La promotion de la vaccination vise avant tout à développer une «culture de la vaccination», en soulignant, pour chaque individu, l’importance et le rôle de la prévention vaccinale tout au long de sa vie. Au cours des deux dernières décennies, le programme de vaccination en Communauté française a fortement évolué, particulièrement en ce qui concerne la protection vaccinale des enfants qui est passée de quatre à douze maladies. Education Santé vous livre un aperçu de cette évolution.
Deux logiques sous-tendent la vaccination: la première, individuelle, vise à protéger les individus vaccinés; la seconde, plus collective, tend, selon les taux de couverture atteints, à réduire l’incidence d’une maladie, voire à éliminer certaines maladies au sein de la population.
Evolution de la politique vaccinale
De quatre maladies évitables par la vaccination, en 1981, la protection vaccinale des enfants s’est étendue, en 2007, à 12 maladies évitables. Cette évolution a pu être réalisée grâce à l’enregistrement de nouveaux vaccins et à la volonté politique d’offrir à tous les enfants une prévention vaccinale de qualité. Pour ce faire, le budget consacré à la vaccination est passé de 1,5 million d’euros, en 1999, à plus de 5 millions d’euros en 2007.
Depuis 1999, lors de l’introduction de la vaccination contre l’hépatite B, les autorités sanitaires fédérales et communautaires établissent des accords pour permettre aux programmes de vaccination de disposer de vaccins de plus en plus coûteux.
L’année 2001 a marqué un tournant essentiel pour les programmes de vaccination: conscients des enjeux en termes de couvertures et de l’apport des nouvelles combinaisons vaccinales sur le plan de la sécurité, les autorités ont mis en place les conditions pour assurer simultanément le passage du vaccin polio oral au vaccin polio injectable et l’introduction des combinaisons vaccinales basées sur le vaccin anti-coquelucheux acellulaire.
Depuis 2001, le vaccin tétravalent DTPa-IPV et, depuis 2004, le vaccin hexavalent (DTPa-VHB-IPV-Hib), sont utilisés dans les programmes de vaccination des trois communautés linguistiques du pays.
En 2002, le schéma vaccinal s’est enrichi de la recommandation de vaccination contre le méningocoque C; en 2005, de celle contre les infections invasives à pneumocoques (Pn7V), et en 2006, de celle contre le Rotavirus.
Le Ministre qui a la santé dans ses compétences en Communauté française est responsable de la politique vaccinale et de l’organisation de la prévention vaccinale par les différents intervenants. Il s’appuie principalement sur les services de la Direction générale de la santé, sur l’association interuniversitaire Provac (association interuniversitaire ULB-ULg-UCL qui pilote le programme), sur les structures préventives ONE et les services PSE et CPMS, ainsi que sur le Service communautaire de communication Question Santé.
Les schémas de vaccination
En Belgique, c’est le Conseil supérieur de la santé qui émet les recommandations vaccinales.
Divers paramètres influencent le choix de l’objectif fixé pour une vaccination:
-les caractéristiques épidémiologiques de la pathologie;
-les caractéristiques intrinsèques du vaccin (efficacité, profil de sécurité, modalités d’administration);
-la modification épidémiologique du profil de la maladie sous l’effet de la vaccination;
-la faisabilité de son intégration dans le schéma vaccinal;
-le coût;
-la perception sociale de la maladie et de la prévention vaccinale par les professionnels de santé, les autorités et le public.
La réflexion qui sous-tend l’adaptation du calendrier vaccinal dans notre pays est donc un processus dynamique qui intègre l’évolution de ces différents paramètres.
Le schéma de vaccination des nourrissons et des enfants en âge scolaire
En 1981, le calendrier vaccinal de base de l’enfant proposait une protection contre la poliomyélite, la diphtérie, le tétanos et la coqueluche. Au cours des deux décennies suivantes, la protection vaccinale du nourrisson s’est élargie à l’ Haemophilus influenzae de type b, l’hépatite B, la rougeole, la rubéole, les oreillons, les infections à méningocoque C, le pneumocoque et le Rotavirus. Le recours aux vaccins combinés a permis d’élargir la prévention vaccinale sans pour autant assister à une inflation du nombre d’injections et de consultations.
Le schéma de vaccination des adultes
Pour la vaccination des adultes au-delà de 18 ans, le programme de vaccination relaie les recommandations auprès des vaccinateurs. Il soutient également la promotion annuelle de la vaccination contre la grippe, notamment par des campagnes de communication médiatiques dans le cadre des espaces publicitaires gratuits réservés à la promotion de la santé.
Les vaccins utilisés pour les adultes ne sont pas intégrés dans le circuit de distribution des vaccins organisé par la Communauté française.
Situation épidémiologique des maladies évitables par la vaccination
En Belgique, la mortalité infantile chez les bébés de moins de un an est passée de 12 pour 1000 naissances en 1980 à 4 pour 1000 naissances en 2005. La mortalité des enfants âgés de moins de 5 ans est passée de 15 pour 1000 naissances en 1980 à 5 pour 1000 naissances en 2005.
Sur base des données rapportées dans le Tableau de bord de la santé , l’ensemble des maladies évitables par la vaccination ont une incidence inférieure à 5/100 000 habitants en Belgique. Seules les infections à Rotavirus et les infections invasives à pneumocoques, pour lesquelles la vaccination est nettement plus récente, présentent encore des incidences élevées (respectivement 90/100 000 habitants en 2005 et 59,5/100 000 habitants en 2001-2002).
Couvertures vaccinales
Couvertures vaccinales des nourrissons
Les enquêtes de couvertures vaccinales réalisées auprès d’enfants de 18 à 24 mois permettent de suivre l’évolution de la vaccination en Wallonie et à Bruxelles. Il ressort des résultats des enquêtes réalisées par Provac en 2006 que les modifications du schéma vaccinal et l’introduction de nouveaux vaccins ont été bien suivies, et ont permis une amélioration des niveaux de couverture.
Les objectifs fixés par le programme de vaccination sont d’atteindre 95 % de couverture pour toutes les vaccinations recommandées et pour lesquelles les vaccins sont accessibles gratuitement dans le circuit de distribution des vaccins de la Communauté française.
En Wallonie, toutes les couvertures vaccinales ont augmenté depuis 2003 et dépassent le seuil de 90 %, hormis celle du RRO qui a néanmoins augmenté de 6,5 % et atteint, à présent, 89 %.
En 2006, en Wallonie, 84 % des enfants âgés de 18 à 24 mois ont reçu l’ensemble des doses de vaccins recommandées dans le schéma vaccinal, ce qui représente une augmentation de 34 % par rapport aux résultats de l’enquête de 2003. En Région de Bruxelles-Capitale, on observe un résultat similaire de 83,7.
Le passage au vaccin hexavalent a permis l’amélioration considérable de la couverture vaccinale du vaccin contre l’hépatite B. L’effort financier consenti pour l’introduction de ce vaccin dans le circuit des vaccins de la Communauté constitue un investissement majeur pour le programme.
Les efforts fournis par le programme en termes de formation des professionnels et en information auprès des parents se sont concrétisés dans l’amélioration de la couverture RRO (+ 6 % en Wallonie, + 16 % en Région bruxelloise). Si les efforts se maintiennent, il sera possible d’atteindre l’objectif de l’OMS d’élimination de la rougeole, en Belgique, pour 2010.
Selon Nathalie Moreau et Béatrice Swennen , auteurs du chapitre consacré à la promotion de la vaccination, « l’organisation du programme de vaccination permet actuellement de bien contrôler les inégalités sociales de santé dans le champ de la prévention vaccinale .» Aussi, insistent-elles sur « la nécessité de préserver une bonne cohésion entre les différents intervenants de la vaccination pour maintenir ce contrôle . Tout doit être mis en œuvre pour protéger et renforcer l’accès des populations les plus défavorisées aux consultations de l’ONE .» Dans le même sens, l’adhésion des parents à la prévention vaccinale reste importante. « Les taux de refus pour les vaccins recommandés restent extrêmement limités . Il est donc essentiel de maintenir cette adhésion pour les nouvelles vaccinations en poursuivant et en améliorant les stratégies de communication du programme .»
Couvertures vaccinales des enfants en âge scolaire
Enquêtes auprès des services PSE
Pour les populations scolaires, les enquêtes de couvertures vaccinales se basent sur les données vaccinales disponibles, fin juin, dans les dossiers médicaux tenus à jour par les équipes PSE, d’un échantillon de classes représentatives de la Communauté française, mais aussi des provinces, ainsi que du type de service (SPSE libre, SPSE communal, SPSE provincial ou CPMS).
Depuis 1996, une enquête est organisée chaque année alternativement soit en 6e primaire, soit en 1e ou 2e primaire. Ces enquêtes mettent en évidence les couvertures des vaccinations recommandées à 5-6 ans et à 11-12 ans.
La qualité des informations récoltées est en nette progression: si au début des années 90, le taux de données manquantes était proche de 40 %, il n’était plus que de 12 % lors de l’enquête de 2005-2006.
Couvertures vaccinales première dose et seconde dose RRO
La surveillance des couvertures concerne en premier lieu la vaccination RRO. En effet, suivant l’objectif européen d’élimination de la rougeole pour 2010, il est essentiel de suivre les couvertures pour les deux doses de vaccin RRO. L’objectif est également d’atteindre 95 % de couverture pour les deux doses.
Les couvertures sont en nette progression depuis le début des mesures par enquête. Ainsi, la couverture estimée pour les élèves de 2e primaire en Communauté française, en 2004-2005, c’est-à-dire nés en 1997, est de 81 % pour le RRO1; celle du RRO2 mesurée en 2005-2006, en 6e primaire, est de 70,5 %.
Couvertures vaccinales hépatite B en sixième primaire
Introduite en 1999 dans le programme de la Communauté française, la vaccination contre l’hépatite B, à 11-12 ans, a nécessité des efforts très importants de la part des services de médecine scolaire pour pouvoir l’organiser et réaliser les trois doses de vaccins nécessaires au cours d’une même année scolaire.
De moins de 10 % de couverture lorsque la vaccination était opportuniste et laissée uniquement à la charge de la médecine privée, la couverture est passée à 68,6 % pour l’année scolaire 2005-2006. « La vaccination réalisée par les services PSE et la mise à disposition du vaccin dans le circuit de distribution ont joué un rôle majeur dans cette augmentation spectaculaire de la couverture vaccinale », soulignent Nathalie Moreau et Béatrice Swennen.
Couverture vaccinale de la dose de rappel DTPa – Polio à 5 – 6 ans
Cette couverture vaccinale a été calculée pour la première fois en 2e primaire lors de l’enquête de 2004-2005. Cette enquête concerne donc des enfants âgés de plus de 7 ans. La vaccination n’atteint que 69 %. Elle est essentiellement réalisée par la médecine privée en raison de la suppression de la visite médicale scolaire en 1e année primaire.
Liste des abréviations des vaccins
DTPa | vaccin anti-diphtérie/tétanos/coqueluche contenant du vaccin coquelucheux acellulaire |
DTPw | vaccin anti-diphtérie/tétanos/coqueluche contenant du vaccin coquelucheux à cellules entières |
DT | vaccin anti-diphtérie/tétanos |
Hexavalent | vaccin combiné contre la poliomyélite, la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, l’hépatite B et l’ Haemophilus influenzae de type b |
Hib | vaccin contre l’ Haemophilus influenzae de type b |
HPV | vaccin contre le papillomavirus humain |
IPV | vaccin antipoliomyélitique injectable (vaccin tué) |
MenC | vaccin contre le méningocoque C |
OPV | vaccin antipoliomyélitique oral (vaccin vivant atténué) |
Pn7V | vaccin contre le pneumocoque |
Rota | vaccin contre le Rotavirus |
RRO | vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons |
VHB | vaccin contre l’hépatite B |
Couvertures vaccinales des adultes
Deux vaccinations sont recommandées dans le schéma vaccinal à tous les adultes: celle contre le tétanos et celle contre la diphtérie. Ces deux vaccins doivent être renouvelés tous les dix ans.
A partir de 65 ans (ou plus tôt si on appartient à un groupe cible), le schéma vaccinal recommande les vaccinations contre la grippe et contre les infections invasives à pneumocoques. Le vaccin contre la grippe se fait chaque année, celui contre les infections invasives à pneumocoques est réalisé une fois, avec un rappel après 5 ou 7 ans.
« Au niveau de la population adulte , aucune enquête générale systématique de couverture vaccinale n’est réalisée , notent les auteurs du chapitre. L’Enquête de Santé par interview réalisée en 2004 par l’Institut Scientifique de la Santé Publique fournit néanmoins quelques informations sur la santé vaccinale des adultes en Belgique .»
Evolution de la couverture vaccinale
Au cours des dernières années, la couverture vaccinale contre le tétanos a diminué dans les deux régions: en Wallonie, elle est passée de 74 à 69 %, et à Bruxelles de 70 à 59 %. Après correction pour l’âge et le sexe, cette diminution n’est statistiquement significative qu’à Bruxelles.
Une amélioration significative de la couverture vaccinale contre la grippe a par contre été observée au cours du temps, dans les deux régions et plus particulièrement en Wallonie. A Bruxelles, la couverture est passée de 17 % à 20 % et en Wallonie de 13 à 21 %.
« Parmi les résultats présentés , on retiendra que les couvertures vaccinales des adultes contre la grippe et contre les infections invasives à pneumocoques ne varient pas en fonction du niveau d’instruction , alors que c’est le cas pour la couverture vaccinale contre le tétanos dans les Régions bruxelloise et wallonne », font remarquer Béatrice Swennen et Nathalie Moreau.
Si ces résultats mettent en évidence l’impact positif des politiques menées pour les vaccinations contre la grippe et contre les infections invasives à pneumocoques, ils invitent également à élargir ces politiques à la vaccination contre le tétanos.
Au niveau des groupes cibles, en ce qui concerne la vaccination contre la grippe, les populations plus jeunes qui présentent une maladie chronique ont une couverture moins bonne que les populations plus âgées. Les campagnes de sensibilisation devraient donc être élargies aux groupes à risque présents dans les classes d’âge plus jeunes.
Les intervenants
La Cellule vaccination de la Direction générale de la santé et Provac coordonnent le programme de vaccination en Communauté française. Ce programme mobilise les différents intervenants de la vaccination autour d’objectifs communs en vue de protéger au mieux la population des maladies évitables par la vaccination. Il s’appuie sur des démarches intersectorielles et transversales.
Les structures préventives de la Communauté, l’ONE, les services PSE et CPMS jouent un rôle majeur dans la protection vaccinale des nourrissons et des jeunes. La médecine privée est associée aux efforts déployés en faveur de la vaccination, à la fois auprès des enfants et des adultes. Le programme met, en effet, gratuitement à disposition des vaccinateurs privés et institutionnels les vaccins utiles pour la vaccination des enfants et des jeunes jusqu’à l’âge de 18 ans.
Les principaux vaccinateurs des nourrissons wallons et bruxellois sont les médecins de l’ONE et les pédiatres privés.
50 à 55 % des nourrissons wallons sont vaccinés par l’ONE et 40 à 45 % par les pédiatres et les services hospitaliers. En Région bruxelloise, la part de la vaccination ONE/Kind en Gezin des nourrissons est de plus de 10 % supérieure à celle des Wallons. Les pédiatres et les services hospitaliers, quant à eux, sont responsables des vaccinations de près de 30 % des enfants bruxellois.
En général, les enfants issus de familles plus défavorisées fréquentent davantage les consultations ONE que les enfants issus de milieux familiaux plus favorisés qui fréquentent davantage les pédiatres privés. Il en est de même pour les enfants provenant de familles monoparentales ou de mère d’origine étrangère.
De manière générale, on constate que les enfants qui fréquentent régulièrement les consultations de l’ONE complètent mieux leur schéma vaccinal que ceux qui ne les fréquentent jamais ou de manière irrégulière.
En ce qui concerne les enfants de 5-6 ans, les médecins privés sont les premiers vaccinateurs, les services PSE interviennent plus en vaccination de rattrapage lors de la visite médicale de 2e primaire. Par contre, pour la vaccination des 11-12 ans, le rôle de la médecine scolaire est essentiel car sur l’ensemble des élèves vaccinés, 43 % le sont par les services PSE et CPMS, et 57 % par les médecins privés. La reconnaissance de la mission vaccination des PSE dans le décret de 2002 a largement contribué à l’amélioration des couvertures vaccinales des enfants en âge scolaire.
Chez les adultes, la vaccination est réalisée par les médecins généralistes.
Les objectifs du Plan communautaire opérationnel
Au niveau du programme de vaccination, l’objectif de niveau 1 du PCO est de « susciter l’adhésion maximale de la population et des professionnels aux recommandations vaccinales résumées dans le calendrier vaccinal approuvé par le Gouvernement de la Communauté française ( c’est – à – dire , selon le cas , augmenter ou maintenir les taux de couverture vaccinale ). Il faut aussi adopter des stratégies adaptées pour les populations fragilisées et les migrants .»
Cet objectif se décline suivant trois objectifs de niveau 2:
-développer les connaissances et la motivation de la population vis-à-vis de la vaccination;
-permettre l’accès maximal aux vaccins des publics cibles retenus par la Communauté française;
-assurer la cohérence et la pertinence du programme de vaccination.
Les actions mises en oeuvre par Provac s’articulent autour de ces trois objectifs.
Perspectives
Les perspectives reprises dans le projet quinquennal 2006-2011, élaboré par Provac, sont les suivantes:
-un programme structuré de vaccination;
-l’élimination européenne de la rougeole et de la rubéole congénitale pour 2010;
-l’élargissement de la prévention vaccinale et le financement de la vaccination;
-la création du registre de vaccination en Communauté française et le maintien des enquêtes de couvertures vaccinales;
-l’adhésion de la population au calendrier vaccinal.
Colette Barbier
Swennen B., Moreau N., Favresse D., Bazelmans Ch., Provac, Tableau de bord de la santé en Communauté française de Belgique, Service communautaire en promotion santé SIPES (ESP-ULB), Bruxelles, 2007.
Il peut être téléchargé en PDF aux adresses suivantes: http://www.sante.cfwb.be (rubrique Publications et périodiques, Promotion de la santé – prévention, Tableau de bord de la santé en Communauté française de Belgique – 2007) et http://www.ulb.ac.be/esp/sipes (onglet Publications).