Mai 2017 Par Cabinet du Ministre PRÉVOT Stratégies

Les enjeux majeurs de la prévention et de la promotion de la santé en Wallonie

Suite à la 6e réforme de l’État et aux accords de la Sainte Émilie, de nombreuses compétences en matière de santé publique ont été confiées à la Wallonie. C’est notamment le cas de la prévention et de la promotion de la santé dont le transfert permet d’en redéfinir le cadre pour une meilleure prise en compte des enjeux dans notre région.

Au cours des 50 dernières années, les modes de vie se sont considérablement modifiés. Si les progrès spectaculaires de la médecine ont permis d’allonger sensiblement l’espérance de vie, la chronicisation accrue des maladies impacte lourdement la qualité de vie des patients mais aussi le budget des soins de santé.

À cela s’ajoutent d’autres problématiques telles que celles de la santé mentale ou encore certaines maladies infectieuses qui restent d’actualité malgré les progrès de la science. Or, un mode de vie sain permettrait d’éviter un grand nombre de ces maladies, voire même 75% des maladies chroniques selon l’Organisation mondiale de la santé. Il est dès lors fondamental de doter la Wallonie d’un Plan Prévention ambitieux qui contribuera au bien-être de chacun.

Une note-cadre qui définit les ambitions de la politique que la Wallonie veut mener en matière de prévention et de promotion de la santé balise les orientations stratégiques du Plan de prévention et de promotion de la santé dont l’objectif est de contribuer à l’amélioration de l’état de santé de la population wallonne grâce à un dispositif solide dont les effets se déploieront sur le long terme, à l’horizon 2030.

Les grandes lignes et les objectifs du plan

Une méthodologie rigoureuse

Depuis un an, une analyse en profondeur des données épidémiologiques des indicateurs de santé (voir plus loin dans ce numéro l’article « Le contexte épidémiologique en Wallonie ») ainsi que des principaux déterminants de la santé (voir l’article suivant « Les déterminants de santé et les thématiques prioritaires en Wallonie ») a été menée pour avoir une vision globale de la situation.

Ce travail rigoureux a été réalisé avec l’appui de l’administration wallonne, de l’AViQ (Agence pour une Vie de Qualité) et des acteurs ayant une expertise méthodologique en matière de documentation, de recherche et d’évaluation dans le domaine de la promotion de la santé, tels l’Observatoire wallon de la Santé et les services communautaires de promotion de la santé (APES de l’ULg, RESO de l’UCL, SIPES de l’ULB et l’asbl Question Santé).

Les bases du Plan de prévention et de promotion de la santé ont ensuite été présentées et débattues avec des experts scientifiques au Bureau régional européen de l’OMS à Copenhague en novembre 2016 afin de bénéficier de leurs conseils et de la validation de la méthodologie suivie.Concrètement, le Plan wallon est décliné en deux parties. La première, présentée au Gouvernement wallon le jeudi 16 février 2017, se fonde sur l’analyse du contexte institutionnel et épidémiologique en Wallonie.

Cette analyse permet de définir les priorités de santé publique et donc les objectifs stratégiques thématiques de manière fondée, cohérente et objective. Avant de décliner les mesures concrètes dans la deuxième partie, il était indispensable de réaliser cette analyse de l’état de santé de la population wallonne.

Cinq axes stratégiques thématiques

Après l’analyse du contexte épidémiologique de la Wallonie, cinq axes d’actions prioritaires ont été retenus selon leur importance en termes de santé publique, leur gravité et le potentiel avéré en matière d’éviction ou de réduction. D’autres thématiques de santé pourront être ajoutées en fonction de problèmes de santé publique émergents.

  1. Promotion des modes de vie et des milieux de vie favorables à la santé :
    promotion d’une alimentation équilibrée, lutte contre la consommation excessive d’alcool et contre le tabagisme, promotion de l’activité physique et lutte contre la sédentarité.
  2. Promotion d’une bonne santé mentale et du bien-être global :
    ceci comprend également la confiance, l’estime de soi et le développement des « life skills » (ou « compétences liées à la vie quotidienne »). Il s’agit de la promotion du bien-être et d’une bonne santé mentale, de la prévention de l’usage addictif d’alcool et d’autres substances psychoactives (cannabis, héroïne, psychotropes…) et de la prévention du suicide.
  3. Prévention des maladies chroniques :
    prévention de maladies de l’appareil circulatoire, du diabète de type II et des maladies respiratoires ainsi que des cancers.
  4. Prévention des maladies infectieuses,
    y compris la politique de vaccination et les infections sexuellement transmissibles.
  5. Prévention des traumatismes non intentionnels, promotion de la sécurité.

Onze objectifs transversaux

Les différents axes stratégiques étant à présent identifiés, ils vont faire l’objet d’une déclinaison opérationnelle qui sera concertée avec l’ensemble des parties prenantes (les secteurs concernés, l’AViQ, les acteurs associatifs, les professionnels de la promotion de la santé et de la première ligne de soins, les pouvoirs locaux…). Les mesures concrètes qui en résulteront seront proposées d’ici la fin de l’année 2017 au Gouvernement wallon et répondront à onze objectifs stratégiques transversaux applicables à l’ensemble de ces priorités de santé.

  1. Promouvoir la santé dans toutes les politiques
    Le Plan s’intéresse principalement aux domaines pour lesquels la Wallonie dispose de leviers d’action. Pour les autres, des protocoles de collaboration devront être conclus avec les autres niveaux de pouvoir. De plus, le Gouvernement wallon souhaite mettre en place l’évaluation systématique des effets sur la santé (EIS) et suivre l’exemple de la Finlande où des évaluations intégrées incluant la santé sont requises dans toutes les propositions législatives.
  2. Adapter les stratégies pour faire face aux inégalités sociales de santé
    À mesure que les pressions économiques s’accentuent et que les coûts des soins de santé augmentent, le risque d’exclusion s’accroît, laissant souvent de côté ceux dont les besoins sanitaires sont les plus grands. Il s’agit d’abord et avant tout de donner les mêmes chances à tous de développer et maintenir un bon état de santé et les capacités maximales à mener une vie de qualité satisfaisante.
  3. Favoriser l’accessibilité et veiller à une bonne couverture territoriale
    Complémentairement à la lutte contre les inégalités sociales de santé, il importe également d’assurer une bonne couverture territoriale en matière de programmes de prévention et de promotion de la santé.
  4. Veiller à l’efficience des actions et instaurer une culture d’évaluation continue
    Au vu du contexte budgétaire actuel et de la diversité d’acteurs en promotion de la santé, les ressources disponibles doivent être utilisées le plus efficacement possible. De plus, pour répondre aux besoins de la population, il faut proposer des interventions pertinentes qui ont fait preuve de leur efficacité. Par conséquent, en Wallonie, la gestion et l’analyse de données de santé doit se concrétiser dans un système intégré de collecte et de traitement de données sanitaires.
  5. Intégrer les priorités de santé dans une approche selon le parcours de vie
    Il s’agit de mener des politiques cohérentes qui ciblent l’ensemble de la vie humaine, à tout âge toutes les générations confondues, et ne se contentent pas de répondre aux besoins et maladies spécifiques à des stades de la vie définis avec précision.
  6. Intégrer les priorités de santé dans une approche selon un continuum
    L’approche « parcours de soins » place la réflexion stratégique dans l’optique d’un continuum promotion de la santé/prévention des maladies/soins curatifs et réduction des risques/revalidation (accompagnement)/soins palliatifs, d’où faire en sorte qu’une population reçoive les bons soins par les bons professionnels dans les bonnes structures au bon moment, et au meilleur coût, en veillant à conserver l’ancrage de la personne dans son milieu de vie et en impliquant les proches dans les soins.
  7. Renforcer l’action communautaire (bottom-up), promouvoir la participation citoyenne et l’empowerment
    Il importe que tous les acteurs participent : les citoyens, les professionnels (de la santé et des autres secteurs), les institutions (publiques et privées) ainsi que les pouvoirs publics. Au niveau individuel, cette compétence passe par la littératie en santé : la possibilité de mobiliser ses ressources pour faire le meilleur usage possible des informations disponibles et du dialogue avec les professionnels. L’empowerment consiste à rendre à chacun la capacité de contribuer aux décisions dans le champ de sa propre santé et dans celui de l’action communautaire.
  8. Développer le travail en réseau et le partenariat intersectoriel
    L’intersectorialité favorise le décloisonnement, l’élargissement du cadre de référence, la mise en commun de ressources diversifiées, la coordination des actions menées au sein des différents secteurs ou encore la diffusion de messages cohérents (travail en réseau, partenariat intersectoriel et alliance entre services publics et monde associatif, concertation des différents niveaux de pouvoirs).
  9. Créer des environnements favorables à la santé (milieux de vie)
    Il faut prendre en compte les soins mais aussi un ensemble de déterminants sociaux qui contribuent tant à la prévention qu’à la restauration d’un bien-être. Les milieux de vie renvoient aux habitants, à leurs environnements quotidiens ainsi qu’aux dynamiques sociales dans lesquelles ils sont immergés.
  10. Inscrire la promotion de la santé dans une perspective durable
    Il est possible de recadrer toutes les actions envisagées selon les trois piliers reconnus du développement durable (social/sociétal, économique et environnemental), ainsi que selon les différentes composantes du système de santé (principalement prévention/promotion, soins et accompagnement) dans une matrice qui permet de mettre de la cohérence dans les politiques de santé et de vérifier pour chaque intervention la prise en compte des différentes dimensions.
  11. Promouvoir l’innovation au service de la santé
    Le domaine de la santé prône cette innovation qui, in fine, profitera à l’amélioration de la santé de la population wallonne. Ainsi, l’innovation peut être comprise comme étant une réponse nouvelle à une problématique ou à un besoin identifié en vue de l’amélioration de la santé de la population concernée. Aujourd’hui, un projet est pertinent par rapport aux enjeux actuels lorsqu’il ouvre également des perspectives pour le futur.

Un décret organisant le secteur de la prévention et de la promotion de la santé sera proposé avant la fin de l’année afin de définir les rôles et missions des différents acteurs de la santé qui interviendront dans l’exécution de ce plan.