Janvier 2008 Par Philippe BASTIN Stratégies

Introduction

Les assuétudes sont une des problématiques prioritaires du Programme quinquennal 2004-2008 et du Plan communautaire opérationnel. Mais elle n’a pas fait d’emblée l’objet d’un PCO dans la mesure où un Plan concerté de prévention , d’aide et de soins en assuétudes fut demandé à un Collège d’experts par les gouvernements de la Communauté française et de la Région wallonne. L’Exécutif de la Commission communautaire française (COCOF) s’est également joint à cette demande par la suite.
Le Collège d’experts a été désigné en décembre 2004 et officiellement installé lors de la séance inaugurale tenue en présence des ministres C. Fonck et Ch. Vienne le 24 janvier 2005, à Namur.
Le cahier des charges était des plus copieux pour une mission limitée à six mois (1er janvier au 30 juin 2005 mais dans les faits réduite à 5 mois) et sans affectation de moyens.
Le cahier des charges (extraits)
a) Objet de la mission
Ce collège d’experts avait pour triple mission de:
-dresser un cadastre critique des actions et projets actifs dans les champs de prévention et de prise en charge des toxicomanes et de leur famille en laissant apparaître clairement les manques ou doublons éventuels;
-établir un inventaire exhaustif et argumenté des besoins qui nécessitent une action conjointe des deux niveaux de compétences concernés;
-définir les actions prioritaires communes à mettre en place.
b)Rappel des orientations
En matière de prévention, d’aide et de soins en assuétudes, tous les niveaux de pouvoir sont engagés. La multitude et l’importance de ces différentes interventions complexifient bien souvent l’organisation de l’offre de services aux toxicomanes tant en ce qui concerne l’assistance, l’aide et les soins; la réduction des risques et des dommages; les missions de prévention.
Il convient dès lors que les différents niveaux de pouvoir concernés, dans le pur respect de leurs compétences spécifiques puissent s’entendre pour l’établissement de nouvelles structures et stratégies transversales cohérentes concernant principalement les secteurs de la Jeunesse, l’Education et l’Enseignement sans oublier le logement et l’insertion socioprofessionnelle.
Différentes problématiques ont d’ores et déjà été soulevées et il conviendra que le plan concerté puisse y apporter des solutions concrètes.
Il s’agit de:
1.L’amélioration de la diversification de l’offre d’aide et de soins aux personnes toxicomanes en ce y compris l’accès aux dispositifs de logements supervisés et aux formations professionnelles, ce qui leur est actuellement quasi impossible.
2.La définition d’une politique optimale de gestion des risques quelle que soit leur nature et pour tous les publics concernés.
3.Le renfort des liens entre les actions préventives de réduction de risques et les moyens de prise en charge des patients toxicomanes.
4.La création de nouveaux services de soutien et d’accompagnement des parents et familles de toxicomanes.
5.L’établissement de collaborations utiles entre le secteur de l’aide à la jeunesse et les services offrant une aide médicale et/ou thérapeutique.
6.Le développement d’une stratégie de prévention globale dans les écoles et autres milieux de vie par le biais de cercles relais et ce, en collaboration avec le réseau spécialisé.
7.La participation d’acteurs du secteur socio-éducatif dans les réseaux «assuétudes».
8.L’amélioration de la prise en charge socio-sanitaire des toxicomanes délinquants, et en particulier des mineurs, y compris durant l’exécution des peines.

Le rapport

Face à une demande aussi vaste mais comportant des orientations déjà marquées et sans aucun moyen affecté à la mission – excepté l’aide de deux membres de l’Administration de la Région wallonne et de la Communauté française -, le collège s’est vu contraint de faire des choix et redéfinir un objectif réalisable pouvant garantir un résultat utile et utilisable dans le futur. En effet, il s’est avéré que la dimension «cadastre critique des actions et projets actifs (indiquant les manques ou doublons éventuels)» n’était pas réalisable en tant que telle ne fût-ce que pour des questions de temps et de moyens.
Par ailleurs, la notion de plan a d’emblée été interrogée car «un plan requiert un va-et-vient structuré entre choix politiques et éclairage d’experts et d’acteurs de terrain pour développer et faire aboutir ses trois composantes majeures: objectifs, activités et services, ressources».
Le rapport formule donc une série de constats et propose 76 recommandations (cf. site de la Communauté française ou d’Infor-Drogues) susceptibles d’être intégrées dans l’élaboration d’un plan concerté en matière d’assuétudes.
Le rapport a été remis aux différentes autorités dans le respect du délai fixé soit le 30 juin 2005.
Suite et retombées
Les trois gouvernements concernés et leurs administrations respectives ont pris connaissance du rapport et dans une Note rectificative – Gouvernement conjoint – Région wallonne–Communauté française–Commission communautaire française, ont pris les décisions suivantes:
«Les Gouvernements conjoints ont considéré que la mise en œuvre des actions transversales sous-tendues par les recommandations du collège d’experts impliquait différents niveaux de pouvoir et, au sein de ceux-ci, différentes compétences, et nécessitait, au préalable, de s’accorder sur des stratégies communes d’intervention et des mécanismes d’évaluation.
Ils ont dès lors chargé un groupe de travail inter-cabinets, composé de représentants des Ministres compétents en termes de champs d’intervention de la Communauté française, de la Région wallonne et de la Commission communautaire française, de décliner les recommandations du collège d’experts sous forme de plan opérationnel.
Ce groupe de travail a également été chargé d’établir les priorités et de définir les moyens nécessaires à la mise en œuvre des actions proposées.
Après avoir analysé les constats et recommandations formulées par le Collège d’experts, le groupe de travail inter-cabinets a souhaité se scinder en plusieurs sous-groupes chargés d’examiner les différents axes qui sous-tendent les recommandations du Collège.
Trois groupes de travail ont été constitués: politique de santé; enseignement; logement, insertion sociale et socioprofessionnelle.
Chaque groupe s’est d’abord attelé à dresser un état des lieux de la situation des secteurs concernés afin de pallier l’absence de cadastre critique des actions menées par chaque niveau de pouvoir. Cette dynamique a fortement contribué à la définition d’initiatives conjointes et de propositions concrètes présentées dans la présente note.
Cependant, il est apparu qu’un cadastre des actions menées en matière de prévention, d’aide et de soins en assuétudes avait été réalisé en Région wallonne sous la précédente législature et qu’il pourrait utilement être réactualisé et complété en vue de dresser l’inventaire exhaustif des besoins nécessitant une action conjointe.
Dès lors, un groupe de travail inter-administrations a été chargé d’actualiser ce cadastre, chacun pour ce qui concerne son niveau de compétences. Dans un second temps, une analyse critique de ce cadastre permettra de mettre en évidence les doublons ou les manques éventuels nécessitant la mise en œuvre d’actions communes. Dans ce cadre, des mesures concrètes de simplification administrative devront permettre aux associations co-financées de réduire leurs démarches administratives liées à leur demande de subvention ou au rapport d’activités.
La présente note précise, point par point, la position des trois gouvernements relative aux différentes recommandations du groupe d’experts et détaille, le cas échéant, les mesures mises en œuvre en la matière».

Cette Note rectificative a fait l’objet d’une notification du Gouvernement entre le Collège de la Commission communautaire française, le Gouvernement wallon et la Communauté française en date du 10 juillet 2006.
Cette notification comprend trois décisions:
Le Gouvernement conjoint prend acte de la mise en place d’un groupe de travail inter-administration chargé de compléter le cadastre des actions mises en œuvre par les différents gouvernements et d’en faire l’analyse critique en vue de dresser l’inventaire exhaustif et argumenté des besoins nécessitant une action conjointe.
Il charge les ministres de la Santé de rencontrer le collège d’experts afin de l’informer sur sa position relative aux différentes recommandations telle qu’elle figure dans la présente note ainsi que sur les mesures mises en œuvre en la matière et sur l’état d’avancement de l’élaboration du plan concerté de prévention, d’aide et de soins en matière d’assuétudes.
Il charge les ministres de la Santé de lui faire rapport de l’état d’avancement de l’élaboration de ce plan concerté endéans les 6 mois.

Aujourd’hui

En toute logique, le groupe d’experts n’existe plus.
Néanmoins, au cours du dernier quadrimestre 2006 et comme prévu dans la notification, le Gouvernement conjoint a organisé quelques réunions réunissant les membres du groupe de travail inter-cabinets, des membres des différentes administrations concernées et quelques membres du groupe d’experts.
Ces réunions ont porté sur la question des cadastres, sur la création des Points d’appui assuétudes et sur les réactions à la Note rectificative.
Par ailleurs, l’asbl Eurotox – Observatoire socio-épidémiologique alcool-drogues en Communauté française de Belgique – a été sollicitée par le groupe de travail inter-cabinet/inter-administration pour faire part de son travail d’élaboration d’un cadastre des activités de promotion de la santé, prévention et réduction des risques en matière d’assuétudes en Communauté française. Enfin, l’approche de la prévention des assuétudes en milieu scolaire a été parfaitement définie dans la circulaire n° 1552 du 19 juillet 2006 – Recommandations du Gouvernement de la Communauté française relatives à la prévention des assuétudes en milieu scolaire , signée par la ministre-présidente Marie Arena. Cette circulaire présente en seconde partie la création des «Points d’appui aux écoles en matière de prévention des assuétudes».
Pour en revenir au PCO assuétudes, à ce jour, aucune information n’a filtré à propos de l’état d’avancement des travaux des groupes de travail inter-administration et inter-cabinet concernant la définition d’un plan opérationnel en matière d’assuétudes en Communauté française.
Philippe Bastin , Directeur d’Infor-Drogues asbl