Septembre 2003 Par S. BOURGUIGNON Lu pour vous

Peut-on m’opérer sans mon consentement? Puis-je consulter un autre médecin? Mon médecin doit-il me donner toute l’information? A qui m’adresser si je ne suis pas satisfait des soins? Puis-je avoir accès à tout mon dossier médical? Des questions légitimes qui, un jour ou l’autre, se posent à nous dans des moments de fragilité et de souffrance. Depuis le 6 octobre 2002, une loi précise les droits des patients et la manière de les exercer. Connaître ses droits reste le meilleur moyen d’améliorer la qualité des relations avec le corps médical et de réagir adéquatement le jour où…
Jusqu’en octobre 2002, contrairement au Danemark, à la Finlande, à la Grèce et aux Pays-Bas, notre pays ne disposait pas de loi relative aux droits du patient. Avant cette loi, le patient avait des droits mais ceux-ci connaissaient des lacunes et de plus, ils n’étaient pas toujours clairs ou suffisamment connus. Par conséquent, ils étaient difficiles à exercer.
L’objectif de cette nouvelle loi est d’améliorer la qualité des prestations de soins de santé et la qualité des relations avec le professionnel. Elle rassemble les droits individuels essentiels du patient et évite autant que possible les exceptions.
Bien que se rapprochant des règles déontologiques existantes, la loi apporte quelques nouveautés (la représentation des adultes devenus incapables) ou des précisions (le droit des professionnels de refuser de communiquer des informations déterminées au patient ou à une compagnie d’assurance).
Concernant les devoirs des patients, la loi mentionne qu’il doit collaborer avec le professionnel, par exemple en communiquant l’information nécessaire ou en suivant les recommandations.
Pour garantir l’application des droits du patient dans la pratique, un service de médiation a été créé pour intervenir entre le patient et les professionnels en cas de besoin.
Pour évaluer l’application de la loi et conseiller l’autorité en matière de droits et devoirs des patients et des professionnels, une Commission fédérale ‘Droit du patient’ a été créée au sein du Ministère fédéral des affaires sociales, de la santé publique et de l’environnement. Elle est constituée de représentants de patients, de mutuelles, de professionnels des soins et d’hôpitaux. Dans cette commission, un service a été créé pour servir de médiateur en matière de plaintes relatives aux droits des patients.

Quels sont ces droits?

Le droit à la prestation de services de qualité
Le patient a droit à des soins de qualité tenant compte des connaissances médicales actuelles et des moyens disponibles.
Il a droit au respect de sa dignité humaine et de son autonomie. Aucune distinction de classe sociale, de nationalité, de situation financière ne peut être faite. Si un professionnel refuse de soigner un patient, il doit l’orienter vers un autre professionnel.
Le droit au libre choix du professionnel
Le droit de choisir librement la personne qui soigne, y compris si le médecin oriente vers un autre médecin ou spécialiste.
Le droit de prendre contact avec différents professionnels et de demander un deuxième avis.
Le droit de changer de prestataire.
Le droit à la protection de la vie privée
L’information concernant la santé du patient ne peut pas être communiquée à des tiers sauf exceptions prévues par la loi.
Sauf avec l’accord du patient, seules les personnes nécessaires sont autorisées à être présentes lors des soins, examens ou traitements…
Le droit à l’information
Le professionnel doit informer, en temps utile, dans un langage compréhensible. Le patient peut demander à confirmer ces informations par écrit. Ce droit concerne les informations relatives à la santé du patient (diagnostic, évolution probable, recommandations, traitement…) et concerne aussi une intervention possible (but, urgence, durée, effets secondaires, risques, coût financier, alternatives éventuelles.). Pour mieux comprendre ce que dit le médecin, le patient peut être assisté par une personne de confiance (ami, professionnel ou non). Cette personne ne doit pas nécessairement être le mandataire.
S’il le souhaite, le patient a le droit de ne pas recevoir d’information excepté si son refus peut sérieusement nuire à sa santé ou à celle d’autres personnes (ex.: maladie contagieuse).
De manière exceptionnelle et temporaire, le professionnel peut décider de ne pas donner une information qui représente un danger grave pour la santé du patient.
Dans ce cas, il doit:
– consulter un autre professionnel;
– motiver sa décision dans le dossier du patient;
– informer la personne de confiance éventuellement désignée par le patient.
Le droit au consentement
Sans le consentement du patient, aucune intervention ne peut être commencée ou continuée.
Comment le patient donne-t-il son consentement?
Le consentement doit être donné, après avoir été suffisamment informé, verbalement et sans ambiguïté, mais il peut être consigné par écrit dans le dossier médical. Le patient peut donner son consentement sous certaines conditions (ex.: arrêt d’un traitement de chimiothérapie en cas d’échec).
En cas d’urgence, les volontés du patient sont tenues en compte en priorité. S’il est impossible de connaître ses volontés, de demander ou d’attendre le consentement du patient ou de son mandataire, le médecin doit commencer tous les traitements nécessaires.
Les obligations liées à l’information et au consentement devront être respectées dès que possible.
Le droit concernant son dossier
Le patient a droit à un ‘dossier patient’ tenu à jour et conservé en lieu sûr. Il peut exister plusieurs dossiers sur le patient à différents endroits (chez le médecin généraliste, à l’hôpital, chez le kiné…).
Le patient a le droit de le consulter directement. Il peut également désigner une personne pour le consulter avec lui ou à sa place (personne de confiance, professionnel ou non). Il peut en demander copie partielle ou totale au prix coûtant. Sa demande doit être satisfaite dans un délai de 15 jours.
Ce droit de consultation n’est pas absolu. D’une part, le patient ne peut pas consulter les données qui concernent une autre personne, ni les notes personnelles du professionnel; d’autre part, le professionnel peut refuser l’accès à certaines données qui pourraient représenter un danger grave pour la santé du patient. Dans ce cas, seul un professionnel désigné par le patient peut consulter le dossier.
Certains documents peuvent ou doivent être inclus dans le dossier, comme la désignation du mandataire du patient, l’identité d’une personne de confiance, la demande du patient de ne pas être informé, l’autorisation ou le refus d’un traitement, d’autres attentes éventuelles…
En cas de décès, le conjoint ou les parents jusqu’au 2e degré (enfants, petits-enfants, soeurs et frères, parents et grands-parents) ont le droit de désigner un professionnel pour consulter le dossier. Ils doivent pouvoir invoquer un intérêt spécifique et le patient décédé ne doit pas s’y être opposé.
Le droit de médiation
Si le patient est insatisfait, en désaccord ou en conflit avec un professionnel de soins, il peut s’adresser à un service de médiation.
La loi prévoit:
– un service de médiation pour chaque hôpital. Ce service traite les plaintes qui concernent les professionnels de son établissement;
– des services spécifiques de médiation pour d’autres groupes de professionnels travaillant en dehors de l’hôpital;
– un service de médiation fédéral. Il traite l’ensemble des demandes et des plaintes pour lesquelles il n’existe pas de services spécifiques.
Tout sera mis en œuvre pour trouver une solution positive au problème, nous promet-on.
Si la médiation échoue, ce service renseigne sur les autres possibilités de recours. Le patient conserve le droit d’introduire une plainte en justice. La médiation peut cependant éviter un parcours long, pénible et coûteux en justice

Comment exercer ces droits?

En principe, les droits des patients mineurs sont exercés par leurs parents (père, mère) ou leurs tuteurs. Le professionnel doit toutefois évaluer, au cas par cas, en tenant compte de l’âge et de la maturité du patient mineur, dans quelle mesure il est suffisamment capable pour juger lui-même de ses intérêts. En fonction de cela, le mineur peut décider en totalité ou en partie sur ses droits en matière de santé sans intervention de ses parents ou de son tuteur.
Les personnes majeures peuvent exercer elles-mêmes leurs droits de patient. Il peut arriver qu’elles en soient incapables (coma, démence, anesthésie…). Par précaution, elles peuvent désigner une personne, un mandataire, chargé d’exercer leurs droits dans des circonstances particulières.
Comment faire?
– choisir une personne majeure de confiance pour exercer leurs droits en leur nom;
– rédiger un document avec le nom du mandataire et la date. Ce document doit être signé par le mandataire et celui qui le mandate;
– préciser dans ce document ce que la personne attend du mandataire;
– donner une copie du document au médecin traitant et au mandataire.
Par la même procédure, il est toujours possible de révoquer le mandataire.
S’il n’y a pas de mandataire désigné:
Si la personne n’est plus capable d’exercer elle-même ses droits, ils seront exercés par un représentant. Ce sera dans l’ordre: l’époux ou le partenaire cohabitant, un enfant majeur, un des deux parents, une sœur ou un frère majeur.
S’il n’y a pas de représentant ou si aucun accord ne peut être trouvé, c’est le professionnel de santé qui décide pour le patient. Dans ce cas, il va consulter d’autres professionnels.
Le professionnel doit suivre la décision du mandataire ou du représentant, sauf si la santé du patient est menacée (par exemple: refus d’une transfusion) et s’il n’est pas clair qu’il s’agisse de la décision du patient. Dans ce cas, le professionnel doit refuser cette décision.

Pour qui la loi est-elle d’application?

Un patient est toute personne qui reçoit des soins de santé, sous quelque forme que ce soit, à sa demande ou non. La loi est dès lors d’application lorsque les soins sont dispensés:
– à la demande d’un représentant (ex.: parents d’un mineur d’âge);
– à la demande d’une tierce personne (ex.: un employeur dans le cadre du contrôle d’une incapacité de travail);
– sans demande dans un cas d’urgence.
La loi doit être appliquée par tous les professionnels de soins : médecins, dentistes, pharmaciens, sages-femmes, kinésithérapeutes, praticiens de l’art infirmier, paramédicaux…
Dans le futur, elle sera également d’application pour les psychothérapeutes, sexologues, psychologues cliniciens et orthopédagogues, et les professionnels enregistrés de pratique non-conventionnelle.

En résumé, cette loi:
– favorise des relations plus transparentes;
– fixe clairement les droits de chacun;
– offre un moyen de faire connaître les attentes des patients;
– offre une possibilité de médiation en cas d’insatisfaction et de plainte.
Sylvie Bourguignon
Vous pouvez retrouver ces informations dans le dépliant ‘Vos droits de patient’ et dans ‘La loi relative aux droits du patient. Partenaires pour une plus grande qualité des soins de santé’, une brochure de 36 pages pour les professionnels qui parcourt de manière détaillée les champs d’application de la loi, les différents types de droit concernés et le texte paru au Moniteur belge.
Contact: Service public fédéral de la Santé publique, de la Sécurité de la chaîne alimentaire et de l’Environnement, Quartier Vésale V502, 1010 Bruxelles. Site: http://www.health.fgov.be/vesalius .

La brochure ‘Les droits du patient’ éditée par les Mutualités Socialistes décrit de manière précise et synthétique la nouvelle réglementation et met en évidence sa vocation à stimuler le dialogue et la coopération. Le contenu et l’organisation des 7 droits fondamentaux de la loi sont détaillés. Au chapitre des modalités d’exercice de ces droits, on examine les situations particulières d’incapacités, les possibilités de représentation du patient par un tiers, les prescrits en matière de responsabilité de l’institution hospitalière, les limites nouvelles mises à la gestion de l’information médicale par les compagnies d’assurance (volet qui peut concerner de près les médecins traitants sollicités pour produire des certificats médicaux…).
Cette brochure gratuite est disponible sur simple demande à l’Union nationale des mutualités socialistes, Département Communication, rue Saint-Jean 32-38, 1000 Bruxelles. Tél.: 02-515 05 59. Fax: 02-512 62 74.
Vous pouvez également la commander ou la télécharger sur le site: http://www.mutsoc.be à la rubrique ‘Publications’
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