Au cours de l’année scolaire 2003 – 2004, la Société belge de pédiatrie (SBP) met en œuvre dans les classes de 3e maternelle, un programme national de sensibilisation et d’éducation des enfants et de leurs parents à une alimentation saine et équilibrée, à l’école comme à la maison.Aujourd’hui plus que jamais, il est important d’acquérir de bonnes habitudes alimentaires et ce dès le plus jeune âge. C’est pourquoi la SBP souhaite favoriser l’adoption de comportements nutritionnels sains et équilibrés dès l’enfance, afin de limiter l’incidence ultérieure de pathologies chroniques, telles que l’obésité ou le diabète notamment, consécutives à la consommation excessive de produits trop sucrés ou trop salés.
La mission de la SBP se situe dans la proximité avec l’enfant: elle joue un rôle d’interface entre l’enfant et tous les acteurs concernés directement ou indirectement par son développement et sa santé. Elle diffuse les connaissances en la matière et favorise la recherche, mais elle entend aussi informer le plus complètement possible le grand public.
Pour cette opération, elle travaille avec un partenaire de poids, le Groupe Danone, qui se définit comme une «entreprise mondiale de proximité».
Le principe de l’action «Bon appétit, la santé!», mise au point en collaboration avec des instituteurs, mais aussi des spécialistes de la santé, de la prévention et de la nutrition des enfants, est de leur enseigner, de façon amusante, ludique et interactive, par le biais d’une approche didactique, les bases d’une alimentation saine et équilibrée.
Le message est fondé sur 3 règles d’or:
• chaque jour, manger 5 fruits ou légumes;
• chaque jour, prendre un goûter, par exemple avec du pain, et éviter de grignoter;
• chaque jour, consommer des produits laitiers.
Un jeu gratuit est mis à la disposition de tous les enseignants de 3e maternelle qui en font la demande, en réponse à une lettre qui leur a été adressée. Le jeu décrit par l’image les bonnes habitudes alimentaires. Il se joue par groupes, et il est composé de 6 petits magasins symbolisant les catégories d’aliments, de 176 cartes illustrant les aliments, et d’une ligne du temps représentant une journée type de l’alimentation d’un enfant.
Cet outil pédagogique est modulable, le rythme de déroulement du jeu est adaptable au calendrier de l’enseignant.
Le jeu fait partie d’un kit complet mis à la disposition de chaque classe qui en a fait la demande. Le kit est constitué, outre le jeu et son règlement, d’un guide pour l’enseignant à propos de l’alimentation saine, d’un poster à placer en classe et d’un livre illustré pour enfants, ‘Le secret des champions’, qui, sous la forme d’un conte, reprend l’enseignement du jeu et les 3 règles d’or. Un exemplaire de ce livre est offert à chaque enfant, ce qui permet d’associer leurs parents à l’information apportée.
Partenaire envahissant
Nous imaginons la satisfaction des enseignants du maternel à qui on offre un outil de cette importance (la boîte fait plus de 50 cm de côté, autant dire qu’elle ne passe pas inaperçue). Les ressources ludiques et pédagogiques luxueuses et gratuites ne courent pas les rues!
On peut toutefois se poser des questions à l’égard du partenariat entre le géant mondial de l’agro-alimentaire et la Société belge de pédiatrie. La présence massive et écrasante de la firme, avec son logo ultra-visible partout, nous laisse penser qu’elle considère ce projet comme un élément-clé d’une stratégie qui ne vise pas uniquement l’apprentissage des règles d’or de l’équilibre alimentaire…
Danone développe beaucoup de produits dont la cible privilégiée est l’enfant, elle propose aux écoles des distributeurs de snacks sucrés et autres yaourts, elle sait mieux que d’autres que les enfants sont de redoutables prescripteurs d’achats. Bref, nous sommes ici en plein marketing au moins autant qu’en situation d’éducation.
Je suppose que les responsables de la Société belge de pédiatrie n’ignoraient pas cela en passant une convention avec la firme.
Une chose est certaine: si les promoteurs de ce programme avaient demandé l’autorisation des autorités de la Communauté française Wallonie-Bruxelles, ils auraient probablement essuyé un refus, l’éducation des enfants et la publicité commerciale étant encore incompatibles dans notre pays (la publicité à l’école est légalement interdite).