Juin 2018 Par Pascale DUPUIS Réflexions

Province - communes, partenaires pour la santé

La Province de Namur accorde un soin particulier à la mise en œuvre de partenariats avec les communes de son territoire. L’été dernier, elle a lancé à ses 38 communes un troisième appel à construire des projets communs, au bénéfice de leurs habitants. Sur les 205 projets choisis par les communes, 58 concernent la santé ou le bien-être.Entre 2017 et 2019 se déroule la troisième phase des partenariats Province-communes en province de Namur. Pour cette édition, la Province de Namur propose aux 38 communes namuroises de faire leur choix au sein d’un catalogue de 47 fiches correspondant chacune à une de ses expertises, un de ses métiers spécifiques, dans ses six domaines de compétences que sont l’action sociale et la santé, la culture, l’économie, l’enseignement, l’environnement et le tourisme.

205 projets dans 38 communes

Au total, la Province a réservé 2,4 millions d’euros pour les partenariats Province-communes 2017-2019. Concrètement, chaque commune dispose d’une enveloppe financière – une sorte de « droit de tirage » – calculée sur base de son nombre d’habitants, de sa superficie et de son indice de cohésion sociale. Et à chaque projet correspond une valeur budgétaire, soit prédéterminée, soit à préciser sur base des spécificités et de l’ampleur du projet envisagé. La Commune sélectionne les projets qui l’intéressent et répartit son enveloppe entre ceux-ci. Si aucune des thématiques proposées ne correspond aux besoins locaux, il existe aussi la possibilité, à certaines conditions, de déposer des projets dits «hors catalogue». L’offre a séduit, puisque la Province a enregistré, pour cette troisième phase de partenariats, pas moins de 205 projets ! Focus sur quelques-uns de ceux-ci, axés en particulier sur la santé et le bien-être.

Un répertoire d’outils « 0-5-30 » à Hastière

Pour la Cellule Promotion Santé, une équipe de la Direction de la Santé publique, travailler en partenariat est une évidence. Les projets qui s’élaborent avec les communes s’inscrivent naturellement dans ce fonctionnement. C’est la deuxième fois que la Commune d’Hastière choisit le thème «0-5-30», une combinaison qui résume trois comportements de santé: 0 tabac, 5 portions de fruit et de légume et 30 minutes d’activité physique par jour. Au cours de la phase II des partenariats Province-communes (2014-2016), les employées de l’Accueil Temps Libre (ATL) de la commune ont suivi un module de formation pour développer leurs connaissances dans ce domaine et leur permettre de construire des activités de promotion de la santé auprès des enfants dont elles ont la chargeNote bas de page. A l’issue du module, les accueillantes ont créé ensemble des outils et des animations leur permettant de mettre le concept en application. Deux journées d’échanges ont alors été organisées et co-construites par les accueillantes, leur coordinatrice et la Province de Namur accompagnée de son partenaire, le Centre local de Promotion de la Santé en province de Namur pour partager les outils ou les animations développés. Carine Crucifix est en charge de ce projet pour la Cellule Promotion Santé provinciale: «Pour cette nouvelle phase de partenariats, l’objectif est de mettre en valeur les idées des accueillantes et de créer un répertoire reprenant de manière détaillée les animations et outils qu’elles ont-elles-mêmes conçus, afin de faciliter l’échange des pratiques et de mutualiser les ressources. Conçu sous une forme évolutive, ce répertoire pourra s’enrichir au fil du temps ». Les employées de l’Accueil Temps Libre d’Hastière souhaitent qu’il puisse servir aux enseignants de la commune et aux accueillantes des autres communes. La fiche projet 0-5-30 a aussi été sélectionnée par les communes d’Havelange et de La Bruyère, qui la déclineront en fonction de leurs besoins propres, avec le public qu’elles identifieront comme prioritaire.

En route vers le label Ecole 21

ImageLe dispositif Ecole 21 est né en 2008 dans le cadre du projet franco-belge Interreg IV Générations en santé, auquel ont collaboré plusieurs Provinces wallonnesNote bas de page. Depuis, la Cellule Promotion Santé accompagne des écoles vers l’obtention de ce qui est beaucoup plus qu’un label. En choisissant la fiche projet «Ecole 21», les communes proposent à leurs écoles d’entrer dans une démarche alliant promotion de la santé et développement durable. Nadège Fivet, de la Cellule Promotion Santé, coordonne ce vaste travail, qui vise à faciliter l’acquisition et le développement de comportements favorables à l’éducation, à la santé et à l’environnement : «L’adhésion des écoles au projet se fait sur base volontaire. A Gesves, Floreffe et La Bruyère, les 12 établissements auxquels nous avons présenté le concept ont choisi de s’engager. Ils acquièrent le label en signant la Charte Ecole 21 et rejoignent ainsi le réseau européen des Ecoles 21». Actuellement, les comités de pilotage se mettent en place dans chaque école. Les prochaines étapes sont la réalisation de diagnostics des besoins par école, l’identification des priorités et l’élaboration de plans d’actions. En outre, des outils pédagogiques permettant d’aborder différentes thématiques (développement durable, santé, climat scolaire…) sont rassemblés dans une malle mise à la disposition de chaque Commune, en collaboration avec le Centre de Ressources Documentaires provincial qui propose aussi une formation à l’utilisation de ces outils. Enfin, dans le cadre de ce partenariat, chaque école bénéficie d’un petit subside pour soutenir la concrétisation d’un projet au choix.

Prévention des risques à Havelange

A côté de la Cellule Promotion Santé, un autre service provincial possède une expertise dans le domaine de la promotion de la santé, et plus spécifiquement dans la prévention du SIDA, des infections sexuellement transmissibles, des hépatites et dans la réduction des risques liés à l’usage de produits psychotropes. Le Service de Santé Affective, Sexuelle et Réduction des Risques (SASER) a également une pratique de travail en réseau profondément ancrée. Il élabore des projets de proximité avec des acteurs de terrain, mettant en action des personnes issues des publics-cibles en vue de les rendre actrices de leur santé. La Commune d’Havelange a décidé de prendre au sérieux la consommation d’alcool chez les jeunes et les risques d’accidents de la route qui y sont liés. Elle a sélectionné la fiche «Contribuer à la réduction des risques lors d’événements festifs par la formation de pair locaux». Jaqueline Collin du SASER travaille en très étroite concertation avec les «Jeunesses» locales et le Patro, en vue de sensibiliser les jeunes à une consommation responsable. Le projet comportera des actions de réduction des risques liés à la consommation de psychotropes, principalement l’alcool, et des nuisances sonores dans les fêtes. Ces actions seront déterminées par les jeunes eux-mêmes, qui ont déjà identifié des moments-clés: les grands feux, les kermesses, les soirées et week-ends du Patro.

C’est quoi le bonheur à Philippeville ?

Ambitieux projet, que celui dans lequel la Commune de Philippeville et la Province de Namur se sont lancées ensemble ! Au départ, le choix de la thématique de «santé dans toutes les politiques» (health in all policies) par le Collège communal de Philippeville est en lien avec la Déclaration de politique communale «Philippeville, Commune où il fait bon vivre !». Pour opérationnaliser cette intention, la Commune souhaite mettre en place un outil pérenne d’aide à la prise de décisions et à la priorisation d’actions. Le CLPS en province de Namur est aussi partie prenante. En mobilisant citoyens, agents communaux et décideurs autour d’une réflexion sur le bien-être à Philippeville, le projet vise à dégager et à hiérarchiser – par une enquête qualitative participative – les principales composantes qui déterminent le bien-être collectif des habitants de Philippeville. Il a aussi pour objectif de sensibiliser le Collège communal à l’impact des politiques sur la santé et le bien-être collectif de la population et de doter l’Administration communale d’un outil qui lui permettra d’estimer, de manière prospective, l’impact de décisions prises par le collège sur le bien-être de la population.En donnant un rôle aux citoyens, aux professionnels actifs sur le territoire et aux employés des services communaux dans la prise de décision, la démarche participative permet à chacun de devenir acteur de l’organisation de la société et du processus de changement. Le projet a officiellement été lancé le 23 avril, lors d’une soirée au cours de laquelle a été le nouveau documentaire «C’est quoi le bonheur pour vous?» de Julien PeronNote bas de page.

Santé mentale: soutenir les professionnels de première ligne et augmenter l’offre de soins

Dans le catalogue proposé aux communes, deux offres de partenariat étaient proposées par les Services de Santé mentale de la Direction de la Santé publique : l’une offre un soutien aux professionnels de première ligne et l’autre permet un accès de proximité aux soins de santé mentale pour la population. «La première a été choisie par trois communes, dont les équipes du CPAS bénéficieront prochainement de séances de supervision élaborées sur mesure en fonction des besoins et animées par des spécialistes de la santé mentale. La seconde, sélectionnée par cinq communes, se décline de manière très différente selon les réalités locales. Dans chaque cas, le premier travail est de bien comprendre les besoins locaux et d’élaborer ensemble un projet qui contribue à y répondre», explique Colette Nigot, responsable du Département de Santé mentale. A Bièvre, il s’agit de poursuivre le partenariat initié dans la phase II, en offrant des ateliers collectifs pour les parents et les adolescents, ainsi que des plages de permanence d’une assistante sociale. A Eghezée, un psychologue sera mis à disposition du CPAS un après-midi par semaine pour apporter à la population et particulièrement, aux bénéficiaires du CPAS et aux personnes éprouvant des difficultés de mobilité, une offre de proximité en matière de soins psychologiques. A Philippeville, le projet vise la prévention des violences conjugales et familiales, partant du constat d’un aggravement de cette problématique et d’un déficit de prise en charge par les structures existantes. Il se concrétise par la mise en place et l’animation d’une plateforme de concertation locale sur les violences intrafamiliales et conjugales, par des permanences de l’asbl « Ça vaut pas le coup » du Réseau Solidaris spécialisée dans l’accompagnement des personnes victimes de violences conjugales et intrafamiliales et par des groupes de paroles.

Et encore…

Les thématiques de partenariat sont multiples. Sans entrer dans les détails :

  • Trois communes ont choisi de faire appel aux services du SAMI (service d’analyse des milieux intérieurs) pour mener une campagne d’information sur les risques du radon sur la santé et distribuer des détecteurs à la populationNote bas de page ;

  • Quatre communes ont inscrit des employés à une formation d’animateurs socio-sportifs des espaces publics ;

  • Avec les conseils et l’accompagnement du directeur du Domaine provincial de Chevetogne, quatre communes créeront une nouvelle plaine de jeux, vue comme espace de socialisation et de loisir actif ;

  • Dix communes se sont engagées ou ont décidé de poursuivre le processus « Ville amie des aînés »Note bas de page ;

  • Cinq communes ont demandé la création ou le développement sur leur territoire d’une ou plusieurs haltes-accueil du Bébé Bus. Il s’agit d’une formule itinérante d’accueil des tout-petits, adaptée aux publics fragilisés, qui offre aux petits une opportunité de socialisation et de stimulation, tandis que leurs parents bénéficient d’un accompagnement et d’un soutien à la parentalité ;

  • Face au problème de la mobilité en milieu rural qui a de réels impacts sur la santé, l’emploi, la formation ou encore l’accès à la culture, six communes ont décidé de prioriser la mobilité inclusive et solidaire pour leurs publics fragiles et dépendants, au travers d’un partenariat à trois : la commune (et/ou son CPAS), la Province et une centrale de mobilité ;

  • Trois communes ont choisi d’acquérir des vélos et/ou d’organiser des formations à la conduite cycliste.

Au plus près des besoins locaux

Si les thématiques et les objectifs généraux sont prédéfinis dans le catalogue, chaque projet concret cherche à rencontrer un réel besoin local identifié par la commune. Un comité de pilotage propre au projet rassemble des représentants de la Commune, de la Province et bien souvent d’organismes partenaires comme une association locale ou, pour les projets de santé, le CLPS… Ce comité détermine, sur base d’une analyse des besoins, les objectifs spécifiques du projet, le contexte, les modalités de ce qui sera mis en place, en suivant une méthode commune de gestion de projet. Et une équipe mène le projet au quotidien sur le terrain. Même si, à côté des projets sur mesure, certains sont davantage «clé sur porte», dans tous les cas, on est loin de la politique de «simple» subsidiation d’autrefois. Pour les Communes, cela requiert parfois d’adapter leurs attentes et leur vision du partenaire provincial. Un changement de culture qui paraît parfois inconfortable mais dont la plus-value est rapidement visible.


Selon la définition de l’ONE : « L’accueil extrascolaire temps libre : Ces lieux d’accueil fonctionnent avant ou après l’école, le mercredi après-midi et parfois durant le week-end. Ils sont situés dans les écoles ou en dehors. Les plus connus sont les ‘garderies scolaires’, et les associations qui organisent des animations spécifiques. » (http://www.one.be/parents/accueil-temps-libre/)

Lire à ce sujet BROUSSOULOUX S., LORENZO P., TINTINGER V., Évaluation du dispositif École 21: des pistes pour sa pérennisation, Education Santé, n°308, février 2015 (https://educationsante.be/article/evaluation-du-dispositif-ecole-21-des-pistes-pour-sa-perennisation/)

Le radon est un gaz radioactif qui peut s’infiltrer dans les bâtiments par le sous-sol. Chaque année, le radon cause environ 480 cancers du poumon en Belgique. Plus d’info sur le radon et sa prévention : www.actionradon.be

Voir à ce sujet l’article : PROVINCE DE NAMUR, Une province et ses communes, amies des aînés, Education Santé n°341, février 2018 (https://educationsante.be/article/une-province-et-ses-communes-amies-des-aines/)