĂ©misses d’un retour en arriĂšre se montrent dangereusement. « Est-ce qu’à trop vouloir faire avancer nos choix et nos mentalitĂ©s, on ne se met pas nous-mĂȘme en danger ? » questionne une des intervenantes.Qui dit conception, dit aussi contraception. « Jackson » nous donne l’opportunitĂ© de rĂ©flĂ©chir sous un autre angle notre approche de l’éducation Ă  la vie relationnelle, affective et sexuelle. Chez nous, le politique prend la question au sĂ©rieux, et heureusement car l’éducation est la clĂ©. Un membre de la clinique de l’avortement dans le film dit « je ne pense pas qu’on puisse retirer toute l’éducation sexuelle aux gens et leurs retirer l’option de l’avortement » ! Cette phrase parle d’elle-mĂȘme mais elle nous rappelle aussi qu’une Ă©ducation ne sera jamais totalement optimale, que les Ă©checs de contraception existeront toujours et que (par chance), l’humain est encore parfois un ĂȘtre dĂ©raisonnĂ©. Doit-on pour autant laisser les femmes dans la difficultĂ© ?DĂ©fendre l’avortement, ce n’est pas dire « il faut faire une IVG », c’est dĂ©fendre le droit des femmes Ă  pouvoir choisir. C’est en cela que Jackson vous questionnera
 « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, Ă©conomique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » (Simone de Beauvoir).

Pour plus d’information sur le film : http://www.jacksonthefilm.com

MĂ©decines et sac Ă  dos

R. Rappe et S. Diserens, 50’, France, 2016Image« Olivier, Elise et Marine sont fraĂźchement diplĂŽmĂ©s en mĂ©decine. Avant de franchir le pas vers la vie professionnelle, ils dĂ©cident de prendre du recul sur les apprentissages de leurs six derniĂšres annĂ©es. Ils partent alors dans un voyage initiatique autour de la MĂ©diterranĂ©e, lĂ  oĂč de grandes civilisations ont dĂ©veloppĂ© la mĂ©decine que l’on connaĂźt aujourd’hui.A travers leur rĂ©flexion, leur vie quotidienne et des anecdotes de voyage, ce road-movie est l’occasion de se questionner sur nos pratiques mĂ©dicales, l’image de la santĂ© et la conception du bien-ĂȘtre. »DĂšs le dĂ©part, Elise, Marine et Olivier dĂ©clarent ĂȘtre en accord avec la dĂ©finition de la santĂ© de l’OMS (« un Ă©tat de complet bien-ĂȘtre physique, mental et social »). Pourtant, ils sentent qu’ils ont Ă©tĂ© formatĂ©s par leurs Ă©tudes et ils ont eu « peur que leur apprentissage inhibe leur rĂ©flexion ». C’est lĂ  le point de dĂ©part de leur rĂ©flexion, qui prend la forme d’un voyage initiatique.

« Dans ce film, on parle pas de la santé et de la médecine mais plutÎt des santés et des médecines. »

En traversant tous ces pays qui encerclent la MĂ©diterranĂ©e, on brosse avec eux un Ă©ventail de dĂ©couvertes et de rĂ©flexions, sans entrer en profondeur au cƓur de toutes les questions soulevĂ©es. Que ce soit sur les ressources thĂ©rapeutiques de la nature, sur l’importance d’aligner son corps et son esprit, ou encore sur une conciliation entre la croyance et la science. « Il faut intĂ©grer une part de croyance dans la science si je veux concilier le corps et l’esprit », entend-t-on en guise de rĂ©flexion.Les trois Ă©tudiants partent Ă©galement Ă  la rencontre de tradithĂ©rapeutes. A la question « que vous reste-t-il de ce voyage dans votre pratique, trois ans plus tard ? », Marine et Elise rĂ©pondent en cƓur : « du respect et de la tolĂ©rance par rapport aux mĂ©decines alternatives. Mais aussi le fait qu’il n’existe pas de vĂ©ritĂ© absolue. En tant que praticiens, nous nous devons d’écouter le patient et ce en quoi il croit, d’oĂč il vient et ce qu’il envisage pour restaurer sa santĂ© ».

« Un voyage ne se termine jamais. D’abord, il vous change, ensuite il reste profondĂ©ment ancrĂ© en vous. »

Un grand intĂ©rĂȘt du film, selon GaĂ«tan Absil , est le lien entre le voyage et le dĂ©veloppement de la compĂ©tence culturelle que l’on voit Ă©merger auprĂšs des protagonistes. Celle-ci dĂ©passe la sensibilisation aux autres cultures ainsi que sa propre sensibilitĂ© culturelle. Dans un contexte de soin, il s’agit de la capacitĂ© Ă  interagir avec les autres, issus d’autres cultures, en adoptant des attitudes et une approche qui valorise la diversitĂ© et permet de s’y adapter. AcquĂ©rir une compĂ©tence culturelle permet alors de mieux comprendre l’autre dans sa relation avec son corps, sa croyance, sa culture
 « et permet aussi de relativiser le savoir de la mĂ©decine ! », ajoute-t-il. D’ailleurs, il met cette compĂ©tence face au phĂ©nomĂšne d’acculturation que les anthropologues ont souvent pointĂ© du doigt lors des Ă©tudes de mĂ©decine. « On a tout intĂ©rĂȘt aujourd’hui Ă  penser le soin et la santĂ© dans les rĂ©seaux thĂ©rapeutiques, c’est-Ă -dire les rĂ©seaux qui ‘font santé’ pour une personne. »Enfin, un mot sur la forme. Il ne s’agit pas lĂ  d’un film argumentaire, qui tente de vous rallier Ă  la cause des mĂ©decines dites alternatives. Ce road-movie nous embarque au fil de rĂ©flexions, de temps de pause et de magnifiques paysages. Le voyage devient lui-mĂȘme un personnage Ă  part entiĂšre (la voix-off : « moi, ce voyage
 »). On y fait aussi l’éloge de la lenteur, du lĂącher-prise. Vous Ă©tiez tendus en vous installant dans votre siĂšge de cinĂ©ma ? Avec le bruit des cigales et le clapotis de l’eau, vous voilĂ  dĂ©tendu, les orteils en Ă©ventails, Ă  rĂ©flĂ©chir sur votre conception de la santĂ© et de la mĂ©decine, ou plutĂŽt ‘de ce qui fait soin’.

Pour plus d’information sur le film : https://fr-fr.facebook.com/medecinesetsacados/ et https://vimeo.com/ondemand/medecinesetsacados


« Maman, maman, ne me tue pas s’il-te-plaĂźt »

Claudine MOUVET, psychologue au Centre Louise Michel, Nathalie CARLIER, médecin au Centre Louise Michel et Damien LINDER, psychologue et animateur au Collectif Contraception de LiÚge.

Province - communes, partenaires pour la santé

La Province de Namur accorde un soin particulier Ă  la mise en Ɠuvre de partenariats avec les communes de son territoire. L’étĂ© dernier, elle a lancĂ© Ă  ses 38 communes un troisiĂšme appel Ă  construire des projets communs, au bĂ©nĂ©fice de leurs habitants. Sur les 205 projets choisis par les communes, 58 concernent la santĂ© ou le bien-ĂȘtre.Entre 2017 et 2019 se dĂ©roule la troisiĂšme phase des partenariats Province-communes en province de Namur. Pour cette Ă©dition, la Province de Namur propose aux 38 communes namuroises de faire leur choix au sein d’un catalogue de 47 fiches correspondant chacune Ă  une de ses expertises, un de ses mĂ©tiers spĂ©cifiques, dans ses six domaines de compĂ©tences que sont l’action sociale et la santĂ©, la culture, l’économie, l’enseignement, l’environnement et le tourisme.

205 projets dans 38 communes

Au total, la Province a rĂ©servĂ© 2,4 millions d’euros pour les partenariats Province-communes 2017-2019. ConcrĂštement, chaque commune dispose d’une enveloppe financiĂšre – une sorte de « droit de tirage » – calculĂ©e sur base de son nombre d’habitants, de sa superficie et de son indice de cohĂ©sion sociale. Et Ă  chaque projet correspond une valeur budgĂ©taire, soit prĂ©dĂ©terminĂ©e, soit Ă  prĂ©ciser sur base des spĂ©cificitĂ©s et de l’ampleur du projet envisagĂ©. La Commune sĂ©lectionne les projets qui l’intĂ©ressent et rĂ©partit son enveloppe entre ceux-ci. Si aucune des thĂ©matiques proposĂ©es ne correspond aux besoins locaux, il existe aussi la possibilitĂ©, Ă  certaines conditions, de dĂ©poser des projets dits «hors catalogue». L’offre a sĂ©duit, puisque la Province a enregistrĂ©, pour cette troisiĂšme phase de partenariats, pas moins de 205 projets ! Focus sur quelques-uns de ceux-ci, axĂ©s en particulier sur la santĂ© et le bien-ĂȘtre.

Un rĂ©pertoire d’outils « 0-5-30 » Ă  HastiĂšre

Pour la Cellule Promotion SantĂ©, une Ă©quipe de la Direction de la SantĂ© publique, travailler en partenariat est une Ă©vidence. Les projets qui s’élaborent avec les communes s’inscrivent naturellement dans ce fonctionnement. C’est la deuxiĂšme fois que la Commune d’HastiĂšre choisit le thĂšme «0-5-30», une combinaison qui rĂ©sume trois comportements de santĂ©: 0 tabac, 5 portions de fruit et de lĂ©gume et 30 minutes d’activitĂ© physique par jour. Au cours de la phase II des partenariats Province-communes (2014-2016), les employĂ©es de l’Accueil Temps Libre (ATL) de la commune ont suivi un module de formation pour dĂ©velopper leurs connaissances dans ce domaine et leur permettre de construire des activitĂ©s de promotion de la santĂ© auprĂšs des enfants dont elles ont la chargeNote bas de page. A l’issue du module, les accueillantes ont crĂ©Ă© ensemble des outils et des animations leur permettant de mettre le concept en application. Deux journĂ©es d’échanges ont alors Ă©tĂ© organisĂ©es et co-construites par les accueillantes, leur coordinatrice et la Province de Namur accompagnĂ©e de son partenaire, le Centre local de Promotion de la SantĂ© en province de Namur pour partager les outils ou les animations dĂ©veloppĂ©s. Carine Crucifix est en charge de ce projet pour la Cellule Promotion SantĂ© provinciale: «Pour cette nouvelle phase de partenariats, l’objectif est de mettre en valeur les idĂ©es des accueillantes et de crĂ©er un rĂ©pertoire reprenant de maniĂšre dĂ©taillĂ©e les animations et outils qu’elles ont-elles-mĂȘmes conçus, afin de faciliter l’Ă©change des pratiques et de mutualiser les ressources. Conçu sous une forme Ă©volutive, ce rĂ©pertoire pourra s’enrichir au fil du temps ». Les employĂ©es de l’Accueil Temps Libre d’HastiĂšre souhaitent qu’il puisse servir aux enseignants de la commune et aux accueillantes des autres communes. La fiche projet 0-5-30 a aussi Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ©e par les communes d’Havelange et de La BruyĂšre, qui la dĂ©clineront en fonction de leurs besoins propres, avec le public qu’elles identifieront comme prioritaire.

En route vers le label Ecole 21

ImageLe dispositif Ecole 21 est nĂ© en 2008 dans le cadre du projet franco-belge Interreg IV GĂ©nĂ©rations en santĂ©, auquel ont collaborĂ© plusieurs Provinces wallonnesNote bas de page. Depuis, la Cellule Promotion SantĂ© accompagne des Ă©coles vers l’obtention de ce qui est beaucoup plus qu’un label. En choisissant la fiche projet «Ecole 21», les communes proposent Ă  leurs Ă©coles d’entrer dans une dĂ©marche alliant promotion de la santĂ© et dĂ©veloppement durable. NadĂšge Fivet, de la Cellule Promotion SantĂ©, coordonne ce vaste travail, qui vise Ă  faciliter l’acquisition et le dĂ©veloppement de comportements favorables Ă  l’éducation, Ă  la santĂ© et Ă  l’environnement : «L’adhĂ©sion des Ă©coles au projet se fait sur base volontaire. A Gesves, Floreffe et La BruyĂšre, les 12 Ă©tablissements auxquels nous avons prĂ©sentĂ© le concept ont choisi de s’engager. Ils acquiĂšrent le label en signant la Charte Ecole 21 et rejoignent ainsi le rĂ©seau europĂ©en des Ecoles 21». Actuellement, les comitĂ©s de pilotage se mettent en place dans chaque Ă©cole. Les prochaines Ă©tapes sont la rĂ©alisation de diagnostics des besoins par Ă©cole, l’identification des prioritĂ©s et l’élaboration de plans d’actions. En outre, des outils pĂ©dagogiques permettant d’aborder diffĂ©rentes thĂ©matiques (dĂ©veloppement durable, santĂ©, climat scolaire
) sont rassemblĂ©s dans une malle mise Ă  la disposition de chaque Commune, en collaboration avec le Centre de Ressources Documentaires provincial qui propose aussi une formation Ă  l’utilisation de ces outils. Enfin, dans le cadre de ce partenariat, chaque Ă©cole bĂ©nĂ©ficie d’un petit subside pour soutenir la concrĂ©tisation d’un projet au choix.

Prévention des risques à Havelange

A cĂŽtĂ© de la Cellule Promotion SantĂ©, un autre service provincial possĂšde une expertise dans le domaine de la promotion de la santĂ©, et plus spĂ©cifiquement dans la prĂ©vention du SIDA, des infections sexuellement transmissibles, des hĂ©patites et dans la rĂ©duction des risques liĂ©s Ă  l’usage de produits psychotropes. Le Service de SantĂ© Affective, Sexuelle et RĂ©duction des Risques (SASER) a Ă©galement une pratique de travail en rĂ©seau profondĂ©ment ancrĂ©e. Il Ă©labore des projets de proximitĂ© avec des acteurs de terrain, mettant en action des personnes issues des publics-cibles en vue de les rendre actrices de leur santĂ©. La Commune d’Havelange a dĂ©cidĂ© de prendre au sĂ©rieux la consommation d’alcool chez les jeunes et les risques d’accidents de la route qui y sont liĂ©s. Elle a sĂ©lectionnĂ© la fiche «Contribuer Ă  la rĂ©duction des risques lors d’évĂ©nements festifs par la formation de pair locaux». Jaqueline Collin du SASER travaille en trĂšs Ă©troite concertation avec les «Jeunesses» locales et le Patro, en vue de sensibiliser les jeunes Ă  une consommation responsable. Le projet comportera des actions de rĂ©duction des risques liĂ©s Ă  la consommation de psychotropes, principalement l’alcool, et des nuisances sonores dans les fĂȘtes. Ces actions seront dĂ©terminĂ©es par les jeunes eux-mĂȘmes, qui ont dĂ©jĂ  identifiĂ© des moments-clĂ©s: les grands feux, les kermesses, les soirĂ©es et week-ends du Patro.

C’est quoi le bonheur à Philippeville ?

Ambitieux projet, que celui dans lequel la Commune de Philippeville et la Province de Namur se sont lancĂ©es ensemble ! Au dĂ©part, le choix de la thĂ©matique de «santĂ© dans toutes les politiques» (health in all policies) par le CollĂšge communal de Philippeville est en lien avec la DĂ©claration de politique communale «Philippeville, Commune oĂč il fait bon vivre !». Pour opĂ©rationnaliser cette intention, la Commune souhaite mettre en place un outil pĂ©renne d’aide Ă  la prise de dĂ©cisions et Ă  la priorisation d’actions. Le CLPS en province de Namur est aussi partie prenante. En mobilisant citoyens, agents communaux et dĂ©cideurs autour d’une rĂ©flexion sur le bien-ĂȘtre Ă  Philippeville, le projet vise Ă  dĂ©gager et Ă  hiĂ©rarchiser – par une enquĂȘte qualitative participative – les principales composantes qui dĂ©terminent le bien-ĂȘtre collectif des habitants de Philippeville. Il a aussi pour objectif de sensibiliser le CollĂšge communal Ă  l’impact des politiques sur la santĂ© et le bien-ĂȘtre collectif de la population et de doter l’Administration communale d’un outil qui lui permettra d’estimer, de maniĂšre prospective, l’impact de dĂ©cisions prises par le collĂšge sur le bien-ĂȘtre de la population.En donnant un rĂŽle aux citoyens, aux professionnels actifs sur le territoire et aux employĂ©s des services communaux dans la prise de dĂ©cision, la dĂ©marche participative permet Ă  chacun de devenir acteur de l’organisation de la sociĂ©tĂ© et du processus de changement. Le projet a officiellement Ă©tĂ© lancĂ© le 23 avril, lors d’une soirĂ©e au cours de laquelle a Ă©tĂ© le nouveau documentaire «C’est quoi le bonheur pour vous?» de Julien PeronNote bas de page.

SantĂ© mentale: soutenir les professionnels de premiĂšre ligne et augmenter l’offre de soins

Dans le catalogue proposĂ© aux communes, deux offres de partenariat Ă©taient proposĂ©es par les Services de SantĂ© mentale de la Direction de la SantĂ© publique : l’une offre un soutien aux professionnels de premiĂšre ligne et l’autre permet un accĂšs de proximitĂ© aux soins de santĂ© mentale pour la population. «La premiĂšre a Ă©tĂ© choisie par trois communes, dont les Ă©quipes du CPAS bĂ©nĂ©ficieront prochainement de sĂ©ances de supervision Ă©laborĂ©es sur mesure en fonction des besoins et animĂ©es par des spĂ©cialistes de la santĂ© mentale. La seconde, sĂ©lectionnĂ©e par cinq communes, se dĂ©cline de maniĂšre trĂšs diffĂ©rente selon les rĂ©alitĂ©s locales. Dans chaque cas, le premier travail est de bien comprendre les besoins locaux et d’élaborer ensemble un projet qui contribue Ă  y rĂ©pondre», explique Colette Nigot, responsable du DĂ©partement de SantĂ© mentale. A BiĂšvre, il s’agit de poursuivre le partenariat initiĂ© dans la phase II, en offrant des ateliers collectifs pour les parents et les adolescents, ainsi que des plages de permanence d’une assistante sociale. A EghezĂ©e, un psychologue sera mis Ă  disposition du CPAS un aprĂšs-midi par semaine pour apporter Ă  la population et particuliĂšrement, aux bĂ©nĂ©ficiaires du CPAS et aux personnes Ă©prouvant des difficultĂ©s de mobilitĂ©, une offre de proximitĂ© en matiĂšre de soins psychologiques. A Philippeville, le projet vise la prĂ©vention des violences conjugales et familiales, partant du constat d’un aggravement de cette problĂ©matique et d’un dĂ©ficit de prise en charge par les structures existantes. Il se concrĂ©tise par la mise en place et l’animation d’une plateforme de concertation locale sur les violences intrafamiliales et conjugales, par des permanences de l’asbl « Ça vaut pas le coup » du RĂ©seau Solidaris spĂ©cialisĂ©e dans l’accompagnement des personnes victimes de violences conjugales et intrafamiliales et par des groupes de paroles.

Et encore


Les thématiques de partenariat sont multiples. Sans entrer dans les détails :

  • Trois communes ont choisi de faire appel aux services du SAMI (service d’analyse des milieux intĂ©rieurs) pour mener une campagne d’information sur les risques du radon sur la santĂ© et distribuer des dĂ©tecteurs Ă  la populationNote bas de page ;

  • Quatre communes ont inscrit des employĂ©s Ă  une formation d’animateurs socio-sportifs des espaces publics ;

  • Avec les conseils et l’accompagnement du directeur du Domaine provincial de Chevetogne, quatre communes crĂ©eront une nouvelle plaine de jeux, vue comme espace de socialisation et de loisir actif ;

  • Dix communes se sont engagĂ©es ou ont dĂ©cidĂ© de poursuivre le processus « Ville amie des aĂźnĂ©s »Note bas de page ;

  • Cinq communes ont demandĂ© la crĂ©ation ou le dĂ©veloppement sur leur territoire d’une ou plusieurs haltes-accueil du BĂ©bĂ© Bus. Il s’agit d’une formule itinĂ©rante d’accueil des tout-petits, adaptĂ©e aux publics fragilisĂ©s, qui offre aux petits une opportunitĂ© de socialisation et de stimulation, tandis que leurs parents bĂ©nĂ©ficient d’un accompagnement et d’un soutien Ă  la parentalitĂ© ;

  • Face au problĂšme de la mobilitĂ© en milieu rural qui a de rĂ©els impacts sur la santĂ©, l’emploi, la formation ou encore l’accĂšs Ă  la culture, six communes ont dĂ©cidĂ© de prioriser la mobilitĂ© inclusive et solidaire pour leurs publics fragiles et dĂ©pendants, au travers d’un partenariat Ă  trois : la commune (et/ou son CPAS), la Province et une centrale de mobilitĂ© ;

  • Trois communes ont choisi d’acquĂ©rir des vĂ©los et/ou d’organiser des formations Ă  la conduite cycliste.

Au plus prĂšs des besoins locaux

Si les thĂ©matiques et les objectifs gĂ©nĂ©raux sont prĂ©dĂ©finis dans le catalogue, chaque projet concret cherche Ă  rencontrer un rĂ©el besoin local identifiĂ© par la commune. Un comitĂ© de pilotage propre au projet rassemble des reprĂ©sentants de la Commune, de la Province et bien souvent d’organismes partenaires comme une association locale ou, pour les projets de santĂ©, le CLPS… Ce comitĂ© dĂ©termine, sur base d’une analyse des besoins, les objectifs spĂ©cifiques du projet, le contexte, les modalitĂ©s de ce qui sera mis en place, en suivant une mĂ©thode commune de gestion de projet. Et une Ă©quipe mĂšne le projet au quotidien sur le terrain. MĂȘme si, Ă  cĂŽtĂ© des projets sur mesure, certains sont davantage «clĂ© sur porte», dans tous les cas, on est loin de la politique de «simple» subsidiation d’autrefois. Pour les Communes, cela requiert parfois d’adapter leurs attentes et leur vision du partenaire provincial. Un changement de culture qui paraĂźt parfois inconfortable mais dont la plus-value est rapidement visible.


Selon la dĂ©finition de l’ONE : « L’accueil extrascolaire temps libre : Ces lieux d’accueil fonctionnent avant ou aprĂšs l’école, le mercredi aprĂšs-midi et parfois durant le week-end. Ils sont situĂ©s dans les Ă©coles ou en dehors. Les plus connus sont les ‘garderies scolaires’, et les associations qui organisent des animations spĂ©cifiques. » (http://www.one.be/parents/accueil-temps-libre/)

Lire Ă  ce sujet BROUSSOULOUX S., LORENZO P., TINTINGER V., Évaluation du dispositif École 21: des pistes pour sa pĂ©rennisation, Education SantĂ©, n°308, fĂ©vrier 2015 (https://educationsante.be/article/evaluation-du-dispositif-ecole-21-des-pistes-pour-sa-perennisation/)

Le radon est un gaz radioactif qui peut s’infiltrer dans les bĂątiments par le sous-sol. Chaque annĂ©e, le radon cause environ 480 cancers du poumon en Belgique. Plus d’info sur le radon et sa prĂ©vention : www.actionradon.be

Voir Ă  ce sujet l’article : PROVINCE DE NAMUR, Une province et ses communes, amies des aĂźnĂ©s, Education SantĂ© n°341, fĂ©vrier 2018 (https://educationsante.be/article/une-province-et-ses-communes-amies-des-aines/)

Mutilations génitales féminines : un « nouveau » réseau à Bruxelles

Un « nouveau » réseau sur les mutilations génitales féminines à Bruxelles

La Coordination bruxelloise des StratĂ©gies concertĂ©es de lutte contre les mutilations gĂ©nitales fĂ©minines (CB SC-MGF) est l’un des 4 « nouveaux » rĂ©seaux financĂ©s par le gouvernement francophone bruxellois dans le cadre du nouveau Plan de promotion de la santĂ©. Le projet permettra de crĂ©er une branche spĂ©cifiquement bruxelloise au sein du rĂ©seau des StratĂ©gies ConcertĂ©es de lutte contre les MGF.

Les StratĂ©gies concertĂ©es de lutte contre les mutilations gĂ©nitales fĂ©mininesNote bas de page (SC-MGF), rĂ©seau d’activistes et d’acteurs travaillant auprĂšs de communautĂ©s concernĂ©es par les MGF, ont Ă©tĂ© mises en place dĂšs 2008, en rĂ©gions wallonne et bruxelloise. Ce rĂ©seau avait alors Ă©tĂ© lancĂ© Ă  l’initiative du GAMS BelgiqueNote bas de page – une asbl qui Ɠuvre depuis 1996 dans la prĂ©vention des mutilations gĂ©nitales fĂ©minines et la prise en charge des femmes, filles et familles concernĂ©es. Les SC-MGF, dont le GAMS assure la coordination, rassemblent des acteurs de tous les secteurs dans le but d’amĂ©liorer la coordination et la qualitĂ© des interventions et de mener un travail de plaidoyer auprĂšs des instances politiques et administratives. Le site internet des SC-MGF constitue aujourd’hui un centre de ressources sur les MGF inĂ©dit en Belgique.Cette nouvelle dĂ©marche vise ainsi de renforcer l’ancrage des SC-MGF Ă  Bruxelles par une branche spĂ©cifique de coordination bruxelloise et de mettre en place des actions rĂ©pondant Ă  la situation spĂ©cifique de la rĂ©gion.

Les mutilations gĂ©nitales fĂ©minines – une prĂ©occupation en rĂ©gion bruxelloise ?

Les mutilations gĂ©nitales fĂ©minines (MGF) sont pratiquĂ©es dans une trentaine de pays et concernent 200 millions de femmes et filles dans le mondeNote bas de page. Il s’agit d’interventions pratiquĂ©es sur l’organe gĂ©nital externe des femmes sans raison mĂ©dicale, incluant la clitoridectomie (ablation du capuchon et/ou du gland du clitoris), l’excision (ablation partielle ou totale des petites et/ou des grandes lĂšvres), l’infibulation (rĂ©trĂ©cissement de l’orifice vaginale par la suture des petites ou grandes lĂšvres) ou d’autres interventions telles que le « pricking » (percement du gland du clitoris). Ces pratiques sont reconnues comme des violations des droits humains des femmes et peuvent avoir des consĂ©quences nĂ©fastes sur la santĂ© physique, mentale et sexuelle de celles-ci.Les MGF sont criminalisĂ©es en Belgique, comme dans la plupart des pays europĂ©ens. L’article 409 du Code PĂ©nal belge sanctionne non seulement toute personne ayant pratiquĂ© une forme de mutilation des organes gĂ©nitaux fĂ©minins, mais Ă©galement tout individu ayant facilitĂ© ou permis cette pratique. En cas de risque de MGF, toute personne qui est confrontĂ©e Ă  cette situation a l’obligation de lui venir en aide (art. 422bis du CP). Aussi, le Code PĂ©nal belge prĂ©voit la possibilitĂ©, mais pas l’obligation, de lever le secret professionnel lorsqu’une fille ou une femme vulnĂ©rable a subi des MGF (art. 458 bis du CP). De plus, les MGF sont reconnues par la Belgique comme une forme de persĂ©cution basĂ©e sur le genre, pouvant donner lieu Ă  une reconnaissance du statut de rĂ©fugiĂ©.e.Note bas de pageSelon la derniĂšre Ă©tude de prĂ©valenceNote bas de page menĂ©e en Belgique, prĂšs de 26.000 filles et femmes vivant dans le pays seraient concernĂ©es par ces pratiques (chiffres pour la fin de l’annĂ©e 2016). L’étude estimait qu’environ 2/3 avait dĂ©jĂ  subi une MGF (17 273) et que le tiers restant Ă©tait Ă  risque (8644). La rĂ©gion de Bruxelles-Capitale, la province d’Anvers et la province de LiĂšge accueillent le plus de filles et femmes concernĂ©es. Pour Bruxelles, environ 8000 filles et femmes sont concernĂ©es.Les femmes et filles ayant dĂ©jĂ  subi une mutilation gĂ©nitale fĂ©minine ont besoin de pouvoir bĂ©nĂ©ficier d’une prise en charge adĂ©quate, que ce soit au niveau des soins de santĂ©, d’un suivi thĂ©rapeutique, de consultations sexologiques, d’aide sociale ou juridique. Les mesures de prĂ©vention sont toujours et encore nĂ©cessaires pour Ă©viter que d’autres filles ou jeunes femmes subissent cette violence. Les StratĂ©gies ConcertĂ©es de lutte contre les MGF sont nĂ©es du constat qu’une meilleure collaboration et concertation intersectorielle, incluant acteurs publics et non-gouvernementaux, sont primordiales pour assurer cette prĂ©vention et prise en charge.

Un réseau en co-coordination

La crĂ©ation d’une Coordination bruxelloise des SC-MGF (CB SC-MGF) (que nous appellerons « rĂ©seau MGF bruxellois » pour plus de facilitĂ©) a Ă©tĂ© soutenue dans le cadre de l’appel Ă  projet de la COCOF et s’inscrit dans le travail dĂ©jĂ  menĂ© par le rĂ©seau des StratĂ©gies concertĂ©es de lutte contre les MGF (SC-MGF) depuis maintenant 10 ans.Le rĂ©seau bruxellois va permettre une prise en charge des spĂ©cificitĂ©s du territoire bruxellois et une meilleure concertation entre les acteurs Ɠuvrant auprĂšs des communautĂ©s concernĂ©es par les MGF sur ce territoire. La finalitĂ© de la coordination bruxelloise des SC-MGF est ainsi de favoriser le travail communautaire, intersectoriel et pluridisciplinaire, afin de prĂ©venir les mutilations gĂ©nitales fĂ©minines, d’amĂ©liorer la prise en charge globale et de promouvoir la santĂ© et le bien-ĂȘtre des personnes concernĂ©es par ces pratiques.

Une particularitĂ© du rĂ©seau MGF bruxellois est le fait qu’il s’inscrit non seulement dans le Plan Promotion de la SantĂ© de la COCOF, mais Ă©galement dans la politique d’Action sociale menĂ©e par la Ministre FrĂ©mault. En parallĂšle avec le subside attribuĂ© au GAMS pour ce projet, un autre subside a Ă©tĂ© attribuĂ© Ă  l’asbl INTACTNote bas de page (association spĂ©cialisĂ©e dans les questions juridiques liĂ©es aux MGF) pour la coordination d’un « volet social » de ce rĂ©seau bruxellois. Les deux associations spĂ©cialisĂ©es se sont unies pour la co-coordination de ce rĂ©seau bruxellois : StĂ©phanie Florquin (GAMS Belgique), coordinatrice depuis 3 ans du rĂ©seau Ă©largi des SC-MGF, pour le « volet Promotion de la SantĂ© », et Charlotte Campo (INTACT), pour le « volet Action-sociale ». Les deux co-coordinatrices travailleront en collaboration Ă©troite. Si chaque « volet » a ses responsabilitĂ©s et activitĂ©s, c’est bien ensemble que nous avons fixĂ© l’objectif gĂ©nĂ©ral de la Coordination bruxelloise des SC-MGF, Ă  savoir de « favoriser le travail communautaire, intersectoriel et pluridisciplinaire, afin de prĂ©venir les MGF, d’amĂ©liorer la prise en charge globale et de promouvoir la santĂ© et le bien-ĂȘtre des personnes concernĂ©es par ces pratiques ». Deux objectifs spĂ©cifiques ont Ă©tĂ© dĂ©finis pour le premier cycle du projet (3 ans) : 1) promouvoir les droits et la santĂ© (sexuelle) des filles et des femmes concernĂ©es par les MGF vivant Ă  Bruxelles-Capitale, et 2) favoriser la concertation et l’action intersectorielle sur la rĂ©gion.ImageActuellement, une vingtaine d’associations et d’institutions bruxelloises sont engagĂ©es, soit dans le cadre des StratĂ©gies concertĂ©es de lutte contre les MGF, ou depuis la mise en place d’une coordination spĂ©cifique bruxelloise. Toutes structures en lien avec des communautĂ©s concernĂ©es par les MGF, ou intĂ©ressĂ©es par la santĂ© sexuelle des femmes migrantes et les violences de genre, sont les bienvenues pour rejoindre le rĂ©seau. Pour ce faire, il suffit de remplir une simple feuille d’adhĂ©sion, disponible sur le site des StratĂ©gies concertĂ©es MGF.Les activitĂ©s du rĂ©seau SC-MGF ont toujours Ă©tĂ© ouvertes Ă  tou.te.s et le rĂ©seau dĂ©passe largement ses membres officiels. Ainsi, de nombreuses structures partenaires ou professionnel.le.s participent aux ateliers et aux rencontres, telles que l’AssemblĂ©e annuelle qui a lieu chaque dĂ©but d’annĂ©e depuis maintenant 3 ans. En 2018, c’est plus de 70 personnes, venues de Bruxelles et de Wallonie (et mĂȘme de Flandre) qui se sont rassemblĂ©es pour Ă©changer des informations en plĂ©niĂšre et participer Ă  des ateliers afin de discuter de thĂšmes spĂ©cifiques tels que : les idĂ©es reçues autour des MGF, comment aborder la question des MGF avec une femme pour la premiĂšre fois, et le dĂ©veloppement psycho-sexuel des enfants. Bien que la Concertation bruxelloise mettra en place des activitĂ©s spĂ©cifiques pour les membres et partenaires de la rĂ©gion, nous continuerons Ă  organiser les assemblĂ©es annuelles du rĂ©seau global SC-MGF, afin de permettre la rencontre entre les acteurs bruxellois et wallons de tous secteurs.

Les actions du « réseau MGF bruxellois»

La premiĂšre action qui sera mise en place dans le cadre du projet en Promotion de la SantĂ© sera un diagnostic communautaire dont le but est de (mieux) connaitre les besoins et attentes en matiĂšre de santĂ© sexuelle des communautĂ©s concernĂ©es par les MGF vivant en rĂ©gion bruxelloise. Ce diagnostic sera menĂ© en concertation avec les membres et partenaires du rĂ©seau et nous veillerons Ă  intĂ©grer les communautĂ©s concernĂ©es dans toutes les Ă©tapes, de la conception de l’étude Ă  la validation des rĂ©sultats, en passant par le recueil des donnĂ©es. Le diagnostic communautaire servira Ă  formuler des propositions de mesures en vue d’amĂ©liorer la santĂ© sexuelle des communautĂ©s concernĂ©es.Afin d’assurer l’appropriation du rĂ©seau par tous les membres et partenaires, des rencontres bilatĂ©rales seront organisĂ©es cette annĂ©e, suivies par des rĂ©unions de concertation trois fois par an, permettant aux membres de se rencontrer et d’échanger sur leurs pratiques dans un cadre intersectoriel. Un rĂŽle important du rĂ©seau sera Ă©galement de soutenir les membres et partenaires dans leurs actions auprĂšs du groupe cible (les communautĂ©s migrantes concernĂ©es par les MGF), Ă  travers la crĂ©ation d’outils, l’organisation d’ateliers thĂ©matiques, de formations… En 2018, l’un des thĂšmes explorĂ©s lors de l’assemblĂ©e annuelle, en fĂ©vrier dernier, Ă©tait le dĂ©veloppement psycho-sexuel des enfants et comment rĂ©pondre aux questions de parents qui ont protĂ©gĂ© leur(s) fille(s) de l’excision. Les professionnel.le.s peuvent ĂȘtre confrontĂ©.e.s Ă  des idĂ©es de la part des parents et ne savent pas toujours comment y rĂ©pondre : « Si on ne coupe pas le clitoris, ça va grandir, c’est sale… », « Pourquoi ma fille met la main dans sa culotte, peut-ĂȘtre que j’aurais dĂ» l’exciser
 ». Un atelier d’une journĂ©e avec l’asbl le CĂ©rĂ©Note bas de page (Centre d’expertise et de ressources pour l’enfance), organisĂ© Ă  Bruxelles le 14 juin prochain, devra ainsi permettre aux professionnel.le.s de savoir comment aider les parents Ă  dĂ©construire ces idĂ©es reçues autour du dĂ©veloppement psycho-sexuel de leurs enfants.Le lancement officiel du rĂ©seau CB SC-MGF (volets « action-sociale » et « promotion de la santĂ© ») est prĂ©vu le mardi 12 juin de 9h Ă  12h dans les bureaux de l’asbl INTACT. Toute personne intĂ©ressĂ©e par le travail de prĂ©vention des MGF, de prise en charge des femmes/filles concernĂ©es, ou travaillant auprĂšs de communautĂ©s potentiellement concernĂ©es, sont vivement invitĂ©es Ă  cette premiĂšre rencontre. (Inscription par mail : scmgf.be@gmail.com)CrĂ©dits photos : Bea UhartPhoto1 : Khadia Diallo, fondatrice et prĂ©sidente du GAMS Belgique (au centre), lors de l’AssemblĂ©e annuelle des SC-MGF en 2017.Photo 2 : Ibrahima Alpha Diallo, relais communautaire du GAMS Belgique, et Cendrine Vanderhoeven, sexologue au centre CeMAViE (*centre de prise en charge des complications des MGF) lors d’une confĂ©rence sur le thĂšme « Excision et SexualitĂ© -DĂ©construire les idĂ©es reçues » organisĂ©e par les SC-MGF en septembre 2016.


UNICEF, 2016, “Female Genital Mutilation/Cutting: A global concern. New York : United Nations Children’s Fund.

https://uefgm.org/index.php/legislative-framework-be/?lang=fr

Dubourg, Dominique et Richard, Fabienne, 2018, « Estimation de la prĂ©valence des filles et femmes excisĂ©es ayant subi ou Ă  risque de subir une mutilation gĂ©nitale fĂ©minine vivant en Belgique, 2018 – Mise Ă  jour au 31 dĂ©cembre 2016 », IEFH et SPF SantĂ© publique, SĂ©curitĂ© de la ChaĂźne alimentaire et Environnement

Un nouveau site Internet pour un environnement sain et juste pour tous !

AprĂšs plus de 10 annĂ©es d’expĂ©riences au contact des personnes en situation de prĂ©caritĂ©, l’équipe d’Empreintes a souhaitĂ© partager son expertise par la mise en place d’un site Internet.

Le site www.precarite-environnement.be rassemble une prĂ©sentation de projets, d’outils pĂ©dagogiques et de constats utiles Ă  la mise en place d’actions pour renforcer la capacitĂ© des personnes en situation de prĂ©caritĂ©, d’agir sur leur environnement.

Les thĂ©matiques proposĂ©es sont l’énergie, la mobilitĂ©, la nature et l’eau. Du contenu vidĂ©o et audio sont Ă©galement disponibles pour comprendre ces projets, ces outils et leur intĂ©rĂȘt.

Vous souhaitez en savoir plus sur ces thématiques ou la façon de mener un projet pour renforcer la capacité des personnes en situation de précarité sur leur environnement ?

Contactez l’équipe « PrĂ©caritĂ© Environnement » d’Empreintes. precarite@empreintes.be

Pour en savoir plus : www.empreintes.be