La quantité d’antibiotiques prescrits a augmenté en Belgique ces dix dernières années, malgré les nombreuses campagnes d’information pointant les effets néfastes d’une utilisation trop intensive de ces médicaments. C’est ce qui ressort d’une étude de l’UCL, menée par le professeur Paul Tulkens.
Depuis les années 2000, les pouvoirs publics belges lancent chaque année, à l’automne, des campagnes d’information, avec pour objectif de sensibiliser le grand public aux effets nuisibles d’une utilisation intensive et inappropriée des antibiotiques. En 1999, la Belgique figurait, en effet, parmi les pays les plus grands consommateurs de ces médicaments.
Selon Paul Tulkens, professeur émérite du Louvain Drug Research Institute de l’UCL, «les campagnes de sensibilisation sont certes importantes mais l’on observe qu’elles n’ont qu’un effet réduit sur la quantité d’antibiotiques prescrite et n’agissent qu’à court terme. Or nous sommes face à une problématique qui nécessite un changement de comportement radical et, surtout, quantitativement important, au risque de voir se développer des bactéries, donc des maladies, de plus en plus résistantes.»
L’équipe du professeur Tulkens a analysé les données fournies par l’INAMI concernant les quantités d’antibiotiques remboursés chaque année depuis 2000. Sachant que tous les antibiotiques sont sous prescription et que la plupart des délivrances concernent des produits remboursés, ces données permettent d’estimer la quantité précise d’antibiotiques à laquelle la population belge est exposée et de la comparer avec la consommation d’autres pays dont les voisins proches.
Il en ressort, concrètement, que de 2001 à 2013, la quantité totale d’antibiotiques distribués en Belgique, mesurée sur base d’une unité reconnue par l’OMS (les ‘defined daily doses’ ou ‘doses quotidiennes définies’) a augmenté de 14%.
Une augmentation qui est surtout due à l’utilisation plus importante des beta-lactames (48%). À titre de comparaison, la Belgique utilise environ 3 fois plus d’antibiotiques en médecine non-hospitalière que les Pays-Bas, et cette situation est restée inchangée entre 2000 et 2014. Ceci montre, globalement, l’inefficacité des campagnes d’information liées à la prise d’antibiotiques.
Le constat majeur de cette étude? Les campagnes de sensibilisation touchent principalement les personnes qui sont en bonne santé et ne font donc pas un usage excessif d’antibiotiques. Et à l’inverse, la cible première de ces campagnes, soit les personnes qui consultent un médecin pour une infection respiratoire et qui sont grandes consommatrices d’antibiotiques, n’est pas atteinte.
En cause? Un message imprécis et surtout pas assez fort: «si nous ne nommons pas le problème clairement, il sera très compliqué de faire changer le comportement des gens» insiste Paul Tulkens. À bon entendeur…