Le 18 juillet dernier ont été votées par le Parlement de la Communauté française les modifications du décret du 20 décembre 2001 relatif à la promotion de la santé à l’école et du décret du 16 mai 2002 relatif à la promotion de la santé dans l’enseignement supérieur hors universités ( décret du 20 juillet 2006 , modifiant le décret du 20 décembre 2001 relatif à la promotion de la santé à l’école et le décret du 16 mai 2002 relatif à la promotion de la santé dans les établissements d’enseignement supérieur hors université ).
Certaines de ces modifications ont fait l’objet de nombreuses supputations et rumeurs depuis maintenant plus de deux ans, d’autres sont restées plus confidentielles… Certaines ressortissent de ce qui apparaît comme du toilettage de texte mais qui dans les faits peut entraîner de vrais imbroglios administratifs. D’autres concernent des éléments plus fondamentaux en termes d’options ou de fonctionnement: nous évoquons par exemple le remplacement du projet-santé par le projet de service; la durée des agréments des services et centres ainsi que des conventions-cadres entre ceux-ci et les établissements scolaires; la durée minimale de prestations exigée des médecins scolaires.
Parmi les modifications d’ordre plus formel, relevons des harmonisations sémantiques et de procédures administratives visant à:
-rendre conforme la dénomination correcte de l’enseignement «spécialisé». Ainsi, le mot «spécial» est remplacé par le mot «spécialisé» afin de rendre le texte conforme à la dénomination exacte de ce type d’enseignement ;
-faire concorder le décret relatif à la promotion de la santé à l’école (décret du 20 décembre 2001) avec le décret relatif à la promotion de la santé dans l’enseignement supérieur hors universités (décret du 16 mai 2002), en prévoyant que les établissements disposant de plusieurs implantations peuvent passer plusieurs conventions avec plusieurs pouvoirs organisateurs de service de promotion de la santé à l’école ;
-convertir des montants de francs en euros dans un souci de concordance des deux décrets susmentionnés ;
-prendre, comme source de calcul de la subvention, les chiffres fournis par les services, certifiés sincères et véritables, provenant des directeurs ou des personnes habilitées par le pouvoir organisateur des écoles plutôt que d’attendre le comptage des élèves régulièrement inscrits fourni par l’AGERS (Administration générale de l’enseignement et de la recherche scientifique). Cette modification devrait permettre d’accélérer la procédure de calcul du montant de la subvention et d’éviter des divergences entre les chiffres servant de base au calcul de la subvention et la population scolaire réellement suivie par le Service ou le Centre ;
-modifier la durée de la convention conclue entre le Service ou le Centre et l’établissement scolaire, convention qui passe de trois à six ans. Une modification de la durée de l’agrément des Services sera prochainement présentée au Gouvernement afin de faire concorder la durée des agréments et des projets de service (cf. ci-dessous).
Une attention est accordée à des mesures propres à renforcer le travail en réseau ( x ).
La collaboration avec les centres psycho-médico-sociaux est déjà inscrite dans le décret du 20 décembre 2001 .
Pour harmoniser ce texte avec le décret du Gouvernement de la Communauté française relatif aux missions, programmes et rapport d’activités des centres psycho-médico-sociaux, il est proposé de spécifier que cette collaboration vise à rendre optimal l’échange réciproque d’informations en matière d’actions de prévention, d’éducation à la santé et de suivi médical des élèves.
La collaboration avec les services de l’ONE
Les enfants sont soumis à la médecine scolaire dès la première maternelle. Avant 2 ans et demi – 3 ans, ils sont suivis, si les parents le souhaitent, par les services de l’ONE qui élaborent et complètent le dossier de l’enfant dès la naissance.
L’instauration d’une collaboration entre les services de l’ONE d’un côté et les services et centres de l’autre vise ainsi à apporter une plus-value dans le suivi médical de l’enfant et à assurer la continuité de son dossier.
La représentation des Centres locaux de promotion de la santé (CLPS) et d’un Service communautaire de promotion de la santé (SCPS) dans la Commission de promotion de la santé à l’école (soit deux membres supplémentaires) vise à garantir l’intégration, dans les activités des services et centres PSE, des grandes priorités définies par la Communauté française notamment dans les PCO, en lien avec les plans fédéraux, régionaux, provinciaux et communaux.
Du projet-santé au projet de service
Enfin, les deux modifications qui ont soulevé le plus d’attentes, de craintes et de débats sont les suivantes.
Revoir la durée minimale des prestations des médecins scolaires
En tout état de cause, afin de s’assurer pleinement du maintien d’une médecine scolaire de qualité, le service doit toujours comprendre au minimum un équivalent mi-temps de personnel médical (article 17 du décret du 20 décembre 2001).
La modification du décret limite l’exigence de prester au minimum 40 heures par mois à un seul médecin par service. Tous les autres médecins doivent prester un minimum de 20 heures par mois. Le Gouvernement fixera les modalités de la durée minimale des prestations à 20 heures par mois.
Cette modification est argumentée de la manière suivante.
D’une part, ce minimum de 20 heures rencontre les besoins des services qui n’ont pas toujours besoin d’engager un médecin à hauteur de 40 heures de prestations par mois, en cas de hausse de la population sous tutelle.
D’autre part, il s’agit de faciliter la conciliation des activités de médecine générale et de médecine scolaire. En effet, étant donné les horaires d’arrivée et de départ des élèves, l’exigence de 40 heures de prestations par mois implique un étalement des activités de médecine scolaire sur 15 à 20 jours ouvrables et donc un chevauchement inévitable avec les pratiques de médecine de proximité. Par conséquent, le passage à un minimum de 20 heures par mois a pour objectif de rendre possible l’investissement des médecins dans cette pratique préventive malgré la faible reconnaissance financière et l’absence de statut spécifique.
Remplacer l’exigence d’un projet-santé par établissement scolaire par un projet de service
Le présent décret impose à tous les services et à tous les centres d’élaborer au moins un projet de service pour l’ensemble des établissements scolaires ou supérieurs avec lesquels ils ont conclu une convention ou relevant de leur ressort d’activités, dans le cas des centres PMS. En conséquence, la convention-cadre passée entre les services PSE et les écoles ne doit plus contenir de projet-santé mais bien un projet de service.
Cette modification est cohérente par rapport au décret du Gouvernement de la Communauté française relatif aux missions, programmes et rapport d’activités des centres psycho-médico-sociaux, qui a institué un «projet de centre» pour l’ensemble des établissements relevant de leur ressort d’activités.
Cette modification est argumentée de la manière suivante.
De nombreux services ont évoqué l’impossibilité de mettre en place un projet-santé par établissement scolaire, à cause de difficultés dues au grand nombre d’établissements sous tutelle, au temps nécessaire pour développer la concertation préalable avec les pouvoirs organisateurs, etc.
Le projet de service a pour but d’inciter chaque service et chaque centre à se mettre en situation de projet et de l’encourager à poursuivre les projets en cours. Il s’agit d’amener l’équipe du service et du centre à préciser son identité au travers de ce projet de service. Celui-ci définit la politique de santé et les priorités que le service ou le centre entend développer dans les établissements sur la base des besoins de ceux-ci ainsi que des priorités de santé publique telles qu’établies dans le Programme quinquennal et dans le Plan communautaire opérationnel. Le projet de service envisage la politique de santé du service ou du centre à travers les quatre missions qui lui sont dévolues par l’article 2 du décret du 20 décembre 2001, et pas uniquement via la mise en place de programmes de promotion de la santé.
Il appartiendra au Gouvernement de fixer la grille de développement du projet de service, sa durée et le délai dans lequel il devra être envoyé au Gouvernement, aux établissements scolaires ou supérieurs, aux centres psycho-médico-sociaux et aux CLPS concernés.
Conclusion
C’est ce dernier point qui porte en germe l’influence qu’exerceront dans les prochaines années les équipes et centres PSE sur le développement de la promotion de la santé dans les établissements scolaires. La réelle portée de cette modification ne pourra être estimée qu’après la parution officielle des arrêtés d’application et des circulaires administratives dont on attend des précisions quant à la nature, aux objectifs, aux contenus et aux modalités d’évaluation du projet de service.
Il faut toutefois savoir que de nombreuses équipes PSE n’ont pas attendu pour entamer la réflexion autour de la notion de projet de service, avec l’appui d’organismes divers tels que les CLPS, le SCPS APES-ULg, l’asbl CORDES, l’asbl Repères, l’asbl les Pissenlits, le CERES, l’Observatoire de Santé du Hainaut, des coordinations provinciales. Ces réflexions, qui impliquent presqu’un tiers des équipes (ou antennes), se situent à différents degrés d’avancement; certaines ont déjà été finalisées dans un document.
Dans le cadre de la mission de concertation des appuis utiles au développement de la PSE, l’APES-ULg a recueilli ces projets existants. Sur cette base, l’APES-ULg a travaillé avec la Commission PSE à opérer une clarification des attentes et des opportunités en matière de projet de service. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point lors d’un prochain article, après la parution des arrêtés d’application et circulaires qui baliseront les obligations légales et administratives en matière de projet de service.
Chantal Vandoorne , APES-ULg, Service communautaire de promotion de la santé en charge de l’appui à la promotion de la santé à l’école et à l’évaluation