Le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a décidé d’entamer cette année, dans les écoles de Wallonie et de Bruxelles, la vaccination des jeunes filles contre le cancer du col de l’utérus. Pour Ecolo, cette politique de vaccination pose question et risque de poser problème.
Cette décision induit un coût de 600.000€ à charge du budget communautaire pour un bénéfice-santé escompté évalué à 70 % de réduction des lésions de cancer du col.
Rien n’est cependant moins sûr. Aucune démonstration n’a été faite de l’efficacité, au-delà de 7 années, de ce vaccin qui doit être administré avant les premiers rapports sexuels. Ainsi, au mieux, la jeune fille vaccinée sera partiellement protégée jusqu’à l’âge de 20 ans et ce, avec un niveau de protection imprécis.
Le monde scientifique s’accorde pour dire que les données manquent au sujet de la vaccination contre le papillomavirus et que le recul est insuffisant pour évaluer et préciser des effets positifs ou indésirables à terme.
Ces éléments avaient jusqu’ici conduit légitimement la Communauté française à une posture réservée vis-à-vis de ce vaccin, privilégiant l’information et la promotion du dépistage qui sont, à l’évidence, les meilleurs moyens de prévention du cancer du col.
La position du gouvernement a basculé au lendemain de la décision de la Flandre de se lancer dans cette aventure, en offrant le vaccin gratuitement aux écolières, et la ministre francophone justifie la décision récente par de nouvelles marges budgétaires et une diminution du prix des vaccins, aucun autre paramètre n’ayant évolué.
Si le Conseil supérieur de la santé propose d’inclure le vaccin contre le papillomavirus dans son programme de vaccination, le KCE (Centre fédéral d’expertise des soins de santé) est, lui, plus mitigé (avis de 2007).
Le Répertoire commenté des médicaments de la Santé publique termine même ses commentaires à ce sujet d’une manière assez claire : « l’effet éventuel de la vaccination sur l’apparition d’un cancer du col de l’utérus avec les vaccins actuels est plus faible que celui d’un dépistage cervical bien planifié ».
D’évidence la posture initiale privilégiant l’information et le dépistage dans un programme structuré offrait un cadre plus rationnel à la prévention du cancer du col de l’utérus que l’utilisation du vaccin contre le papillomavirus, aux effets potentiellement positifs à court terme, mais clairement limités. L’illusion de son efficacité, le sentiment de sécurité induit par le vaccin risquent en outre de freiner le recours au dépistage.
Fondamentalement, en cette période de forte contrainte budgétaire, il nous semble que l’appréciation des choix d’investissements en matière de prévention doit nécessairement s’appuyer sur une évaluation solide de leur impact sur la santé.
En l’occurrence, pour ce qui concerne la prévention du cancer du col de l’utérus, il importe de hiérarchiser les stratégies d’action : information contradictoire et claire, accès favorisé au dépistage et puis, option vaccinale. Ces stratégies ont des coûts et des bénéfices à évaluer dans la transparence et avec une indépendance optimale.
Plus largement, Ecolo s’interroge sur les moyens d’aide à la décision que se donnent les pouvoirs publics dans le champ de la santé publique en général et dans le domaine des vaccins en particulier : quels sont les déterminants de la décision ? L’opportunité budgétaire, les lobbies commerciaux, l’expertise, la pression médiatique… ? Autant de paramètres qui pèsent dans les choix et pas toujours au bénéfice unique de la santé publique…
Ecolo plaide donc pour que les acteurs du monde politique et de la société civile initient une réflexion sur l’amélioration de la gouvernance dans ce domaine et sur la mise en place d’outils et de procédures qui en accroissent la qualité au bénéfice de la collectivité.
Jacques Morel et Patrick Dupriez , députés Ecolo