Septembre 2008 Initiatives

Comme chaque année la Plate-forme prévention sida a mis en place cet été une campagne de sensibilisation à l’intention des jeunes. La période est propice aux rencontres plus libérées qu’en période scolaire, et dès lors ouvre la possibilité d’une augmentation de rapports sexuels non protégés.
La campagne s’est adressée aux jeunes âgés de 15 à 25 ans, avec trois sous-publics: les jeunes hétérosexuels belges, les jeunes hétérosexuels d’origine étrangère et les jeunes homosexuel(le)s.
Le message visait en particulier:
-les jeunes qui croient qu’il ne leur arrivera jamais rien, et qui comptent sur la chance pour ne pas être infectés;
-les jeunes qui ne se sentent pas concernés par le sida et les IST;
-les jeunes qui se protègent, afin de les conforter et les pousser à continuer de se préoccuper du sida et des IST.
La campagne 2008 reprenait les objectifs, les idées, les messages et les visuels de 2006 et 2007 en les affinant et complétant sur base d’une évaluation fouillée des réalisations antérieures.
La prise en compte des éléments saillants de l’évaluation des campagnes précédentes a donc été le fil conducteur des différents acteurs impliqués dans le processus de construction et d’amélioration des outils.
Ainsi, un nouveau visuel à l’attention des jeunes homosexuels, deux autocollants, deux pochettes de préservatifs, un jeu sur Internet et des cachets pour le milieu festif ont été créés en plus des outils réalisés les années précédentes (notamment spots TV et radio).

Quel(le) séducteur(séductrice) es-tu?

A l’heure où Internet envahit le paysage de l’information et de la communication, et ce particulièrement chez les jeunes, la Plate-forme prévention sida a développé un outil ludique et léger sur Internet. Plus concrètement, il s’agit d’un projet de buzz marketing (principe du bouche à oreille sur Internet) s’intitulant «Quel(le) séducteur/séductrice es-tu ?».
En se connectant sur http://www.preventionsida.org/seduction , l’internaute est invité à séduire une personne, homme ou femme, via plusieurs étapes qu’il passe en répondant à des questions. Au moment de conclure, se pose la question de l’utilisation ou non du préservatif. En fonction de sa décision, il recevra son «profil» (ex.: Secret safe lover, Secret risky lover, Cool safe lover, Cool unsafe lover, Love safe master, Serial unsafe lover) dans lequel il trouvera, entre autre, des conseils de prévention.
L’internaute est invité à transférer son «profil» via un mail, son blog ou Facebook à ses amis et ainsi les inviter à faire de même. C’est à ce moment que se crée le bouche à oreille pour faire circuler le message. Cette approche permet d’aborder la question de la séduction mais aussi et surtout celle des freins liés à l’utilisation du préservatif.

Alex et la vie d’après

L’asbl Ex æquo, un des partenaires de la Plate-forme, vient de publier un outil de promotion de la santé et de prévention du VIH/Sida auprès des homo-/bisexuels masculins. Il s’agit d’une bande dessinée dont l’ambition est de susciter des questions et de donner des informations en lien avec la séropositivité (annonce du diagnostic, relation médecin-patient, suivi des traitements antirétroviraux, santé sexuelle, discriminations…). Elle a été construite au départ d’un groupe porteur qui a défini les sujets à aborder au cours de l’année 2006, et réalisée par Thierry Robberecht (scénario) et Fabrice Neaud (dessin). Sur un sujet à la fois délicat et peu exaltant de prime abord, c’est une incontestable réussite.
L’album de 60 pages comprend, outre le récit lui-même, des témoignages, des infos médicales, un glossaire et des adresses utiles.
Il peut être obtenu gratuitement chez Ex æquo, rue Locquenghien 41, 1000 Bruxelles. Tél.: 02 736 28 61. Fax: 02 733 96 17. Courriel: info@exaequo.be. Site: http://www.exaequo.be

Données épidémiologiques récentes

Au cours de l’année 2007, 1052 nouveaux diagnostics d’infection par le VIH ont été rapportés en Belgique. Après une augmentation observée à partir de 1997, le nombre de personnes qui découvrent leur séropositivité est stable depuis 2002 et se situe entre 1000 et 1075 cas par an.
Ces chiffres masquent des évolutions différentes selon les populations touchées. Les infections par contacts hétérosexuels, qui constituent chaque année la majorité des infections diagnostiquées, ont vu leur proportion diminuer au cours du temps: elles représentaient 64% des infections diagnostiquées en 2002 pour 53% en 2006.
A l’opposé, le nombre d’infections diagnostiquées chez les homo/bisexuels masculins est en nette augmentation. Lorsque le mode de transmission est connu, les cas de séropositivité dans la population homo/bisexuelle masculine constituaient 23,4% des infections diagnostiquées en 2002 et 39,8%, soit près du double, en 2006.
Les années 1990 avaient été marquées par une diminution des infections et par l’adoption de comportements à moindre risque dans la population homosexuelle. Les années 2000 constituent un tournant, avec des chiffres comparables à ceux observés au début de l’épidémie.
Le nombre accru d’infections par le VIH et la progression des infections sexuellement transmissibles dans cette population signent un retour des pratiques à risque.

Incertitude sur le financement de la Plate-forme

En novembre 2007, l’asbl Plate-forme prévention sida a introduit une demande de financement pluriannuel (2008-2010) afin de poursuivre ses actions de sensibilisation et de prévention des infections sexuellement transmissibles (IST) et du sida.
Cette demande a été rédigée en se basant sur trois sources principales:
– les Stratégies concertées du secteur IST/Sida, qui définissent le cadre de référence commun des acteurs du secteur en termes d’objectifs, de stratégies et d’évaluation;
– les recommandations issues du travail d’évaluation formative réalisé par la Plate-forme en concertation avec le secteur de la prévention du sida et de la promotion de la santé;
– les enseignements des évaluations des activités précédentes.
Le budget demandé est équivalent au budget reçu depuis 3 ans, à savoir 490.000 euros.
Six mois plus tard, l’incertitude était grande quant à l’avenir du projet pluriannuel de la Plate-forme, et celle-ci marquait son inquiétude en entendant parler d’une possibilité de réduction budgétaire pour un montant de 90.000 euros. Elle se posait des questions sur les raisons justifiant une réduction budgétaire aussi importante, à un moment où les indicateurs épidémiologiques et comportementaux en lien avec les IST et le VIH restent préoccupants. Elle tenait aussi à rappeler:
– que la prévention du sida et des autres IST est une priorité du Plan communautaire opérationnel de la Communauté française;
– que la Plate-forme intègre de plus en plus systématiquement la prévention des autres infections sexuellement transmissibles dans le cadre de ses actions. Il est à noter qu’aucune politique claire en matière de prévention des autres infections sexuellement transmissibles n’a été définie en Communauté française et que ces infections sont en recrudescence ces dernières années;
– qu’elle renforce progressivement ses liens avec les acteurs du secteur de l’éducation affective et sexuelle, dans un souci d’intégration et d’articulation de la prévention IST/Sida;
– qu’elle veille en continu, par le développement d’un travail d’évaluation et par sa participation aux Stratégies concertées, à l’amélioration de ses processus de travail et de la qualité de ses productions.
Pour conclure, elle affirmait qu’« audelà des risques de restrictions budgétaires pour la Plateforme , le secteur de la prévention IST / Sida reçoit depuis plusieurs mois des signes qui laissent penser que cette thématique est de moins en moins prioritaire et risque d’accuser des réductions de budget dans la plus grande indifférence ».

Commentaire

La revue Education Santé est logée à la même enseigne que la Plate-forme, et dépend des moyens que la Communauté française estime judicieux d’allouer à son projet. Quand le financement est correct et bénéficie d’une certaine continuité (5 ans est le maximum possible), la situation permet de travailler de façon sereine.
Les périodes (de demande) de renouvellement sont évidemment stressantes, puisqu’il faut d’abord convaincre une Commission d’avis du Conseil supérieur de promotion santé et l’Administration de la Santé du bien-fondé de la démarche, en espérant ensuite que la Ministre, à qui incombe la décision finale de financer ou non, suivra les recommandations (1).
Tout en comprenant le désarroi de la Plate-forme, il faut aussi savoir que depuis de nombreuses années, la prévention du sida est une thématique privilégiée par la Communauté française, les réalités budgétaires en attestent (2). La perspective d’un subside raboté de 20% n’est guère réjouissante, c’est vrai, mais il est vrai aussi que pas mal d’opérateurs de la promotion de la santé seraient très heureux d’obtenir ne fût-ce que la moitié du budget dévolu à la Plate-forme…
Christian De Bock , sur base du dossier de presse de la campagne été 2008 et de la ‘note relative au retard de décision et à la probable diminution budgétaire du programme de la Plate-forme’
Plate-forme prévention sida, av. Emile de Béco 67, 1050 Bruxelles. Tél.: 02 733 72 99. Fax: 02 646 89 68. Courriel: info@preventionsida.org. Internet: http://www.preventionsida.org

(1) Si les avis sont convergents et positifs, évidemment! C’est le cas en ce qui concerne la Plate-forme. Au moment où nous rédigions cet article, la décision ministérielle n’était pas encore connue.
(2) En 2006 par exemple, en ce qui concerne la mise en œuvre du Plan communautaire opérationnel, seule la vaccination (2.730.000 euros) a obtenu plus de moyens que la prévention du sida (2.067.000 euros).