Qu’est-ce que le «risque cardio-vasculaire global» (1)?
C’est une seule mesure qui regroupe les principaux facteurs de risque de l’athérosclérose. Cette démarche, nouvelle en médecine, permet de prendre en compte simultanément les 8 principaux facteurs de risque des maladies cardio-vasculaires, en relativisant l’impact du cholestérol par rapport au tabac, à l’hypertension artérielle ou à l’excès de poids, et vice-versa…
En médecine générale, cette nouvelle approche nous semble particulièrement pertinente pour deux raisons:
-elle nous permet de relativiser et de globaliser l’impact de tous ces facteurs sur la santé cardio-vasculaire d’un patient en particulier, et de pouvoir négocier avec lui ce qui est réaliste, aujourd’hui, de vouloir modifier si nécessaire.
-cette démarche nous permet également de renforcer notre approche globale de la santé. Car le tabac, le poids ou l’alimentation déséquilibrée sont également utiles à prendre en compte dans beaucoup d’autres situations que le contexte cardio-vasculaire: la prévention des cancers, les douleurs de gonarthrose, etc.
Trois étapes: dépistage, détermination du risque et prise en charge
La première étape est de rassembler l’information sur les huit facteurs de risque cardio-vasculaires principaux, classiquement reconnus comme intervenant dans les maladies ischémiques.
Cette étape est purement clinique; le généraliste regroupe les informations suivantes:
A (âge) | Le patient est-il âgé de plus de 50 ans? |
B (briquet) | Fume-t-il au moins une cigarette chaque jour? |
C (cholestérol) | A-t-il des antécédents de cholestérol perturbé? |
D (diabète de type 2) | A-t-il un diabète de type 2 connu (glycémies à jeun > à 126 mg/ml à deux moments)? |
E (événement) | A-t-il des antécédents d’événement personnel ischémique? |
F (familial) | A-t-il des antécédents familiaux cardio-vasculaires, chez les proches au premier degré (avant 55 ans chez le père ou un frère; avant 65 ans chez la mère ou une sœur)? |
G (graisse) | Présente-t-il un excès de graisse (BMI > à 30 kg/m2 et/ou tour de taille supérieur à 102 cm chez l’homme et à 88 cm chez la femme)? |
H (hypertension) | A-t-il une hypertension artérielle traitée ou mesurée supérieure à 140 / 90 mm Hg à plusieurs reprises? |
La deuxième étape consiste à déterminer le risque cardio – vasculaire global .
Les informations recueillies permettent de classer immédiatement le patient dans l’un des 4 groupes à risque suivants.
Risque d’emblée élevé: facteur de risque E et/ou D (Rouge)
Risque d’emblée bas: aucun facteur de risque clinique (Vert)
Risque lié au tabac uniquement: facteur de risque B (Brun). Le sevrage est associé à un risque bas après 2 ans.
Risque à déterminer: un (A, C, F, G, H) ou plusieurs (A, B, C, F, G, H) facteurs de risque (Mauve).
Un patient sur deux fera d’emblée partie de l’un des trois premiers groupes (rouge, vert, brun).
L’autre moitié se retrouve dans le groupe des patients à risque indéterminé (2) (mauve). C’est uniquement dans ce groupe-là qu’un profil lipidique associé à une glycémie est nécessaire, pour déterminer le risque cardio-vasculaire global grâce aux tables de risque selon le projet SCORE ou l’étude de Framingham: la table précise si le patient est à risque élevé (rouge), moyen (orange) ou bas (vert).
Elle continue toujours en 2006: affiche prévue pour la salle d’attente, documents pour les patients, cadastre des ressources locales pour l’accompagnement des patients présentant un risque cardio-vasculaire, formation et discussion de cas de suivi de patients à risque cardio-vasculaire identifié.
Des intervisions et les prémisses d’un travail en partenariat sont prévues pour 2007.
La troisième étape est une prise en charge prioritaire des patients à risque cardio-vasculaire global élevé (rouge) ou moyen (orange) et des patients fumeurs (brun).
Douze cibles thérapeutiques sont définies dont 6 ont un niveau de preuve EBM élevé I (essais randomisés) à II (études de cohorte).
0 ( zéro ): absence de tabagisme (EBM II).
M: alimentation de type m éditerranéen (EBM I).
E: e xercices physiques: 3 X 30 minutes par semaine (EBM II).
P: inhibition p laquettaire: acide acétylsalicylique (EBM I).
C: inhibition du c holestérol: une statine essentiellement pour son rôle de stabilisateur de plaque, même en cas de cholestérol normal (EBM I).
A: inhibition de l’ a ngiotensine: un IEC (ou sartan en cas d’intolérance) pour son rôle protecteur au niveau des artères, même en cas de pression artérielle normale (EBM I).
Ces 6 cibles principales se retiennent sous forme d’une plaque minéralogique: OMEPCA Les autres cibles thérapeutiques sont les suivantes:
HbA1c (3) < 7% (si diabète de type 2) (EBM II)
Cholestérol total < 190 mg/dl
LDL-Cholestérol < 115 mg/dl
Tension artérielle systolique < 130 mm Hg
Tension artérielle diastolique < 85 mm Hg
BMI (indice de masse corporelle) < 25
Les cinq dernières cibles thérapeutiques ont un niveau de preuve EBM IV (opinions d’experts).
Il existe une plaquette présentant ces trois étapes, elle est consultable sur le site http://www.ssmg.be En conclusion, nous pouvons affirmer que le risque cardio-vasculaire global peut être facilement déterminé par le médecin généraliste en consultation courante pour les patients de 30 à 75 ans.
Nous présenterons, dans une prochaine rubrique, comment, pas à pas, le généraliste peut accompagner ce patient à risque vers une ou plusieurs de ces cibles. Tout un programme!
D’après un article de Patricia Eeckeleers , commenté par Jean Laperche , médecin généraliste, Fédération des maisons médicales
Adresse de l’auteur: Fédération des maisons médicales, Boulevard du midi 25/5, 1000 Bruxelles. Tél. : 02/514 40 14. Fax : 02 514 40 04
Cette série d’articles est également publiée par la Revue de médecine générale de la Société scientifique de médecine générale. (1) De Muylder R., Jeanjean M., Paulus D., Descamps O., Selvais P., Chenu P., Boland B.: Un algorithme pour la prévention cardio-vasculaire en médecine générale, Louvain Med. 2004; 123: S235-S240.
(2) Résultats extraits d’une étude pilote réalisée en Communauté française de Belgique en 2004 auprès de 3200 patients avec 80 généralistes. Ces résultats seront détaillés dans un prochain numéro de cette revue.
(3) Dosage de l’hémoglobine glycosylée, qui permet de surveiller l’équilibre glycémique chez les diabétiques.