Mars 2025 Par Clotilde de GASTINES Initiatives

Après plusieurs mois d’interruption, les activités de l’ASBL Femmes et Santé (FESA) redémarrent avec le soutien du GAMS Belgique. La nouvelle équipe annonce déjà un premier rendez-vous le 28 mai pour célébrer la Journée internationale d’action pour la santé des femmes et poursuit la structuration du service support genre.

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Constituée en octobre, la nouvelle équipe Femmes et Santé (FESA) conserve et valorise l’ADN de l’association qui va fêter ses 20 ans. L’asbl féministe de promotion de la santé a pour missions de réduire les inégalités de santé et les violences faites aux femmes, de soutenir une analyse de genre en santé pour des équipes et institutions, des projets et la recherche. 

Fabienne Richard, coordinatrice ad interim est par ailleurs directrice du GAMS, Marwa Mohamed El Rufai est chargée de mission pour la région wallonne, Julia De Clerck et Léa Rollin sont chargées de mission pour la région bruxelloise. 

Unir ses forces et ses réflexions 

Le 20 février dernier avait lieu le (re)lancement officiel du Réseau bruxellois Femmes et Santé : pour favoriser les liens entre les différents acteur.rices du secteur. Il a réuni une vingtaine de participant.es au cours d’un workshop d’échange de pratiques.  

Après le redémarrage du réseau bruxellois, FESA organisera également des événements communs avec le réseau Wallon pour la santé des femmes. Celui-ci a continué de fonctionner malgré la mise en suspens des activités de Femmes et Santé sur Bruxelles. 

En région bruxelloise, FESA compte aussi relancer les ateliers autour de l’auto-santé et les ouvrir aux publics minorisés. « Ces ateliers d’auto-santé n’avaient plus lieu depuis deux ans, car l’équipe précédente avait mis le focus sur la diffusion des deux référentiels d’auto-santé et la formation à leur utilisation, explique Fabienne Richard, coordinatrice. En tant que nouvelle équipe, nous souhaitons refaire du terrain et rencontrer notre public cible, car rien ne remplace la pratique, et celle-ci nourrit le plaidoyer ». 

L’auto-santé est parfois vue comme une activité réservée aux personnes privilégiées qui ont le temps et l’argent de penser à leur santé. L’équipe souhaite renforcer la vocation intersectionnelle de l’asbl afin que « les principes et les pratiques d’auto-santé soient accessibles autant aux femmes migrantes, qu’à celles porteuses de handicap, aux minorités de genre, aux publics marginalisés (prison, sans abri, santé mentale) », précise Julia De Clerck. 

L’Asbl a également réédité Que se passe-t-il dans nos culottes ?, un carnet d’activité réalisé en partenariat avec la Fédération pluraliste des centres de planning familial (FPCPF) pour les enfants à partir de 9 ans qui se posent des questions sur les règles, leur corps, la puberté et les changements. 

Structuration du service Support Genre  

Le service support Genre lance ses activités en partenariat avec l’Observatoire du sida et des sexualités de l’ULB. Destiné aux professionnel·les de la santé et du social, ce « service de support en matière d’approche genrée des inégalités de santé » a pour objectif de soutenir les acteur-ices œuvrant à améliorer la qualité de vie de l’ensemble de la population bruxelloise susceptible de subir des inégalités de genre en matière de santé.

L’OSS et FESA se partagent la tâche : 

  • FESA poursuivra sa mission de mise en réseau et proposera un service gratuit d’accompagnement et de soutien opérationnels des acteurs·rices de la promotion de la santé. 
  • L’OSS assurera la récolte de données, de documentation, d’enquête et de recherche.  

Après l’attribution du service support en mars 2024, l’OSS a missionné la chercheuse Aurélie Aromatario pour qu’elle réalise un état des lieux des savoirs. La chercheuse a réalisé une revue de littérature scientifique, et identifié les acteur-rices du genre et de la promotion de la santé en région bruxelloise. « Ce travail a permis de réaliser un état des lieux des savoirs et de la connaissance en socio-anthropologie de la santé, ce qui nous donne un bon aperçu des intersections ». Dans les prochains mois, l’OSS publiera un document d’une cinquantaine de pages à destination principale des acteur-ices de la promotion de la santé avec une approche théorique sur la question de la santé et du genre. 

Le service support en genre veut promouvoir une santé inclusive en améliorant la compréhension des inégalités de santé liées au genre et en répondant aux besoins spécifiques des acteurs de santé sur le terrain. 

« Avoir une approche basée sur le genre, c’est avoir une approche critique de la santé, cela oblige à changer de lunettes, pour ne pas se contenter d’aborder la santé des femmes par exemple sous l’angle de leur santé reproductive, comme c’est souvent le cas » explique Aurélie Aromatario. Des pans entiers de la santé des femmes sont encore « invisibilisés » dit-elle. Ainsi, l’endométriose, une affection qui touche une femme sur dix, met en moyenne sept ans à être diagnostiquée. Et ses causes sont toujours inconnues. Comme la gynécologie a longtemps eu pour mission centrale de se concentrer sur la fonction reproductive des femmes, l’endométriose ou le vaginisme sortaient du prisme. 

La chercheuse cite plusieurs affections pour lesquelles pèse le poids du genre. 

  • L’alcoolisme : chez les hommes, l’alcool est souvent considéré comme une affection en soi, alors qu’elle peut procéder d’un état dépressif. Chez les femmes, un médecin va plus rapidement interroger sur la dépression, ce qui va avoir pour conséquence une surreprésentation des femmes dans la catégorie Santé mentale et une sous-représentation dans les catégories liées aux assuétudes. 
  • L’ostéoporose : celle-ci est trop souvent sous-diagnostiquée chez les hommes. Elle est en générale découverte trop tardivement quand la maladie est très avancée, entraînant des risques de mortalité plus élevés. 
  • La vaccination contre le papillomavirus (HPV) : la première campagne de vaccination en 2010 concernait seulement les femmes, car le virus peut provoquer des lésions qui évoluent en cancer au niveau du col de l’utérus.  C’est typique d’une affection pensée uniquement comme un risque au féminin, et un gros raté en termes de santé publique, car les hommes non vaccinés sont potentiellement porteurs et peuvent transmettre le virus. Certaines des lésions pré-cancéreuses générées par le HPV (cavité buccale, anus…) peuvent en outre concerner les hommes également. Il a fallu plusieurs réajustements des campagnes de vaccination au fil des années pour dépasser ces impensés.  

Le service support genre permettra ainsi d’initier une réflexion au sein des équipes et institutions désireuses de faire évoluer leurs pratiques. Une étude exploratoire dans le domaine de la promotion de la santé sera ainsi mise en place dans les années à venir par Charlotte Pezeril qui reprend ce dossier auprès de l’OSS. 

Le 28 mai prochain, FESA fête ses 20 ans et célèbre la Journée internationale d’action pour la santé des femmes avec des plénières, une conférence gesticulée, des ateliers d’auto-santé, et une projection de film. 

Références :