Novembre 2022 Par Juliette VANDERVEKEN Education Santé Politiques

En 2016, la Région bruxelloise s’était dotée d’une première stratégie Good Food (2016-2020). Une première impulsion, couronnée de résultats concrets. Cette année voit apparaître la nouvelle stratégie (2022-2030). Alors… Stratégie Good Food 1, bis repetita ? On vous sert la petite sœur ? Pas tout à fait. Plus ambitieuse encore que la précédente couvrant l’ensemble de la chaîne – de la production jusqu’au consommateur –, la stratégie Good Food 2 a pour ambition d’améliorer l’accessibilité à l’alimentation saine et durable pour tous.tes les Bruxellois.es.

woman buying cereals and grains in sustainable plastic free grocery shop.

Premier fait notoire, on ne parle plus dans la stratégie Good Food 2 d’alimentation durable. A ce mot-valise qui fait appel à de nombreuses représentations, on lui préfère désormais celui de régime alimentaire Good Food ou assiette Good Food. Comprenez : « une assiette constituée d’un menu sain et savoureux, faisant la part belle aux fruits, légumes, légumineuses, fruits à coques et céréales complètes, limitant les sucres, le sel, les aliments trop gras. Le repas Good Food est cuisiné à base d’ingrédients frais et de saison, de préférence bio, un maximum locaux. Il limite les protéines animales (moins et de meilleure qualité), favorise les protéines végétales, limite fortement les pertes alimentaires.»[1] « Nous souhaitions ainsi être plus précis et définir l’alimentation Good Food via le prisme concret de l’assiette : comment elle est composée et ce qu’on y retrouve. Avoir une meilleure compréhension de ce qu’est la Good Food permet une meilleure appropriation », nous précise Amélie Noël, gestionnaire de projets chez Bruxelles Environnement.

Qu’entend-t-on par Good Food ?

« Des régimes alimentaires de haute qualité nutritionnelle et présentant des avantages pour la santé. Ils permettent le développement optimal de tous les individus et de soutenir le fonctionnement ainsi que le bien-être physique, mental et social à toutes les étapes de la vie, pour les générations actuelles et futures ainsi que de contribuer à la prévention de toutes les formes de malnutrition (c’est-à-dire la sous-nutrition, les carences en micronutriments, le surpoids et l’obésité), et de réduire les risques de maladies non transmissibles liées aux régimes alimentaires. Ces régimes atténuent leurs impacts environnementaux liés au changement climatique et à la biodiversité et sont respectueux du bien-être animal. Ils sont acceptables et abordables pour tous et toutes y compris les groupes à faibles revenus. Les régimes alimentaires sains et durables doivent associer toutes les dimensions de la durabilité afin d’éviter toute conséquence indésirable. »

(Stratégie Good Food 2 (2022-2030), p.20, définition basée sur celle de la FAO relative à un système alimentaire durable)

Accessibilité de la Good Food à toutes et tous

Lors de la journée de finalisation du processus de co-construction de la nouvelle stratégie rassemblant les acteurs bruxellois en mars 2022, la notion d’accessibilité pour tous les publics a été d’emblée mise en exergue. Comme le souligne Amélie Noël, « la volonté d’élargir la stratégie à toutes les franges de la population s’inscrit dans la continuité de la stratégie Good Food 1. » Il a bien fallu commencer quelque part, la stratégie Good Food 1 a créé une émulation, posé les bases pour de nouveaux partenariats et ancré d’autres plus solidement. « Nous avons ainsi déjà financé plusieurs associations qui travaillent avec des publics plus fragilisés.»

Mais dépasser les représentations d’une alimentation pour les « bobos bruxellois » n’est pas l’apanage d’un seul plan. Amélie Noël nous le confirme, ainsi que l’évaluation de la stratégie Good Food 1 : « nous nous sommes rendu compte, sans réelle surprise, qu’on avait majoritairement touché une population déjà active dans le secteur de la transition, des gens assez engagés ou des personnes socio-économiquement bien nanties. » C’est pourquoi cette priorité est désormais centrale pour Bruxelles Environnement, sous la tutelle de son Ministre actuel, Alain Maron (Ecolo) qui a en charge les matières relatives à l’environnement, à la transition climatique mais aussi au social et à la santé.

Pour faciliter les choix

La stratégie soulève trois types de freins à l’accessibilité d’une alimentation Good Food : financiers, géographiques et culturels. « En effet, nous explique Amélie Noël, dans la première stratégie, la promotion était plus axée sur le changement des comportements individuels. Or si on encourage les personnes à améliorer leurs pratiques, il faut également qu’elles soient en mesure de le faire. Dans cette stratégie-ci, on dépasse le changement et la motivation individuelle pour travailler davantage sur les facteurs contextuels (l’approvisionnement, etc.) et faciliter ainsi les choix. D’où l’idée de travailler sur l’environnement direct des consommateurs : les commerces, les écoles, les bassins de vie… ».

Une approche quartier par quartier

Si on reprend la question de l’accessibilité géographique, un objectif spécifié dans la stratégie est que chaque ménage bruxellois ait accès à un projet en lien avec l’accessibilité financière et culturelle de la Good Food dans les 10-15 min à pied de son domicile. « Tous les quartiers bruxellois ne sont en effet pas homogènes et la population de chaque quartier a des besoins différents. Par exemple, dans les cultures héritées du bassin méditerranéen, la consommation de légumes tels que la tomate est centrale. On souhaite d’une part avoir une lecture plus fine des quartiers, et partir ensuite des besoins identifiés pour chaque quartier. »

Le croissant pauvre est-il le plus mal desservi ? « Il y a des nuances à apporter quartier par quartier. Prenons l’exemple des quartiers avec une forte concentration de bureaux où l’offre peut être présente, mais pas forcément accessible. Certaines zones de Bruxelles sont mal achalandées de produits Good Food, comme les zones d’Evere et de Neder-Over-Hembeek par exemple, à l’inverse de Saint-Gilles et Ixelles où on retrouve une offre importante mais pas forcément accessible financièrement à toutes et tous. D’autres zones comme Anderlecht se développent fort ces dernières années. »

Pour définir ces besoins et y répondre, Bruxelles Environnement continuera avec cette stratégie 2022-2030 à proposer des dispositifs variés comme les appels à projets associatifs, les appels à projets avec les communes, le soutien aux supermarchés coopératifs, etc. « De manière plus générale, en termes d’accessibilité, on soutient plusieurs dispositifs comme les cuisines de quartiers, le projet VRAC (pour mettre en place des groupements d’achat dans des quartiers plus précarisés, en lien avec un acteur social du quartier), les restaurants participatifs… Ce sont des modèles qu’on soutient, on essaye de tirer des enseignements pour pouvoir les dupliquer et les disséminer au travers de Bruxelles. »

Briser les silos et renforcer l’intersectorialité

« C’est la collaboration entre tous les acteurs – les pouvoirs publics, les acteurs de la chaine alimentaire et les acteurs de terrain – qui fait vivre la stratégie. Plus nous serons nombreux et nombreuses à la porter, plus elle sera efficace. »

Amélie Noël

Lors de la journée ayant rassemblé les acteurs fin mars et de notre rencontre avec Amélie Noël, le message est clair : il est primordial de ne plus travailler en silos (la santé, l’environnement, l’agriculture…) et de mettre en place des dynamiques intersectorielles. « Nous cherchons à créer des ponts avec les acteurs des secteurs social-santé et tisser des collaborations fortes et durables. »

La Fédération bruxelloise de promotion de la santé (FBPS) s’implique d’ailleurs depuis la fin de la première stratégie dans le conseil participatif Good Food. A force de contacts et d’échanges avec les personnes actives dans le secteur de la promotion de la santé notamment, un vocabulaire commun se développe. On peut par exemple relever que des termes comme « littératie en santé » ont fait leur apparition dans le nouveau texte.

La stratégie Good Food 2 s’articulera avec le prochain Plan bruxellois de Promotion de la Santé et le Plan Social-Santé Intégré. Parole de Ministre !

Découvrez le portail Good Food

L’ensemble de la stratégie Good Food 2, ainsi que toutes les ressources nécessaires pour se mettre en action, sont disponible sur le portail : goodfood.brussels/fr