Mars 2017 Par Conseil consultatif bruxellois francophone - Section Promotion de la Santé Stratégies

Avis d’initiative concernant le futur plan de promotion de la santé de la Commission communautaire française

Préambule

La section de promotion de la santé du Conseil consultatif bruxellois francophone a décidé d’émettre un avis d’initiative contenant des points d’attention et des recommandations concernant la confection du futur plan quinquennal de promotion de la santé et de réduction des inégalités sociales de santé ainsi que des appels à projets/candidatures qui en découleront.

Ce plan est prévu par Décret relatif à la promotion de la santé en Région de Bruxelles-Capitale adopté en février 2016 par l’Assemblée de la COCOF. Il constitue le «document de référence présentant l’ensemble des objectifs, des programmes et des approches stratégiques prioritaires définis par le Collège» pour «améliorer l’état de santé de la population et réduire les inégalités sociales de santé».

La section se réfère au texte du décret qui précise les contenus à traiter par le futur plan et les stratégies de promotion de la santé à prioriser.

Au cœur des réalités de vie de la population, les inégalités sociales sont en augmentation constante en Région bruxelloise et impactent lourdement la santé; le secteur veut souligner la nécessité d’une réponse ambitieuse, rappelle la pertinence de la promotion de la santé à y contribuer, et insiste en conséquence pour que les moyens soient accordés à la hauteur de cet enjeu.

Méthode

Un groupe de travail interne à la section a été mis en place pour préparer l’avis.

Un questionnaire en ligne a été envoyé à l’ensemble des membres de la section. Ce questionnaire les interrogeait individuellement et nominativement sur leurs attentes à l’égard du plan de promotion de la santé et sur les critères de qualité d’un tel plan. Le questionnaire invitait également les répondants à identifier un ou des experts (en planification par exemple), en Belgique ou dans les pays limitrophes, susceptibles d’être contactés comme personnes ressources pour l’élaboration du plan.

Les réponses à ce questionnaire ont été étudiées par le groupe de travail et soumises ensuite à la discussion plénière de la section (séance du 10/11/2016).

L’avis a été rédigé sur la base de ces deux sources (analyse des réponses au questionnaire et discussion en plénière) puis approuvé par la section (séance du 9/12/2016).

Points d’attention et recommandations

Cet avis est structuré sur la base des différentes dimensions habituellement attribuées à une planification des interventions en promotion de la santé. Ces niveaux ne sont évidemment pas cloisonnés; construire un plan cohérent et global implique de veiller à leur articulation et à leur liaison interactive.

Dimension politique

La section recommande que le plan soit construit sur l’analyse des déterminants environnementaux, sociaux, éducationnels et institutionnels qui ont un impact sur la santé des Bruxellois.

En conséquence, la transversalité et l’intersectorialité doivent impérativement être au cœur des fondements stratégiques du plan puisqu’une série de déterminants concernent d’autres politiques (régionales, communautaires et fédérales, mais aussi européennes) et d’autres secteurs d’activité susceptibles d’avoir une influence déterminante sur la problématique (par exemple éducation, emploi, égalité des chances, logement, soins et ambulatoire, environnement).

La section ne peut donc qu’insister sur la nécessité, déjà prévue par le Décret, d’articuler le plan de promotion de la santé aux autres plans existants et à venir (en particulier le plan santé bruxellois de la COCOM) et d’assurer des modalités de coopération entre la promotion de la santé et d’autres niveaux ou domaines de compétence politique.

Par conséquent, le plan se doit d’être un outil compréhensible (lisible) et appropriable par les autres secteurs et les diverses instances (inter)ministérielles. Le plan devra aussi faire l’objet d’une large diffusion (visible).

La gestion des espaces audiovisuels gratuits par les différentes entités doit, dans ce but, trouver à être consolidée et valorisée pour promouvoir les stratégies et actions du secteur.

Dimension stratégique

Le plan constitue un cadre de référence pour les acteurs de la promotion de la santé en Région bruxelloise, d’abord pour ceux qui sont subventionnés par le Décret et ensuite pour ceux qui ne sont pas subventionnés mais qui peuvent contribuer à sa mise en œuvre. La section attend du plan qu’il contribue à une meilleure santé – dans toutes ses dimensions – des Bruxellois dans une visée de réduction de l’impact des inégalités sociales de santé. Le plan doit pouvoir défendre une vision ouverte et positive de la santé.

La section recommande que le plan, d’une part fasse figurer les principes spécifiques de promotion de la santé (en complément du décret) et d’autre part, traduise ces principes à un niveau opérationnel.

Le plan doit notamment mettre en avant:

  • une approche par déterminants de santé qui vise un changement des conditions de vie ayant un impact sur la santé;
  • la notion d’équité en santé en invitant à prendre en compte de manière systématique le gradient social (les désavantages sociaux) et les besoins de publics prioritaires;
  • la participation des usagers et plus largement des citoyens en favorisant leur capacité d’agir (empowerment) individuellement et collectivement.

La section recommande que le futur plan soit fondé sur l’analyse des spécificités bruxelloises concernant les besoins, les publics et les environnements (par exemple l’accroissement des inégalités sociales de santé et de la dualisation sociale, augmentation des populations jeunes et vieillissantes, enjeux liés au multiculturalisme).

Le plan doit permettre de développer une approche de santé globale et multifactorielle, mais aussi rationnelle et cohérente en vue d’assurer une couverture populationnelle et territoriale suffisante. Le plan doit ainsi assurer la complémentarité entre des actions globales et locales/spécifiques et des approches généralistes et thématiques.

Pour cela, le plan doit prendre en compte l’ensemble des publics et des secteurs géographiques de la Région. Il doit cependant porter une attention particulière aux populations vulnérables et précarisées. Il sera attentif aux zones en difficulté, où les besoins sont importants alors que le tissu psycho-médico-social est insuffisant pour y répondre. Il ira à la rencontre des problématiques émergentes pour leur prise en considération.

Dimension programmatique et opérationnelle

La section estime que le plan devrait atteindre un niveau d’opérationnalité suffisant en donnant un cadre et des directions pour sa mise en œuvre. La période de cinq ans du plan est relativement courte pour mesurer des effets probants en termes de santé. C’est pourquoi la section recommande que le plan énonce des objectifs généraux qui se situent davantage à un niveau d’objectifs intermédiaires réalistes, faisables et évaluables, plutôt qu’à un niveau plus haut de santé publique (avec mesure d’impact). De plus, le plan doit s’inscrire dans un calendrier réaliste pour atteindre lesdits objectifs.

Le plan doit donc donner des indications et orientations concrètes en ce qui concerne:

  • les objectifs et les priorités pour améliorer la santé des Bruxellois;
  • les domaines/secteurs d’intervention;
  • les niveaux d’intervention et leur coordination;
  • les leviers à activer (stratégies et types d’action attendues).

En même temps, le plan devrait assurer une certaine souplesse dans les propositions de mise en œuvre que les opérateurs pourront soumettre, en laissant une place à l’initiative nécessaire pour s’adapter aux spécificités locales, mais également une place à l’émergence de pratiques innovantes.

La section insiste pour que les ambitions du plan soient assorties des moyens nécessaires à sa réalisation; il y va de sa faisabilité. Ces moyens sont financiers, mais portent également sur les connaissances, les capacités d’évaluation, la formation et l’échange de pratiques. Le plan devrait notamment permettre d’identifier là où des ressources supplémentaires sont requises. De plus, le plan devrait indiquer précisément quels sont les processus et critères d’allocation et/ou de renouvellement des ressources.

Pour éviter de fragiliser les acteurs de promotion de la santé, une attention particulière doit être portée sur l’impact du calendrier de confection et de démarrage du plan sur la gestion des ressources humaines. Sa mise en place doit garantir les conditions de continuité des services et des programmes ainsi que le maintien des emplois pendant la transition. En particulier, les modalités de mise en place du nouvel organigramme dépendant du plan veilleront à épargner le recours aux préavis conservatoires.

En matière d’évaluation des projets portés par les acteurs et services, il s’agit d’évaluer non seulement les effets mais également les processus. La section recommande une évaluation continue sur la base d’outils construits en concertation. Ceux-ci comprendront des critères et indicateurs tant quantitatifs que qualitatifs, et progressivement des standards de qualité d’une intervention/démarche de promotion de la santé.

À propos de la méthodologie d’évaluation du plan lui-même, la section estime que cette question cruciale doit être abordée dès la construction du plan et être co-construite avec les acteurs. La section recommande que plusieurs critères de qualité soient retenus dans l’évaluation du plan:

  • la prise en compte les inégalités sociales de santé;
  • la participation des publics et populations concernées;
  • l’actualisation du plan en fonction des avancées et évolutions (un plan évolutif);
  • l’articulation du plan avec les autres plans et politiques s’appliquant sur le territoire bruxellois.

Dimension ‘projet’

Concernant les appels à projet, la section estime que le plan devrait préciser que le terme ‘projet’ peut désigner aussi bien des projets ponctuels que des programmes d’action.

Conformément aux priorités du plan et à la complémentarité des axes stratégiques de la Promotion de la santé (Charte d’Ottawa), la section préconise une certaine diversité quant au type de projets pouvant être soutenus: outre des actions en direction des publics cibles, des actions impliquant les usagers ou la participation de populations, d’interventions visant les individus ou les environnements sociopolitiques, d’approches de type généraliste ou thématique et des projets de plaidoyer, de recherche, de formation des acteurs et d’échanges de pratiques devraient pouvoir être financés.

Pour être pertinents, les stratégies, objectifs, méthodes et priorités du plan doivent correspondre à des problématiques identifiées et documentées par des études scientifiques, des diagnostics communautaires, des données expérientielles (expertise du terrain et vécu du terrain (des usagers, des citoyens)), tant quantitatives que qualitatives.

Dans le plan, les objectifs, les thématiques et publics prioritaires devraient être précisés mais sans exclusivité afin de permettre l’émergence de propositions innovantes. Il en est de même pour la diversité des stratégies et des méthodologies.

Avis émis le 9 décembre 2016 par la section Promotion de la santé du Conseil consultatif bruxellois francophone