La Mutualité chrétienne (MC) publie son Mémorandum 2024 en vue des prochaines élections. Plus qu’une vision de la santé, la MC déploie une vision de société. Au cœur de l’action de la MC figure la défense d’un système de santé incluant l’aide et les soins, la prévention et la promotion de la santé, la santé communautaire et tout ce qui contribue au bien-être dans ses dimensions tant physique que mentale et sociale. Ces axes d’actions prioritaires ont pour ambition de préciser la vision de la MC sur des thématiques qu’elle juge essentielles face aux défis tels que les changements climatiques et les évolutions démographiques, économiques, sociales et culturelles.
Nous détaillons ci-dessous quatre de ces priorités, qui concernent plus directement la prévention et promotion de la santé.
Penser la santé dans toutes les politiques
Pour être en bonne santé, il ne suffit pas d’avoir accès à des soins de santé. Être en bonne santé tout au long de sa vie dépend de nombreux déterminants sociaux de la santé tels que les conditions socio-économiques, l’environnement, l’emploi… Domaines sur lesquels les personnes ne peuvent agir individuellement. Cela implique deux choses : premièrement, la responsabilité de « la bonne santé » est collective et relève de la sphère publique. Deuxièmement, il faut agir sur l’ensemble des politiques qui impactent la santé, et ce à tous les niveaux de pouvoir.
La précarité financière étant l’un des facteurs majeurs qui affectent la santé, les autorités doivent veiller à étudier et mesurer l’impact de chacune de leur politique sur la santé en ayant une attention particulière aux publics fragilisés. (…)
Régions et Communautés doivent réagir pour garantir la bonne santé de la population à travers différentes politiques publiques…
… en ce qui concerne l’environnement, la MC plaide pour que ces niveaux de pouvoir :
• financent adéquatement l’assainissement des terres contaminées par des pesticides, des engrais, des fongicides… ;
• réduisent les résidus de pesticides, d’amiantes, de perturbateurs endocriniens, de produits pharmaceutiques dans l’eau consommable en développant des zones de captage d’eau saine ;
• définissent les valeurs limites au bruit, au regard de ce que propose l’OMS dans ses recommandations, dont la réduction du bruit aérien à moins de 45 dB en journée et à moins de 40 dB pendant la nuit.
…en ce qui concerne l’emploi, la MC plaide pour que ces niveaux de pouvoir :
• Soutiennent la création d’emplois stables et de qualité dans des secteurs qui participent à la cohésion de la société et permettent le lien social – singulièrement le secteur non-marchand ;
• Renforcent la prévention concernant le burn-out, le bore-out et toute autre souffrance psychique liée au travail ;
• Renforcent la sensibilisation et l’accompagnement des employeurs aux adaptations possibles des postes de travail à la suite d’une incapacité du travailleur ou pour prévenir celle-ci.
…en ce qui concerne le logement, la MC plaide pour que ces niveaux de pouvoir :
• Renforcent et visibilisent davantage les services publics d’analyse des milieux intérieurs et la cellule régionale d’intervention en pollution ;
• Renforcent et simplifient les politiques qui incitent et aident à assainir et rénover les logements, en ce compris les biens mis en location ;
• Promeuvent le “housing first”.
Investir dans la promotion de la santé et la prévention
La prévention et la promotion de la santé forment le premier maillon essentiel de la politique de santé dans le sens où elles agissent directement en amont du système curatif sur les déterminants sociaux de la santé. Cependant, malgré le rôle qu’elles jouent en termes de lutte contre les inégalités sociales de santé et dans l’amélioration de la santé individuelle, collective et communautaire, les politiques de promotion de la santé et de prévention sont encore trop souvent délaissées.
Il incombe aux autorités publiques de déployer en concertation avec les acteurs du secteur des stratégies ambitieuses en la matière. La bonne santé de la population est une responsabilité collective. Dès lors, les politiques de prévention et promotion de la santé nécessitent une définition de priorités communes et d’objectifs de santé clairs à l’échelle d’une entité, en collaboration avec les autres niveaux de pouvoir. (…)
Les Communautés et Régions disposent de leviers importants pour faire de la promotion de la santé et de la prévention des lignes de force de notre système de santé, en mettant en place des dispositifs cohérents, transversaux et de long terme en la matière.
La MC plaide donc pour que les Régions et Communautés :
• privilégient le financement structurel du secteur et évitent le lancement d’appels à projets en dehors d’une stratégie globale, cohérente et concertée avec le secteur et entre les niveaux de pouvoirs ;
• renforcent les campagnes de dépistage (VIH, IST, cancers, diabète, maladies chroniques…) singulièrement auprès des publics défavorisés et des jeunes ;
• mettent l’accent sur les modes de vie qui favorisent une bonne santé, en soutenant des campagnes et des stratégies d’action relatives à la promotion de l’alimentation saine et l’activité physique ou encore aux risques du tabagisme et de la consommation d’alcool. Elles peuvent mettre en place des mesures telles que, par exemple :
– encourager l’éducation à l’activité physique pour tous, avec une attention particulière aux plus jeunes ;
– proposer une alimentation durable dans les cantines publiques (crèches, écoles, collectivités…)
– soutenir les stratégies de dénormalisation du tabac et de l’alcool et les acteurs œuvrant en ce sens ;
– Soutenir l’interdiction de la publicité pour les produits alcoolisés.
Enfin, parce qu’elle est convaincue que la prévention et la promotion de la santé représentent un moyen indispensable pour garantir la bonne santé de la population, la MC plaide pour tripler le budget consacré à ce domaine pour se rapprocher des 6 % du total des dépenses en santé, à l’instar du Canada.
Organiser une première ligne plus proche du citoyen
Le concept de « santé » va bien au-delà du simple fait de ne pas être malade. De la même manière, la définition de la première ligne ne peut se limiter à l’organisation des soins curatifs. La première ligne de soins doit évoluer vers le concept de première ligne de santé communautaire et intégrative de tous les acteurs de la prévention et de la promotion de la santé, de l’aide et des soins, y compris des acteurs sociaux, et des patients et leurs aidants proches pour favoriser une approche holistique.
La MC plaide pour une nouvelle organisation de cette première ligne, au plus près des citoyens et basée sur un modèle territorial qui contribue à rencontrer et opérationnaliser des objectifs de santé et de soins de santé définis à un niveau régional et fédéral. Ce modèle doit être articulé de manière à décliner ces objectifs au regard des réalités locales. (…)
La MC souhaite apporter sa plus-value, en tant que représentant des usagers et en tant qu’acteur de la première ligne, dans le développement du modèle, dans les dimensions de gouvernance, d’expertise et d’accompagnement et de représentation des personnes / patients.
Pour répondre à l’ambition de cette vision, la MC plaide donc pour que les Régions et Communautés :
• mettent en place le modèle territorial décrit [dans le Mémorandum], lequel doit assurer une couverture homogène du territoire et respecter le libre choix du patient ;
• tiennent compte des besoins de la population et des pénuries dans la définition des sous-quotas Inami ;
• encouragent la mise en réseaux à travers, notamment, un dossier patient informatisé centralisant les informations pertinentes sur le bénéficiaire, accessible aux professionnels et au patient, avec toutes les garanties en termes de respect des droits du patient ;
• soutiennent le développement des maisons médicales pratiquant le forfait ;
• accentuent la coopération entre les niveaux de pouvoir et les entités pour faire émerger des objectifs de santé et de soins de santé en bonne concertation avec les acteurs de la gestion paritaire ;
• renforcent l’accessibilité financière des transports médico-sanitaires non urgents et assurent un financement adéquat des services de transport de personnes assurés par des volontaires ;
• impliquent les organismes assureurs dans la gouvernance de chaque niveau du modèle et reconnaissent et soutiennent leur rôle d’acteurs de la première ligne (services sociaux, agents de prévention…).
Renforcer les actions en faveur de la santé mentale
« La bonne santé mentale est un état de bien-être dans lequel la personne peut se réaliser, surmonter les tensions de la vie, accomplir un travail productif et fructueux et contribuer à la vie de sa communauté ». C’est un concept complexe et intimement lié aux différents domaines de l’être : la santé physique, la vie affective, professionnelle, culturelle et sociale mais aussi le logement, les ressources économiques ou encore l’environnement.
Les déterminants de la santé mentale sont à l’intersection de tous ces domaines. Le spectre des souffrances psychiques qui impactent la bonne santé mentale est donc large et demande des réponses différenciées, proportionnées et accessibles à tous. Ces réponses peuvent notamment être la prévention et la promotion de la santé ainsi que l’accès à une offre lisible, connue et accessible, tant financièrement que géographiquement et temporellement. Au-delà des réponses directes, la MC est convaincue que la participation à des activités sociales, culturelles et sportives, notamment parce qu’elle relie la personne à un maillage social, est également de nature à garantir un bien-être mental. (…)
En ce qui concerne la prévention et la promotion de la santé dans le domaine de la santé mentale, la MC plaide pour que les Régions et Communautés :
• renforcent la prévention et la promotion de la santé mentale dès le plus jeune âge, notamment en augmentant et en rendant structurels les moyens financiers dédiés aux acteurs directs du secteur (centres PMS, plannings familiaux, centres d’aide à la parentalité…) ;
• soutiennent les secteurs qui ont indirectement un impact sur la santé mentale (organisations de jeunesse, mouvements d’éducation permanente clubs sportifs, milieux scolaires…).
En ce qui concerne l’accessibilité de l’offre ambulatoire, la MC plaide pour que les Régions et Communautés :
• renforcent le déploiement de la convention de soins psychologiques de première ligne pour garantir l’accessibilité financière de l’offre, tant pour les adultes que pour les enfants et les adolescents ;
• améliorent la répartition géographique des prestataires et le travail en réseau, en favorisant l’interconnaissance des services et les temps de coordination ;
• mettent tout en œuvre pour rendre l’offre de soins en santé mentale plus lisible, en développant un cadastre régulièrement mis à jour ;
• poursuivent l’ouverture de places en initiatives d’habitations protégées ;
• améliorent l’accessibilité financière de l’hébergement en maisons de soins psychiatriques et prévoient une programmation régionale actualisée de l’offre ;
• œuvrent à l’amélioration de la continuité des soins et de la compréhension du système de soins en santé mentale.
En ce qui concerne la lutte contre les assuétudes, la MC plaide pour que les Régions et Communautés :
• renforcent la prévention dans ces domaines, particulièrement envers le public adolescent.
Mais aussi…
Les 4 autres axes prioritaires sont :
- Répondre aux besoins et défis de la perte d’autonomie
- Garantir l’accessibilité de notre système de santé
- Renforcer la démocratie au sein du système de santé
- Renforcer le secteur associatif
Plus d’infos :
Le texte complet du Mémorandum MC 2024 est disponible sur https://www.mc.be/fr/elections-2024.