Mai 2004 Par Christine DELIENS et al. Initiatives

Evaluation d’un projet autour de l’alimentation des écoliers

L’opération «A table les cartables» est née à la suite du Forum «Alimentation à l’école et tout au long de la journée» du 2 décembre 2000 à Gembloux (1), réunissant les différentes parties concernées: école, santé, enfance, éducation, restauration scolaire et société civile, à l’initiative de Nicole Maréchal, Ministre de la Santé et de Jean-Marc Nollet, Ministre de l’Enfance. Ce forum, préparé en consultation avec des intervenants actifs en matière d’alimentation des enfants en âge scolaire, a renouvelé l’offensive pour améliorer l’alimentation à l’école maternelle et primaire en l’abordant, cette fois, sous l’angle de l’offre alimentaire.
L’opération «A table les cartables» et les outils qui l’accompagnent ont été développés pour mobiliser davantage les acteurs éducatifs et de santé et poursuivre ainsi la dynamique du forum.
La Coordination Education et Santé (Cordes asbl) a reçu un double mandat dans le cadre de cette opération: d’une part, la réalisation, l’édition et la coordination de la diffusion d’outils (brochure et affiche reproduisant la charte «A l’école d’une alimentation saine») et d’autre part, l’organisation et la coordination de visites (2) de personnes ressources de son équipe pour soutenir les écoles adhérentes dans leur démarche de construction d’un plan d’action.
En janvier 2004, à la demande des deux cabinets ministériels, elle a évalué la couverture de l’opération en termes d’écoles touchées, de partenaires impliqués et d’outils diffusés. Au niveau qualitatif, la visite réalisée dans la majorité des écoles adhérentes (79 sur 96) a permis de relever des indicateurs de mobilisation sur des thématiques liées à la charte.
Les nombreux contacts et rencontres avec les acteurs et partenaires des écoles ont permis de relever quelques éléments facilitateurs et quelques obstacles dans l’adhésion des écoles et du développement de leur plan d’action dont il sera question plus loin.
Pour rappel, la brochure très largement diffusée pendant toute la durée de l’opération entre 2001 et 2004 et intitulée elle aussi «A l’école d’une alimentation saine» (nous l’appelons brochure ‘charte’ pour faire plus court) suggérait une série d’étapes marquant la dynamique participative du projet: le point de départ étant d’adhérer après avoir débattu de la charte et des priorités d’action, il était proposé ensuite aux écoles:

  • de faire le point de la situation de l’école à propos de la thématique choisie;
  • de discuter et d’élaborer un plan d’action avec les élèves;
  • de profiter, si nécessaire, de la visite de la personne ressource de la Coordination;
  • de solliciter si besoin l’appui technique gratuit d’une diététicienne (asbl Euralisa) ou méthodologique (CLPS, acteurs provinciaux et locaux…);
  • de développer enfin des actions en s’efforçant de faire des liens entre elles.

L’adhésion des écoles se concrétisait par l’envoi à la Cellule «A table les cartables», mise en place au niveau des deux cabinets, d’un bulletin d’adhésion signé par les membres du Conseil de participation et faisant mention de la thématique choisie, des classes participantes et de la personne de référence pour les contacts ultérieurs. Les Ministres y apposaient leur signature et le renvoyaient ensuite aux écoles avec un courrier encourageant leur initiative.
L’information concernant les écoles adhérentes était ensuite transmise à la Coordination Education et Santé chargée du suivi de l’opération avec l’organisation d’une visite aux écoles adhérentes. Des délais de transmission parfois longs ont creusé les écarts entre la date d’adhésion et la date de la visite: ils ont sans doute freiné quelque peu les écoles dans la concrétisation de leur adhésion ou l’élaboration de leur plan d’action.
Des outils et des ressources locales étaient néanmoins présentés dans la brochure «charte», valorisant ce qui existe déjà en Communauté française. De même, le site atablecartable.be géré par la Cellule ministérielle a mis la liste des écoles adhérentes et leurs coordonnées à la disposition de tout un chacun, intervenant ou partenaire potentiel, leur permettant ainsi de faire valoir leurs outils ou de prendre contact directement avec les écoles adhérentes.
L’opération était destinée à 1800 écoles fondamentales, soit 2 781 implantations, ce qui représente une population totale de près de 465.000 élèves.
Nous détaillons maintenant les dimensions mesurées par l’évaluation, à savoir la diffusion, l’adhésion des écoles, les mobilisations obtenues, les actions, le niveau d’implication des acteurs (essentiel dans une démarche de promotion de la santé digne de ce nom), la cohérence du projet, pour finir par trois recommandations.

La diffusion

La promotion de l’opération s’est déroulée par diverses voies (presse, courriers, sensibilisations, stands…). Les outils produits (brochure et affiche «charte», cahier technique «Pour une alimentation saine à l’école fondamentale», feuillet «parents» ) ont été largement diffusés dans le milieu scolaire, éducatif, dans les secteurs concernés et auprès des acteurs et décideurs locaux. Cette stratégie de diffusion visait à susciter une large concertation autour des principes contenus dans la charte et à inviter les écoles fondamentales et leurs partenaires à les mettre en pratique.

Diffusion systématique des outils de l’opération «A table les cartables»

Ecoles : durant les 3 années scolaires de l’opération (2001 à 2004), 2781 implantations d’écoles fondamentales des différents réseaux d’enseignement ont été sensibilisées à l’opération de manière systématique, que ce soit par voie de circulaires ministérielles, par envoi d’outils de l’opération, ou encore par des documents de promotion de la santé à l’école diffusant les initiatives en cours en matière d’alimentation subsidiées par la Communauté française, notamment les «Midis à l’école».
Acteurs éducatifs : les documents ont été transmis systématiquement à l’attention des membres des Conseils de participation via les Directions des écoles fondamentales car c’est au sein de cette structure participative mise en place officiellement par décret en 1997, que devait être discutée la décision de l’école d’adhérer aux principes de la charte et de le signaler aux Cabinets.
Acteurs santé et partenaires potentiels : susceptibles de jouer un rôle de diffusion de cette opération et de relais auprès des écoles et des membres des Conseils de participation, ces acteurs «santé» et d’autres secteurs ont également reçu les outils de l’opération afin de les sensibiliser aux objectifs ministériels communiqués aux écoles et les inviter à jouer un rôle dans cette démarche de promotion de la santé à l’école. Un courrier spécifique de la Ministre Nicole Maréchal, annexé au feuillet «parents», a renforcé cette information auprès des acteurs «santé». D’autres initiatives locales ou communautaires ont contribué à la diffusion de cette opération.

Sensibilisation à l’opération

Un large effort de communication sur l’opération (démarche proposée, présentation des outils, processus d’adhésion, ressources locales…) a été réalisé par la Coordination Education et Santé.
Pour les mobilisations locales, 5 réunions de coordination ont eu lieu avec l’ensemble des CLPS, permettant de faire le point, d’examiner ensemble comment diffuser l’opération et mobiliser davantage les écoles et leurs partenaires potentiels.
De nombreux acteurs et relais locaux ont été sensibilisés (n = 788) directement lors d’événements divers (stands, formations, colloques). Des journées de sensibilisation ont été organisées avec les CLPS pour faire connaître les outils et la dynamique de l’opération et susciter les liens de cohérence avec les autres programmes en cours. Des présentations de l’opération ont été réalisées dans des revues spécialisées de différents secteurs ou encore en direct, que ce soit dans un cadre institutionnel (Fédération d’associations de parents, diététiciens…), dans un cadre de formation (Hautes Ecoles, Euralisa, Dispositif d’expression collective des élèves, UCL, Cerise, etc.) ou encore dans un cadre communautaire ( 1ère Conférence liégeoise en promotion santé).

Diffusion internationale

Une fiche «Trésors en promotion de la santé» a été réalisée pour le REFIPS (Réseau international de promotion de la santé ), qui présente la dynamique de l’opération, ses atouts et ses défis.
Au niveau européen, l’opération et ses outils ont été brièvement présentés en réunion du groupe «Nutrition en milieu scolaire » du Conseil de l’Europe en mai 2002.
Avec le Conseil de l’Europe, ce groupe a organisé à Strasbourg en novembre 2003 et en partenariat avec l’OMS-Europe et le Réseau Européen des Ecoles en Santé, un colloque sur ce thème réunissant près de 300 représentants de 45 pays. L’asbl Cordes y a participé activement en représentation de la Communauté française. Un point d’orgue lors de ce colloque fut à notre avis la présentation par deux représentants de l’association de parents de l’école «Clair Vivre» à Evere (Bruxelles), d’un brillant exposé en plénière illustrant leur démarche et stratégies pour mobiliser l’école. Après de nombreuses concertations, le groupe «Santé et environnement» de cette école a réalisé une enquête auprès des parents et des enseignants. Elle a mobilisé des partenaires, interpellé les décideurs et acteurs concernés en se revendiquant de l’opération «A table les cartables» sans toutefois concrétiser officiellement la procédure d’adhésion.

Adhésion à la charte «A l’école d’une alimentation saine»

96 bulletins d’adhésion ont été renvoyés à la Cellule «A table les cartables» des deux Cabinets concernés. Ce nombre couvre en fait 120 implantations de l’enseignement fondamental qui ont adhéré à la charte «A l’école d’une alimentation saine».
Au niveau des réseaux, la procédure d’adhésion a été respectée plus fortement dans les écoles du réseau officiel (76 écoles communales et 8 autres (villes, provinces, Communauté française)). Pour le réseau libre, seules 12 écoles ont renvoyé leur bulletin d’adhésion.
Quant on connaît la fréquence relative (minimum 2 fois par an) des réunions des Conseils de participation, on peut mieux apprécier l’effort de mobilisation que représente l’adhésion d’une part, et comprendre, d’autre part, les difficultés éventuelles à respecter cette procédure. Celle-ci a sans doute freiné l’adhésion d’écoles qui ne voyaient pas l’avantage d’adhérer «en monnaies sonnantes et trébuchantes» mais y voyaient plutôt des inconvénients, en termes de «contrôles de ce qui se fait ou sanctions de ce qui ne se fait pas».
Parmi les bulletins d’adhésion transmis, le nombre de signataires de la charte a pu être identifié dans 88 cas soit un total de 899 signataires. Il confirme l’importance de la mobilisation scolaire à laquelle a pu donner naissance la démarche d’adhésion à la charte et en particulier celle des membres des Conseils de participation par qui se formalisait l’adhésion de l’école.
Dans 33 écoles, plusieurs classes se sont mobilisées tandis que pour 56 écoles, il s’agit bien d’un projet d’école ou en tous les cas d’une volonté d’élargir à toutes les classes la mobilisation sur la ou les thématiques prioritaire(s).

Choix de thématiques

Dans son adhésion à la charte, le Conseil de participation précisait le thème prioritaire qui ferait l’objet de son plan d’action avec les classes impliquées. Ce choix de thématique(s) s’est fait soit pour valoriser des actions mobilisant déjà l’école, soit pour lancer un nouveau projet ou encore il est le résultat de négociations au sein du Conseil de participation, entre les représentants des différents groupes, parents, enseignants, pouvoir organisateur. Dans certains cas, la priorité a été définie par les pouvoirs organisateurs pour l’ensemble de leurs écoles. Ce sont souvent alors des écoles «désignées volontaires» qui ont renvoyé leur bulletin d’adhésion, une situation de promotion de la santé peu favorable à la mobilisation des acteurs!

Tableau 1 – Thématiques prioritaires (plusieurs choix possibles)

Sujets

Nombre d’écoles (96) %
Equilibre alimentaire: repas chauds, pique-niques, collations et boissons 63 66
Découverte des saveurs et des goûts 38 40
Respect de l’hygiène 35 36
Lieu et cadre des repas 18 19
Développement durable et choix de consommation 13 14
Restauration de qualité à coûts maîtrisés 11 11
Publicité, marketing et vente 7 7
Autre 6 9
Non précisé 5 5

Le tableau ci-dessus n’indique sans doute pas des besoins réels des élèves et des écoles mais il traduit cependant des priorités aux yeux des acteurs scolaires en matière d’alimentation scolaire. La majorité d’entre eux a pointé l’équilibre alimentaire et a abordé dans son plan d’action un moment de repas en particulier (petit déjeuner, collation, midi, goûter…).
La découverte des goûts et des saveurs permet d’explorer l’aspect sensoriel des repas et les habitudes alimentaires des enfants. Dans près d’une école sur 3, le respect de l’hygiène est prioritaire: hygiène des mains des élèves ou encore hygiène dans la préparation et la conservation des repas. Le lieu et le cadre des repas est pointé comme priorité dans 1 école sur 4. Ce thème englobe des aspects «aménagement» des lieux de repas (réfectoire, classes, salle polyvalente) – comme par exemple des sets de table ou la disposition et le type de mobilier – aussi bien que les règles de vie présidant aux moments de repas.
La diversité des activités réalisées – ou en projet – a été relevée lors de la visite de la personne ressource. Six écoles ont précisé d’autres thématiques relatives notamment à la production et distribution des aliments.
Comme nous l’avons indiqué plus haut, le choix de thématiques fait rarement l’objet d’une analyse de la situation à moins que l’adhésion fasse suite à des projets déjà en cours ou à une concertation avec les centres de santé scolaire.
Le nouveau rôle des PSE était – il est vrai- encore peu connu ou mis en avant dans la majorité des écoles: le partenariat pour l’élaboration de plans d’action avec le PSE, le PMS et le CLPS n’était pas chose acquise au départ de l’adhésion de l’école et s’est vu sans doute développé par la suite.

Mobilisations

Conséquence de la diffusion décrite précédemment, de nombreux contacts avec la Coordination Education et Santé ont eu lieu suite à la promotion de l’opération, que ce soit de la part des écoles, des institutions, des communes, des acteurs locaux et des partenaires potentiels «santé», «éducatifs», restauration, alimentation… Ces démarches actives constituent un indicateur intéressant d’impact car ils reflètent la dynamique engendrée.
Depuis le lancement de l’opération «A table les cartables», le 02/11/01, 380 écoles ont contacté notre asbl Cordes. Parmi elles, 221 écoles prennent contact pour la première fois et 159 écoles étaient des «anciens» contacts du programme «Midis à l’école», qui couvre à la fois la dimension «repas» et la dimension «récréation»: les échanges donnaient alors l’occasion de valoriser les outils, la démarche et les liens pour susciter leur adhésion.
Près de la moitié des contacts avec les «nouvelles écoles» l’ont été par voie téléphonique. Les échanges en direct (37 % de l’ensemble des contacts) à l’occasion de sensibilisations, de stands tenus annuellement au Salon de l’Education de Namur, ou d’événements, représentent à chaque fois l’occasion de soutenir les écoles «nouveaux contacts» tout comme les acteurs mobilisés. Ils permettent aussi de saisir les réalités de terrain et le défi que constitue un lancement de projet dans l’école, que l’on soit enseignant, parent, directeur, surveillant, infirmière PSE ou PMS, cuisinier(e) ou intervenant éducatif ou «santé» du tissu associatif.
Par ailleurs, de nombreux contacts ont été établis pour la première fois par des personnes et des institutions suite à la promotion de l’opération. Un inventaire des nouveaux contacts après le démarrage de l’opération indique que sur 581 contacts-personnes, 226 concernaient «A table les cartables».

Tableau 2 – Type de contacts-personnes

Origine

Nombre de personnes
PSE-PMS-IMS 56
Intervenants en promotion de la santé 40
Acteurs scolaires hors fichier «écoles» 32
Pouvoirs organisateurs et communes hors «fichier écoles» 29
Enseignants et étudiants du supérieur 21
Parents, membres Associations de parents et Conseils de participation 16
Restaurateurs 9
Autres 23
Total 226

La mobilisation des équipes PSE et PMS représente la majorité de ces contacts (56/226) Les nouvelles missions des PSE expliquent sans doute en partie ce phénomène. Quant au nombre important de nouvelles communes et pouvoirs organisateurs ayant pris contact avec la Coordination, il reflète sans doute aussi la dynamique suscitée par le réseau des mandataires pour des communes en santé.
Les parents restent relativement peu nombreux dans les contacts à propos de la charte et de l’opération. Il faut savoir cependant que souvent les premiers contacts ont pour objet des aspects plus généraux de la promotion de la santé et n’apparaissent donc pas dans le tableau spécifique à la mobilisation «A table les cartables».

Tableau 3 – mobilisation locale

Ecoles adhérentes par zone de CLPS

Nombre
Mons 23
Bruxelles 17
Namur 15
Liège 11
Charleroi 10
Huy – Waremme 5
Luxembourg 5
Hainaut Occidental 4
Brabant wallon 4
Verviers 2
Total 96

Les chiffres ci-dessus indiquent bien des procédures d’adhésion abouties mais ne reflètent pas nécessairement la mobilisation locale. En effet, comme l’ont souligné les CLPS lors des réunions de concertation, la procédure d’adhésion a pu sembler lourde et trop institutionnelle pour certains, d’autant plus que les atouts d’une adhésion leur semblaient parfois faibles en regard des engagements auxquels l’école souscrivait.
Des écoles semblent avoir perçu les formalités à accomplir (signatures par le Conseil de participation, renvoi à la cellule «A table» des Cabinets, signatures et courriers des ministres…) comme l’entrée dans un mécanisme de type «audit», ce qui a constitué un frein à l’adhésion. Peu sans doute ont perçu son but principal de permettre le suivi de l’opération et l’organisation de la visite d’une personne-ressource de la Coordination.
La large diffusion de la brochure permettait en effet à chaque école de s’approprier la démarche comme telle sans nécessité de remplir les formalités d’adhésion. Elle a aussi permis aux différents intervenants et structures locales de se proposer comme personnes-ressources sur les thématiques proposées et d’accompagner les écoles dans leur démarche d’élaboration de plan d’action, sans nécessité de renvoi de bulletin.

Les actions: avant ou après l’adhésion?

Un des leviers pour la réalisation d’un plan d’action a sans doute été la visite de la personne ressource et le tissage de liens et de partenariat avec les acteurs et ressources locaux. Dans de nombreux cas, en effet, les écoles adhérentes semblaient attendre cette visite pour conforter leur démarche. Cette visite a permis aux acteurs présents de relever la diversité des préoccupations et l’intensité des mobilisations en cours ou pendant les dernières années sur la thématique de l’alimentation, de la consommation et de l’équilibre alimentaire.

Tableau 4 – Les actions

Nature des actions menées par les écoles

Nombre d’ écoles
Actions sur l’équilibre alimentaire ( plusieurs actions possibles par école ) 76
Collations 54
Petit déjeuner 30
Repas 6
Menu 14
Boissons 9
Actions sur le lieu, le cadre des repas dont notamment: 34
Fontaines d’eau 7
Contenu du distributeur 5
Aménagement réfectoire, cuisine 10
Actions autour de la chaîne alimentaire, concernant par exemple: 46
Le tri ou la réduction des déchets 25
Le circuit de production des aliments 15
La distribution et la commercialisation des produits 3

Pour la plupart des écoles, il semble évident que la dynamique d’action n’est pas neuve. L’alimentation est, en effet, un des sujets les plus fréquemment abordés dans tous les degrés du fondamental: ce thème permet de concrétiser de nombreuses compétences et des savoirs faisant partie intégrante du programme scolaire.
Les nombreux contacts de la Coordination dans le cadre du programme «Midis à l’école» confirment cette situation. Ce qui est plus neuf par contre – et le décret «Missions» y invite les écoles -, c’est la concertation entre acteurs et l’échange entre enseignants sur les actions en cours ou réalisées dans les classes. Cette ouverture a permis sans doute de lancer les prémisses de ce qui pourra ressembler davantage à un projet-santé d’école qu’à une suite d’actions ponctuelles.

Participation: acteurs et partenaires des écoles adhérentes

L’indicateur utilisé pour évaluer la réalité de cette mobilisation est la présence d’acteurs et de partenaires lors de la visite de la personne ressource à laquelle participaient systématiquement direction et enseignants. Dans 48 écoles (sur les 79 visitées entre mai 2002 et juin 2003), un ou plusieurs partenaire(s) participai(en)t à la réunion permettant de dégager des points de vue différents. Le nombre de participants s’élevait parfois à plus de 20 personnes. La personne ressource de Cordes asbl a animé et conduit la discussion en rappelant la démarche de l’opération et les caractéristiques d’une approche en promotion de la santé dans la mise sur pied d’un projet et d’actions favorisant la santé à l’école. D’autres visites ont été réalisées à l’initiative de CLPS ou d’acteurs locaux (province, intervenants locaux…) pour soutenir les écoles selon les priorités de chacun.
La participation de personnes extérieures à l’école, reflète sans doute des appuis qui se sont concrétisés ou renforcés par la suite dans les actions de l’école; c’est le cas sans doute pour les PSE (présents dans 25 écoles sur les 79), les PMS (23 écoles sur 79), pour les parents (présents lors de la réunion dans 16 écoles) ainsi que pour les CLPS (présents lors de la visite dans 11 écoles).
Dans 10 réunions, les responsables de la fabrication de repas (cuisinières, diététiciennes, traiteur) étaient présents. Pour certains PMS et PSE, la visite a été l’occasion d’une première rencontre de concertation en tant que partenaires pour le projet-santé de l’école dans le cadre des nouvelles missions PSE.
Quelques écoles adhérentes n’ont pas souhaité de visites de personnes ressources car leur plan d’action était en cours ou la visite était jugée superflue. Par ailleurs, une offre d’aide technique gratuite d’une diététicienne de l’asbl Euralisa a été faite à deux occasions début 2003 et en octobre 2003. Douze écoles seulement avaient répondu favorablement en juin 2003. A chaque contact avec l’école, les différentes possibilités existantes et les missions des PSE, PMS et CLPS ont été rappelées aux écoles. Chaque partenaire a pu, par ailleurs, développer des stratégies spécifiques pour appuyer les écoles adhérentes. Il leur appartient d’évaluer les répercussions de ces propositions.

Tableau 5 – Niveau d’implication des acteurs

Implication des élèves…

78
dans l’action (petit déjeuner, collation, petit magasin) 43
dans l’inventaire de besoins, l’état des lieux 21
dans des ateliers – cuisines 23
dans des animations 11
Implication pédagogique des enseignants 78
Implication des personnes en charge des repas (diététiciennes, traiteur, cuisinières, responsable) 43
Implication des parents 18

Si les élèves ont effectivement participé à la dynamique de projet, la nature de cette participation reflète encore un sérieux déficit ne permettant pas de parler véritablement de démarches participatives. Pour la période préalable à la visite, ce tableau indique que dans 21 écoles seulement sur les 79 écoles visitées (soit une école sur quatre), les élèves étaient intervenus dans la réalisation d’un état des lieux sous forme de questionnaires, débats, enquêtes…
Par contre dans 54 % des écoles, leur participation se traduisait dans des actions autour de petits déjeuners, de repas, de collations, de la tenue de petits magasins de collation, l’organisation de l’événement «repas», ou la simple consommation de petits déjeuners équilibrés.
L’implication des enseignants est importante nous l’avons déjà souligné; ils exploitent les thématiques de la charte en classe, dans des activités pédagogiques.
Ce sont donc les adultes qui ont été les principaux concepteurs des actions et les concertations au départ du Conseil de participation ont sans doute freiné quelque peu la participation des élèves dans l’évaluation des besoins. Cette démarche «adulte» est tout aussi essentielle néanmoins, étant donné leur rôle éducatif en matière d’habitudes de consommation saine et l’enjeu de construire de véritables alliances éducatives en matière de santé à l’école notamment.
Si la participation des élèves et des enseignants ainsi que des personnes en charge des repas est signalée, les parents semblent encore «les parents pauvres» de la dynamique sans doute par difficulté tant de l’école que des parents eux mêmes, de se reconnaître comme partenaires dans l’éducation des élèves – enfants à des modes de consommation et de vie saine.

Cohérence, continuité et intersectorialité

La continuité des projets de promotion de la santé est une des priorités du Programme quinquennal de promotion de la santé, du Conseil supérieur de promotion de la santé et des acteurs de terrain.
Comment cela se traduit il dans l’action de terrain? L’opération «A table les cartables» abordant la question des repas, la Coordination a établi des liens de cohérence auprès des acteurs et décideurs concernés: ainsi la farde «Promotion de la santé» diffusée à toutes les écoles et auprès des acteurs concernés, a établi des liens entre les projets «Midis à l’école» et «A table les cartables» (voir la double page couleur). 37 écoles «Midis» sur les 96 écoles adhérentes ont fait ce lien, en adhérant à la charte et en choisissant d’explorer plus spécifiquement l’une ou l’autre thématique.
A noter également que les exemples cités dans la brochure «charte» sont tous tirés des expériences menées dans les écoles mobilisées sur la question des midis dans ses aspects «alimentation», ce qui contribue à la fois à valoriser les actions entreprises auparavant et à susciter des partages d’expériences de terrain.
Les outils et le suivi de l’opération «A table les cartables» ont traduit également cette recherche de cohérence en regard des priorités éducatives et pédagogiques; la Coordination a veillé, notamment, à intégrer dans la démarche de promotion de la santé, les priorités du décret «Missions» comme la participation des acteurs éducatifs (rôle du Conseil de participation dans l’adhésion, implication des parents…) et les objectifs de citoyenneté et de développement des élèves. Un des principes de base de l’accompagnement méthodologique offert aux écoles est d’établir ces liens entre la promotion de la santé et les missions de l’enseignement.
Cette initiative ministérielle conjointe a sans nul doute renforcé les liens intersectoriel «santé – éducation – alimentation», (il est rare d’avoir une circulaire ministérielle adressée aux écoles qui soit co-signée par le Ministre ayant la santé dans ses attributions sauf en cas de compétences cumulées bien entendu !) mais il faut reconnaître que ce principe d’intersectorialité tant prôné par le secteur est sans doute – avec la participation des «publics cible» un défi des plus tenaces en promotion de la santé.
Il exige la patience des tisserands, une vision prospective et un investissement important en temps et en énergie… Le décret PSE positionnant les acteurs de santé scolaire en tant que partenaires dans l’élaboration de projets-santé dans les écoles renforcera ces liens entre éducation et santé et permettra d’établir davantage de cohérence entre les actions préventives de ces acteurs et les actions d’éducation et de promotion de la santé menées au sein de l’école.

Recommandations

Ces éléments d’évaluation portent sur l’impact de l’opération «A table les cartables» en termes de mobilisation sur la question de l’offre alimentaire dans les écoles et par les parties concernées (parents, personnes en charge des repas, élèves, enseignants, partenaires). L’ objectif premier de l’opération, à savoir «améliorer l’alimentation à l’école et tout au long de la journée» ne peut pas être évalué comme tel . L’évaluation de l’opération ne faisait pas partie du mandat attribué à la Coordination et n’a donc pas été planifiée: aucun recueil de données particulier n’a été mis en place. L’évaluation se base donc sur des données recueillies en routine par la Coordination dans le cadre de contacts et d’activités de promotion de la santé à l’école et auprès de partenaires potentiels et d’acteurs éducatifs. Ceci souligne la nécessité d’octroyer les ressources nécessaires à la planification de l’évaluation et à la coordination d’une opération d’une telle envergure et ce dès sa conception.
L’ensemble des outils de l’opération ont été conçus de manière à rendre possible l’implication des acteurs éducatifs, de santé et de la restauration scolaire sans qu’un accompagnement ne soit nécessaire. Les nombreux contacts avec la Coordination permettaient de soutenir la démarche d’appropriation en encourageant les compétences des acteurs par des interrogations plus que par des réponses et des propositions toutes faites. Cette façon de procéder s’inscrit dans le respect des principes de promotion de la santé qui visent à ce que chacun puisse être acteur de sa santé et de la santé collective. Cependant comme pour d’autres projets de promotion de la santé à l’école, la participation des élèves, des parents et des personnes concernées, mérite d’être planifiée davantage en élaborant des stratégies spécifiques pour la rendre effective surtout au niveau de la conception des actions et de l’élaboration du projet. La construction d’une démarche participative des élèves peut par exemple être préparée avec des intervenants éducatifs et les représentants des élèves.
La diversité des enjeux entre les différents acteurs et décideurs concernés complique la tâche tout en lui donnant tout son intérêt car il s’agit de définir des stratégies complémentaires et de mettre sur pied des actions et des projets visant la santé nutritionnelle des élèves. Des représentants de différents niveaux de pouvoir (ministères, villes, communes, provinces, fédérations, associations, particuliers…), de différents secteurs concernés (santé, diététique, industrie alimentaire, éducation, famille, environnement…) et des réseaux divers d’acteurs et de relais (CLPS, PSE, Fédération des associations de parents de l’enseignement officiel, Union fédérale des associations de parents de l’enseignement catholique, Changement pour l’égalité, Administrations…) se sont impliqués dans l’opération. Cette démarche intersectorielle mérite qu’on y consacre le temps nécessaire et ce, aux différents niveaux de pouvoir et d’action afin d’aboutir à la planification et à la réalisation d’actions et de changements durables.
Cristine Deliens , coordinatrice, et l’équipe de Cordes
Adresse de l’auteur: Coordination Education et Santé, rue de la Rhétorique 19, 1060 Bruxelles. Tél et fax: 02 538 23 73. Courriel: cordes@beon.be .
Nous vous présenterons aussi dans quelques mois une évaluation des acquis du programme ‘Midis à l’école’, cité plusieurs fois dans cet article.
(1) Voir à ce sujet deux articles publiés dans Education Santé: ‘L’alimentation à l’école. Un forum et une charte’ , de Maryse Van Audenhaege et Bernadette Taeymans (n° 155 de janvier 2001) et ‘A table les cartables!’ , de Maryse Van Audenhaege (n° 165, décembre 2001).
(2) Les visites d’écoles ont été réalisées par Christine Lachaussée et Danielle Dohogne, et occasionnellement par Sabine Froment, Cristine Deliens et Claire Berthet.