Octobre 2002 Par Emmanuelle CASPERS Initiatives

Pendant cette année scolaire 2002-2003, le service Education pour la santé de la Croix-Rouge développe une démarche de sensibilisation visant l’enseignement secondaire. Le projet ‘Promouvoir la santé à l’école secondaire’ s’adresse plus particulièrement aux chefs d’établissements et se concrétisera par l’organisation de trois journées d’échanges. Au-delà des journées elles-mêmes, il s’agit véritablement d’initier ou de renforcer l’articulation entre éducation et santé, objectifs d’enseignement et objectifs de bien-être. Il est aussi question d’entamer et d’approfondir le dialogue avec cet acteur aux compétences sans cesse démultipliées, mais ô combien central, qu’est le directeur d’école.

Un point sur le service Education pour la santé

Depuis 1998, le service Education pour la santé est reconnu, dans le cadre d’un programme quinquennal, pour disséminer les concepts et méthodes de l’ ‘Ecole en santé’ en Communauté française. Pour ce faire, les stratégies privilégiées sont la sensibilisation, la formation et la réalisation d’outils pédagogiques. Conçu conjointement par l’OMS, la Commission européenne et le Conseil de l’Europe, le programme ‘Ecole en santé’ a été expérimenté dans plus de 40 pays et dans une vingtaine d’écoles (tous types, niveaux et réseaux) en Belgique francophone. Il propose une approche globale et intégrée de la santé et repose sur les ’12 Critères d’une école en santé’. Ceux-ci mettent successivement en évidence des éléments tels que les besoins des élèves, la qualité des relations et de l’environnement, l’estime de soi ou le projet d’école.
Les fondements du programme sont par ailleurs intégrés aux lignes directrices du récent Décret de Promotion de la Santé à l’Ecole (PSE) auquel ils offrent un cadre éprouvé. De plus, le service Education pour la santé a été désigné par la Ministre de la Santé et l’Aide à la jeunesse pour coordonner la formation des équipes PSE (ex-IMS). Si le présent projet de sensibilisation des directeurs constitue un axe prioritaire du programme quinquennal du service, il est évident qu’il s’inscrit pleinement dans l’actualité de la réforme de la médecine scolaire, en accordant une attention particulière aux personnes qui accueilleront cette réforme non depuis le Centre de santé, mais bien depuis les classes et l’agitation des couloirs d’écoles, et particulièrement, depuis leur poste de directeurs.

Petite histoire du projet

Le secondaire, parent pauvre de la promotion de la santé?

La nécessité d’accorder une attention particulière à l’école secondaire s’est imposée au fil des contacts avec les acteurs éducatifs et suite au constat général d’une dissémination moins efficace de la promotion de la santé dans l’enseignement secondaire. Cela, alors même que les directions et les équipes éducatives interpellent les acteurs de santé à propos de comportements ‘inquiétants’ ou de ‘problèmes de santé’ chez les adolescents.
Il est vrai que les programmes de prévention et de promotion de la santé, par leur légitime volonté de situer leurs interventions en amont des problèmes, s’adressent plus naturellement aux publics jeunes, chez qui les habitudes de vie et de santé ne sont pas encore (ou moins) ‘fixées’. Il est vrai également que le fonctionnement (un professeur pour une classe), la taille (moins de gros ‘bahuts’) et les rythmes (plus de temps avec un groupe classe) offrent a priori un contexte plus favorable au développement d’une approche intégrée de la santé dans le fondamental.

Construire une sensibilisation adaptée

L’ensemble de ces réflexions et constatations ont motivé la mise en place d’un groupe de travail réunissant à la fois des directeurs de tous les types et réseaux de l’enseignement secondaire, un représentant du service de médiation de l’enseignement officiel, et des acteurs de promotion de la santé (Prospective Jeunesse, un CLPS, des agents PMS). Nous avons fait appel à l’APES pour superviser la construction des contenus pédagogiques et la méthodologie de la démarche, de même que pour élaborer les processus d’évaluation. Avec l’aide de ce groupe de travail, nous souhaitions identifier des stratégies et un langage de sensibilisation adaptés aux réalités des chefs d’établissement, premiers destinataires du projet. Nous remercions en passant tous les membres du groupe de travail pour leur investissement.

Coup d’œil sur une enquête auprès des chefs d’établissement

Pour garantir l’adéquation du projet aux préoccupations des directeurs, nous avons également fait parvenir un questionnaire à 130 établissements secondaires. Intitulé ‘les priorités santé du directeur’, il balise tant les ‘thématiques’, les partenaires, que les contraintes rencontrées en matière de santé à l’école. Nous consacrerons un prochain article aux résultats de cette enquête dont nous devons encore finaliser l’analyse. Nous pouvons d’ores et déjà annoncer que le taux de réponse a pratiquement atteint les 40%, ce qui laisse présager d’un intérêt certain des directeurs pour la santé. Sans donner de résultats définitifs et à titre d’illustrations, voici quelques aperçus des réponses données (questions fermées):
– thématiques santé prioritaires: les assuétudes, la violence, la santé affective et sexuelle,…
– éléments prioritaires en matière de santé vécue à l’école: la qualité des relations professeurs-élèves, l’hygiène, la propreté et l’embellissement des lieux,…
– partenaires avec lesquels ils collaborent pour ce qui a trait à la santé: l’éducateur, le centre PMS/IMS, le professeur d’éducation physique,…
– ressources favorisant le développement de projets santé: des moyens humains supplémentaires, des carrefours d’échanges dans l’école, le travail en réseaux,…
Avec le groupe de travail, l’enquête fournit une base solide à la démarche de sensibilisation et à la construction du contenu des journées.

Renforcer les liens entre Ecole (secondaire) et santé

Le sujet était au centre de la dernière Conférence internationale de promotion de la santé à l’école organisée fin septembre (Egmond, Pays-Bas): pour améliorer de manière durable la qualité de vie à l’école, un partenariat s’impose entre Santé et Education. Notre projet de sensibilisation veut éclairer et renforcer ce lien intersectoriel de différentes manières:
– en montrant la complémentarité des objectifs et des méthodes: tant l’enseignant que l’acteur de PSE veulent développer la confiance en soi de l’élève, la participation des acteurs scolaires à la construction de projets cohérents, les savoir-être, savoir et savoir-faire permettant l’autonomie de l’élève;
– en relevant la cohérence des dispositifs institutionnels: tant le Décret-Missions que les Décrets de Promotion de la santé insistent sur les notions de projet d’école, de Conseil de participation ou d’égalité des chances (populations prioritaires);
– en répétant les rencontres entre décideurs de l’enseignement et décideurs de la santé: dès l’entame du projet, les représentants des différents pouvoirs organisateurs de l’Enseignement ont été informés. Tant la Ministre de la Promotion de la santé que les Ministres en charge de l’Enseignement sont invités aux journées.
Sur ce dernier point, précisons qu’un dossier de présentation a été adressé tout spécialement à Monsieur Hazette , Ministre de l’Enseignement secondaire et de l’Enseignement spécial. La réponse a été rapide et positive, le Ministre souhaite entre autres être présent aux journées. Une Circulaire ministérielle sera envoyée aux établissements secondaires de l’enseignement officiel organisé par la Communauté française, cela en même temps que l’invitation aux journées. Monsieur Hazette a également inscrit la ‘promotion de la santé à l’école’ dans ses perspectives 2002-2004 pour l’enseignement secondaire. Autant d’éléments positifs et ‘renforçants’ qui, à notre sens, convergent vers une rencontre des pratiques et un mieux-être à l’école.

Sensibiliser les directeurs…à quoi?

Le directeur, incontournable

Pour appréhender la complexité de l’école secondaire, nous devions identifier un premier interlocuteur capable d’avoir une vision globale de l’école, une vision de l’intérieur mais aussi distanciée. Le directeur s’imposait en ses qualités de coordinateur du projet d’école, gestionnaire des ressources humaines, garant des valeurs, responsable des personnes et du bâtiment… bref, comme figure centrale avec un rôle et une vision pluriels.
C’est le directeur qui peut impulser une philosophie de travail, encourager des pratiques cohérentes. C’est encore lui qui renforce l’inscription d’un projet dans la durée, dans une certaine mesure, garantit l’obtention de moyens et valorise le travail de l’équipe éducative. Dernier élément et non des moindres, le directeur constitue l’interlocuteur privilégié des futurs agents de Promotion de la Santé à l’Ecole (PSE, ex-IMS).
A voir la description du rôle des directeurs, à les entendre décrier notamment la démultiplication de leurs tâches administratives, on peut se poser la question suivante: que leur demander encore? Idéalement nous voulons les voir ‘acteurs’ intégrant la promotion de la santé dans leurs pratiques quotidiennes pour les impulser ensuite à leur équipe. Avant toute chose et plus réalistement, le directeur sera abordé comme un ‘facilitateur’. Si ce n’est déjà le cas, les écoles vont disposer d’agents PSE compétents pour initier et soutenir la mise en œuvre de projets santé visant à améliorer la qualité de vie à l’école. Ces projets sont construits avec l’équipe éducative et reçoivent l’aval du Conseil de participation et du Chef d’établissement. Actuellement se déroule la formation des agents PSE, par conséquent, sensibiliser les directeurs aux liens entre éducation et bien-être doit faciliter la collaboration future avec les équipes PSE.

Renforcer la disposition du directeur à être acteur ou ‘facilitateur’

Lors des journées, nous souhaitons favoriser le recours – par le directeur et les acteurs scolaires – à des repères et des partenaires les plus pertinents pour promouvoir la santé à l’école. Nous travaillerons sur la sensibilité ou la disposition à agir du directeur afin de permettre à chacun un temps de recul par rapport aux idées et aux méthodes présentées (et éprouvées).
On pourrait résumer en ces quelques phrases clés les messages que les participants entendront et seront invités à travailler en ateliers:
– ‘la promotion de la santé peut servir les missions de l’école, tout comme l’école est un lieu privilégié pour promouvoir le bien-être’, les objectifs, méthodes et concepts de la promotion de la santé et de l’éducation sont complémentaires et cohérents;
– ‘il est possible d’intégrer la santé (repères et acteurs) dans une série de tâches et de domaines d’action du directeur’, par exemple dans le projet d’école, au sein des structures participatives (Conseil de Participation, Association de parents, Délégués de classe) ou dans les différentes facettes de la gestion quotidienne (les bâtiments, le règlement, les relations avec l’extérieur, les ressources humaines,…);
– ‘la santé est un concept positif que chacun expérimente, vit au quotidien’, la santé ne s’exprime pas qu’en termes de problèmes et chacun à des expériences à valoriser.

De l’interactivité avant tout

Peu de bla-bla, des ateliers

Dès les premières réunions du groupe de travail, les principes moteurs envisagés pour les journées de sensibilisation ont été la rencontre, l’interaction et la valorisation des compétences existantes dans les champs de la Santé et de l’Education. Pas question de se poser en ‘donneurs de leçons’ et de considérer les participants comme des cires vierges à modeler.
Le programme des journées s’articule donc en trois temps spécifiques dont le plus large est consacré aux ateliers:
– temps 1: une plénière pour introduire la journée, en fixer le cadre et les objectifs. Elle doit déjà établir les premières connexions entre Décrets de l’Enseignement et Décrets organisant la Promotion de la Santé et la PSE;
– temps 2: cinq ateliers pour permettre de croiser des préoccupations thématiques (assuétudes, hygiène, sécurité,…) avec des concepts et méthodes de PSE (les Critères d’une école en santé, les étapes du projet santé, la confiance en soi, la participation,…);
– temps 3: une exposition interactive des travaux réalisés en ateliers avec une possibilité d’échanger entre participants d’ateliers différents.
Chaque atelier sera pris en charge par un animateur extérieur au secteur de la promotion de la santé, appuyé par une personne ressource du secteur (membre du groupe de travail, CLPS, agent PSE,…). Un observateur est prévu dans chaque atelier. Les participants seront invités à cerner le contour de la participation, du projet santé, de la qualité de vie,… pour construire des activités concrètes relatives à un domaine ‘visible’ de la santé à l’école secondaire (l’environnement, les relations sociales, la vie affective et sexuelle,…).

Des journées à suivre

Nous souhaitons laisser le temps à l’émergence et à la convivialité, ne sont-ce pas là des bases de la motivation? En tout cas, des points de départ positifs pour aller plus loin et permettre, en fonction des besoins recueillis après les journées de mettre en place et animer des espaces-temps de rencontre sur la santé entre directeurs du secondaire; d’ouvrir (davantage) les lieux où se rencontrent les directeurs aux acteurs, projets et outils de PSE; de créer/renforcer une dynamique de réseau entre les acteurs d’une région (directeurs, équipes PSE, promoteurs de santé, travailleurs en milieu ouvert,…) préoccupés par une même problématique et/ou souhaitant s’accorder sur des pratiques cohérentes dans les domaines de la santé et de l’éducation;…
Ces journées constituent donc autant de petits pas, nous voulons qu’elles s’inscrivent dans la dynamique portée par de nombreux acteurs, programmes et services en Communauté française et rendue encore plus durablement prioritaire par le récent Décret de Promotion de la Santé à l’Ecole.

Concrètement

Trois journées sont prévues dans trois villes en 2002-2003. Elles visent les chefs d’établissement de tous types et réseaux de l’enseignement secondaire. Ceux-ci recevront une invitation officielle dans le courant du mois d’octobre. Les trois dates sont:
1. Le mercredi 13/11/2002 à Namur.
2. Le mercredi 19/02/2003 à Bruxelles.
3. Le mercredi 21/05/2003 à Liège.
La synthèse des journées, de même que le document relatif à l’enquête menée auprès des directeurs et portant sur leurs ‘priorités santé’ seront diffusés auprès des acteurs de promotion de la santé en milieu scolaire et serviront de base à la construction des pistes de suivi.
Emmanuelle Caspers , Service Education pour la santé, Croix-Rouge de Belgique
Pour tout renseignement complémentaire, vous pouvez vous adresser à Emmanuelle Caspers, Service Education pour la santé, Croix-Rouge de Belgique. Tél. 02-349 55 18. Courriel: emmanuelle.caspers@redcross-fr.be.