Tableau de bord de la santé en Communauté française
En Wallonie comme à Bruxelles, les principaux traumatismes mortels sont par ordre décroissant les suicides, les accidents de la route et les chutes. Les jeunes et les personnes âgées sont les plus touchés par les traumatismes. La mortalité consécutive à un traumatisme est plus importante chez les hommes. Parce que les traumatismes sont causés par de multiples facteurs interdépendants, les mesures de prévention doivent toucher simultanément différents domaines.
D’une manière générale, les traumatismes constituent un problème dont la gravité est fréquemment sous-évaluée. Or, ils sont évitables car ils peuvent souvent être prévenus ou atténués. En effet, parmi les nombreuses stratégies mises en place pour prévenir les traumatismes, le port de la ceinture de sécurité, le port du casque, l’application de politiques contre l’alcool au volant et les excès de vitesse, les emballages spéciaux pour éviter les intoxications, le matériel de protection sur le lieu de travail… ont montré leur efficacité.
Depuis 2005, la Communauté française a décidé d’inscrire cette problématique dans ses priorités de santé publique.
Les accidents en général
La mortalité
En 1997, les traumatismes étaient responsables de 2 419 décès en Région wallonne et de 658 décès en Région bruxelloise. Quel que soit l’âge, la mortalité par traumatisme est plus élevée chez les hommes, et cela dans les deux Régions. Le taux de décès par traumatisme augmente en fonction de l’âge avec des taux particulièrement élevés dans la catégorie des 65 ans et plus.
Tant en Région wallonne qu’en Région bruxelloise, les traumatismes chez les personnes âgées de 20 à 39 ans sont responsables de plus de 50 % des décès observés en 1997, constituant la première cause de mortalité, particulièrement dans la population masculine.
Entre 1986 et 1997, grâce aux mesures de prévention, une diminution de la mortalité par traumatisme a été observée dans les différentes régions du pays.
Les principaux traumatismes mortels
En Wallonie comme à Bruxelles, les suicides, les accidents de la route et les chutes sont responsables de plus de 2/3 des décès enregistrés en 1997.
Les accidents liés aux transports apparaissent plus souvent comme des causes de décès dans les populations les plus jeunes, tandis que les suicides et les chutes prennent plus d’importance au fur et à mesure que l’âge avance.
Concernant les différences liées au sexe, on observe que la mortalité suite à une chute est plus élevée chez les femmes. Les hommes présentent les taux de mortalité par suicide et par accidents de la route les plus élevés.
Au niveau de l’âge, les 65 ans et plus se démarquent particulièrement pour les chutes et les accidents de la route.
La morbidité
Les données de morbidité les plus récentes proviennent de l’Enquête nationale de santé de 2004. Cette enquête porte sur les accidents dits majeurs, c’est-à-dire ayant entraîné une hospitalisation ou une consultation médicale au cours des deux mois précédents l’enquête. En 2004, 8 % de la population en Région wallonne et 7 % de la population bruxelloise âgées de 15 ans et plus déclaraient avoir été victimes d’un accident majeur. Ces accidents sont plus fréquents en Région flamande (9 %) qu’en Région wallonne et bruxelloise. Ces différences sont significatives après standardisation pour l’âge et le sexe.
Ainsi, en Wallonie, les accidents traumatiques affectent davantage les hommes (9 %) – plus particulièrement les jeunes – que les femmes (6 %). Les jeunes hommes wallons, âgés de 15 à 24 ans, sont le plus à risque d’encourir un accident majeur (18 %); ce risque diminue avec l’âge pour atteindre moins de 5 % à partir de 55 ans. Chez les femmes, la variation avec l’âge est moindre: la prévalence des accidents est de 9 % chez les jeunes wallonnes jusqu’à 24 ans, puis tourne autour de 5 % au-delà de cet âge (à l’exception du groupe des 35-44 ans, qui compte seulement 2 % de victimes).
En Région bruxelloise, il n’y a pas de différence significative dans la prévalence en fonction du sexe (6 % des femmes et 7 % des hommes) ou de l’âge.
La morbidité par type de traumatisme
En Wallonie, les traumatismes les plus fréquents sont dus aux accidents domestiques (35 % des cas), suivis des accidents sur le lieu du travail ou à l’école (32 %), les accidents liés à une pratique sportive (25 %) et les accidents de la route (16 %). À Bruxelles, les accidents de la route sont les plus fréquents (31 %), suivis des accidents domestiques (27 %) et des accidents sur le lieu du travail ou à l’école (28 %). En Wallonie comme à Bruxelles, les chutes sont responsables de plus de 50 % des traumatismes.
L’âge est un facteur important dans la survenue des différents types d’accident. En effet, les accidents à l’intérieur ou aux abords immédiats de la maison surviennent plus particulièrement chez les moins de 5 ans et les 65 ans et plus. Les traumatismes chez les enfants de 5 à 14 ans surviennent principalement à l’école.
L’Enquête nationale de santé révèle que les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes à être impliquées dans des accidents domestiques (43 % contre 24 %). Par contre, les accidents liés à la pratique d’un sport concernent davantage les hommes que les femmes (24 % contre 11 %).
Deux populations à risque: les jeunes et les personnes âgées
Les enfants et les jeunes
En ce qui concerne la mortalité, en 1997, les traumatismes représentaient 48 % des décès chez les moins de 24 ans en Wallonie et 32 % des décès en Région bruxelloise. En Wallonie, les garçons de moins de 24 ans sont plus à risque de décéder d’un traumatisme que les filles (53 % contre 31 %). Par contre, à Bruxelles, ces différences entre filles et garçons ne s’observent pas.
Au niveau de la morbidité, en 2005, parmi les 6 901 enfants fréquentant les consultations ONE, 843 enfants ont eu au moins un type d’accident domestique (chute, morsure, brûlure ou autres). Les chutes constituent le type d’accident le plus fréquent et touchent un enfant sur dix suivis à la consultation.
L’étude sur la santé et le bien-être des jeunes scolarisés révèle que 33 % des jeunes disent avoir été blessés ou soignés suite à un accident. L’école est le principal lieu d’accident chez les jeunes scolarisés âgés de 5 à 14 ans.
Chez les adolescents, les accidents se produisent surtout dans les aires de sport.
Des variations en fonction du sexe sont observées: les garçons subissent plus fréquemment un traumatisme dans le cadre d’une activité sportive, tandis que chez les filles, les accidents surviennent davantage à l’école.
Les personnes âgées
Au niveau de la mortalité, sur les 6 292 décès observés par traumatisme en 1997, 37 % concernaient les personnes âgées de 65 ans et plus. Chez les femmes âgées, les chutes sont majoritairement responsables des traumatismes entraînant le décès. Les chutes et les suicides sont les principales causes de décès des hommes.
En ce qui concerne la morbidité, l’Enquête nationale de santé montrait que 5 % des personnes de 65 ans et plus, en Wallonie, et 7 % à Bruxelles ont été blessées au cours des 12 derniers mois. Trois quarts des personnes ont rapporté un accident domestique et, dans plus de 80 % des cas, une chute était la cause de l’accident. Les fractures, les plaies, les contusions et les entorses sont les principales lésions observées.
L’âge de la personne influence le type de lésion: les fractures sont les plus fréquentes chez les personnes de 85 ans. Les commotions sont plus fréquentes chez les personnes de 35 à 74 ans.
L’effet de l’âge sur le risque de traumatisme et le type de traumatisme peut s’expliquer par les effets combinés du vieillissement (diminution de la mobilité, des réflexes et de l’équilibre, baisse de la vue…) et les maladies liées à l’âge (arthrose, affections neurologiques…) qui rendent les déplacements plus difficiles et les risques de chute plus élevés.
L’Enquête nationale de santé a mis en évidence un facteur économique: les personnes qui ont un niveau d’instruction plus élevé rapportent moins souvent un traumatisme que celles ayant un niveau plus faible. Une étude réalisée à Fontaine-l’Évêque a également mis en évidence que le fait de vivre seul augmente le risque de chutes.
Le suicide
La mortalité
En 1997, 892 décès par suicide ont été enregistrés en Wallonie et 189 en Région bruxelloise.
L’âge et le sexe sont deux déterminants majeurs dans la mortalité par suicide. D’une part, les hommes se suicident plus que les femmes. Ainsi, en 1997, en Région wallonne, le taux de décès par suicide atteignait 39,8/100 000 chez les hommes contre 14,6/100 000 chez les femmes. En Région bruxelloise, le taux de décès par suicide chez les hommes s’élevait à 29,4/100 000 contre 11,22/100 000 chez les femmes.
D’autre part, quels que soient le sexe ou la région, les taux de suicide sont toujours plus élevés chez les personnes âgées (après 65 ans).
Enfin, le poids du suicide sur la mortalité totale est beaucoup plus important chez les jeunes: les suicides représentent la première cause de décès chez les 25-44 ans et la deuxième chez les 15-24 ans.
Selon le Réseau des médecins vigies, une augmentation de l’incidence des suicides était constatée, entre 1993 et 1995, ainsi qu’en 2000 et 2001, chez les hommes, alors qu’une diminution de cette incidence était enregistrée chez les femmes.
Avec un taux de suicide de 21/100 000 habitants, la Belgique présente, avec la France, la Finlande et le Danemark, un taux qui se situe, non seulement, bien au-delà de la moyenne mondiale (14,5/100 000), mais qui est aussi plus élevé que la moyenne européenne.
La morbidité
Selon l’Enquête nationale de santé, 6 % de la population âgée de 15 ans et plus rapportent avoir déjà posé un geste suicidaire, en Wallonie et à Bruxelles. 16 % des Wallons et 17 % des Bruxellois âgés de 15 ans et plus déclarent avoir sérieusement pensé au suicide au moins une fois dans leur vie.
[ i ] L’âge et le sexe [/ i ]
Concernant le sexe, les femmes commettent davantage de tentatives de suicide que les hommes (7 % contre 4 % selon l’Enquête nationale de santé de 2004). Selon le Réseau des médecins vigies, durant la période 2000-2001, l’incidence standardisée pour l’âge des tentatives de suicide était de 89/100 000 chez les hommes contre 214/100 000 chez les femmes en Wallonie. Cette incidence est probablement sous-estimée car toutes les tentatives de suicide ne sont pas enregistrées. L’Enquête nationale de santé confirme cette situation en Wallonie et montre aussi que les femmes sont plus nombreuses que les hommes à avoir eu des idéations suicidaires (17 % contre 14 %). En réalité, jusqu’à l’âge d’environ 54 ans, il n’y a pas de différence entre les deux sexes en ce qui concerne le taux de pensées suicidaires, qui oscille entre 15 et 20 %. À partir de 55 ans, ce taux diminue chez les hommes et les femmes ont deux à quatre fois plus de pensées suicidaires que les hommes.
Par contre, en Région bruxelloise, la différence entre les hommes (16 %) et les femmes (17 %) est faible pour les pensées suicidaires, après correction pour l’âge.
Toujours selon l’Enquête nationale de santé, les taux de tentatives de suicide sont deux fois plus élevés en Wallonie qu’en Région flamande. Parmi les jeunes de 15 à 24 ans, 6 % déclarent avoir tenté de se suicider en Wallonie contre 1 % seulement en Flandre.
Les deux groupes d’âge à risque concernant les tentatives de suicide, comme les suicides, sont les jeunes et les personnes âgées. Si le suicide des jeunes est une priorité de santé publique, le suicide des personnes âgées ne peut pas non plus être négligé puisqu’il est probablement le reflet de l’isolement social, du mal-être, de la détresse… des états trop souvent sous-estimés.
[ i ] Les facteurs socio [/ i ]-[ i ] économiques [/ i ]
En Région wallonne, il apparaît, selon l’Enquête nationale de santé, que les tentatives de suicide récentes sont plus concentrées dans les milieux les plus défavorisés sur le plan socio-économique.
Par ailleurs, les passages à l’acte sont plus fréquents en milieu urbain (8 %) qu’en milieu rural 4 %).
Les accidents de la circulation
En 2006, le taux de personnes décédées ou gravement blessées suite à un accident de circulation s’élevait à 21 pour 100 000 en Région bruxelloise et à 67 pour 100 000 habitants en Région wallonne. Ces taux sont plus faibles qu’en Flandre (76/100 000).
Entre 1980 et 2006, le nombre d’accidents et le nombre de personnes décédées ou blessées graves a globalement diminué, en Wallonie. Dans la Région bruxelloise, le nombre d’accidents, après avoir diminué entre 1980 et 2002, connaît une légère augmentation.
La prévention des traumatismes et la promotion de la sécurité
Tous les traumatismes sont la conséquence d’événements multifactoriels qui nécessitent une approche globale. Les facteurs de risque liés à la personne, à ses comportements et à son environnement – physique et social – doivent donc être pris en compte dans un programme de prévention des traumatismes combinant des mesures actives et passives.
Les mesures passives (à savoir celles qui ne demandent pas une attention et un effort soutenus de la part des individus pour assurer leur protection) ont montré leur efficacité. Des stratégies de promotion des mesures passives contribuent à leur acceptation par la population concernée.
Dans le domaine de la promotion de la sécurité , une approche peut être appliquée dans divers milieux comme une rue, un parc, une école, un quartier, une ville et une nation. Le mouvement « Safe Communities » a pour but de supporter les communautés souhaitant améliorer leur niveau de sécurité. Après s’être d’abord intéressé à la promotion de la sécurité au niveau des traumatismes non intentionnels, il développe aujourd’hui des projets englobant les problématiques de la violence et du suicide.
Dans le cadre des recommandations aux professionnels , le Plan communautaire opérationnel a défini des objectifs qui concernent les deux publics les plus vulnérables: les jeunes enfants et les personnes âgées. Ces objectifs sont centrés, d’une part, sur les compétences des professionnels et, d’autre part, sur celles des parents et des personnes âgées de plus de 65 ans.
Enfin, le PCO rappelle que, compte tenu des différentes compétences impliquées en matière de prévention des traumatismes et de promotion de la sécurité, un travail de concertation doit avoir lieu entre les acteurs concernés, et avec les différents secteurs et niveaux de pouvoir impliqués. Il est également primordial de créer des ponts entre les actions au sein des différents milieux de vie. De nombreux secteurs sont concernés directement et indirectement dans le PCO:
-la politique des consommateurs;
-la politique de l’emploi et du travail;
-la politique de la petite enfance et de la famille;
-la politique de l’environnement;
-la politique de la promotion de la santé;
-les soins de santé et les services de première ligne;
-le secteur de la santé mentale;
-la politique du logement;
-la politique de l’enseignement;
-la politique internationale.
Colette Barbier
Christine BAZELMANS , Martine BANTUELLE , Alain LEVÊQUE , Christelle SENTERRE , Marie – Christine VAN BASTELAER , Tableau de bord de la santé en Communauté française de Belgique , Service communautaire en promotion santé SIPES ( ESP – ULB ), Bruxelles , 2007 .
Il peut être téléchargé en PDF aux adresses suivantes : [L]www.sante.cfwb.be[/L] ( rubrique Publications et périodiques , Promotion de la santé – prévention , Tableau de bord de la santé en Communauté française de Belgique – 2007 ) et [L]www.ulb.ac.be/esp/sipes[/L] ( onglet Publications ).