Février 2008 Par Vincent LORANT N. LAC HONG J. PRIGNOT Réflexions

Introduction

Selon la dernière enquête de santé, menée en 2004 par l’Institut Scientifique de Santé Publique, 24% des Belges âgés de plus de 15 ans fument quotidiennement (1). Ce tabagisme est à l’origine de nombreuses maladies et de nombreux décès prématurés. En Belgique, on estime que pas moins d’un tiers de tous les décès pour causes médicales chez les hommes est lié au tabac (au total 15.958 décès). Le tabac est également un facteur important d’incapacités et d’invalidité. Selon le Global Burden of Disease, le tabac est responsable de 12.1% des années de survie perdues corrigées pour l’invalidité (DALY) dans les pays développés (2).
Ce facteur de risque n’est pas distribué de manière uniforme dans la population. En particulier, les groupes sociaux moins favorisés fument plus fréquemment et ont moins de succès dans le sevrage tabagique, ce qui en fait un groupe-cible des politiques publiques en matière de prévention du tabagisme.
Ces différences ont un impact considérable: la différence de tabagisme entre les classes sociales explique plus de moitié de la différence de mortalité existant entre elles dans divers pays occidentaux, et le tabagisme est responsable de près de la moitié des décès dans la classe sociale la moins favorisée (3).
S’attaquer aux inégalités de tabagisme est donc prioritaire. Depuis peu, les politiques publiques s’intéressent plus spécifiquement à ces populations, par exemple dans le programme du Ministère de la santé britannique «Tackling Health Inequalities» (4), ou dans «Healthy People 2010» visant à éliminer les disparités de santé aux USA (5).
L’objectif de cet article est de faire l’état de la question en ce qui concerne les inégalités sociales de tabagisme et de sevrage tabagique. Après avoir décrit leur ampleur, nous y apporterons des explications provenant des sciences humaines et des sciences de la santé.

Méthode

Nous utiliserons principalement les données de la dernière enquête en face-à-face réalisée en 2004 par l’Institut scientifique de santé publique et l’Institut national de statistique auprès d’un échantillon (n=12945, taux de participation=61.4%) de la population de 15 ans et plus résidant en Belgique. La méthodologie de l’enquête de santé est décrite en détail sur le site de l’ISSP (6). Le statut socio-économique y est mesuré par le niveau de scolarité, un indicateur fréquemment utilisé dans la mesure des inégalités de santé (7) (8). Nous analyserons 4 indicateurs de tabagisme: la prévalence de tabagisme actuel (quelle que soit la quantité fumée), l’âge de l’initiation tabagique, la dépendance dérivant du score d’intensité du tabagisme de Heatherton (9) et la prévalence des tentatives antérieures d’arrêt. Comme les personnes âgées ont un niveau de scolarité plus modeste tandis que la prévalence de tabagisme diminue chez elles, l’analyse s’est limitée aux personnes de 15 à 44 ans.

Résultats

Il existe un gradient important dans l’ampleur des inégalités socio-économiques en matière de tabagisme

Tableau 1 Comportement tabagique parmi la population résidente de 15 à 44 ans et parmi les fumeurs de 15 à 44 ans, Belgique 2004

Scolarité

Fumeur actuel (a) (%) Age de l’initiation (b) (moyenne) Tentative d’arrêt (b) (%) Dépendance forte (b)(c) (%)
Primaire 53.6 15.8 61.7 15.0
Secondaire inf. 41.5 16.0 64.7 16.8
Secondaire sup. 36.3 16.8 64.0 11.4
Supérieure- Unif 24.0 17.2 69.1 5.7

Source: Health Interview Survey 2004, ISSP
(a) parmi la population résidente (n=3795)
(b) parmi les fumeurs (n=1214)
(c) la dépendance est mesurée par les questions «Quand fumez-vous votre première cigarette après votre réveil?» et «Combien de cigarettes fumez-vous par jour?»

Tandis que plus de 41.5% des individus ayant bénéficié d’un enseignement primaire ou secondaire inférieur fument actuellement, seulement 36.3% des individus ayant un diplôme d’enseignement secondaire supérieur fument et 24% des individus ayant réalisé des études supérieures ou universitaires. Les inégalités apparaissent également parmi les fumeurs: les fumeurs disposant d’un diplôme de l’enseignement secondaire inférieur ont commencé à fumer plus jeunes (16 ans) que ceux disposant d’un diplôme supérieur ou universitaire (17 ans). Une majorité a tenté d’arrêter de fumer à un moment ou l’autre mais les différences entre niveaux de scolarité sont relativement faibles: 64.7% des individus disposant d’un diplôme d’enseignement secondaire inférieur ont fait une tentative d’arrêt contre 69.1% parmi les individus de scolarité supérieure.
Les individus dont la scolarité s’est arrêtée à l’enseignement secondaire inférieur sont beaucoup plus dépendants (16.8%) que les fumeurs de scolarité supérieure (5.7%). Cette différence dans la dépendance est sans doute un facteur explicatif dans les différences de succès du sevrage tabagique entre les niveaux d’éducation.
Les comparaisons internationales réalisées par l’Université de Rotterdam mettent en évidence un gradient Nord/Sud des inégalités sociales de tabagisme: en comparaison avec les populations favorisées, les populations défavorisées fument plus dans les pays nordiques tandis que l’inverse s’observe dans les pays du Sud (10) (11). Cependant, parmi les jeunes de moins de 24 ans, cette prédominance du tabagisme dans les populations faiblement scolarisées tend à se retrouver tant au Nord qu’au Sud dans l’ensemble des pays européens.
Dans les pays du Nord comme le Royaume-Uni, la décroissance de prévalence du tabagisme au cours des dernières décennies ne concerne que les classes favorisées, le comportement tabagique restant inchangé dans les groupes socialement défavorisés (12).
Au niveau européen, chez les jeunes (16-24 ans) dont le niveau de scolarité est modeste, la prévalence de tabagisme est 1.85 fois supérieure à celle des jeunes à niveau de scolarité élevée. En Belgique ce ratio atteint 3.05 (95% IC 1.65, 5.63) (11). En Belgique les inégalités sociales de tabagisme sont plus marquées que dans n’importe quel autre pays européen.
Il est possible que les explications des inégalités sociales en matière de tabagisme soient différentes aux diverses étapes franchies par le fumeur: l’initiation tabagique, la transition vers le statut de fumeur régulier ou les tentatives de sevrage.

Les effets de pairs et les effets d’identité

Une perspective intéressante en ce qui concerne l’initiation tabagique chez les jeunes, est celle des normes, c’est-à-dire des comportements attendus d’un individu aspirant à un statut social dans un groupe (groupe de pairs, famille, école). Nous avons tendance à nous comporter d’une manière déterminée en fonction des rôles sociaux que nous exerçons (professionnel, père ou mère, enfant ou enseignant, adolescent ou adulte, etc). Le comportement tabagique serait plus fréquent dans les groupes sociaux où le tabac est une norme de comportement. De nombreuses études empiriques ont montré que le risque d’initiation tabagique d’un individu était étroitement lié à la prévalence du tabagisme du groupe de pairs (13) (14). Selon Lisa Powell le risque d’initiation d’un jeune passant d’une école où personne ne fume vers une école où 25% des jeunes fument augmenterait de 15% (13).
De nombreuses études se sont intéressées à l’effet de la famille, de l’école, du groupe de pairs ou du quartier (15) sur l’initiation tabagique. Il semble que la prévalence du tabagisme dans l’école, dans le groupe de pairs ou dans la famille ait une influence très nette sur l’initiation tabagique (16) (17) (18) (19). L’interdiction du tabagisme à la maison (et dans une moindre mesure à l’école) tend à retarder l’initiation tabagique des jeunes (20).
La contribution de ces effets de pairs aux inégalités sociales de tabagisme peut s’expliquer par le fait que le tabagisme est plus prévalent dans les écoles accueillant un public moins favorisé ( par exemple les écoles professionnelles en communauté française) (21) ou par le rôle de la famille dans la transmission du tabagisme entre générations et dans la mobilité sociale.
Les individus d’origine sociale modeste fument plus parce qu’ils ont été exposés très tôt au tabagisme de leurs parents, de leurs pairs ou de leur environnement proche (22). Cette situation offre une opportunité d’action pour la médecine de famille ou pour la promotion de la santé dans les écoles.
Comment le tabagisme peut-il devenir une norme dans un groupe de pairs tel qu’un groupe de jeunes? Selon la sociologie interactioniste, le tabagisme chez les adolescents procède d’une quête d’identité qui ne se construit plus principalement sur des appartenances sociales classiques comme la classe sociale, l’ethnie, le genre ou le groupe d’âge. Ces catégories sociales façonnent encore notre identité mais leur poids – dans notre société – est moindre car la division du travail entre les genres tend à s’estomper et la persistance d’un chômage de longue durée ainsi que le déclin de la société industrielle affectent les identités fondées sur le marché du travail, comme l’identité ouvrière. Dans ce contexte d’identités floues, le tabac jouerait un rôle symbolique permettant de communiquer aux autres une identité fondée sur la maturité (pour fumer il faut disposer de ressources économiques), sur la prise de risque mesurée (à la différence de l’alcool ou de la drogue), sur la rébellion face à l’autorité (23), sur l’affirmation d’une pleine possession de soi-même («je connais les risques et je les prends») et offrirait aux filles la possibilité de rivaliser avec les garçons (24).
Le risque attaché au tabac n’est pas dénué d’impératifs moraux signalés en anthropologie: fumer c’est préférer une consommation présente à une réduction d’espérance de vie dans le futur, fumer c’est entrer en conflit avec des normes de l’hygiène bienséante et marquer une distance à certains impératifs moraux (25). Le tabac étant frappé de manière croissante par l’opprobre publique, fumer est en passe de devenir un signe distinctif de la résistance d’un groupe à la recherche d’une identité sociale spécifique (26).

La gestion du stress chronique

Pourquoi les populations continuent-elles à fumer? Deux explications sont souvent apportées: la gestion du stress et la dépendance.
Selon diverses études qualitatives auprès de populations défavorisées, le tabac serait un des seuls plaisirs subsistant dans un horizon de vie relativement sombre et aussi un moyen de faire face aux difficultés économiques et sociales auxquelles elles sont confrontées dans le domaine de leur travail, de leur logement (15) et de leur vie quotidienne (22)(23). Une même attitude se retrouve chez les sans abri (Okuyemi, 2006) Cet argument correspond à ce que décrivent les fumeurs d’origine sociale modeste dans les études qualitatives (16)(18)(27)(28)(29)(30)(31); il est de plus fréquemment reflété par la médecine générale (32) qui répugne à aborder le sevrage avec des patients confrontés à de multiples difficultés sociales et économiques. Le tabac serait donc une ressource pour compenser les effets délétères d’un environnement social précaire (33).
Peu compatible avec cette thèse est que la nicotine a peu d’effets pharmacologiques sédatif ou anxiolytique et, au contraire, manifeste plutôt des effets stimulants (24). Mis à part son rôle dans le syndrome de privation, le rôle tranquillisant attribué au tabac correspond mal à ses propriétés pharmacologiques.
Cet argument soulève une question plus fondamentale: il est vraisemblable que les préférences dans la gestion des risques de santé varient d’un groupe social à l’autre (30). Les individus moins favorisés seraient plus orientés vers la gestion des risques immédiats et moins sensibles aux risques futurs comme celui de décéder d’un cancer du poumon. Ce comportement «moins préventif» à long terme pourrait reposer sur le fait que leur horizon de temps est réduit et moins favorable, les populations défavorisées ayant indépendamment de leur tabagisme, une espérance de vie plus courte et des revenus futurs (sous forme de pension) plus limités (33).

Inégalités sociales de dépendance et du sevrage

La dépendance des individus à niveau de scolarité modeste est plus fréquente (15%) que celle de ceux dont le niveau de scolarité est supérieur ou universitaire (5.7%). Il y a peu de différence en ce qui concerne les tentatives d’arrêt (62% contre 69%). Le taux de succès dans les tentatives d’arrêt est plus bas et le taux de rechute plus élevé parmi les individus à scolarité modeste. Ce sont donc eux qui ont le plus grand besoin des méthodes d’aide à l’arrêt (1). Ces inégalités sociales de dépendance sont confirmées par les dosages de cotinine plasmatique (un marqueur d’imprégnation par la nicotine de la fumée) qui sont d’autant plus élevés que le niveau socio-économique est plus bas (22).
En outre, la réussite d’un sevrage tabagique requiert des capacités de préparation et des ressources cognitives spécifiques. Plus le sentiment d’efficacité des fumeurs quant à leur capacité à réussir ce sevrage sera faible, moins ils auront confiance en eux, moins ils disposeront d’un support social efficace, et plus faible sera leur chance de réussir à arrêter(34). Les individus de niveau social plus modeste ont ainsi une moindre estime d’eux-mêmes et un moindre sentiment d’efficacité de leur action (35)(36). Les fumeurs moins favorisés estiment donc leurs chances de réussir un sevrage plus faibles par comparaison aux fumeurs plus favorisés (37).
Cette situation est interpellante pour les modèles utilisés dans les changements de comportements, en particulier le modèle trans-théorique qui suppose le passage systématique par les stades de satisfaction, de dissonance, de pré-intention, d’intention avant d’arriver au sevrage. Ce type de progression motivationnelle est peut-être plus lent ou plus rare dans les populations défavorisées. Certains auteurs remettent d’ailleurs en question cette approche graduelle et motivationnelle dans la prise en charge du sevrage ou des assuétudes en général (38). Les chances de succès de sevrage sont d’ailleurs plus élevées pour les tentatives d’arrêt soudaines (65%) que les tentatives d’arrêt planifiées (42%) (39).

Le cycle de vie

Jusqu’ici nous avons décrit les explications d’inégalité en fonction des étapes: l’initiation, la persistance et le sevrage. Ce faisant, nous risquons de perdre de vue la continuité de ce processus. Les inégalités sociales sont le résultat de processus survenant à différentes étapes de la vie et s’accumulant au fil de l’existence. La plupart des études concernent les différences sociales du tabagisme au moment de l’enquête, ce qui ne permet pas de savoir si elles sont survenues principalement durant la prime enfance, l’adolescence, ou à l’âge adulte.
Quelques études de cohortes montrent cependant qu’elles sont présentes à chaque étape. Les enfants nés dans une famille ouvrière ont plus de risques d’être exposés au tabagisme durant la grossesse que ceux nés dans une famille de profession libérale(40). Le risque d’initiation tabagique, parmi les enfants nés dans une famille vivant sous le seuil de pauvreté, est de 48% supérieur (OR=1.48 , IC 95% 1.23, 1.79) à celui de ceux d’une famille vivant au-dessus de ce seuil (41). Ces différences surviennent également dans la transition vers le tabagisme quotidien, qui est plus fréquent, (OR=1.51 IC 95% 1.21, 1.88) et dans le sevrage tabagique, qui est plus rare (OR=0.52).

Politiques publiques: influence du prix et des taxes

L’approche du tabagisme et de ses inégalités sociales adopte une perspective trop souvent individuelle: le risque de fumer est expliqué essentiellement par des attributs personnels comme l’âge, l’origine sociale, la dépendance, les effets de pairs, le sentiment de maîtrise, etc.
Cette approche ignore que la santé d’une population est également le produit de mesures collectives de protection et de réglementation. Quelques instruments de l’action publique sont susceptibles de minimiser ces différences sociales face au tabagisme: les taxes, les interdictions de publicité, les campagnes d’éducation à la santé et la réglementation sur le tabagisme dans les lieux publics.
Les taxes sont non seulement utiles au budget de l’Etat mais peuvent avoir également une vocation de santé publique. Les taxes accroissent le prix du tabac et, en conséquence, réduisent la demande de cigarettes. Cependant le lien entre le prix des cigarettes et la demande est un phénomène difficile à étudier: les taxes sont en général identiques à l’intérieur d’un pays et varient faiblement avec le temps. En outre, le tabagisme est un comportement addictif qui se prête difficilement à une analyse strictement économique.
Néanmoins, la demande de tabac est sensible aux taxes tant pour la propension à commencer à fumer que pour la propension à arrêter. En moyenne, la sensibilité de la demande de tabac varie entre une élasticité (variation de la consommation en fonction de la variation du prix) de –0.3 et une élasticité de –0.5(42): dans le meilleur des cas, une augmentation de 10% du prix du tabac entraîne une réduction de 5% de la demande de cigarettes. Une augmentation de 1% des taxes augmente l’âge de l’initiation de 0.16 années chez les hommes et réduit le nombre d’année de tabagisme de 0.60. Les femmes sont moins réactives au prix du tabac (leurs élasticités étant respectivement de 0.08 et 0.46) (43).
L’impact des taxes sur la consommation de cigarettes pourrait être inégal d’un groupe socio-économique à l’autre. Deux hypothèses s’affrontent ici: d’un côté la barrière du prix pourrait être plus prononcée dans les couches sociales moins favorisées à cause de leur revenu plus modeste; de l’autre, ces groupes sociaux sont plus sujets à la dépendance et donc moins sensibles aux variations de taxe et de prix. La théorie et la recherche empirique soutiennent la première hypothèse: les individus à revenu faible sont pratiquement deux fois plus sensibles à une variation du prix que les individus disposant d’un revenu plus élevé (élasticités respectivement de –0.29 versus –0.17) (44). Les individus d’instruction plus modeste sont plus sensibles au prix que les individus plus instruits (45).
La théorie économique suggère que le degré de dépendance (ou addiction) augmente la sensibilité au prix. Le sens commun suggérerait pourtant que plus un fumeur est dépendant moins il est sensible au prix. Toutefois, la théorie économique sur les comportements addictifs (46) suggère que les individus plus dépendants sont plus sensibles au prix (sur le long terme) parce que les consommations des différentes périodes de leur vie sont cumulatives. Une augmentation du prix sur le long terme est donc plus susceptible d’entraîner une réduction de la consommation chez les personnes dépendantes. Cette théorie est confirmée par les travaux empiriques et explique pourquoi l’arrêt tabagique brutal est plus fréquent chez les fumeurs très dépendants que ceux moins dépendants; pour les premiers, la difficulté d’une diminution graduelle de consommation est beaucoup plus importante.
Toutefois, les mesures de taxation sont susceptibles d’avoir des effets collatéraux inattendus. Les fumeurs compensent l’augmentation des taxes en se reportant sur des cigarettes dont la concentration en nicotine ou en goudron est plus élevée (47) ou en consommant plus intensément les cigarettes résiduelles ainsi que le montre le taux de nicotine plasmatique plus élevé dans les classes défavorisées après ajustement pour le nombre de cigarettes par jour (22). Les taxes et les accises sur le tabac peuvent aussi poser des problèmes d’équité car elles ne sont pas modulées selon le revenu: les groupes à revenus modestes risquent donc de payer sous forme de taxe une proportion plus élevée de leur revenu que ceux disposant d’un revenu plus élevé (42).

Politiques publiques: les campagnes d’éducation pour la santé

Des efforts importants ont été déployés par les gouvernements pour informer le public des dangers de la cigarette en sorte qu’il est actuellement impossible d’ignorer les dangers liés au tabac. Il est cependant difficile d’évaluer l’impact de ces campagnes d’information car leurs effets se combinent avec ceux d’autres mesures (comme l’évolution des taxes et l’interdiction plus ou moins complète de la publicité). Les programmes éducatifs en milieu scolaire retardent tout au plus l’initiation sans la prévenir vraiment(48).
On admet généralement que l’effet préventif des campagnes sur la consommation du tabac dépend de leur fermeté et du danger mis en avant: les avertissements prudents et nuancés ont peu d’impact tandis que les campagnes plus agressives et visant à suggérer la peur sont plus efficaces (42). D’autres estiment au contraire que la peur est mauvaise conseillère et que pour consolider des résultats à moyen terme, une approche ‘soft’ et respectueuse du public, soutenant ses efforts, plutôt que l’effrayant, augmente les chances de succès (49).
Ces campagnes ont-elles une efficacité pour tout le monde? Non car la prévalence du tabagisme a bel et bien diminué entre 1973 et 1996 parmi les groupes les plus favorisés (scores de 0 à 2) tandis qu’elle restait relativement stable dans les groupes les plus défavorisés (score de 4) et augmentait chez les individus vivant dans les conditions les plus difficiles (score 5) (Figure 2) (12). Les campagnes d’information ou d’éducation à la santé semblent profiter surtout aux couches sociales favorisées de la population. Le tabagisme serait ainsi en passe de devenir une des causes majeures d’inégalités sociales de santé.

Politiques publiques: interdiction de fumer dans les lieux publics fermés

L’interdiction de fumer dans les lieux publics trouve sa justification dans les effets-santé bien démontrés du tabagisme passif dans tous les lieux fermés, sur la quasi-inefficacité des méthodes d’épuration de l’air et sur les droits des travailleurs à un environnement sain et sans fumée. Ces effets se font ressentir non seulement chez les non-fumeurs, mais encore davantage chez les fumeurs, les plus proches de la source de fumée environnementale.
L’interdiction totale de fumer dans les lieux de travail entraîne évidemment une réduction de l’exposition aux toxines du tabac pour l’ensemble du personnel ainsi que le démontre une étude récente dans les ‘pubs’ irlandais: la concentration de cotinine salivaire y a baissé de 80% chez les non-fumeurs. Les symptômes respiratoires y ont eux aussi diminué (50). Cette mesure protége une population socialement moins favorisée que ce soit le personnel travaillant dans ces bars ou leur clientèle.
Une revue de 26 études concernant l’effet des interdictions de fumer sur les lieux de travail a montré que celle-ci s’accompagnait d’une réduction moyenne de 3.8% du taux des fumeurs et, chez les sujets continuant à fumer, d’une diminution moyenne de consommation de 3.1 cigarettes par jour. Les interdictions partielles (celles où fumer est autorisé dans certains locaux) ont un effet nettement moindre (51).
Actuellement, la plus grande part de l’exposition à la fumée environnementale survient dans les lieux privés, où la législation n’intervient pas et où la prise de mesures revient aux fumeurs eux-mêmes. Ceci fait ressortir à nouveau l’inégalité entre défavorisés (notamment les chômeurs qui séjournent plus longtemps à domicile) et les travailleurs protégés de la fumée pendant (quasi) toute leur journée de travail. De plus, on sait que les restrictions volontaires du tabagisme à domicile sont moins fréquentes dans les milieux défavorisés.

Autres politiques publiques

L’interdiction totale de la publicité réduit sensiblement la consommation tabagique (48) (Banque Mondiale) et contribue à la dénormalisation de ce comportement. L’interdiction de vente aux mineurs n’a qu’un impact limité car elle peut être facilement contournée.

Conclusions

Les inégalités socioéconomiques en matière de tabagisme sont importantes: les catégories socioéconomiques moins favorisées fument plus, plus précocement et sont plus dépendantes du tabac. En comparaison avec les autres pays européens, en Belgique les inégalités sociales sont plus prononcées. Elles trouvent leurs racines dans l’initiation, dans la persistance du tabagisme et dans le sevrage.
Les individus d’origine sociale modeste fument plus parce qu’ils ont été exposés très tôt au tabagisme de leurs parents, de leurs pairs ou de leur environnement proche. Cette situation offre une opportunité d’action pour la médecine générale qui approche les milieux de vie (école, famille, entreprise).
D’autre part, le tabac serait un moyen de compenser les effets délétères d’un environnement social et économique précaire. Ces inégalités s’expliquent aussi par la plus grande dépendance tabagique des couches sociales moins favorisées et par le manque de ressources psychocognitives et sociales pour aider au sevrage: le rôle du secteur éducatif dans le développement de ces ressources psychocognitives est bien connu. Le système scolaire belge favorise-t-il le développement équitable de ces ressources?
En Communauté française, le système éducatif semble s’orienter vers une ségrégation croissante des résultats scolaires (52).
Enfin, les politiques publiques peuvent jouer un rôle important en cette matière: les taxes et la réglementation sur les lieux publics semblent réduire les inégalités sociales de tabagisme tandis que la promotion de la santé a des effets incertains.
Comment s’attaquer à ces inégalités? Nous reprenons principalement les recommandations du rapport Acheson sur les inégalités de santé au Royaume-Uni (53) ainsi que la stratégie «tackling health inequalities (4)

Reconnaître le problème et définir des objectifs en Communauté française

La Belgique et la Communauté française renâclent à définir une politique claire de réduction des inégalités de santé telle qu’on peut l’observer chez nos voisins britanniques (4) néerlandais (54) ou scandinaves. Le programme quinquennal de promotion de la santé de la Communauté française reconnaît l’importance d’«adapter les stratégies pour faire face aux inégalités devant la santé» (55); cependant il reste relativement silencieux sur la question du tabagisme; quant au programme opérationnel, il n’aborde pas la manière de réduire ces inégalités de tabagisme. Cela est étonnant car la Communauté française dispose d’un espace pertinent pour s’attaquer à ce problème: les écoles et les effets de pair dans l’initiation du tabagisme chez les jeunes.
Nous nous risquons donc à suggérer au Conseil supérieur de promotion de la santé d’inscrire dans le prochain programme l’objectif suivant: dans 5 ans la Communauté française de Belgique aura réduit de 25% les différences de prévalence de tabagisme entre les écoles d’enseignement général et les écoles d’enseignement professionnel.

Interdire le tabagisme dans les lieux publics fermés

La législation belge autorise sous certaines conditions la présence de fumoirs dans les lieux de travail et, dans l’Horeca, la persistance d’espaces-fumeurs. Ces restrictions, sans doute prises sous la pression des cigarettiers et du secteur Horeca qui y est parfois lié, ne sont pourtant pas justifiées par un facteur économique, car les études sérieuses montrent que l’interdiction n’a pas d’impact économique négatif sur les ventes des restaurants et des bars et que les seuls travaux concluant à un effet négatif sont ceux financés par l’industrie du tabac (56)(57). L’interdiction récente et bien appliquée de fumer dans les bars n’a pas modifié en Irlande la tendance légèrement négative des ventes observée depuis quelques années (50).
La Belgique n’apparait pas particulièrement un bon élève en matière de législation sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics et dans les écoles. Sur 22 pays Européens, elle arrive avec un score de 8/22 (58).

Soutenir les programmes de sevrage tabagique

A l’instar de ce qui se passe en Grande-Bretagne, un soutien des pouvoirs publics sous forme d’un remboursement des interventions des tabacologues et des médicaments d’aide à l’arrêt, ainsi qu’une meilleure reconnaissance de la charge supplémentaire que représente l’aide à l’arrêt par le généraliste serait le plus bénéfique pour les milieux socialement défavorisés.
Dans une étude pilote réalisée en France dans les centres d’examen périodiques de santé, une prise en charge gratuite du sevrage par substituts nicotiniques a entraîné à 6 mois un taux d’arrêt de 29.9% contre 10.3% dans le groupe n’ayant bénéficié que d’un conseil médical (59). Sachant que les médecins généralistes sont des acteurs importants pour les populations moins favorisées, cet objectif implique également de renforcer le rôle du médecin généraliste dans la prise en charge du sevrage tabagique.
Vincent Lorant , Ecole de Santé Publique, Université Catholique de Louvain, Lac Hong Nguyen , Centre Académique de Médecine Générale, Université Catholique de Louvain, Jacques Prignot , Professeur émérite, Université Catholique de Louvain et FARES (Bruxelles), Jean Laperche , Centre Académique de Médecine Générale, Université Catholique de Louvain
Adresse des auteurs: c/o Vincent Lorant, Ecole de Santé Publique, Faculté de Médecine, Université Catholique de Louvain, Clos Chapelle aux champs 30.41, 1200 Bruxelles. Tél.: 02 764 32 63; Fax: 02 764 31 83; courriel: lorant@sesa.ucl.ac.be
Cet article est une version modifiée d’un texte paru dans Louvain Médical , vol. 125, n°9, nov. 2006.

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