Mars 2007 Par L. JOOSSENS Données

Une étude à grande échelle sur les habitudes tabagiques réalisée fin 2006 indique que le pourcentage de fumeurs reste stable; la consommation de cigarettes diminue, mais le tabac à rouler gagne en popularité. L’étude nous fournit aussi d’autres données intéressantes.

Trois Belges sur dix fument

Une enquête réalisée par Ipsos auprès de 3 872 personnes de plus de 15 ans à la demande de la Fondation contre le Cancer et financée par le SPF Santé publique, révèle que le pourcentage de fumeurs quotidiens s’élève à 29 % en Belgique. Le pourcentage de fumeurs quotidiens est resté stable au cours des quatre dernières années, à savoir 29 % en 2002, 28 % en 2003, 29 % en 2005 et 2006. (1)

Tableau 1. Le pourcentage de fumeurs quotidiens en Belgique (15 ans et plus)

Année

Hommes Femmes Total
2002 33 % 25 % 29 %
2003 32 % 22 % 28 %
2005 35 % 24 % 29 %
2006 33 % 25 % 29 %

Source: CRIOC (2002), VIG (2003), Fondation contre le Cancer (2005-2006). Le tabac à rouler est nettement plus en vogue (voir plus loin). Les chiffres de vente reflètent d’ailleurs cette tendance. Au cours de la période 2002-2006, la vente de cigarettes est passée de 14 314 millions de cigarettes en 2002 à 13 320 millions de cigarettes en 2006. La vente de tabac à rouler a augmenté de 8 417 tonnes en 2002 à 9 278 tonnes en 2006.

Tableau 2. Évolution de la vente de produits de tabac en Belgique au cours de la période 2002-2006

Année

Vente de cigares (millions de pièces) Vente de cigarettes (millions de pièces) Vente de tabac à rouler, à priser et à chiquer (tonnes)
2002 629 14 314 8 417
2003 528 14 287 8 327
2004 553 13 634 8 429
2005 542 13 385 8 198
2006 548 13 320 9 278

Source: Service Public Fédéral Finances (l’estimation pour 2006 est basée sur les 11 premiers mois de 2006)

Méthodologie de l’enquête

La population totale comprenait 8 601 000 personnes âgées de 15 ans ou plus vivant en Belgique.
3 872 personnes ont été interviewées en face à face à leur domicile pendant la période du 4 septembre au 16 octobre 2006.
L’échantillon est stratifié en fonction des provinces et du type d’urbanisation. Le croisement de ces deux variables fournit 37 cellules. Dans chacune de ces cellules, un point de départ a été sélectionné au hasard, auquel un nombre d’interviews a été attribué par rapport à la population de la cellule. Le nombre de points de départ est estimé à 100.
Des quotas ont été appliqués en ce qui concerne le sexe, l’âge, la profession (actif ou inactif) et le niveau d’éducation du répondant.

En 2006, le pourcentage de fumeurs quotidiens s’élevait à 29 %, le pourcentage de fumeurs occasionnels à 4 %, le pourcentage d’anciens fumeurs à 22 % et le pourcentage de ceux qui n’ont jamais fumé à 45 %. Notre pays compte environ 2 900 000 fumeurs, 1 900 000 ex-fumeurs et 5 500 000 personnes qui n’ont jamais fumé. Le pourcentage de fumeurs quotidiens s’élève à 25 % en Flandre, 32 % à Bruxelles et 36 % en Wallonie.
On s’attendait à ce que le pourcentage de fumeurs diminue un peu en 2006, notamment à la suite de l’interdiction de fumer sur le lieu de travail et dans les autres lieux publics entrée en vigueur le 1er janvier 2006.
Par rapport à 2003-2004, le nombre de cigarettes par fumeur a diminué. En 2003-2004, 39 % des fumeurs fumaient 20 cigarettes ou plus par jour, contre 29 % en 2006. L’interdiction de fumer a eu peu d’influence sur le pourcentage de fumeurs car seul 1 % des ex-fumeurs a arrêté de fumer après son entrée en vigueur. 20 % des ex-fumeurs ont arrêté de fumer au cours des trois dernières années et 54 % des anciens fumeurs il y a plus de 10 ans.
La raison principale de l’arrêt reste les conséquences néfastes pour la santé (46 %), suivie par le prix des cigarettes (11 %), le conseil du médecin préconisant d’arrêter de fumer (10 %), le souhait de ne pas être dépendant (7 %) et la demande émanant d’amis ou de membres de la famille (6 %).
Il se peut également que le pourcentage de fumeurs n’ait pas diminué en 2006 parce que, pour la première fois depuis dix ans, le prix des cigarettes n’a pas augmenté en 2006. Les fumeurs sont sensibles au prix, mais ils n’arrêtent pas de fumer pour autant: ils passent au tabac à rouler et aux marques meilleur marché. D’après la Banque mondiale, les hausses de prix sont les plus efficaces pour faire diminuer la consommation. En janvier 2007, le prix du paquet de cigarettes a augmenté de 0,53 euro.

Tableau 3. Prix en euros d’un paquet de 20 cigarettes (Marlboro) au cours de la période 2002-2006

1-1-2002

3,20
1-1-2003 3,50
1-1-2004 3,85
1-7-2005 4,00
1-1-2006 4,00
1-1-2007 4,53*

* €4,30 pour un paquet de 19 cigarettes.

Le profil du fumeur, de l’ex-fumeur et du non-fumeur en 2006

L’échantillon de l’étude sur les habitudes tabagiques, réalisée par Ipsos à la demande de la Fondation contre le Cancer, comprend 3 872 personnes. Il s’agit d’un nombre représentatif qui permet de déterminer le profil du fumeur, de l’ex-fumeur et du non-fumeur en 2006, selon le sexe, l’âge, la classe sociale, la profession et la région. La détermination des groupes sociaux s’effectue sur la base d’un ratio calculé entre la profession du principal responsable des revenus du ménage et son niveau de formation. La population est classée en fonction de la valeur que fournit la combinaison de ces deux variables et est ensuite divisée en huit groupes plus ou moins égaux. Le groupe qui correspond aux valeurs les plus élevées (et, par conséquent, au niveau professionnel et/ou au niveau de formation le plus élevé) est appelé «groupe 1», tandis que le groupe 8 est celui qui correspond aux valeurs les plus faibles.

Tableau 4. Habitudes tabagiques chez les hommes en fonction de l’âge, de la classe sociale, de la profession et de la région.

Age N=459 N=378 N=1121

15-24 ans
N=283
25-44 ans
N=679
45-64 ans
N=567
65 ans +
N=348
Total
N=1877
Fumeur quotidien 35 % 35 % 41 % 17 % 33 %
Fumeur occasionnel 4 % 6 % 2 % 3 % 4 %
Ex-fumeur 6 % 19 % 33 % 49 % 27 %
Non-fumeur 56 % 40 % 25 % 31 % 36 %
Classe sociale Classe sociale 1-2
Classe sociale 3-4
N=438
Classe sociale 5-6
N=524
Classe sociale 7-8
N=456
Total
N=1877
Fumeur quotidien 30 % 35 % 31 % 37 % 33 %
Fumeur occasionnel 5 % 4 % 4 % 1 % 4 %
Ex-fumeur 23 % 24 % 26 % 34 % 27 %
Non-fumeur 41 % 37 % 38 % 27 % 36 %
Profession ouvrier
employé
N=422
indépendant
N=193
cadre
N=50
sans emploi
N=133
Fumeur quotidien 44 % 29 % 36 % 21 % 62 %
Fumeur occasionnel 4 % 5 % 6 % 2 % 5 %
Ex-fumeur 21 % 24 % 15 % 33 % 13 %
Non-fumeur 32 % 42 % 43 % 44 % 20 %
Région Flandre
Bruxelles
N=177
Wallonie
N=579
Total
N=1877
Fumeur quotidien 28 % 40 % 42 % 33 %
Fumeur occasionnel 3 % 12 % 3 % 4 %
Ex-fumeur 32 % 15 % 21 % 27 %
Non-fumeur 38 % 33 % 33 % 36 %

Tableau 5. Habitudes tabagiques chez les femmes en fonction de l’âge, de la classe sociale, de la profession et de la région.

Age N=488 N=378 N=1156

15-24 ans
N=289
25-44 ans
N=683
45-64 ans
N=580
65 ans +
N=443
Total
N=1995
Fumeuse quotidienne 23 % 34 % 26 % 11 % 25 %
Fumeuse occasionnelle 6 % 5 % 3 % 2 % 4 %
Ex-fumeuse 9 % 16 % 25 % 18 % 18 %
Non-fumeuse 62 % 45 % 46 % 69 % 53 %
Classe sociale Classe sociale 1-2
Classe sociale 3-4
N=478
Classe sociale 5-6
N=518
Classe sociale 7-8
N=511
Total
N=1995
Fumeuse quotidienne 20 % 26 % 26 % 27 % 25 %
Fumeuse occasionnelle 5 % 3 % 4 % 3 % 4 %
Ex-fumeuse 19 % 21 % 18 % 15 % 18 %
Non-fumeuse 56 % 50 % 52 % 54 % 53 %
Profession ouvrière
employée
N=422
indépendante
N=193
cadre
N=50
sans emploi
N=133
Fumeuse quotidienne 45 % 25 % 22 % 17 % 44 %
Fumeuse occasionnelle 3 % 5 % 3 % 6 %
Ex-fumeuse 18 % 17 % 21 % 18 % 13 %
Non-fumeuse 34 % 53 % 53 % 65 % 37 %
Région Flandre
Bruxelles
N=192
Wallonie
N=647
Total
N=1995
Fumeuse quotidienne 22 % 25 % 31 % 25 %
Fumeuse occasionnelle 2 % 10 % 5 % 4 %
Ex-fumeuse 19 % 17 % 17 % 18 %
Non-fumeuse 57 % 49 % 47 % 53 %

Le pourcentage de fumeurs de tabac à rouler augmente

Le tabac à rouler est nettement plus en vogue que les cigarettes manufacturées. Le pourcentage de fumeurs de tabac à rouler est passé de 27 % en 2003-2004 à 30 % en 2006. Le pourcentage de fumeurs de cigarettes ordinaires est passé de 77 % en 2003-2004 à 65 % en 2006.
Si 65 % des fumeurs fument aujourd’hui des cigarettes ordinaires, 30 % préfèrent le tabac à rouler et 6 % des cigares, des cigarillos ou la pipe. Il existe d’importantes différences entre les préférences des fumeurs en fonction du sexe, de l’âge et de la classe sociale:
59 % des hommes fument des cigarettes ordinaires (contre 74 % des femmes), 34 % des hommes fument du tabac à rouler (contre 22 % des femmes) et 8 % des hommes fument la pipe, des cigares ou des cigarillos (contre 2 % des femmes).
77 % des jeunes (15 à 24 ans) fument des cigarettes ordinaires, contre 58 % des plus de 65 ans.
21 % des jeunes (15 à 24 ans) fument du tabac à rouler, contre 32 % dans les autres catégories d’âge.
44 % des sans emploi fument des cigarettes roulées à la main, contre seulement 2 % des cadres.
10 % des plus de 65 ans fument des cigares, des cigarillos ou la pipe.
Dans la classe sociale supérieure (déterminée sur la base de la formation et du niveau d’éducation), 21 % fument du tabac à rouler, contre 43 % dans la classe sociale inférieure.

Tableau 6. Le pourcentage de fumeurs par type de produits de tabac en fonction de la classe sociale n=1268[/ti

Cigarettes ordinaires Tabac à rouler Pipe, cigares ou cigarillos
Classe 1-2 70 % 21 % 8 %
Classe 3-4 73 % 23 % 5 %
Classe 5-6 68 % 31 % 2 %
Classe 7-8 53 % 43 % 4 %

Tableau 7. Le pourcentage de fumeurs par type de produits de tabac en fonction de la région n=1268

Cigarettes ordinaires Tabac à rouler Pipe, cigares ou cigarillos
Flandre 71 % 25 % 4 %
Bruxelles 56 % 39 % 7 %
Wallonie 62 % 34 % 5 %
Belgique 65 % 30 % 6 %

Combien de cigarettes fumez-vous par jour en moyenne?

Les enquêteurs ont demandé aux fumeurs de tabac à rouler ou de cigarettes ordinaires combien de cigarettes ils fument par jour en moyenne:
33 % fument moins de 10 cigarettes par jour.
38 % fument entre 10 et 19 cigarettes par jour.
29 % fument 20 cigarettes ou plus par jour.
Par rapport à 2003-2004, le nombre de cigarettes par fumeur a diminué. En 2003-2004, 39 % des fumeurs fumaient 20 cigarettes ou plus par jour, contre 29 % en 2006. En 2003-2004, 24 % fumaient moins de 10 cigarettes par jour, contre 33 % en 2006.
Dans la classe sociale supérieure, 21 % fument plus de 20 cigarettes par jour, contre 36 % dans la classe sociale inférieure.

Tableau 8. Le nombre de cigarettes fumées par jour en fonction de la classe sociale n=1 268

Moins de 10 cigarettes par jour 10 à 19 cigarettes par jour 20 cigarettes ou plus par jour
Classe 1-2 N=255 50 % 29 % 21 %
Classe 3-4 N=271 22 % 49 % 29 %
Classe 5-6 N=308 35 % 36 % 29 %
Classe 7-8 N=287 29 % 36 % 36 %

L’opinion de la population au sujet des mesures antitabac

La même enquête révèle que 73 % des personnes interrogées estiment que l’interdiction de fumer dans les restaurants est justifiée (2). Les ex-fumeurs sont 74 % à soutenir cette mesure et les non-fumeurs 88 %. Un fumeur sur deux (49 %) approuve cette interdiction. Chez les fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer, 56 % soutiennent la mesure (40 % chez ceux qui ne souhaitent pas arrêter de fumer).
L’interdiction de fumer déjà introduite sur le lieu de travail bénéficie d’un soutien encore plus marqué: 83 % des personnes interrogées estiment que l’interdiction de fumer sur le lieu de travail est justifiée. Les anciens fumeurs sont 86 % à la soutenir et les non-fumeurs 94 %. Deux tiers des fumeurs (67 %) sont d’accord avec la mesure. Les fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer sont même 80 % à approuver cette mesure (contre 54 % chez ceux qui ne souhaitent pas arrêter de fumer).
Six personnes interrogées sur dix (59 %) estiment que les campagnes antitabac ont enregistré des progrès au cours des quatre dernières années (50 % des fumeurs, 61 % des anciens fumeurs et 64 % des non-fumeurs). Une personne sur trois (33 %) pense le contraire, tandis que 8 % n’ont pas d’opinion sur le sujet. Chez les fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer, 55 % sont d’accord avec cette idée (contre 46 % chez ceux qui ne souhaitent pas arrêter de fumer).
A la question de savoir quelles mesures sont les plus efficaces pour déconseiller de fumer, 19 % répondent l’interdiction de la vente de cigarettes aux jeunes de moins de 16 ans, 18 % une hausse annuelle de 0,50 euro par paquet de cigarettes, 14 % l’interdiction de fumer sur le lieu de travail et dans les autres lieux publics, 12 % la diffusion régulière de spots sur le tabagisme à la télévision, 8 % la présence de photos dissuasives sur les paquets de cigarettes et 6 % l’interdiction totale de publicité pour le tabac.
Pour les jeunes (de 15 à 24 ans), les mesures suivantes sont les plus efficaces: les hausses de prix (23 %), les spots télévisés (22 %), l’interdiction de fumer sur le lieu de travail (12 %), l’interdiction de vente aux jeunes (12 %), les photos dissuasives sur l’emballage (10 %) et l’interdiction de publicité (7 %).
Selon les fumeurs, les mesures suivantes sont les plus efficaces: l’interdiction de fumer pour les jeunes (21 %), les spots télévisés (13 %), l’interdiction de fumer sur le lieu de travail (11 %), les hausses de prix (9 %), les photos dissuasives sur l’emballage (9 %) et l’interdiction de publicité (6 %).
Il existe des différences marquantes entre les fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer et les autres. 12 % des fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer pensent qu’une hausse de prix est une mesure efficace, contre 6 % des fumeurs ne souhaitant pas arrêter. 14 % des fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer pensent qu’une interdiction de fumer sur le lieu de travail est une mesure efficace, contre 8 % des fumeurs qui ne souhaitent pas arrêter de fumer.
Informations communiquées par Luk Joossens , Fondation contre le Cancer
Fondation contre le Cancer, chée de Louvain 479, 1030 Bruxelles. Internet: http://www.cancer.be
(1) Il s’agit de quatre enquêtes réalisées par Ipsos sur la base d’une méthodologie identique, auprès de 2 000 personnes en 2002, 2003 et 2005 et auprès de 3 872 personnes en 2006, pour le compte du CRIOC (2002), du VIG (2003) et de la Fondation contre le Cancer (2005 et 2006).
(2) Voir MAILLARD C., 2007, une bonne année pour les non-fumeurs, Education Santé n° 220, février 2007.