Février 2014 Par A. CREMERS Yves COPPIETERS Initiatives

En Région bruxelloise, certains services ambulatoires de la santé et du social bénéficient de subventions régionales. Une étude préalable à la programmation des services ambulatoires a été réalisée pour mieux appréhender l’offre existante.

Un cadastre de ces services a été élaboré afin de dégager une vision des différents secteurs et de disposer d’un cadre de concertation commun pour une future programmation.

Les résultats se basent sur un questionnaire en ligne qui abordait 3 composantes : les caractéristiques des services et leur implantation; l’analyse de l’offre sur base des activités, des stratégies et des métiers; les caractéristiques des bénéficiaires.

115 structures agréées sur 139 ont répondu dans le cadre de l’élaboration de ce cadastre, ce qui représente 82.7 % du total.

L’analyse des fonctions des services

L’objectif de cette analyse était d’identifier les aspects transversaux, communs et spécifiques des différents secteurs et services. Les stratégies mises en œuvre, dans le cadre des missions du décret, concernent d’abord le travail et l’aide individuels, même si les dimensions collectives et communautaires sont très présentes. Tous les secteurs n’ont pas de missions collectives dans le décret. Certains les développent dès lors en dehors du cadre décrétal.

Concernant l’analyse des activités, on ne peut que constater la diversité de celles-ci. Certaines activités sont reprises par la majorité des secteurs mais elles se déclinent de manière spécifique selon les secteurs, les bénéficiaires et les équipes de travail.

L’immense majorité des répondants fait état d’un travail de réseau et de l’appartenance à une fédération ou d’un lien avec un organisme de coordination. Une importante proportion de services fait état de difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de leurs activités dans le cadre du décret. Le manque de ressources financières et humaines est très largement cité.

Les activités des 115 agréments s’exercent à partir d’au moins 153 lieux d’implantation (115 sièges principaux et au moins 38 antennes au total) répartis sur le territoire bruxellois. Le cas de figure le plus fréquent et celui du siège d’activité unique (94 agréments), suivis des services avec une ‘antenne’ complémentaire (12 agréments).

La répartition sectorielle nous montre que ce sont les services actifs en matière de toxicomanie (12 sièges) et les services de santé mentale (10 sièges au moins) qui ont le plus de sièges, suivi des centres d’action sociale globale (6 sièges au moins), des maisons médicales (5 sièges), des centres de planning familial et des services d’aide à domicile avec un siège. Les agréments ‘multisièges’ sont ainsi concentrés dans quatre secteurs.

La grande majorité des services offre des stratégies d’aide/travail individuel(le), trois-quarts développent des actions collectives et la moitié s’inscrit conjointement dans des développements communautaires. De façon globale, un tiers combine approches individuelles et collectives et un autre tiers complète cela par des actions communautaires. 8% des services s’inscrivent tant dans de l’aide individuelle que communautaire.

Tous les services travaillent sur l’aide individuelle et seuls les services de médiation de dettes ne développent pas d’actions collectives, ni communautaires, ni de stratégies autres qu’individuelles. Les actions communautaires ne concernent pas non plus les centres d’accueil téléphonique, les centres de soins palliatifs et continués et les services ‘Espaces-rencontres’.

Les stratégies se basent aussi sur les partenariats et les réseaux des services, qu’ils soient formalisés ou non. 90% des services ont des partenariats dans le cadre d’un réseau (formel ou informel) ou avec des partenaires extérieurs au service. Cela se confirme pour l’ensemble des secteurs.

Cette même distribution est retrouvée pour l’appartenance des services à des fédération(s) et/ou le fait d’être en lien avec un organisme de coordination et/ou de représentation du secteur. 94% des services répondent appartenir à une de ces fédérations et 4 services (3,5%) ne répondent pas.

70% des services rencontrent des difficultés pour effectuer les activités définies dans le cadre du décret ou leurs stratégies de mise en œuvre. 20% déclarent ne pas avoir de difficultés et 10% des services ne se prononcent pas sur ce point.

L’analyse des métiers des services

Cette étape de l’analyse vise à identifier quels métiers sont mobilisés par les services afin de remplir les fonctions identifiées précédemment et les compétences utilisées dans ce cadre.

Les professionnels mobilisés sont très divers. Les tâches qui leurs sont confiées et les compétences mises en œuvre au sein des institutions varient plus ou moins fort en fonction des équipes. Ils sont pour l’essentiel issus de l’enseignement supérieur, avec des variations entre les secteurs selon les qualifications requises.

La grande majorité des services fonctionne en équipe interdisciplinaire. Les modes de fonctionnement sont variés par secteurs et les réunions d’équipes, les supervisions et intervisions, les groupes de travail, les prises en charge communes… apparaissent comme des vecteurs privilégiés de ce travail interdisciplinaire.

À la question «Quels sont les métiers mobilisés dans le cadre de vos activités en général (décret et hors décret)», ce sont les assistants sociaux, les psychiatres, psychologues, secrétaires et ‘autres’ qui sont le plus cités pour l’ensemble des répondants. Ce ne sont cependant pas les métiers qui représentent le plus d’ETP puisque ce sont clairement les aides familiales qui constituent la grande majorité des ressources humaines en regard des autres métiers.

Offre globale et différenciée

Les données ci-dessus ne sont que quelques éléments de l’analyse de l’offre globale en matière de services ambulatoires en Région bruxelloise. Certains secteurs souhaitent un élargissement des missions du décret pour pallier le besoin en ressources humaines et mieux gérer les demandes de prise en charge de situations de crise, qui augmentent de plus en plus. En effet, les évolutions de la population bruxelloise en termes de précarité financière (dettes), matérielle (logement, aide alimentaire…), sociale et mentale induisent une augmentation et des changements de la demande, ainsi qu’une difficulté des services à y faire face. Le nombre de demandes d’accompagnement social est croissant et les services sont confrontés aux limites de leurs moyens en personnel pour réaliser les accompagnements souhaités.

Les services soulignent aussi un problème de charge de travail croissante et ils sont souvent débordés par les évolutions de la population bruxelloise (vieillissement, pauvreté…) et de la politique de maintien à domicile. Les secteurs préfèrent voir optimaliser les moyens des centres existants et agréés actuellement plutôt que de favoriser l’apparition de nouveaux centres. Ils réclament du temps pour les suivis individuels et une meilleure coordination/collaboration entre acteurs. Pour plusieurs secteurs, ils montrent aussi l’importance que leurs services restent généralistes et qu’ils demeurent des lieux d’accueil pour une prise en charge ‘globale’.

Il y a donc une réflexion à proposer sur la nécessité d’une reconnaissance conceptuelle et financière des fonctions transversales des services/secteurs et d’une meilleure articulation du travail entre les secteurs dans une vision intégrée et différenciée. Cela passe entre autres par le développement de transversalité au niveau des politiques de santé et sociale afin d’être en cohérence avec les pratiques et approches de terrain.

Références

Coppieters Y, Cremers A. Cadastre des services ambulatoires agréés par la Cocof en Région bruxelloise. Rapport de recherche, Projet Cocof/École de santé publique de l’ULB, Bruxelles, septembre 2012.

Cremers A., Coppieters Y. Étude préparatoire à l’élaboration de la programmation des services ambulatoires en Région bruxelloise: rapport final. Projet Cocof / École de santé publique de l’ULB, Bruxelles, septembre 2012.

Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale, Décret du 5 mars 2009 relatif à l’offre de services ambulatoires dans les domaines de l’action sociale, de la famille et de la santé, publié au Moniteur belge le 8 mai 2009.