Ceci n’est pas une conclusion…
Mais la question de la réduction des inégalités sociales de santé a du sens. C’est une réalité concrète pour nombre de professionnels. Se pencher sur cette question est un défi auquel de nombreux intervenants font face. Des intervenants s’investissent pour la réduction des inégalités sociales de santé. Cet objectif est parfois explicite dans l’objet social de leur institution et s’intègre dans leurs missions.
Ils adaptent leurs pratiques, les offres de santé et de promotion de la santé au sens large pour réduire les inégalités sociales de santé. L’accessibilité à la santé dans une vision globale, l’accessibilité aux ressources et offres de promotion de la santé, sont des questions transversales et fondamentales.
De multiples approches d’intervention pour réduire les inégalités sociales de santé co-existent :
– en optant par exemple pour le principe de discrimination positive ou en cherchant à renforcer la cohésion sociale;
– en poursuivant un objectif d’insertion ou d’émancipation.
Pour réduire les inégalités sociales de santé, les stratégies de discrimination positives sont-elles plus « payantes » que des stratégies de cohésion sociale ou inversement ? Ces stratégies pourraient-elles être complémentaires? Quels sont les avantages et inconvénients (effets contre-productifs) de ces approches?
La Région wallonne, par exemple, a choisi de promouvoir la cohésion sociale et de favoriser l’accès de tous les habitants aux droits fondamentaux en suivant les principes développés par le Conseil de l’Europe. Une synergie des politiques Communauté – Région dans l’accès au droit à la santé serait à mettre en œuvre. Un groupe de travail intercabinets permanent ‘Cohésion sociale’, commun à la Région wallonne et à la Communauté française et créé sous la présente législature, est déjà un signal concret de la volonté de rapprochement de ces deux entités sur le plan de la cohésion sociale.
Des pistes proposées
1. Intégrer de façon explicite et structurelle la question de la réduction des inégalités sociales de santé quel que soit le niveau de pouvoir et/ou d’intervention :
– dans le programme quinquennal et plan communautaire opérationnel ainsi que dans les services et programmes et recherches de promotion de la santé ;
– dans le pilotage (budgets et financements, grille d’appréciation de la qualité du programme, etc.) et l’évaluation des politiques de santé ;
– par les échanges et coopérations entre organisations ;
– par l’articulation cohérente entre différents niveaux de pouvoir (ligne hiérarchique institutionnelle et territoriale).
2. Fixer les conditions qui garantissent une offre universelle en promotion de la santé aux différents âges de la vie :
– définir des objectifs ainsi que des indicateurs permettant de piloter un tel défi ;
– fixer un cadre organisationnel. 3. Renforcer les connaissances et les compétences des professionnels pour lutter contre les inégalités sociales de santé :
– documenter la question des ISS (comment elles se construisent et s’entretiennent, et quelles sont les stratégies et méthodes efficaces) ;
– communiquer et former les professionnels à ce propos. 4. Maintenir les offres de promotion de la santé et de prévention (programmes et services) qui visent l’universalité en veillant particulièrement à toucher les populations les plus précarisées. 5. En complément, développer des stratégies qui consistent à s’adresser à des publics particuliers en visant à les ramener vers le circuit universel. Il s’agit d’insister sur :
5.1. Rendre l’offre de santé (soins de santé, prévention et promotion de la santé) accessible aux groupes cibles en adaptant l’offre (par la réorientation des missions et des objectifs, la réorganisation pratique des services…).
5.2. Renforcer les compétences des professionnels.
5.3. Accroître le dialogue entre les publics et les professionnels.
5.4. Communiquer sur les activités et offres de promotion de la santé.
5.5. Agir en santé dans les communautés et lieux de vie.
5.6. Encourager la participation des personnes concernées comme moyen de concilier efficience et éthique et intégrer leur voix.
5.7. Favoriser l’empowerment et le développement de compétences non cognitives.
5.8. Renforcer le développement des connaissances sur les questions de santé et le fonctionnement des services de santé (soins de santé, prévention et promotion de la santé).
5.9. Mobiliser et enrichir les représentations. 6. Attribuer des ressources adéquates, à moyen et long terme .
Garantir des sources de financement pérennes (services universels et programmation à long terme) pour :
– assurer le maintien des compétences dans les structures et services de promotion de la santé ;
– favoriser le lien entre professionnels et usagers ;
– avoir une attitude congruente vis-à-vis du public et donner un message positif aux acteurs de promotion de la santé leur permettant réellement de mobiliser les populations avec lesquelles ils travaillent dans une recherche conjointe de mieux-être « pour tous ». 7. Poursuivre et développer le plaidoyer en faveur de la réduction des inégalités sociales de santé.
Processus mené par le groupe de travail « réduction des inégalités sociales de santé » du Conseil supérieur de promotion de la santé
Le groupe de travail s’est réuni 9 fois entre janvier et décembre 2010; il a mené une réflexion, des échanges, un travail d’enquête et d’analyse.
Une réflexion
Il s’agissait de rassembler les références documentaires utiles à éclairer le concept d’ISS et les modes d’intervention propices à réduire celles-ci. Deux modalités ont été mises en place.
– Un portefeuille de lectures a ainsi été créé sur une plafe-forme internet à destination des membres du groupe de travail. Cette plate-forme a été administrée par le SCPS Question-Santé.
– Le SCPS UCL-RESO a élaboré deux dossiers techniques destinés à synthétiser ces références.
Des échanges
Trois temps forts ont animé les échanges des membres du groupe de travail.
– Une clarification des questions à mettre au travail dans le groupe et des définitions relatives aux inégalités sociales de santé
– Des échanges sur la méthode de travail à adopter pour éclairer ces questions d’une manière concrète, qui reflète les pratiques et enjeux des acteurs de divers niveaux : une enquête a finalement été décidée.
– Une analyse des résultats de cette enquête de manière à constituer le présent rapport au CSPS et à lui proposer des lignes de force et des pistes de travail.
Une enquête
Un questionnaire a été proposé à une vingtaine d’organismes (envoi en août 2010) sur base d’un échantillonnage raisonné. Il s’agissait de contacter des organismes présentant des profils variés quant aux caractéristiques suivantes :
– appartenance ou non au secteur de la promotion de la santé, financé par la Communauté française;
– niveau territorial de leur activité: local (une commune ou un quartier), intermédiaire (un arrondissement, une province) ou ensemble de la Communauté française ;
– présence dans leur projet d’objectifs explicites on non de réduction des inégalités sociales de santé.
La liste des 19 organismes ayant répondu à ce questionnaire est présentée plus loin.
Le questionnaire lui-même présentait trois voies d’approche pour identifier les pratiques à l’intersection de la promotion de la santé et de la réduction des inégalités sociales de santé.
– Les répondants étaient invités à expliquer le sens que prenaient certains concepts de référence dans leurs pratiques quotidiennes : inégalités de santé, inégalités sociales de santé, gradient social ; population précarisée, vulnérable, fragilisée, défavorisée, immigrée, stigmatisation…
– Ils étaient ensuite invités à expliquer ce qui était mis en œuvre dans leur projet ou programme en vue de réduire les inégalités sociales de santé.
– Et enfin il leur était demandé de remplir une grille AFOM en précisant les Atouts, Faiblesses de leur organisation ; les Opportunités et Menaces de leur environnement, dans une perspective de réduction des inégalités sociales de santé.
Une analyse
Les réponses parfois très détaillées fournies par les répondants donnent un aperçu de leurs représentations quant aux ISS et aux moyens à mettre en place pour réduire celles-ci. Les réponses ont été soumises à une analyse de contenu visant à faire surgir une image structurée de ces représentations et de ces pratiques. Cette analyse de contenu a été réalisée via le logiciel NVivo. Ce travail a été effectué par les SCPS Question Santé et APES-Ulg.
Grâce à cette analyse, le groupe de travail a pu, dans un premier temps, prendre connaissance des contenus les plus souvent évoqués par les répondants pour chacune des questions ou chacun des concepts proposés à leur appréciation. Le groupe de travail a alors pu commenter ces tendances et le SCPS Question Santé a sélectionné des extraits en relation avec ces contenus les plus fréquents.
Sur base d’un premier document ainsi constitué, le groupe de travail a proposé des lignes de force et des pistes de travail.
Une note de travail
Cette note est le fruit d’une première synthèse de ces différents apports. Vu l’importance du matériau recueilli, tous les éléments n’ont pu être exploités et certaines questions pourraient être approfondies ou développées, suivant l’intérêt ou les attentes du Conseil.
Pour une meilleure lisibilité :
-le point de vue et les propos des répondants seront mis en italique ;
-les éléments que le GT ISS a souhaité mettre en évidence, seront présentés en encadré ;
-les apports de la littérature scientifique seront mis en retrait.
Nous remercions particulièrement les personnes et organisations qui ont répondu à l’enquête
– Service Infor Santé de l’Alliance nationale des mutualités chrétiennes
– Centre d’éducation du patient
– CLPS Liège
– Echevinat de la ville de Namur
– asbl Cultures et Santé
– Ville de Durbuy
– FARES Tuberculose
– FARES tabac
– Mutualité socialiste PIPSA
– asbl Les Pissenlits
– Plan cohésion sociale Namur
– PROVAC
– Relais Social Charleroi
– Réseau Santé Diabète
– Relais Santé Urbain de Namur
– SAMI Liège
– SIPES
– SPSE Province de Liège
– SSM CPAS Charleroi