Avril 2005 Initiatives

Une étude de la Mutualité socialiste sur la consommation de sept groupes de médicaments parmi ses affiliés et selon les catégories d’âge fait apparaître un essor non négligeable des profils de santé “problématiques” à partir de la cinquantaine. Une donnée à intégrer au débat sur le devenir des réglementations concernant l’âge de la pension.
Depuis bientôt douze ans, la Mutualité socialiste adresse une publication «de dialogue» – baptisée pour la cause Renouer – aux médecins, dentistes et pharmaciens francophones (1). Elle y aborde régulièrement des sujets d’intérêt général et de société qui touchent aux aspects éthiques, politiques, économiques ou sociaux de la santé.
Dans son numéro de novembre-décembre 2004, ce périodique présente une étude qui porte sur un vaste échantillon de notre population et jette un éclairage original sur la question de l’allongement du temps de travail, en la mettant en relation avec l’état de santé actuel des (pré-)seniors.
Concrètement, le Service d’études de la Mutualité socialiste a passé en revue la consommation de sept groupes importants de médicaments parmi l’ensemble de ses affiliés adultes durant l’année 2002. Les résultats mentionnent, catégorie par catégorie de produits pharmaceutiques, les pourcentages d’affiliés de 20 ans, de 25 ans, de 30 ans (et ainsi de suite jusqu’à 70 ans…) qui en ont consommé au cours de ladite année.
Un premier enseignement de cette étude statistique est qu’il y a trois scénarios-types pour ce qui est de la propension à consommer un groupe donné de médicaments aux divers âges de la vie. En gros, on rencontre:
1° des taux stables de consommation pharmaceutique quel que soit l’âge, observés par exemple pour les antibiotiques et les antihistaminiques (deux catégories prises ici comme point de comparaison par rapport aux sept analysées de plus près dans l’étude). Ainsi, en 2002, le recours aux médications restait compris dans une fourchette étroite de 46 à 49 % de consommateurs selon l’âge pour les antibiotiques et de 8 à 11 % pour les antihistaminiques.
2° des croissances linéaires (le taux de consommateurs croît de façon régulière entre l’âge de 20 ans et de 70 ans). Ce que l’étude objective pour deux catégories de produits: ceux prescrits contre l’ asthme et les maux d’ estomac .
3° des croissances brutales «à l’âge mûr» (consommation nulle à très faible jusqu’à 40-45 ans, puis en essor rapide à partir de 50-55 ans). C’est le cas pour quatre groupes de médicaments étudiés: ceux contre l’ hypertension , l’excès de cholestérol , les maladies du cœur et le diabète .
Le septième groupe analysé, celui des antidépresseurs, fait un peu bande à part sur deux plans: il présente une croissance de type linéaire entre l’âge de 20 ans (5 % de consommateurs) et celui de 50 ans (18 %). Puis le taux demeure stable jusqu’à 70 ans. En revanche, il se signale par un fort contraste sexué: à tout âge, les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes à en consommer!
Deuxième enseignement: les co-morbidités se multiplient elles aussi dans les tranches d’âge directement concernées par les projets d’allongement de la vie professionnelle. En additionnant les sujets qui consomment deux des sept médications étudiées et ceux qui en consomment «trois ou plus», on découvre qu’ une personne sur cinq est déjà concernée à l’âge de 50 ans . Et plus d’ une sur trois à l’âge de 60 ans . Sachant que cette étude ne prend pas en compte toutes les médications ni a fortiori toutes les pathologies existantes, ces constats sont en outre bien en-deçà de la réalité .
Comme de surcroît la plupart des pathologies prises en compte ici sont chroniques, fragilisantes, parfois invalidantes ou demandent à tout le moins des adaptations personnelles et certains aménagements dans la vie de tous les jours, l’étude plaide pour qu’on réfléchisse sérieusement aux conditions réalistes de prolongation de la vie professionnelle et qu’on s’attaque notamment aux facteurs de stress au travail, pour tous les travailleurs et en particulier pour les plus âgés d’entre eux. Rester actif et socialement utile est certes une bonne chose. N’avoir plus comme perspective que de verser dans l’incapacité pour fuir des contraintes insupportables n’en est assurément pas une.
Vous pouvez retrouver les résultats complets de l’étude sur le site http://www.mutsoc.be .
Renouer, rue St-Jean 32-38, 1000 Bruxelles.Courriel: renouer@mutsoc.be.

(1) Voir DE BOCK C., ‘Quand une mutualité dialogue avec les prestataires’ , Education Santé n° 189, avril 2004