Novembre 2014 Par Christian DE BOCK Lu pour vous

La protection sociale contribue à l’affaiblissement moral des individus? C’est faux: elle assure leur bien-être.

L’État Providence bride le dynamisme économique et écrase de ses insupportables charges la création de richesse et l’innovation? C’est faux: il favorise la prise de risque, développe les capacités humaines et maintient la cohésion sociale. L’État Providence est insoutenable financièrement? C’est faux: il n’a jamais provoqué la moindre crise économique.

Depuis trente ans, l’État Providence n’est envisagé que sous l’angle de sa crise et de son inéluctable effondrement. Ce discours inquiétant se veut performatif: on espère préparer ainsi les esprits au recul inévitable et pour tout dire souhaitable de la mutualisation des risques sociaux. Réfutant fermement le déclinisme social ambiant, cet essai laisse entrevoir non seulement la consolidation sociale mais aussi la perpétuation écologique de l’État providence: l’état actuel des insécurités sociales comme la menace de celles, écologiques, qui sont déjà là et grandissent à l’horizon conduisent à penser que nous allons vers un renforcement global de nos protections collectives, dans le sens exactement opposé à ce que nous indique une vulgate néolibérale en bout de course.

On ne demande qu’à croire l’auteur de ce texte aussi bref que réjouissant. Il ne nous apprendra pas grand-chose dans sa démonstration de l’évidente supériorité des régimes de sécurité sociale basés sur la solidarité collective. Là où il est particulièrement intéressant, c’est quand il établit un lien (qui libère) entre État Providence et gestion des risques, des crises et catastrophes écologiques. Ce qu’il appelle l’État social écologique constitue un nouveau paradigme pour la politique sociale, en passant de «l’écologie qui accuse à l’écologie qui protège».

Stimulant!

Défendre l’écologie parce que c’est une protection sociale!

Si l’Europe a inventé puis construit l’État-Providence, c’est parce que les citoyens de ses nations sont parvenus à se défaire de régimes politiques qui n’avaient cure d’investir dans le développement humain, trop occupés qu’ils étaient à conserver les privilèges des élites. Si l’Europe est devenue le leader écologique global, c’est parce que ses citoyens sont plus que les autres attachés à la préoccupation environnementale, ce dont témoignent les enquêtes d’opinion sur le sujet, mais aussi l’arsenal de politiques publiques mis en place depuis deux décennies sur le Vieux Continent. Les citoyens européens veulent une puissance publique capable d’investir dans le développement soutenable.(extrait)

Éloi Laurent, Le bel avenir de l’État Providence, Les liens qui libèrent, 2014, 160 pages.