Juillet 2001 Par A. HOFFMAN Réflexions

L’idée d’une santé publique appelée à revitaliser l’espace démocratique chatouille agréablement les oreilles d’un soignant de première ligne. Participation de la population à sa santé, approche globale de la santé incluant ses déterminants non-médicaux tels que socio-économiques et environnementaux, dénonciation d’une médicalisation outrancière, respect de l’autonomie des sujets définissent le projet de nombre d’acteurs des soins de santé primaires, dont les maisons médicales.
Ce projet déborde le champ du curatif dans lequel ces acteurs sont enclos. Trop souvent en effet leur rôle, en termes de santé publique, est confiné à l’application de mesures biologiques alors que les actions classiques de santé publique semblent lointaines, parfois contre-productives.
Or les soins de santé primaires constituent une charnière entre le système de soins et la population. Dispensés de dispenser des soins complexes ou de haute technologie qu’ils renvoient aux autres niveaux, les professionnels du premier niveau de soins sont à l’écoute du vécu des usagers et immergés dans leur milieu de vie. Proximité qui en fait des témoins, des relais et des acteurs potentiels efficaces et déjà en place dans la communauté.
S’il est indispensable que la santé publique soit développée par des experts qui disposent des outils nécessaires, la première ligne de soins peut en constituer un pôle de qualité. Le décloisonnement entre curatif, préventif, promotion de la santé, santé communautaire et santé publique est souhaitable. C’est un choix politique, car il implique une réorientation des priorités et des moyens dévolus à la première ligne. Mutation périlleuse, car la dérive vers un renforcement du contrôle sur les populations au détriment d’un plus de démocratie n’est pas impensable.
Certes, la proximité de la première ligne avec la population ne constitue pas une garantie absolue contre le ‘biopouvoir’, mais elle offre un espace où peut se déployer une gestion plus démocratique de la santé et se constituer un réel contre-pouvoir. Pourquoi ne pas s’en donner les moyens?
Axel Hoffman , médecin généraliste à la Maison médicale Norman Béthune