Juillet 2011 Initiatives

Comment juger de la cohérence et de la pertinence des politiques européennes dans la lutte anti-tabac? C’est le but du Tobacco Control Scale (TCS), une méthode permettant d’évaluer l’efficacité des mesures anti-tabac prises par les gouvernements en Europe.
Les résultats de la dernière enquête TCS – qui se base sur les mesures en place au 1er janvier 2011, sont mitigés pour la Belgique, qui perd deux places. La cause? Notre pays fait du surplace, alors que d’autres progressent constamment. Même si la Cour constitutionnelle a annulé, la semaine dernière, les exceptions à l’interdiction totale de fumer dans l’Horeca, la Belgique n’avance pas assez vite dans sa politique anti-tabac. C’est une des conclusions des résultats du TCS.
Le Tobacco Control Scale a été créé en 2005 par Luk Joossens , expert en prévention du tabagisme à la Fondation contre le Cancer, et Martin Raw , spécialiste anglais en santé publique. Cette échelle évalue les mesures concrètes, prises dans 6 domaines essentiels de la lutte anti-tabac, et prônées par la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale de la Santé: le prix, l’interdiction de fumer dans certains lieux, le budget consacré à la lutte anti-tabac, la législation relative à la publicité, les avertissements de santé repris sur les paquets et, enfin, les mesures disponibles d’aide à l’arrêt.
En 2007, l’enquête avait été menée dans 30 pays européens (y compris hors Union européenne). La Belgique s’était alors classée en 8e position. En 2011, la Turquie a été incluse dans l’enquête, portant le nombre de pays concernés à 31. Une entrée remarquée, directement à la 4e place, alors que la Belgique perd deux places et se retrouve à une décevante 10e position.

Qui n’avance pas recule

La Belgique aurait dû être en tête de peloton dans la lutte contre le tabac. Après tout, elle a été le premier pays européen à utiliser des photos en couleur jointes aux avertissements de santé sur les paquets de cigarettes. Mais le classement est sans appel: la Belgique est à la traîne. C’est le résultat d’un immobilisme dans certains domaines de la lutte contre le tabagisme.
Ainsi, la frilosité belge concernant l’interdiction totale de fumer dans l’Horeca a coûté des points à notre pays dans le récent classement, puisqu’il était encore possible de fumer dans les cafés, discothèques et casinos début 2011. Heureusement, les exceptions à la loi concernant l’interdiction totale de fumer dans l’Horeca ont enfin été annulées, et les cafés, discothèques et casinos seront totalement sans fumée à partir du 1er juillet 2011. La Belgique rejoindra donc – enfin! – les 18 pays européens ayant déjà pris cette mesure.

La Belgique doit redevenir pionnière de la lutte anti-tabac

Tout n’est pas négatif dans notre pays. Comme déjà dit, il a été le premier pays européen à placer des photos d’avertissement sanitaire en couleur sur les paquets de cigarettes. Autre première européenne, la mention désormais obligatoire du numéro de Tabacstop sur les paquets depuis le 1er janvier 2011. Rappelons que Tabacstop est le service d’aide à l’arrêt tabagique de la Fondation contre le Cancer, joignable gratuitement par téléphone au 0800 111 00 et également présent sur Internet à http://www.tabacstop.be . Enfin, le remboursement de l’accompagnement à l’arrêt chez un médecin ou un tabacologue permet à la Belgique de grappiller quelques points dans le Tobacco Control Scale.
La Belgique n’en est pas moins à la traîne si l’on compare sa situation avec ce qui se passe à l’étranger. Pour remonter dans le classement, il serait nécessaire de prendre exemple sur d’autres pays, ayant eu le courage de mener leur politique anti-tabac à terme. C’est, par exemple, le cas de la Turquie, qui décroche la 4e place du TCS. Un résultat obtenu, entre autres, en doublant le prix des cigarettes en 5 ans, en consacrant 65 % de la face avant des paquets aux photos d’avertissement sanitaire et en interdisant totalement le tabac dans l’Horeca, y compris dans des pièces réservées à cet effet (fumoirs).

La Fondation contre le Cancer propose des solutions

La Fondation continue son travail d’information auprès des autorités, afin que des mesures essentielles soient prises dans notre pays. Elle avance des propositions concrètes et efficaces pour réduire la consommation de tabac:
1. Les photos illustrant les effets nocifs du tabac devraient être rendues obligatoires sur la face avant et arrière de tous les paquets de cigarettes et de tabac à rouler. Elles devraient couvrir 80 % de la surface disponible. La Fondation recommande également que les paquets de cigarettes deviennent neutres, c’est-à-dire sans logo ou autre élément graphique propre à la marque. Ce point doit justement être discuté lors de la révision de la directive européenne en la matière, qui aura lieu en 2011.
2. Encourager l’accompagnement à l’arrêt tabagique, grâce à une baisse des prix des produits de substitution nicotinique (au moins pour les personnes à faible revenu), un enregistrement des informations relatives au statut d’arrêt tabagique des patients et la possibilité de transférer ces informations (par exemple la participation à Tabacstop ) dans le Dossier Médical Informatisé des médecins généralistes.
3. Augmenter chaque année les taxes sur les produits du tabac, et réduire la différence de taxation entre les cigarettes et le tabac à rouler. L’augmentation annuelle minimum des accises devrait être de 8 % pour les cigarettes et 10 % pour le tabac à rouler.
4. L’interdiction totale de publicité et des étalages de présentation dans les points de vente, et la limitation du nombre de ces derniers.
5. Le budget consacré à la lutte anti tabac devrait s’élever au minimum à 20 millions d’euros, notamment dans le cadre de campagnes d’information. Les différentes autorités devraient également établir clairement la destination de cet argent.
6. Restreindre l’influence de l’industrie du tabac sur la politique de santé publique, notamment en traduisant en loi les directives de l’article 5.3 de la Convention cadre de l’OMS pour la Lutte anti-tabac ( Protection of public health policies with respect to tobacco control from commercial and other vested interets of the tobacco industry ).
D’après un communiqué de la Fondation contre le Cancer