La recherche-action UNI-SOL en Communauté française de Belgique a débuté en 2003, à l’initiative du Fonds Houtman et de l’Office de la Naissance et de l’Enfance (1). Quatre universités se sont impliquées dans une aventure originale: réaliser, ensemble, une recherche-action sur l’immigration récente.
L’originalité ne s’est cependant pas arrêtée à cette démarche. En effet, non contents de collaborer étroitement à un projet d’une grande ampleur, les différents acteurs initiaux ont «osé» la différence. D’un objectif initial commun – l’amélioration du bien-être des enfants primo-arrivants et de leur famille – sont nées des approches diversifiées : diversité des méthodologies, diversité des théories, diversité des acteurs concernés.
La recherche-action UNI-SOL est donc extrêmement métissée. Cependant, ce métissage n’empêche aucunement une réelle solidarité entre universités, mais aussi entre les universités et «le terrain», une construction commune où interviennent conjointement chercheurs universitaires, intervenants sociaux (travailleurs psycho-sociaux, médicaux, scolaires, etc.), et familles immigrées.
Demandeurs d’asile: quel vécu?
Il existe de nombreuses formes d’immigration: regroupement familial, étudiants, demande d’asile, etc. L’équipe de l’Université de Mons-Hainaut a décidé de s’intéresser aux demandeurs d’asile en première phase de la procédure de régularisation vivant dans un centre ouvert fédéral et dans une Initiative locale d’accueil (ILA) (2).
Un demandeur d’asile est une personne ayant introduit une demande auprès de l’Office des étrangers afin de bénéficier du statut de réfugié, « parce qu’elle craint , avec raison , d’être persécutée à cause de sa race , sa religion , sa nationalité , son appartenance à un certain groupe social , ou ses opinions politiques ( 3 )». Cependant, la procédure de régularisation demande du temps: chaque demandeur d’asile doit en effet pouvoir attester que ses craintes sont justifiées, mais souvent, les «preuves» attendues sont inaccessibles. La procédure elle-même, extrêmement complexe, propose de multiples recours. Plusieurs mois, souvent plusieurs années, sont nécessaires pour aboutir à une décision définitive. Et, pour neuf personnes sur dix, cette décision leur refuse le statut de réfugié et les enjoint de retourner dans leur pays d’origine.
Dès lors, des questions se posent: comment vit-on, lorsqu’on arrive dans un pays étranger, qu’on a tout perdu, qu’on dépend d’une décision sur laquelle on ne peut peser? Comment construit-on sa vie de famille , lorsqu’on est accueilli dans une structure d’accueil communautaire? De quoi est fait le quotidien ? Quels projets peut-on faire pour l’avenir? Est-il encore possible d’investir dans l’avenir ?
L’espace et le temps si particuliers des familles en procédure d’asile ont ainsi été approchés, pendant plus de deux ans et demi.
Une visée de changement ayant été retenue comme objectif principal de la recherche-action (4), nous avons souhaité favoriser la réflexivité personnelle et sociale de chaque acteur impliqué dans le domaine de la demande d’asile: les intervenants sociaux travaillant dans l’accueil des personnes et les demandeurs d’asile eux-mêmes. Cette stimulation de la réflexivité de chacun avait un objectif double:
– favoriser une prise de distance par rapport aux habitudes quotidiennes (5);
– faire émerger des pistes d’actions concrètes de changement émanant du terrain même de la recherche-action.
Dans cette optique, les chercheurs ont adopté un regard étonné et positif, assurant le rôle de «passeurs de parole», «passeurs de pensées». Ce regard particulier émane de l’anthropologie.
L’ anthropologie utilise différentes méthodes de recueil de données: l’entretien, l’observation participante, les procédés de recension et les sources écrites.
Des entretiens ont été menés, individuellement ou en groupe, formellement ou «autour d’un petit café».
L’ observation participante consiste, pour le chercheur, à se confronter à la réalité qu’il observe, en effectuant un séjour prolongé auprès des personnes (Olivier de Sardan, 1995). Il participe ainsi à la vie sociale, culturelle, voire rituelle des personnes qu’il observe (Copans, 1999). C’est dans cette optique que les chercheurs ont passé des séjours fréquents, répétés, prolongés au sein des structures d’accueil, partageant les repas et divers moments du quotidien.
Les chercheurs n’ont cependant pas été les seuls «observateurs» de ce vécu. Les regards experts des demandeurs d’asile eux-mêmes ainsi que ceux des intervenants sociaux ont été sollicités, favorisant une triangulation des observateurs.
En outre, une approche originale, issue de l’ethnographie, est venue corroborer, compléter, nuancer et illustrer les données recueillies: la photographie.
Voir: l’usage de la photographie
L’ethnographie consiste à « voir , mais aussi faire voir » (Laplantine, 2000). Le média utilisé pour «faire voir» (écriture, photographie) permet à chacun de se distancier de l’observation initiale. Cependant, il est essentiel de se livrer à un perpétuel mouvement de va-et-vient entre le sensible et l’intelligible, entre le concret et l’abstrait.
Afin de favoriser cette médiatisation du vécu, et d’obtenir un maximum de renseignements sur leur vie quotidienne , sur leurs satisfactions et insatisfactions affectives, cognitives et sociales, nous avons donné à quarante demandeurs d’asile des appareils photographiques. Les photographes étaient libres de photographier ce qu’ils désiraient, comme ils le désiraient, au moment et à l’endroit choisis par eux.
L’usage d’appareil photographique nous semble intéressant, et ce pour diverses raisons. Premièrement, ce média permet, dans une certaine mesure, d’entrer dans une autre forme de communication . Les personnes ne sont pas placées dans une situation d’interviewé passif, mais vont être les acteurs-experts, les photographes de leur vie , qui parlent de ce qu’ils vivent à des non-initiés, en commentant leurs œuvres.
Leur rôle social est ainsi valorisé, dans une perspective d’ empowerment , les acteurs ayant pleinement conscience d’avoir un rôle majeur à jouer dans l’élaboration et l’évolution de l’étude. Cet outil a en outre permis d’éviter d’orienter la recherche avec certains a priori culturels. Enfin cela nous a permis de discuter des besoins sociaux réels formulés par ceux qui n’ont généralement pas le pouvoir de s’exprimer (Grell, 1981).
Suite à la prise des photographies et au développement des films photographiques, des entretiens ont été menés avec ces photographes amateurs afin de bien saisir le sens de ce qu’ils ont voulu montrer.
Comprendre: explorer le sens des photographies
Ces entretiens portant sur les photographies ont permis non seulement de dégager le sens que les personnes attribuaient à chacune de leurs productions, mais aussi d’identifier de nombreuses dimensions du quotidien.
En effet, si certaines personnes ont choisi de photographier leur famille, leurs amis, illustrant ainsi un volet plus affectif et social de leur quotidien, d’autres ont photographié leurs plateaux repas, leur lit, une fenêtre, etc. D’autres encore ont photographié les cicatrices des tortures subies dans leur pays d’origine…
Des centaines de photographies ont été développées. Chaque image est porteuse d’un message , parfois très fort, frappant, voire heurtant pour celui qui la regarde. Cependant, afin de se préserver d’interprétations abusives, chaque photographie a été commentée par son auteur.
Une catégorisation des dimensions du quotidien photographiées par les demandeurs d’asile a été effectuée après l’analyse des discours de tous les photographes. Les vingt-sept dimensions relevées dans les entretiens ont été catégorisées en cinq grands axes, un axe physique et quatre axes psychosociaux (dimensions affective, cognitive, sociale et idéologique (6)).
Dans la dimension « besoins physiques », les demandeurs d’asile ont souligné certains aspects très positifs de leur vie. Par exemple, pouvoir bénéficier d’une assistance médicale de qualité et gratuite, pouvoir pratiquer des exercices physiques, être logés. Cependant, sur le plan physique, d’autres éléments du quotidien sont pénibles. Ainsi, de nombreux demandeurs d’asile illustrent leur sentiment de dégoût face au manque d’hygiène de certains de leurs «cohabitants» (7).
Les troubles du sommeil sont récurrents dans les discours des photographes. Ainsi, un jeune homme désigne son lit comme « mon lit de misères ». Un autre souligne la couleur choisie pour les montants du lit: « le rouge , c’est la couleur du sang , c’est le danger ». Beaucoup évoquent les ruminations mentales qui provoquent des insomnies « la nuit , je pense à là – bas , je me demande ce qui va arriver ».
Enfin, la nourriture est un élément très souvent décrié par les personnes vivant en structure d’accueil communautaire: ils soulignent le manque de variété et d’équilibre des repas, la manière de présenter les mets (pas sur des assiettes, mais sur un plateau compartimenté en plastique). Ces diverses considérations sont toutefois toujours nuancées. Un homme nous annoncera, en montrant la photographie qu’il a prise de son plateau-repas: « Ce n’est pas bon , mais je n’ai pas dit que c’était mauvais ». En effet, «on a à manger, c’est déjà ça … On ne peut pas se plaindre », précisent certains adultes.
La première dimension psychosociale est intitulée « affiliation ». L’affiliation désigne l’attachement d’un individu à son groupe d’appartenance. Ainsi, certains soulignent l’importance de pouvoir s’appuyer sur la famille , sur des amis , sur un conjoint , afin d’obtenir du soutien . Mais apparaissent également dans cette dimension la souffrance , le chagrin de la perte des membres de sa famille, des amis, etc., les deuils à faire, les personnes dont on n’a aucune nouvelle. La vie communautaire engendre des difficultés particulières: le manque d’intimité , la promiscuité permanente (8), le règlement d’ordre intérieur extrêmement strict, limitant l’autonomie de chacun. Un sentiment d’infantilisation est fort présent chez la plupart des adultes.
La deuxième dimension psychosociale porte sur l’ « accomplissement », c’est-à-dire la possibilité de s’accomplir au quotidien, de pouvoir agir sur son environnement. Cette dimension concerne la formation, la scolarité pour les enfants, les activités quotidiennes et le travail au sein de la structure d’accueil (9).
La scolarité est un élément d’intense satisfaction pour les parents. Les enfants ont ainsi l’occasion de suivre une scolarité jugée «de qualité» par les parents. En outre, ils peuvent rencontrer d’autres enfants, et apprendre très vite le français. Les formations sont perçues comme un moyen utile de «passer le temps».
Cependant, les demandeurs d’asile précisent les difficultés énormes qu’ils rencontrent afin de faire valoir leurs formations antérieures. Par exemple, il n’est pas rare de voir un médecin s’inscrire dans un graduat en infirmerie, parce qu’il n’a pu prouver qu’il avait ce diplôme au pays, ou parce qu’aucune équivalence n’a été établie entre le diplôme belge et celui qu’il détient.
L’« inscription sociale » est la troisième dimension psychosociale. Cette inscription sociale des demandeurs d’asile au sein de la société d’accueil semble difficile, pénible. Elle dépend beaucoup de la décision qui sera prise au niveau de la demande d’asile. Ce frein majeur de la procédure d’asile engendre chez certaines personnes une inhibition de l’action , une indisponibilité cognitive et une lassitude immense. Les personnes sont donc très souvent dans une situation d’attente, ne sachant si elles peuvent s’investir dans ce nouveau pays, dans de nouveaux tissages affectifs . Cependant, certains s’appuient sur de nouvelles rencontres, des amitiés, des relations amoureuses. Cela renforce leur sentiment de pouvoir un jour « reprendre racine » sur le sol belge. Ces soutiens sociaux deviennent même pour certains un tremplin pour un engagement social, une participation active à des groupes de réflexion, à des groupes de parole, voire à des groupes de revendication.
La dernière dimension, l’« enculturation », définie par Pourtois et Desmet (2004) comme la transmission des valeurs et des représentations collectives, concerne les valeurs et les croyances religieuses ou philosophiques des demandeurs d’asile.
La religion est un élément essentiel pour les personnes croyantes. Elles puisent dans leur foi des ressources qu’elles se disent incapables de puiser ailleurs: « Prier Dieu pour garder le courage , pour trouver des réponses , pour parler dans ma langue avec quelqu’un qui me comprend ». Apparaissent dans cette dimension toutes les difficultés que rencontrent les parents au niveau de l’éducation .
Les parents doivent faire face à des pratiques éducatives parfois extrêmement éloignées des leurs. Or, vivant au sein d’une structure communautaire, ils sont confrontés aux assignations sociales véhiculées par les travailleurs sociaux. Par exemple, une mère disait « ils m’ont dit : tu tapes pas ton enfant . Alors , je tape plus . Mais comment je le punis , alors ? Ils m’ont dit : tu parles doucement , tu expliques . Je parle , mais ça ne va pas ». Cette mère est confrontée à un dilemme grave: elle ne peut plus punir son enfant comme elle le faisait avant, mais n’a aucun moyen pour remplacer le comportement éducatif rejeté par la société d’accueil. Elle ne signifie plus à son enfant les limites qu’il ne peut dépasser. Dès lors, elle conclut « Je ne suis plus sa mère . C’est le centre qui est sa mère ».
Agir: pour un mieux-être au quotidien
Les pratiques actuelles des intervenants sociaux tendent vers le bien-être des personnes primo-arrivantes. Cependant, malgré leur compétence et leur humanité , les intervenants sociaux sont limités dans leurs actes par les innombrables contingences liées aux lois actuellement en vigueur et aux institutions.
Il ne nous appartient pas de proposer des changements profonds dans les démarches liées à la demande d’asile. Par contre, certains éléments peuvent être aménagés de façon à assurer un vécu moins difficile pour chaque personne.
Emanant des acteurs de la recherche-action, les pistes suivantes pourront déboucher sur des pratiques visant un mieux – être des personnes demandeuses d’asile.
Favoriser l’affiliation aux groupes d’origine
Il importe de favoriser la reliance entre chaque individu et son environnement. Développer les possibilités de nouer des liens au sein d’un groupe de la communauté d’origine, ou au sein d’un groupe de même croyance religieuse, ou de personnes qui parlent la même langue est essentiel. Pour parvenir à répondre au besoin d’ attachement de chacun, les voies d’entrée sont nombreuses: associations de fait, asbl, lieux de culte, etc. sont autant de lieux où de tels liens peuvent s’établir. Une information complète et détaillée sur les lieux de rencontres disponibles autour du lieu de résidence serait extrêmement précieuse.
Mais il est également primordial pour certains demandeurs d’asile de pouvoir bénéficier d’informations sur les membres de leur famille restés au pays. La Croix-Rouge parvient parfois à localiser certaines personnes. Souvent, cependant, les recherches sont longues et infructueuses.
Créer des opportunités d’accomplissement personnel et collectif
Chaque individu possède en lui des ressources et des richesses provenant de ses expériences passées et de ses formations formelles et informelles. Cependant, dans bien des cas, les savoirs et savoir-faire antérieurs des demandeurs d’asile sont niés ou non considérés. Ce constat est dommageable pour au moins deux raisons: premièrement, c’est une atteinte profonde à la considération et à l’ estime de soi d’une personne; deuxièmement, c’est gâcher les possibilités d’un enrichissement mutuel . Mettre en place une forme de « réseau d’échanges de savoirs » serait intéressant pour pallier les manques actuels en la matière. Ce réseau permettra à chacun d’expérimenter de nouvelles connaissances et pratiques. De plus, celui qui possède un «savoir» se verra considéré par ses pairs.
Favoriser l’inscription sociale
Chacun doit pouvoir trouver «sa» place au sein de la société d’accueil. Pour y parvenir, il importe de respecter le degré d’implication de chacun et de laisser à chaque personne du temps pour «prendre ses marques», explorer le nouvel environnement et enfin se poser. Certains demandeurs d’asile apprennent très rapidement le français, alors que d’autres mettent des mois, voire des années. Cet exemple n’est cependant pas le reflet d’une volonté chez ces personnes de «s’intégrer» ou au contraire de vivre dans une forme de repli communautaire. Les demandeurs d’asile perçoivent parfois une assignation sociale extrêmement pesante et pressante de «s’intégrer». Mais il existe presque autant de formes d’inscription sociale qu’il existe d’individus.
Favoriser l’historicité
Chaque personne est porteuse d’une histoire personnelle, culturelle, sociale. La migration, véritable bouleversement dans les habitudes de vie de la personne, entraîne une rupture, une déconnexion avec son passé et donc avec son histoire.
Favoriser l’historicité des demandeurs d’asile permettra d’ assurer un enracinement et une continuité identitaires . Il importe que la personne prenne conscience de la façon dont elle porte en elle son histoire, et dont cette histoire influe sur ses stratégies actuelles. Cette conscientisation permet à la fois d’ancrer le sentiment d’appartenance de l’individu à son groupe d’origine et de créer des stratégies pouvant réorienter son histoire, la modifier afin de faire face aux situations nouvelles .
Pour une politique de l’humain…
Les demandeurs d’asile ont montré, au cours de cette recherche-action, les problèmes majeurs auxquels ils sont confrontés quotidiennement. Leur bien-être est sans cesse menacé par la précarité de leur situation.
Face au désarroi, aux souffrances mentales et sociales, aux épreuves d’une quotidienneté subie, il est indispensable d’attacher la plus grande vigilance aux difficultés liées à l’affiliation, à l’inscription sociale, à l’accomplissement et à l’historicité de chaque personne primo-arrivante. L’attention doit également porter sur les aspects physiques liés à ces conditions de vie particulières.
Puissions-nous espérer que les politiques à venir sachent s’engager dans les voies ici évoquées et les concrétiser dans des pratiques dynamiques et efficientes. Afin, d’une part, de tirer le meilleur parti des ressources que l’on peut déceler chez ces personnes et, d’autre part, de réduire la souffrance humaine qui accompagne ces parcours qui n’ont été ni voulus ni désirés.
Les demandeurs d’asile que nous avons rencontrés démontrent aussi qu’il est toujours possible de contourner les déceptions et les déliances, pour bâtir progressivement un monde où la reliance prédomine. Ces acteurs de terrain, véritables piliers de leur propre reconstruction, ont besoin, au cours de leur cheminement, de pouvoir s’appuyer sur des tuteurs de développement et sur des tuteurs de résilience (Cyrulnik, 2005). Les intervenants sociaux devraient pouvoir agir en tant que tels: devenir, pour certains demandeurs d’asile traumatisés, des tuteurs de résilience, et pour tous, des tuteurs assurant un développement optimal.
La triangulation interuniversitaire des données a permis de mettre en évidence les points communs et les divergences propres à chaque «terrain» de la recherche-action UNI-SOL. Un constat est cependant récurrent: le temps d’attente d’une régularisation est extrêmement long et préjudiciable pour la santé psychosociale des demandeurs d’asile.
Dès lors, il s’agit non seulement de veiller à circonscrire ces atteintes au bien-être des enfants, des femmes et des hommes qui arrivent sur le territoire belge, mais aussi d’investir ce temps comme un temps de développement identitaire et social.
A un autre niveau, il est nécessaire de sensibiliser la population autochtone à ces réalités de vie souvent peu ou mal connues, afin d’introduire un changement dans les regards posés sur la demande d’asile et sur ses «bénéficiaires».
Oser penser une politique de l’humain, une politique innovante et à la hauteur des défis que nous lancent les civilisations d’aujourd’hui, est un objectif essentiel pour une Europe métissée.
Benoît Demonty et Delphine Jouret , Université de Mons-Hainaut. Directeurs de recherche: Jean-Pierre Pourtois et Huguette Desmet
Dans le cadre de la Recherche-action UNI-SOL menée en collaboration avec le Fonds Houtman et l’ONE
Adresse des auteurs: Département de Développement familial et communautaire, Université de Mons-Hainaut, Place du Parc 18, 7000 Mons. Tél.: + 32 (0)65 37 31 12. Courriel: delphine.jouret@umh.ac.be.
(1) L’équipe de l’Université de Mons-Hainaut a également bénéficié du soutien du Ministère des Affaires sociales et de la Santé de la Région wallonne.
(2) Les centres ne sont pas le seul mode d’accueil existant. L’OCIV (Overlegcentrum voor Integratie van Vluchtelingen, ‘centre de consultation pour l’intégration des réfugiés’) et le CIRE (Coordination et Initiatives pour Réfugiés et Étrangers) sont des organisations-coupoles non gouvernementales qui organisent aussi l’accueil des demandeurs d’asile.
Les Initiatives Locales d’Accueil (ILA) sont un autre type d’accueil, à petite échelle, proposé par certains CPAS. Ces structures accueillent les demandeurs d’asile pour le temps de la durée de la procédure. Elles offrent une aide matérielle (nourriture, logement, soins de santé, etc.).
(3) Convention de Genève des Nations Unies, 1951.
(4) Amélioration du bien-être des familles primo-arrivantes. Nous entendons par «primo-arrivante» toute personne étrangère présente sur le territoire belge depuis moins de cinq ans.
(5) Les intervenants sociaux, comme les demandeurs d’asile, consacrent peu de moments à une réflexion sur leur travail, leur vie. Trop souvent pris dans «l’urgence de l’agir», ils ne peuvent que difficilement prendre du recul afin de penser – ou repenser – leur quotidien.
(6) Ces quatre dimensions psychosociales sont issues du Modèle des douze besoins de J.-P. Pourtois et H. Desmet (2004).
(7) Lorsqu’un demandeur d’asile arrive seul au sein d’une structure d’accueil de type communautaire, il est logé dans une chambre avec cinq autres «isolés», dans des lits superposés.
(8) Les chambres sont communes à six personnes pour les demandeurs d’asile isolés, et une chambre est attribuée par famille (père, mère, enfants, parfois même grands-parents). Les douches sont communes, situées dans les couloirs.
(9) Les demandeurs d’asile ne bénéficient pas d’un permis de travail. Ce qui est dénommé ici «travail» concerne des tâches ménagères d’entretien des locaux communs ou de vaisselles. Les demandeurs d’asile volontaires s’engagent à travailler pendant deux semaines. Une rétribution est octroyée à l’issue de ces quinze jours, de l’ordre de 32 euros.
Bibliographie
Copans J. (1999). L’enquête ethnologique de terrain . Paris: Nathan.
Cyrulnik B. (2005). Le murmure des fantômes . Editions Odile Jacob.
Grell P. (1981). Problématiques de la recherche-action. Dans Revue de l’Institut de Sociologie . 1981 – 3. Université Libre de Bruxelles, 605-614
Laplantine F. (2000). La description ethnographique . Paris: Nathan (2e édition).
Olivier de Sardan J.-P. (1995). La politique du terrain. Sur la production des données en anthropologie. Dans: Enquête 1 , Les terrains de l’enquête , pp.71-112.
Pourtois J.-P. et Desmet H. (2004). L’éducation postmoderne . Paris, PUF (4e édition).