Vous n’avez pas pu échapper à la récente et massive campagne de ‘sensibilisation’ à propos des troubles de l’érection, qui touchent paraît-il 1 homme sur 3 à partir de 40 ans en Belgique: spots radio et télévisés, affiches, site Internet, imprimés distribués via le corps médical, l’émetteur du message a déployé les grands moyens pour convaincre le public qu’il s’agit là d’un problème de santé publique gravissime, bien plus préoccupant sans doute que les cancers, les maladies cardiovasculaires, le diabète et autres bobos du même genre.
Quel bienfaiteur de l’humanité priapique peut donc bien être à l’origine de cette campagne ? Pouvoirs publics, mutualités, membres éminents de la communauté scientifique dressés contre la mollesse ambiante ?
En cherchant bien, on découvre que cette communication émane d’un certain ELB, soutenu par la Belgian Society for Sexual Medicine. Mais qui est ELB, qui s’inquiète si aimablement et de façon si désintéressée de la qualité de nos érections ?
Je vous le donne en mille, il s’agit ô surprise du laboratoire pharmaceutique Eli Lilly Benelux, qui, par le plus grand des hasards, commercialise en Belgique une des trois molécules concernées par la question, de la famille des inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 .
La firme contourne ainsi la loi qui interdit encore toujours aux laboratoires pharmaceutiques de faire de la publicité directe auprès du grand public pour des spécialités soumises à prescription, et ce malgré les pressions énormes de Big Pharma sur l’Union européenne.
Puisqu’on m’empêche de faire de la pub pour ma marchandise, j’en ferai pour la maladie, na, à laquelle je donnerai des… proportions gigantesques. Bien joué, non ? Et tant pis si cela profite aussi à mes collègues de Bayer et Pfizer : quand il y en a pour un, il y en a pour trois !
Christian De Bock , rédacteur en chef