Au cours de l’hiver 2015-2016, la Plate-forme prévention sida a lancé une campagne pour plus de solidarité et de lutte contre les discriminations envers les personnes séropositives, qu’Éducation Santé a mise en évidence dans son numéro de janvier.
Aujourd’hui, elle nous propose une analyse et une synthèse de l’évaluation de cette grande campagne.
Objectifs et méthodologie
Objectifs d’évaluation
L’évaluation réalisée vise deux objectifs principaux:
- évaluer les outils produits dans le cadre de cette campagne, et en particulier la satisfaction des bénéficiaires à leur égard (compréhension, lisibilité et acceptabilité des messages). La visibilité globale de la campagne a également été évaluée;
- analyser et partager les enseignements de cette évaluation avec l’ensemble du secteur afin d’améliorer les processus de création et les productions des campagnes à venir.
Méthodologie
Cette évaluation concerne les outils créés pour la campagne et d’autre part le thème de celle-ci, qui diffère des campagnes habituellement produites par la Plate-forme (à savoir la prévention et la sensibilisation au VIH-sida et autres IST).
Pour ce faire, un post-test de la campagne a été effectué, par la diffusion d’un questionnaire à destination du grand public via le site internet et via un envoi à toutes les personnes ayant commandé un ruban rouge lors de la dernière campagne. Ce questionnaire comprenait principalement des questions fermées et aussi quelques questions ouvertes. Les autres éléments d’évaluation ont pu être récoltés grâce aux données transmises par les régies publicitaires (IP-RMB) et par le biais d’une revue de presse relevant les articles traitant du projet.
La campagne en bref
Les objectifs:
- amener le public à mieux accepter la séropositivité et en donner une image plus positive;
- informer le public sur les notions de prévention combinée et de charge virale indétectable;
- expliquer que l’on peut avoir une vie affective et sexuelle avec une personne séropositive qui suit un traitement, qui le prend correctement et régulièrement, avec un risque quasi nul de contamination;
- amener le public à intégrer sans crainte les personnes vivant avec le VIH dans la vie de tous les jours;
- donner de l’information sur la prévention combinée aux personnes vivant avec le VIH tout en leur adressant un message de soutien et de solidarité.
Le public cible:
- grand public
- jeunes et adultes
- personnes séropositives et séronégatives.
Le message:
En vivant avec une personne séropositive, on prend surtout le risque d’être amoureux, d’avoir de merveilleux enfants, de vieillir ensemble, ou encore, tout simplement, de prendre son pied. En d’autres mots, rejeter une personne parce qu’elle vit avec le VIH, c’est se priver d’une belle rencontre!
Les outils:
- 7 affiches
- 7 cartes postales déclinaison des affiches diffusées via le réseau Boomerang
- 1 spot radio
- 1 spot vidéo
- 1 dépliant avec deux visuels.
Ces différents supports ont une double vocation: d’une part, la communication d’un message fort à travers les visuels et les slogans; d’autre part, le renvoi vers le site internet pour avoir plus d’informations sur le sujet.
Évaluation quantitative de la diffusion et de la visibilité
- Spots TV et radio: en concertation avec l’asbl Question Santé, un plan média a été proposé à la Commission ‘campagnes radiodiffusées’ du Conseil supérieur de promotion de la santé ainsi qu’à la ministre compétente. Il prévoyait quatre vagues de passage des spots TV et des spots radio, aux heures de grande écoute, de novembre 2015 à mai 2016.
- Échos dans les médias: la campagne a été lancée à l’occasion de la Journée Mondiale de Lutte contre le sida 2015, ce qui lui a permis de bénéficier d’un large écho dans les médias. Au-delà des passages accordés traditionnellement par les radios et télévisions, une dizaine de diffusions supplémentaires du spot a été offerte à la Plate-forme prévention sida sur les chaînes du groupe RTL (RTL-TVI, Club RTL et Plug RTL). Des rubans rouges ont également été mis à disposition de tous les journalistes du groupe afin de permettre à chacun d’affirmer son soutien de façon visible. Les messages ont par ailleurs été fortement véhiculés sur les ondes, via le plan média mais aussi grâce aux capsules audio contenant un message de prévention, enregistrées par les animateurs de Radio Contact. Des articles rédactionnels et les visuels de la campagne ont aussi été largement diffusés sur internet et via les réseaux sociaux. Une nette augmentation du nombre de personnes suivant la page de la Plate-Forme a d’ailleurs pu être observée pendant cette période. Enfin, des espaces publicitaires gratuits dans la presse ont été négociés pour la diffusion des visuels et d’articles de fond.
- Distribution du matériel dans le secteur sida: chacune des 7 versions de l’affiche a été offerte en 500 exemplaires aux associations du secteur sida.
- Réseau publicitaire: 195.000 exemplaires des cartes postales ont été diffusés dans le réseau Boomerang via les bars, cafés, restaurants et cinémas de Bruxelles et de Wallonie. Ces cartes rappelaient les messages de la campagne et invitaient le public à surfer sur le site de la Plate-forme afin d’en savoir plus. Les messages de la campagne ont aussi été diffusés dans le réseau des métros bruxellois (290 affiches) et le réseau des bus en région wallonne (330 affiches).
Évaluation qualitative auprès du grand public
Le questionnaire d’évaluation a été envoyé par mail à 1742 adresses de personnes ayant commandé un ou plusieurs ruban(s) rouge(s) suite à la diffusion de la dernière campagne. Il a également été mis en ligne sur le site internet de la Plate-forme prévention sida du 6 avril au 10 mai 2016. Enfin, un Sidaflash (lettre d’information électronique hebdomadaire) incitant les destinataires à répondre au questionnaire a été envoyé à 1809 personnes. Le sondage a été clôturé le 10 mai 2016 après avoir recueillis 290 réponses au total.
Profil des répondants
Caractéristiques:
- 59% de femmes et 41 % d’hommes ont répondu au sondage;
- sur l’ensemble des répondants, 91% ont déclaré être séronégatifs; 5% séropositifs et 3% ont répondu ne pas connaître leur statut sérologique;
- 58% ont entre 25 et 45 ans; 22% ont plus de 45 ans et 19,5% ont moins de 25 ans;
- 83,5% des répondants sont des personnes privées et 16,5% sont des professionnels du secteur de la santé.
Visibilité de la campagne
- 67,5 % des répondants au questionnaire en ligne (n=288) affirment avoir vu et/ou entendu la campagne en général;
- Le spot TV est l’outil le plus vu par le grand public. Cela peut facilement s’expliquer par le fait que celui-ci a été diffusé via des canaux à grande audience;
- Ce sont ensuite les 7 affiches et le spot radio qui ont été les plus vus/entendus avec des taux de plus de 65% (n=179);
- Les dépliants et les cartes postales sont les outils qui ont été les moins vus.
Appréciation générale
- 94% des répondants (n=232) affirment que la campagne leur plaît «beaucoup» ou «plutôt oui», alors que 6% seulement affirment qu’elle ne leur plaît «plutôt pas», ou «pas du tout».
- Pour les spots TV et radio, respectivement 90 et 87% des répondants (n=172) affirment que les spots leur plaisent «beaucoup» ou «plutôt oui».
La campagne semble donc globalement avoir rencontré du succès auprès de ceux qui l’ont remarquée.
Appréciation de la forme et du ton
83% des répondants (n= 230) déclarent que le graphisme et les visuels leur plaisent «plutôt» ou «beaucoup».
Rétention, compréhension et acceptation du slogan
- On constate une bonne reconnaissance du slogan de la campagne: 73% des personnes (n= 180) ayant déclaré avoir vu la campagne ont pu identifier son slogan parmi 4 propositions;
- Il y a également une très bonne acceptation du message: 95% des répondants (n=232) affirment être «beaucoup» ou «plutôt» en accord avec le message véhiculé. Toutefois, si les répondants se sentent majoritairement en accord avec celui-ci, ils émettent une crainte particulière: celle que ce type de campagne banalise la transmission du VIH et favorise la baisse de l’utilisation de mesures préventives;
- Au niveau de la compréhension du message, 98% des répondants (n=213) affirment «plutôt» ou «tout à fait» comprendre le slogan de la campagne. Le message est qualifié de «très clair» par un grand nombre de répondants.
Impact
- Plus de la moitié des répondants (60%, n=232) estiment que la campagne leur a «beaucoup» ou «plutôt» apporté des informations nouvelles, contre 40% estimant qu’elle leur en a «plutôt pas» ou «pas du tout» apporté;
- Près de 65% des répondants (n=231) se sentent concernés par le message véhiculé par la campagne;
- 44% des répondants (n=199) disent n’avoir rien fait de particulier après avoir vu un ou plusieurs outil(s) de la campagne; 36% ont parlé de la campagne autour d’eux; 25% ont visité le site de la Plate-forme prévention sida; 18% ont recherché des informations supplémentaires.
Ces chiffres permettent de mettre en évidence le fait que la campagne a eu un impact sur plus d’une personne sur deux l’ayant vue.
Connaissance et compréhension des messages
Afin de tester leurs connaissances et leur compréhension du message, les répondants ont été invités à répondre par «vrai» ou «faux» (ou «je ne sais pas») à plusieurs affirmations.
Les réponses nous apprennent que si les répondants affirment bien comprendre la campagne et estiment, pour la plupart, que le message est clair, la méconnaissance et la confusion persistent quant à la notion de la charge virale indétectable. Le traitement semble être perçu, pour beaucoup de personnes, principalement dans ses fonctions curatives et non dans ses aspects préventifs.