Septembre 2004 Initiatives

L’Agence Intermutualiste (AIM) est une asbl dont le travail consiste à traiter les données de différents organismes assureurs, à les analyser et à établir des recommandations pour améliorer le système des soins de santé. Elle publie aujourd’hui son deuxième rapport sur le programme de dépistage du cancer du sein, couvrant la période de 1999 à 2002.
En accord avec les recommandations de L’Europe contre le cancer (1) , le programme de dépistage du cancer du sein a pour but de dépister toutes les femmes âgées de 50 à 69 ans une fois tous les deux ans au moyen d’une mammographie de dépistage. En Flandre, le dépistage du cancer du sein par mammographie a débuté le 15 juin 2001. En Wallonie et à Bruxelles, les programmes ont commencé un an plus tard, en juin 2002 (2).
Le premier rapport de l’Agence intermutualiste, publié en 2002 avait, à l’époque, suscité beaucoup d’intérêt de la part des services et institutions en charge de l’organisation et de l’évaluation de ce programme de dépistage sur le terrain. Les organismes assureurs disposent en effet de données auxquelles les centres de dépistage n’ont pas accès, telles que les caractéristiques sociales des femmes, les mammographies hors campagne et les échographies du sein.
Dans son deuxième rapport, l’Agence intermutualiste développe tout d’abord une analyse prudente du taux de couverture atteint grâce au programme en comparant la période 1999-2000 avec la période 2001-2002 au cours de laquelle les différentes campagnes ont démarré dans les trois régions du pays. Ensuite, elle étudie en détails les examens complémentaires réalisés suite à une mammographie avant de jeter un coup d’œil aux coûts associés au dépistage du cancer du sein.
L’Agence intermutualiste espère que les différents acteurs de terrain considéreront ce rapport comme un instrument utile afin d’évaluer leurs activités et de les améliorer si nécessaire.

Amélioration sensible de la couverture totale

A partir de juin 2001, un code spécifique de la nomenclature en soins de santé a été prévu pour la mammographie de dépistage (ou mammotest ), venant s’ajouter à l’ancienne mammographie ‘diagnostique’. Cet examen de dépistage peut seulement être exécuté dans des centres radiologiques agréés où appareillage, méthodes de travail et personnel doivent satisfaire à de sévères exigences de qualité. En outre, la mammographie de dépistage doit être obligatoirement accompagnée d’une deuxième lecture indépendante. L’objectif dans le cadre d’un dépistage organisé du cancer du sein est de substituer à la mammographie diagnostique existante cette mammographie de dépistage, qui offre de meilleures garanties de qualité. Les résultats présentés dans ce rapport laissent entrevoir que dans la pratique ce changement ne s’est pas encore fait de manière satisfaisante.
Etant donné que la situation est encore en pleine évolution, ce rapport désigne par ‘couverture totale’ le taux de couverture quel que soit le type d’examen utilisé: mammographie de dépistage ou mammographie diagnostique. Voici ce que cela donne:

Couverture totale par région et par période de 2 ans

1999-2000 2001-2002
Bruxelles-Capitale 45% 52%
Flandre 33% 49%
Wallonie 45% 49%
Total 38% 50%

Source: Agence intermutualiste, juin 2004La couverture totale en Belgique passe de 38% en 1999-2000 à 50% en 2001-2002. On peut donc estimer qu’en Belgique, une femme sur deux appartenant au groupe cible a été effectivement examinée. Plus de 80% de ces femmes se font dépister une seule fois tous les deux ans, comme prévu par le programme. A côté de celles-ci, 15% des femmes se font examiner une fois par an. Grâce à la campagne de dépistage, la Flandre rattrape son retard par rapport à Bruxelles et à la Wallonie.
Au cours de la période 1999-2000, nous constatons que la couverture totale est plus grande chez les femmes plus jeunes (50-54 ans). En 2001-2002, la couverture croît plus fortement chez les femmes plus âgées et dans le groupe des pensionnées. Ceci réduit la différence entre les groupes d’âges mais ne l’efface pas entièrement.

Mammographie diagnostique ou mammotest?

Depuis le début de la campagne, un transfert de la mammographie diagnostique vers la mammographie de dépistage réalisée dans les centres reconnus s’opère en Flandre. Lors du second semestre de 2002, en Flandre, presque la moitié des mammographies ont eu lieu dans un centre agréé, et ont donc été suivies d’une seconde lecture.
En Wallonie, où la campagne n’a débuté que fin 2002, le rapport est seulement de 7,5%. La Région de Bruxelles-Capitale occupe une place intermédiaire avec 23%.
Un des indicateurs de l’efficacité de la campagne est le pourcentage de cas où on fait des examens d’imagerie médicale complémentaires (échographie, IRM) après une mammographie: selon L’Europe contre le cancer , cela devrait se produire dans moins d’1 cas sur 20. Et en effet, en 2002, un examen complémentaire n’est réalisé en Belgique que pour 5% des mammographies de dépistage, conformément aux critères de qualité européens.
Par contre, 79% des mammographies diagnostiques sont suivies d’un examen complémentaire, principalement par une échographie du sein. Vu leur grand nombre, nous devons pourtant conclure que ces examens complémentaires sont bien utilisés de façon prépondérante à des fins de dépistage. Une telle approche diagnostique dans une population en grande majorité saine doit inévitablement mener à un très grand nombre de résultats faussement positifs et à leur cortège d’inquiétude et de médicalisation inutile, sans pour autant que la qualité et le suivi soient suffisamment contrôlés. En outre, la sécurité sociale paie ici un coût élevé injustifié: actuellement, la combinaison d’une mammographie diagnostique et d’une échographie coûte deux fois plus qu’une mammographie de dépistage!En résumé, nous pouvons dire qu’une évolution favorable est constatée en ce qui concerne la couverture et le recours à l’examen de dépistage de qualité. Toutefois, il reste encore du chemin à parcourir. Médecins et population doivent être mieux informés quant aux garanties de qualité qu’offre un bon dépistage, ainsi qu’aux dangers d’une utilisation inappropriée de l’approche diagnostique dans une population de femmes en grande majorité saines.Kristel Degauquier, Anne Remacle, Valérie Fabri et Raf Mertens, Programme de dépistage du cancer du sein, Période 1999 – 2002, Rapport n°2 de l’Agence intermutualiste. Adresse: IMA-AIM, chée St Pierre 373, 1040 Bruxelles.
Le rapport complet peut être téléchargé à partir du site des différentes mutualités: http://www.mc.be , http://www.mutualites-neutres.be , http://www.mutsoc.be , http://www.mut400.be , http://www.mloz.be , http://www.caami-hziv.fgov.be . Il peut aussi être consulté sur le site http://www.cin-aim.be (mise en ligne prévue en septembre 2004).
(1) L’Europe contre le cancer est un programme de l’Union européenne basé sur un partenariat multidisciplinaire entre scientifiques, autorités, organisations non gouvernementales, groupes de pression et médias. Son objectif est de soutenir la prévention et le dépistage du cancer et de contribuer à la formation et à l’information en matière de cancer.
(2) Lire notamment ‘Evaluation du programme mammotest: premiers chiffres’ (n)188) et ‘Evaluation du programme mammotest: complément’ (n°189)