Mars 2011 Lu pour vous

Le fait de toucher un objet rend-il celui-ci plus désirable ? Un prénom peut-il influencer le choix d’un lieu de vie ou d’une profession ? Une personne est-elle dépréciée après avoir été aperçue aux côtés d’une personne obèse ? Sommes-nous plus susceptibles d’accepter de commettre un acte moralement discutable du fait d’avoir été exposé à des concepts religieux ? Pourquoi achetons-nous des produits que nous évaluons moins favorablement lors d’un test à l’aveugle ?
Ces questions, et bien d’autres encore, trouvent une réponse dans ce livre qui a pour objectif d’aider le lecteur à identifier et comprendre les mécanismes psychologiques influençant ses préférences et choix.
Les différents chapitres présentent un aperçu général des découvertes majeures en la matière. Plus de 300 articles scientifiques sont présentés et discutés, qui ont été sélectionnés par l’auteur pour leur pertinence théorique et pratique. Ils abordent un ensemble de thèmes généraux tels que le rôle des mécanismes conscients et inconscients dans la formation de nos préférences et la détermination de nos choix.
Toute personne intéressée par la promotion de la santé ne manquera pas de faire le lien entre les développements de l’ouvrage d’ Olivier Corneille et les pratiques en matière d’acquisition d’attitudes et de comportements ‘sains’ ou ‘malsains’…

Des études suggèrent que l’obésité galopante observée dans les pays industrialisés pourrait avoir pour origine la taille toujours grandissante des portions individuelles de nourriture. (…) En effet, les consommateurs ne se baseraient pas sur leur sentiment de faim (difficile à évaluer) pour déterminer la quantité de nourriture à ingérer. Ils se baseraient de manière heuristique sur la quantité de nourriture qui leur est fournie. (…)
Dans une expérience confinant à l’absurde Wansink a invité des participants à prendre part à une étude à l’heure du déjeuner. L’objet présumé de cette étude consistait à goûter une nouvelle recette de soupe à la tomate, servie dans un bol. Les participants avaient pour instruction de goûter cette soupe et d’en manger autant qu’ils le désiraient. Cependant, pour la moitié des participants, le bol était truqué par un dispositif qui le remplissait imperceptiblement au fur et à mesure que les participants le vidaient.
La consommation de soupe était supérieure de 73% dans cette condition par rapport à la condition contrôle (bol non truqué). Les participants ne semblaient pas être conscients de ce trucage, et ne pensaient pas avoir consommé davantage dans cette condition que dans l’autre.
Une heuristique de représentativité avait donc influencé, de manière drastique, et particulièrement insidieuse, leur comportement alimentaire.
(extrait, page 45)

Bien que basé sur une revue rigoureuse de la littérature scientifique sur le sujet, majoritairement anglo-saxonne, l’ouvrage est accessible, et fourmille d’exemples très concrets. Comme montré dans l’extrait, certains sont vraiment ‘tordus’, de quoi se poser des questions sur la santé mentale des expérimentateurs plutôt que sur le caractère influençable de leurs ‘cobayes’.
Intelligent et distrayant !
Olivier Corneille, Nos préférences sous influences – Déterminants psychologiques de nos préférences et choix, Mardaga, 2010, 224 pages, 25 euros.