Février 2022 Par Médecins du Monde - Dokters van de Wereld Données

Bruxelles, le 17 décembre 2021 – Médecins du Monde publie aujourd’hui l’observatoire sur l’accès aux soins des groupes vulnérables dans une Europe touchée par le Covid-19. Le rapport fait le point sur les conditions de vie, la santé et l’accès aux soins des citoyens et citoyennes les plus invisibles en Europe : les ressortissant.e.s en extrême pauvreté, les personnes sans-abri, migrantes sans papiers,  européennes en situation de précarité extrême ou les mineurs (non accompagnés). Au total, 25.355 personnes ont été interrogées en 2020.

« Ce rapport donne la parole aux personnes qui ne sont pas prises en compte dans les statistiques officielles nationales et européennes : les personnes sans-abri, les personnes sans papiers ou celles qui n’ont pas accès au système de soins de santé national. Et cela, en pleine pandémie qui a compliqué l’accès déjà limité aux soins médicaux », explique Michel Genet, directeur de Médecins du Monde Belgique. 
 
Le rapport est le résultat d’une enquête réalisée auprès de 25.355 personnes et de 45.292 consultations dans 6 pays européens. Chacune de ces personne a fait appel aux équipes fixes ou mobiles de Médecins du Monde en 2020.

78,2% n’ont aucun accès aux soins.

L’accès aux soins de santé pour groupes de personnes invisibles et malades en Europe a été faible pendant cette année de pandémie : 78,2% n’avaient en effet aucun accès aux soins de santé lors de leur première visite chez Médecins du Monde. La Belgique se classe en dernière position : sur les 1773 patient.e.s interrogé.e.s qui se sont rendu.e.s dans les projets belges, 86,1% n’avaient aucun accès au système de soins réguliers.  

Leur état de santé était mauvais : 26,6% des personnes interrogées ont déclaré être en (très) mauvaise santé physique. Ce nombre est trois fois plus élevé comparé  à la population européenne générale, dont 8,4% déclare être en mauvaise santé physique. 

En 2020, la santé mentale des personnes vulnérables en Europe était mauvaise : près de 59% d’entre elles ont déclaré se sentir déprimées tous les jours, plus de la moitié du temps ou pendant plusieurs jours. Un tiers des personnes interrogées sur leur santé mentale ont obtenu un score si élevé sur l’échelle de la dépression qu’un examen pour la dépression majeure était indiqué. 

Les femmes enceintes vulnérables ne reçoivent pas de soins, les enfants ne sont pas suffisamment vaccinés

Médecins du Monde a traité des patients et patient.e.s souffrant d’une multitude de maladies aiguës et chroniques, notamment des femmes enceintes. Des 437 femmes enceintes qui se sont présentées dans les projets nationaux, près de la moitié d’entre elles (52,7%) n’avaient reçu aucune consultation prénatale. 42,9% des femmes qui se trouvaient dans leur deuxième ou troisième trimestre n’avaient encore reçu aucun examen. 
 
Seuls 46,4% des enfants que nous avons vus dans nos projets nationaux avaient reçu un vaccin contre le tétanos, 44,1% contre la coqueluche et l’hépatite B et 42,6% contre la rougeole, la rubéole et les oreillons.  

« C’est non seulement dangereux pour la santé des enfants vulnérables, mais cela présente également des risques réels pour la santé de l’ensemble de la population. La vaccination contre le Covid-19 l’a démontré », explique Michel Genet. « De plus, ce type de situation crée un fossé entre les enfants pauvres, non vaccinés et les enfants (plus) riches, vaccinés. » 

 
« Tous nos patients et patientes, quelle que soit leurs origines, font face à des situations de vie extrêmement difficiles », explique Michel Genet. « Ils et elles viennent chez nous en dernier ressort, après s’être heurté.e.s à un mur auprès des organismes officiels de la santé. A leur arrivée chez nous, ils et elles sont souvent atteint.e.s de maladies graves voire mortelles. » 
 
Ce rapport souligne finalement l’intérêt d’un système de santé qui ne pratique pas l’exclusion : « Depuis des années, notre plaidoyer en faveur d’un accès équitable et universel aux soins de santé (préventifs), indépendamment de la nationalité, du statut administratif ou des revenus, est plus que jamais pertinent depuis la pandémie de Covid-19 : ce ne sont pas les personnes vulnérables qui sont en danger, ce sont les systèmes de soins de santé qui excluent délibérément ces personnes vulnérables de l’accès aux soins médicaux. »

Qui sont les personnes interrogées ?

  • Elles vivent dans une extrême pauvreté : 91,7% d’entre elles vivent en effet sous le seuil de pauvreté. 
  • 25% sont des résident.e.s ou ressortissant.e.s de l’UE. 74,7% sont originaires de pays en dehors de l’UE. 
  • Seuls 17,7% ont un logement adéquat. 28% sont des personnes sans-abri et 52,6% vivent dans un logement précaire ou inadéquat. La moitié des ressortissant.e.s étaient sans abri. 

59,1% des patients étaient des hommes, 40,9% des femmes. L’âge médian était de 34 ans. 1,7% des personnes étaient plus âgé.e.s que 70 ans et 8,8% étaient mineurs.