Décembre 2007 Par M.-C. VAN BASTELAER A. LEVEQUE Martine BANTUELLE Stratégies

Les traumatismes représentent un problème majeur de santé publique en Europe, les groupes les plus affectés étant les jeunes et les personnes âgées. Il s’agit souvent cependant d’un problème dont la gravité est sous-évaluée. Or, les traumatismes sont souvent évitables; ils peuvent être prévenus ou atténués. Les traumatismes sont causés par des facteurs multiples interdépendants, et les mesures de lutte doivent donc toucher simultanément différents domaines.
Les traumatismes ont un impact économique et social important. Les décès ou les incapacités liés aux accidents peuvent entraîner une diminution de la qualité de vie et une aggravation de la pauvreté. Sur un plan purement économique, les coûts liés aux soins, à une hospitalisation prolongée, à la réadaptation des victimes et à la perte de productivité peuvent être énormes.
De nombreuses stratégies pour prévenir les traumatismes ont déjà été mises en place et ont montré leur efficacité: port de la ceinture de sécurité, port du casque, application de politique contre l’alcool au volant et les excès de vitesse, emballages spéciaux pour éviter les intoxications, matériel de protection sur le lieu de travail, etc.
Depuis 1999, la Communauté française de Belgique a décidé d’inscrire cette problématique dans ses priorités de promotion de la santé et depuis 2005, dans les priorités de son PCO.

La problématique des traumatismes en Belgique

La mortalité par traumatisme

En 1997 (dernières données de mortalité disponibles), il y a eu 6 292 décès causés par les traumatismes en Belgique.
Les traumatismes constituent la première cause de décès chez les moins de 40 ans .
Les trois principaux traumatismes mortels au sein de la population belge sont par ordre décroissant: les suicides, les traumatismes liés au transport, les chutes .
Lorsqu’on étudie les principales causes de traumatismes mortels en fonction des groupes d’âge, on observe de nettes différences.
Cette répartition des traumatismes mortels en fonction des groupes d’âge met en évidence la nécessité de définir des priorités de prévention spécifiques à chaque catégorie d’âge .

Les trois principales causes de décès traumatiques en fonction du groupe d’âge

Groupe d’âge

1ère cause de traumatisme mortel 2ème cause de traumatisme mortel 3ème cause de traumatisme mortel
0-4 Accident par submersion, suffocation, corps étranger Accidents liés au transport Homicide
5-9 Accidents liés au transport Accidents par le feu Accidents par submersion, suffocation, corps étranger – homicide
10-14 Accidents liés au transport Suicide Homicide
15-19 Accidents liés au transport Suicide Intoxications accidentelles
20-24 Accidents liés au transport Suicide Intoxications accidentelles
25-29 Accidents liés au transport Suicide Homicide
30-34 Suicide Accidents liés au transport Intoxications accidentelles
35-39 Suicide Accidents liés au transport Homicide
40-44 Suicide Accidents liés au transport Homicide
45-49 Suicide Accidents liés au transport Chute
50-54 Suicide Accidents liés au transport Chute
55-59 Suicide Accidents liés au transport Chute
60-64 Suicide Accidents liés au transport Chute
65-69 Suicide Accidents liés au transport Chute
70-74 Suicide Chute Accidents liés au transport
75-79 Chute Suicide Accidents liés au transport
80-84 Chute Suicide Accidents liés au transport
85-89 Chute Suicide Accidents par submersion, suffocation, corps étranger
90-94 Chute Suicide Actes chirurgicaux et médicaux responsables de réactions anormales du malade…
95 et + Chute Actes chirurgicaux et médicaux responsables de réactions anormales du malade… Froid excessif

Source: Institut National de Statistiques, causes de décès, 1997

La morbidité par traumatisme

Il existe deux sources de données générales sur les traumatismes: le système EHLASS (1) et l’Enquête de santé par interview (2).
Le système EHLASS recense les traumatismes dus aux accidents domestiques et de loisirs ayant nécessité une consultation au service des urgences de l’hôpital. En 1999, trois hôpitaux participaient au projet (Anvers, Bruxelles, Gand). 13.868 traumatismes domestiques et de loisirs ont été recensés.
L’enquête de santé par interview de 2004 s’est centrée sur les accidents dits «majeurs», c’est-à-dire ceux qui ont entraîné une consultation chez un médecin ou à l’hôpital. La période de temps considérée couvre les douze mois précédant l’enquête. En Belgique, 8% de la population déclare avoir été victime d’un accident ayant entraîné une consultation médicale au cours des 12 derniers mois.
Les traumatismes sont caractérisés en fonction de leur nature, du lieu de survenue, de l’activité au cours de laquelle s’est produit le traumatisme, du type de lésion provoquée.
L’âge et le sexe
D’après l’enquête de santé par interview de 2004, les hommes sont significativement plus nombreux que les femmes à être victimes d’un accident. Cette tendance cependant s’inverse au-delà de 65 ans.
L’âge joue un rôle déterminant au regard des accidents majeurs. Les plus jeunes ont une propension plus grande à être victimes d’un accident en comparaison avec leurs aînés, exception faite des personnes de plus de 75 ans.
Nature du traumatisme
Selon les deux sources de données, le principal mécanisme à l’origine du traumatisme est la chute et cela quel que soit le groupe d’âge.
Lieu de survenue
L’intérieur de la maison est le principal endroit où survient le traumatisme et cela dans plusieurs catégories d’âge notamment les enfants de moins de 5 ans (EHLASS, 1999). Les enfants de 5-14 ans sont surtout victimes de traumatismes à l’école tandis que pour les adolescents (15-24 ans) cela se passe plutôt sur les aires de sport.
Les accidents domestiques sont plus fréquents chez les femmes tandis que les hommes sont davantage victimes d’accidents au travail/école et de sport (Enquête de santé par interview, 2004).
Nature des lésions
Plusieurs types de lésions peuvent être rapportés pour le même accident traumatique (Enquête de santé par interview, 2004).
En Belgique, les trois quarts des victimes d’accidents se répartissent en trois types de lésions principales: les fractures, les plaies et les entorses.

Les traumatismes en milieu scolaire

Comme le montre le système EHLASS, l’école est le premier lieu de survenue des traumatismes chez les 5-14 ans. Selon Piette D. et al, l’école est impliquée dans un quart des traumatismes chez les filles et dans un cinquième chez les garçons (3).
Tout accident qui survient dans le cadre scolaire doit être déclaré auprès d’un organisme assureur. Une étude a été réalisée par Senterre C. et al (4) sur base des données provenant de deux organismes assureurs. Cette étude permet d’analyser le lieu de survenue des traumatismes scolaires, le mécanisme de survenue, les parties du corps atteintes et les lésions observées.
Lieu de survenue du traumatisme en milieu scolaire
On constate que les lieux les plus souvent impliqués lors d’accidents scolaires sont d’une part la cour de récréation et d’autre part les salles de gymnastique ou de sport. La répartition de ces lieux de survenue diffère de manière statistiquement significative selon le niveau d’étude (fondamental ou secondaire).
Mécanisme de survenue
Les principaux mécanismes à l’origine d’un traumatisme sont par ordre décroissant: les chutes (52,1%), les contacts avec quelqu’un ou quelque chose (24,3%), les mouvements (13,9%) et autres mécanismes (9,7%).
Cette répartition varie en fonction du niveau scolaire: davantage de chutes dans le fondamental par rapport au secondaire. Les autres mécanismes sont plus fréquents dans le secondaire par rapport au fondamental.
Parties du corps atteintes
Les parties de corps les plus atteintes sont, par ordre décroissant: la région de la tête et du cou (40,6%), les membres supérieurs (32,0%), les membres inférieurs (20,2%), les atteintes générales ou multiples (3,8%) et la région du tronc et du bassin (3,4%).
La région de la tête et du cou est significativement plus atteinte dans le fondamental tandis que les membres inférieurs et supérieurs le sont plus fréquemment dans le secondaire.
Nature des lésions observées
Les différents types de lésions observées sont, par ordre décroissant: les hématomes/contusions (23,8%), les plaies/égratignures (21,5%), les traumatismes des articulations – muscles – tendons (17,8%), les fractures (16,1%), les lésions globales ou d’un autre type (12,1%) et les traumatismes dentaires (8,8%).
Il y a significativement plus de traumatismes articulaires dans le secondaire et plus de traumatismes dentaires dans le fondamental.

Les traumatismes chez les personnes âgées

En 1997 (INS), sur les 6292 décès traumatiques, 37% ont eu lieu chez les personnes de 65 ans et plus.
Chez les personnes âgées, que ce soit en terme de mortalité ou de morbidité, le traumatisme dominant est la chute (1,2).
Une étude menée en 2005-2006 auprès de la population âgée de 65 ans et plus à Fontaine-l’Evêque (5) permet une meilleure compréhension de la problématique des chutes chez les personnes âgées. Sur les 501 personnes qui ont participé à cette étude, 168 personnes ont déclaré avoir fait au moins une chute au cours des 12 mois précédents l’enquête.
L’âge et le sexe
Le nombre de chutes mortelles varie en fonction du sexe et de l’âge.
Lorsqu’on étudie le taux de chutes mortelles en fonction de l’âge et du sexe, on constate que quel que soit le sexe, le taux de chute augmente lorsque l’âge augmente. Les taux de chutes mortelles sont plus élevés chez les hommes que chez les femmes et cela dans toutes les catégories d’âge.
Lieu de survenue des traumatismes
Chez les personnes de 65 ans et plus, 56,5% des traumatismes se passent à l’intérieur de la maison, 19,3% dans les aires de transport et 8,2% autour de la maison.
Dans la majorité des cas, la chute a eu lieu à l’intérieur de la maison. Les principaux lieux dans la maison sont par ordre décroissant: l’escalier (20%), la cuisine (19%) et la salle à manger (16%). 1
Activité au moment du traumatisme
Les principales activités au cours desquelles ont eu lieu les traumatismes chez les seniors sont des activités de la vie quotidienne, en ordre décroissant:
-déplacement et mouvement (61,0%)
-bricolage, jardinage (8,3%)
-tâches ménagères (7,2%)
-réalisation de besoins personnels (6,3%)
-loisirs (3,2%)
Nature de la lésion
Chez les personnes de 65 ans et plus, la lésion la plus fréquente nécessitant une consultation à l’hôpital est la fracture (37,5%) suivi de la contusion (24,0%) et enfin des blessures ouvertes.
Les foulures, luxations et autres lésions sont beaucoup moins fréquentes.
Les parties du corps les plus fréquemment lésées sont: les membres supérieurs et inférieurs ainsi que la tête et le visage.
Facteurs prédisposants
Dans le courant de l’année 1995-1996, les médecins vigies (6) ont enregistré les facteurs prédisposant aux accidents domestiques chez les personnes de plus de 65 ans. Neuf patients sur dix de 75 ans ou plus présentaient une prédisposition physique. Un tiers des victimes présentaient des problèmes de mobilité.
Des problèmes psychologiques, principalement la démence, ont été signalés chez un cinquième des patients ayant des facteurs physiques de prédisposition. Chez des patients atteints de problèmes neurologiques, on notait principalement des problèmes d’équilibre, la maladie de Parkinson, une paralysie et une parésie. Les problèmes vasculaires enregistrés concernent surtout une insuffisance cérébrovasculaire, des séquelles d’accidents cérébrovasculaires, une hypotension et une décompensation cardiaque. Des problèmes de vue ont également été notés dans 14% des cas.
L’Enquête nationale de santé (2) a mis en évidence la présence d’un gradient socio-économique: les personnes qui ont un niveau d’instruction plus élevé rapportent moins souvent un traumatisme que celles d’un niveau d’instruction plus faible. L’étude à Fontaine-l’Evêque (5) a également mis en évidence que le fait de vivre seul augmente le risque de chute.
Des facteurs présents dans l’environnement de la victime peuvent être à l’origine de l’accident. Dans deux tiers des accidents chez les plus de 60 ans impliquant des facteurs d’environnement, le revêtement de sol et les escaliers étaient à l’origine de l’accident.

Les traumatismes intentionnels

Cette catégorie de traumatismes regroupe les traumatismes auto-infligés (suicide, automutilations), les traumatismes interpersonnels (homicides, agressions) et les traumatismes collectifs (guerre…). Chaque année, en Belgique, plus de 2000 personnes se donnent la mort et on estime à plus de 20.000 celles qui font une tentative de suicide.
Décès par suicide
En Belgique, en 1997, selon les données de l’Institut National de Statistiques, il y a eu 2 323 morts causées par les traumatismes intentionnels .
92% des traumatismes intentionnels mortels sont des suicides . 72% de ces suicides mortels sont perpétrés par des hommes .
Le suicide est la première cause de décès chez les personnes de 25 à 35 ans, et la deuxième chez ceux de 15 à 24 ans. Chez les personnes âgées, c’est également une cause de décès très importante.
Avec un taux de suicide de 21/100 000 habitants, la Belgique présente, avec la France, la Finlande et le Danemark, un taux bien au-delà de la moyenne mondiale estimé à 14.5/100 000, et plus élevé aussi que la moyenne européenne. (7)

Tentatives de suicide

L’Enquête nationale de santé fournit des données sur les tentatives de suicides et les idéations suicidaires (2). En Wallonie comme à Bruxelles, 6% de la population âgée de 15 ans et plus rapporte avoir déjà posé un geste suicidaire. Ils sont 16% de wallons et 17% de bruxellois âgés de 15 ans et plus à déclarer avoir sérieusement pensé au suicide une fois au moins dans leur vie.
Concernant le sexe, le rapport est inversé par rapport aux suicides car il y a plus de tentatives de suicides chez les femmes que chez les hommes .
Nous reviendrons en détails sur la problématique du suicide dans un prochain numéro.

Les stratégies de prévention des traumatismes

Tous les traumatismes sont la conséquence d’événements multifactoriels qui nécessitent une approche globale. Les facteurs de risque liés à la personne, à ses comportements et à son environnement (physique et social) (8) doivent être pris en compte dans un programme de prévention des traumatismes qui combinera des mesures actives et passives.
Les expériences réalisées et évaluées dans plusieurs pays mettent en évidence l’efficacité des mesures de prévention passive, c’est-à-dire celles qui ne demandent pas une attention et un effort soutenus de la part des individus dans le but d’assurer leur protection. Ces mesures sont d’autant plus efficaces qu’elles s’appliquent à un maximum de personnes sans distinction de sexe, de revenu… Différentes stratégies sont mobilisables: l’information, la formation, la participation, l’action intersectorielle, l’action sur le milieu de vie, la réglementation, l’approche normative, la recherche, le développement d’aptitudes individuelles et sociales, l’advocacy, le marketing social…

Un outil d’analyse et d’aide au choix des stratégies: la matrice de Haddon

En 1970, W . Haddon a conçu un outil d’analyse des traumatismes. Il s’agit d’une matrice qui permet de décomposer l’événement traumatique. Cette matrice intègre:
-la dimension temporelle en distinguant trois phases: la phase pré-événement (qui précède la survenue de l’événement), la phase événement (période de contact entre l’hôte et l’agent), la phase post-événement (réponse de l’hôte à l’événement);
-le caractère multifactoriel de la genèse des traumatismes en distinguant l’hôte, le vecteur et l’environnement physique et socio-économique.
Ce modèle permet d’identifier les principaux déterminants de la survenue des traumatismes et des conséquences qui en découlent.
La matrice de Haddon est très utile pour identifier les stratégies, les interventions et les secteurs à mettre en oeuvre pour prévenir les traumatismes ou en atténuer la gravité ou les conséquences.

Une approche globale de promotion de la sécurité

Toutes ces stratégies seront d’autant plus efficaces qu’elles s’intégreront dans une approche globale de la problématique, afin d’éviter le cloisonnement des interventions et des intervenants. La collaboration entre les intervenants et les secteurs concernés ainsi qu’une coordination de leurs interventions sont indispensables pour assurer la réussite des programmes de promotion de la sécurité.
«La promotion de la sécurité est un processus que les individus, les communautés, les gouvernements et les autres organisations, incluant les entreprises privées et les organisations non gouvernementales (ONG), appliquent, au niveau local, national, et international pour développer et maintenir la sécurité. Ce processus est composé de tous les efforts consentis pour modifier les structures, l’environnement (physique, social, technologique, politique, économique et organisationnel) ainsi que les attitudes et les comportements ayant trait à la sécurité» (9).
L’approche de promotion de la sécurité peut être appliquée dans des milieux diversifiés d’envergure différente tels qu’une rue, un parc, une école, un quartier, une ville et une nation. Une illustration de cette approche appliquée au niveau d’une communauté locale est fournie par le réseau des «Safe Communities». Ce réseau a été développé par le Karolinska Institutet de Suède, sous les auspices de l’OMS (10) et a pour but de supporter les communautés souhaitant améliorer leur niveau de sécurité. La commune de Fontaine-l’Evêque intègre cette démarche dans sa politique de santé depuis 2000.
Le réseau s’est d’abord intéressé à la promotion de la sécurité au regard des traumatismes non intentionnels mais aujourd’hui, il développe également des projets englobant les problématiques de la violence et du suicide.
En effet, si l’on regarde l’importance que représente le problème du suicide en termes de santé publique et si l’on s’intéresse aux recommandations énoncées par l’OMS dans son rapport mondial sur la violence et la santé en 2002 (11), des efforts substantiels doivent être faits, notamment pour développer une approche globale du problème en suivant les stratégies de promotion de la santé et de la sécurité. En Communauté française de Belgique, bien que de nombreuses associations et bénévoles oeuvrent dans le champ de la prévention et/ou de la prise en charge du suicidaire et/ ou de son entourage, il est impossible aujourd’hui de se faire une idée précise des différents types d’interventions qui existent et des spécificités de chacune d’entre elles.
Les principes à la base des programmes «Safe Communities» sont les suivants:
-les programmes visant à rendre les communautés plus sécuritaires doivent reposer sur toutes les organisations concernées par la sécurité de la communauté et être associés de près à tous les secteurs d’activité pertinents. La structure utilisée pour promouvoir la sécurité variera d’une communauté à l’autre et d’un pays à l’autre.
-les programmes visant à rendre les communautés plus sécuritaires doivent s’appuyer sur suffisamment de données dont des données épidémiologiques pour être en mesure de bien documenter la nature et l’ampleur des problèmes de sécurité, incluant les accidents, les blessures, la violence et le suicide, et ce, dans tous les environnements incluant le domicile, le travail, la route, le sport et les loisirs.
-les priorités pour l’action et la prise de décision doivent aussi reposer sur ce qui est perçu comme important par la communauté. Les solutions devraient être identifiées par la communauté et les suggestions provenant de l’extérieur devraient être adoptées seulement si elles sont vues comme étant appropriées par la communauté. Cela suppose l’implication des individus aussi bien que des communautés dans le processus mis en avant pour améliorer la sécurité.
-un large éventail de techniques et de méthodes doivent être utilisées comme par exemple l’utilisation des médias, la présentation de données locales, la diffusion d’avis, de conseils, la formation de certains groupes de professionnels ainsi que des membres d’organismes communautaires, la réalisation de rondes de sécurité, le contrôle de l’environnement ou le développement de certains produits.

La concertation

Le PCO rappelle qu’au vu des différentes compétences impliquées dans la problématique, il est important de travailler en collaboration avec différents secteurs et niveaux de pouvoir impliqués. De même, il est primordial de créer des ponts entre les actions au sein des différents milieux de vie…
De nombreux secteurs sont concernés et impliqués directement et indirectement dans le PCO. Sur base du partenariat établi entre l’Asbl Educa Santé et l’ESP/ULB pour la coordination du PCO de prévention des traumatismes et de promotion de la sécurité de la Communauté française, des ententes et collaborations sont menées avec les nombreuses politiques concernées.
Politique des consommateurs
-Commission pour la sécurité des consommateurs;
-Test-Achats: évaluation de la qualité des équipements de protection pour les enfants;
-Plan d’action national belge pour la sécurité des enfants coordonné par le CRIOC.
Politique de l’emploi et du travail
-Centre de promotion du travail du Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale, groupe enseignement;
-Prevent: campagne Move Europe sur la promotion de la santé au travail.
Politique de la petite enfance et de la famille
-ONE: intégration des recommandations dans le guide de médecine préventive du nourrisson et du jeune enfant et formation des pédiatres à la prévention des accidents domestiques chez les enfants (Glem(m) de pédiatrie), diffusion du livre «Tim,Tam et la famille souris», promotion du matériel de sécurité;
-Ligue des familles: intégration d’informations et de recommandations dans le «Journal de votre enfant».
Politique de promotion de la santé
-Carolo prévention santé: campagne de promotion de l’activité physique des personnes de plus de 50 ans;
-CLPS: appui à l’implantation du programme de prévention des chutes chez les personnes âgées vivant à domicile;
-Infor Santé (Mutualités chrétiennes), asbl Solival et UCP mouvement social des aînés: conception d’un outil de dialogue entre les personnes âgées et les professionnels sur la prévention des chutes âgées à domicile;
-publication d’articles dans la revue Education Santé ;
-mutuelles, maisons médicales, communes, centres de loisirs pour personnes âgées: implantation des ateliers «équilibres».
Soins de santé et services de première ligne
-SSMG: élaboration et validation d’outils de formation, d’information et de dépistage destinés aux médecins généralistes et aux professionnels de santé;
-Services Intégrés de Soins à Domicile (SISD) pour l’implantation des mesures de prévention des chutes chez les personnes âgées vivant à domicile;
-associations professionnelles de médecins généralistes, kinésithérapeutes, infirmières, ergothérapeutes, aides familiales et aides ménagères: dépistage du risque de chutes, application des bonnes pratiques de prévention des chutes;
-PSE: intégration de la prévention des accidents en milieu scolaire dans les projets de service.
Politique du logement
-Société d’architectes: intégrer la prévention des accidents domestiques dans la pratique des architectes;
-collaboration avec les communes pour promouvoir le bon usage du détecteur de fumée, augmenter la sécurité des personnes âgées, diffuser du matériel de protection des jeunes enfants.
Politique de l’enseignement
-Centres Universitaires et Départements de Médecine Générale des facultés de médecine (ULg, ULB, UCL): intégration d’un module de formation à la prévention des accidents domestiques.
Secteur des assurances
-deux compagnies d’assurances, Ethias et le Centre Interdiocésain Assurances pour la réalisation d’une étude épidémiologique des accidents et traumatismes survenant dans le cadre scolaire en Communauté française de Belgique et la mise en place d’un système permanent de récolte de données.
Autorités communales et contrats de sécurité
-implantation des «Communautés sûres» et du guide «Sécurité dans les milieux de vie».

Les objectifs et activités du PCO

L’objectif général du PCO est de susciter l’adhésion maximale de la population et des professionnels aux recommandations de prévention des traumatismes et promotion de la sécurité.
Les objectifs spécifiques sont au nombre de trois.
1. Développer la connaissance et la motivation des publics concernés vis-à-vis des mesures de protection passive, de prévention des accidents et de promotion de la sécurité
Promouvoir l’utilisation de mesures de protection passive et développer les connaissances et les compétences du public cible et des professionnels pour l’adoption de mesures de prévention et de promotion de la sécurité vis-à-vis des jeunes enfants, chez les jeunes en âge scolaire, auprès des personnes âgées et auprès de la population en général.
2. Assurer la cohérence et la pertinence du programme de prévention des traumatismes et de promotion de la sécurité
Assurer la cohérence et la pertinence des actions menées, des mesures réglementaires proposées.
Promouvoir une concertation/collaboration avec d’autres partenaires et niveaux de pouvoir et introduire des démarches de promotion de la santé dans d’autres secteurs.
Maintenir ou développer un recueil de données psychosociales et épidémiologiques permettant de préciser les circonstances de survenue des traumatismes non intentionnels et les déterminants de santé en relation avec les risques d’accidents.
Travailler la question de la violence dans une approche globale de la promotion de la santé avec les responsables d’autres secteurs.
3. Permettre l’accès maximal aux mesures de protection .

Les actions

Objectif 1: développer la connaissance et la motivation des publics concernés vis-à-vis des mesures de protection passive, de prévention des accidents et de promotion de la sécurité
Vis-à-vis des parents de jeunes enfants:
-recherche sur l’acceptabilité des équipements de protection pour enfants par les milieux défavorisés. Projet mené dans la ville de Fontaine-l’Evêque avec le personnel de l’ONE et d’un service de gardiennes encadrées;
-évaluation de la qualité des équipements de protection pour les enfants et diffusion auprès du public avec Test-Achats;
-développement du rôle des médecins généralistes et des pédiatres dans la prévention des traumatismes des jeunes enfants. Projet réalisé avec l’ONE pour la formation des pédiatres et avec les CUMG et DUMG des facultés de médecine de l’ULg et l’ULB.
Auprès du milieu scolaire:
– recherche sur les accidents et traumatismes en milieu scolaire avec deux compagnies d’assurances;
-organisation d’une journée d’information des PSE sur les traumatismes en milieu scolaire;
-participation au groupe de travail ‘enseignement’ du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale pour préparer une journée d’étude sur les bonnes pratiques en prévention de la violence dans l’enseignement.
Auprès des personnes âgées:
– implantation du référentiel de bonnes pratiques de prévention des chutes chez les personnes âgées vivant à domicile avec la collaboration des SISD;
– expérimentation d’une approche communautaire et locale: Fontaine-l’Evêque «Communauté sûre».
Auprès de la population en général:
-avis de la CSC et réalisation de campagnes avec le VIG notamment sur la sécurité dans les aires de jeux
Objectif 2: assurer la cohérence et la pertinence du programme de prévention des traumatismes et de promotion de la sécurité
Assurer la cohérence et la pertinence des actions menées, des mesures réglementaires proposées :
-meilleure connaissance de l’efficacité de certaines démarches participatives et communautaires notamment dans le cadre du projet «Communauté sûre» de Fontaine-l’Evêque;
-augmentation des capacités des intervenants et professionnels dans le cadre du projet de prévention des chutes chez les personnes âgées vivant à domicile et le projet ‘développement du rôle des médecins généralistes et des pédiatres dans la prévention des traumatismes des jeunes enfants’;
-formation des autorités communales et des services de protection et de prévention à la promotion de la sécurité dans les milieux de vie;
-appui méthodologique aux acteurs et aux actions: centre de ressources, documentation scientifique, outils et formations.
Promouvoir une concertation/collaboration avec d’autres partenaires et niveaux de pouvoir et introduire des démarches de promotion de la sécurité dans d’autres secteurs
-rapport sur la prévention du suicide en Communauté française et mise en place de l’inter cabinets;
-participation à la planification et la mise en œuvre du Plan national de sécurité des enfants;
-concertation avec le Ministère de la Justice sur la gestion des armes à feu;
-sensibilisation des médias.
Maintenir ou développer un recueil de données psychosociales et épidémiologiques permettant de préciser les circonstances de survenue des traumatismes non intentionnels et les déterminants de santé en relation avec les risques d’accidents
-dans le cadre de la «Communauté sûre» de Fontaine-l’Evêque: recueil de données auprès d’un service d’urgence hospitalier et des médecins généralistes se rapportant à tous les accidents survenus aux habitants de Fontaine-l’Evêque ou sur le territoire de la commune;
-idem: recueil d’informations auprès des personnes âgées de plus de 65 ans sur la survenue de chutes et la peur de chuter;
-traitement et analyse des accidents scolaires répertoriés par les deux compagnies d’assurances les plus importantes en terme de couverture en milieu scolaire (tous réseaux confondus).
Travailler la question de la violence dans une approche globale de promotion de la santé avec les responsables
-participation groupe de travail ‘enseignement’ du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale pour la préparation d’un module de formation «communication de crise et prévention des violences symboliques à l’école» adapté aux jeunes enseignants;
-concertation avec le secteur de la santé mentale (inter cabinets) en vue de promouvoir les bonnes pratiques de prévention du suicide et de mettre en place un continuum de services;
-concertation avec le Ministère de la Justice pour la sensibilisation des professionnels de santé, des milieux professionnels et de la population à la gestion et au contrôle des armes à feu;
-mise en place de tables rondes autour de la question des armes à feu en collaboration avec les contrats de sécurité;
-mise en place d’une formation de prévention de la violence (rapport Violence et santé de l’OMS).
Objectif 3: Permettre l’accès maximal aux mesures de protection
Cet objectif consiste a garantir l’accès aux mesures de protection en assurant la mise à disposition à la population de produits répondant aux normes de sécurité, notamment en ce qui concerne les appareillages, les jouets, le matériel utilisé dans différentes activités. Cet accès aux mesures de protection signifie également que des mesures de protection sont mises à disposition de certains publics ou de certains lieux (promotion de la sécurité des aires de jeux, renforcement de la législation concernant le placement des détecteurs de fumée, test du matériel de sécurité et diffusion des résultats par Test-Achats, promotion du matériel de sécurité).

Eléments de bilan du PCO 2004-2005 et recommandations pour l’avenir

Les processus de concertation sont nombreux et ils s’installent dans la durée. Ils augmentent les capacités de mise en œuvre des programmes .
Recommandation – Renforcer les concertations et les collaborations entre les niveaux et les secteurs concernés, plus particulièrement la participation et l’articulation avec le plan national de prévention des accidents chez les enfants, coordonné par le CRIOC et s’inscrivant dans un programme européen. D’ores et déjà, une large collaboration est envisagée entre l’Asbl Educa Santé et le VIG.
La sensibilisation doit être soutenue et permanente afin de préparer l’implantation des actions .
Recommandations – Soutenir l’information des parents et adultes proches des jeunes enfants: campagne, média…
Continuer la mobilisation des relais proches des personnes de plus de 65 ans et auprès de celles-ci en vue d’augmenter la prise de conscience de la problématique des chutes et la connaissance des moyens et ressources pour la prévention.
Les demandes d’expertise, sous forme de conseils méthodologiques, de données, de formation émanent de divers secteurs et concernent différents publics et milieux de vie .
Recommandation – Reconnaître et organiser les activités de l’Asbl Educa Santé (en collaboration avec l’unité Epitraumac de l’ESP-ULB) en un service d’expertise et d’appui aux acteurs de la Communauté française.
La recherche et les actions pilotes donnent des informations pertinentes pour l’action. Mais, le passage de l’anecdote expérimentale à la généralisation de la mesure demande des efforts et des moyens qui dépassent ceux du programme .
Recommandations – Interpeller les collectivités locales et transférer les réussites des «Communautés sûres» afin de mobiliser des ressources et rejoindre les populations les plus vulnérables: parents très jeunes ayant de jeunes enfants, familles monoparentales, personnes âgées isolées, zones d’habitat précaire.
Continuer la concertation avec l’ONE pour l’extension de la diffusion des trousses de sécurité auprès des familles ayant de jeunes enfants.
Continuer la formation des kinésithérapeutes et ergothérapeutes afin d’étendre la couverture des ateliers «équilibres» sur l’ensemble du territoire de la Communauté française.
L’état lacunaire de l’information est un frein à la détermination pertinente des priorités et des mesures d’une part, et un handicap à la mise en œuvre d’une évaluation des effets des programmes d’autre part .
Recommandation – Augmenter la connaissance de la problématique par des informations de qualité: intégration dans un système d’information sanitaire, mobilisation d’acteurs privés (actuellement deux compagnies d’assurances en ce qui concerne les traumatismes scolaires), motivation d’acteurs de première ligne (médecins généralistes, PSE, services de soins à domicile…), concertation avec des systèmes existants dans d’autres pays (INVS France et INSP Québec par exemple).
Le développement de programmes thématiques parallèles et l’absence d’agenda général et d’approche transversale entrave la mobilisation et l’intervention des professionnels de première ligne .
Recommandation – Continuer la démarche d’intégration des éléments de prévention des traumatismes à domicile des enfants et des personnes âgées chez les professionnels de la santé: pédiatres, médecins généralistes, soignants à domicile (formation, outils…) avec la collaboration de la SSMG et des SISD.
Le PCO doit s’étendre à de nouveaux publics et lieux de vie vulnérables aux traumatismes particulièrement les milieux scolaires et extra-scolaires .
Recommandations – Exploiter le référentiel de bonnes pratiques de prévention des conduites à risque chez les enfants et les adolescents en milieu scolaire (édition Inpes 2008) et en dégager des recommandations pour la Communauté française.
Faire connaître les données recueillies sur les accidents scolaires et les stratégies de prévention auprès des PSE et des acteurs du milieu scolaire.
Etendre les stratégies de prévention des accidents scolaires aux milieux extra-scolaires.
Martine Bantuelle , Marie-Christine Van Bastelaer (asbl Educa Santé), et Alain Levêque (ESP-ULB)
Adresse des auteurs: Educa Santé, Av. Gl Michel 1B, 6000 Charleroi. Courriel: doc@educasante.org. Internet: http://www.educasante.org .

(1) European Home and Leisure Accident Surveillance System. EHLASS, Annual Report Belgium 1999.
(2) Bayingana K, Demarest S, Gisle L, Hesse E, Miermans PJ, Tafforeau J, Van der Heyden J., Enquête de Santé par Interview, Belgique, 2004, Service d’Epidémiologie, Institut Scientifique de Santé Publique, Bruxelles, 2006. ( http://www.iph.fgov.be/EPIDEMIO/epifr/index4.htm )
(3) Piette D, Parent F, Coppieters Y, Favresse D, Bazelmans C, Kohn L, de Smet P, La santé et le bien-être des jeunes d’âge scolaire. Quoi de Neuf depuis 1994 ? Bruxelles: Université Libre de Bruxelles. Ecole de Santé Publique, 2003.
(4) Senterre C, Bantuelle M, Levêque A, Prévention des accidents et traumatismes en milieu scolaire. Rapport de recherche relatif au projet 3.2 de l’axe 3 du programme de prévention des traumatismes et de promotion de la sécurité en Communauté française de Belgique. Belgique: Centre d’Etude et de Recherche en Santé Publique (CERESP asbl). 2005. ( http://www.ulb.ac.be/esp/epitraumac/ ).
(5) Bantuelle M, Van Bastelaer M.C, Mendes Da Costa E., Levêque A, Les chutes chez les personnes de plus de 65 ans … mieux les comprendre pour mieux les éviter. L’exemple de Fontaine-l’Evêque, 2005-2006, données non publiées.
(6) Devroy D, Van Casteren, V, Walckiers D, Accidents domestiques nécessitant l’intervention du médecin généraliste, Enregistrement des médecins vigies 1995-1996, avril 2001
( http://www.iph.fgov.be/epidemio/epifr/medvfr
(7) World Health Organisation, Prevention and social programmes, suicide rates, Genève, 2007. http://www.who.int/mental_health
(8) Réseau francophone de prévention des traumatismes et de promotion de la santé, Référentiel de bonnes pratiques, Prévention des chutes chez les personnes âgées à domicile, Inpes, Paris, mai 2005
(9) Sécurité et promotion de la sécurité: aspects conceptuels et opérationnels, Centre collaborateur OMS du Québec, Centre collaborateur OMS de Suède, OMS, septembre 1998
(10) OMS, Manifesto for Safe Communities. Safety – A Universal Concern and Responsibility for All. First World Conference on Accident and Injury Prevention, 1989 ( http://www.phs.ki.se/csp/pdf/Manifesto.pdf )
(11) OMS, Rapport mondial sur la violence et la santé, Genève, 2002 ( http://www.who.int/violence_injury_prevention/violence/world_report/en/full_fr.pdf )