Mai 2003 Par Christian DE BOCK Initiatives

L’an dernier, à la suite d’un accord entre l’autorité fédérale et les communautés, les enfants âgés de 1 à 5 ans ont eu la possibilité de se faire vacciner gratuitement contre les infections à méningocoque du sérogroupe C.(1) Il est intéressant de s’arrêter un instant sur le bilan de cette initiative concertée qui aura coûté environ 12,5 millions d’euros, deux tiers à charge du budget fédéral et un tiers pour les communautés, responsables aussi de l’organisation de la campagne dans le cadre de leurs compétences en matière de prévention collective.

Succès de foule

Pour rappel, la tranche visée était constituée des enfants âgés de 1 à 5 ans, soit 400.000 jeunes enfants. En Flandre, l’action avait déjà démarré un peu avant l’accord entre l’Etat fédéral et les communautés; elle a eu lieu pour la majeure partie de mars à juin 2002 en Communauté française. En Flandre, la campagne a aussi visé les adolescents de 15 à 18 ans, ce qui a permis de protéger 7 cohortes en un an.
La Communauté flamande a distribué 460.000 vaccins, et la Communauté française Wallonie-Bruxelles près de 200.000. Etant donné qu’une partie de la population cible avait déjà été vaccinée sur une base individuelle, la Communauté française a pu étendre son intervention aux enfants nés en 1996.
Du côté francophone, on estime que la couverture est de 80% , compte tenu du fait qu’un nombre significatif d’enfants étaient déjà vaccinés au prix fort au démarrage de la campagne (voir encadré).

Méningocoque C en régression

Le nombre de cas d’infections confirmés par le laboratoire de référence des méningocoques (Institut scientifique de santé publique – section Bactériologie) avait tendance à augmenter depuis le début des années 90, particulièrement dans la province d’Anvers. Pour le pays, on était ainsi passé de 144 cas en 1993 (18% de C) à 380 en 2001 (49% de C).
Les chiffres de 2002 marquent un net coup d’arrêt, avec 262 cas (35% de C).

Initiatives mutuellistes

Devant le délai nécessaire pour mettre en place la campagne publique, certaines mutualités ont pris l’initiative d’offrir à leurs affiliés une intervention significative dans le prix du vaccin dans le cadre de leur assurance complémentaire. Nous disposons de chiffres concernant les Mutualités chrétiennes.
Ces avantages étant gérés de façon autonome par les mutualités régionales ou leur plate-forme communautaire, l’approche n’a pas été la même dans le Nord et le Sud du pays.
Entre le 01/10/2001 et le 31/12/2002, les mutualités chrétiennes flamandes ont remboursé 20 € pour les enfants âgés de 16 mois à 4 ans, et du 01/01/2002 au 31/12/2002 pour les jeunes âgés de 5 à 18 ans à la condition qu’ils ne puissent pas bénéficier d’une vaccination gratuite grâce à la campagne de la Communauté flamande.
A la date du 25-11-2002, elles étaient intervenues pour près de 3.000.000 € et 146.000 enfants. Cela représente 20 à 25% du groupe cible pour cette mutualité qui est la plus importante en Flandre.
Cette action d’envergure a aussi permis d’obtenir des fabricants une diminution de 15% du prix de vente en pharmacie.
Les mutualités francophones et germanophone ont remboursé 20 € pour les enfants âgés de 1 à 5 ans avant le démarrage de la campagne publique. Elles sont intervenues pour environ 5.800 enfants (un peu plus de 110.000 € de dépense), soit près de 11% de leurs affiliés dans la tranche d’âge considérée.
Deux d’entre elles ont maintenu leur service pour les jeunes de 15 et 16 ans (Liège) et pour tous les enfants jusqu’à 18 ans (Namur), ce qui peut se comprendre pour des raisons épidémiologique (cohortes les plus touchées après les 0 à 4 ans) et politique (pas de campagne généralisée en Communauté française en 2003).
L’effort de cet organisme assureur a été très important, comme vous pouvez le constater, et c’est sans doute vrai aussi des autres unions nationales ayant inscrit ce vaccin dans leurs avantages en 2002. Il faut ajouter à cela que leur remboursement par dose (20 € pour un prix de vente en pharmacie de 35,67 €) leur a coûté plus cher que le prix obtenu par les autorités pour la campagne généralisée…
Pour Bertrand Castel , responsable marketing à l’ANMC, les mutualités ont pu jouer un rôle intéressant dans ce dossier: faire pression sur les autorités sanitaires pour qu’elles ne tardent pas à lancer leur campagne de vaccination. Par ailleurs, il constate que la campagne publique met davantage de temps à s’organiser, mais permet de vacciner les enfants à moindre coût, tandis que les services mis en place par les organismes assureurs sont plus vite opérationnels mais plus onéreux.
C.D.B.

Ce résultat est très spectaculaire. Il peut être attribué pour partie à l’effort massif de vaccination (c’est à espérer, vu la somme d’argent et d’énergie dépensée par les familles, les professionnels de santé et les autorités), mais pas uniquement. En effet, il semble que l’évolution de l’incidence dans les tranches d’âge non vaccinées suive la même tendance à la baisse. Il y aurait donc cumul d’une baisse ‘naturelle’ et d’une baisse due à la campagne de vaccination (3).

Et pour la suite

Du côté flamand, la campagne sera prolongée jusqu’à la fin 2004, 3 cohortes étant vaccinées en 2003 et 4 en 2004, cet étalement étant justifié par des raisons à la fois budgétaires et logistiques. Le rattrapage des jeunes âgés de moins de 18 ans n’ayant pas été vaccinés est également possible.
La Communauté française n’envisage pas d’extension à d’autres cohortes que celles vaccinées l’an dernier.
Dans les deux communautés, la vaccination est maintenant intégrée dans le calendrier vaccinal des enfants de plus d’un an (avant 12 mois, 3 doses sont nécessaires sans garantie quant à la protection à long terme conférée par le vaccin). Cela représente une commande de 60.000 doses pour 2003 en Communauté française.
Christian De Bock
Merci à Raymond Moriaux et Michiel Callens pour leur relecture attentive.
(1) Voir notre article ‘Campagne de vaccination contre la méningite C’ dans Education Santé n° 168, avril 2002.
(2) En cumulant les interventions des autorités, des mutualités et des familles, on atteint sans doute une dépense de 25 millions d’euros pour cette seule vaccination.
(3) Communication personnelle du Dr Germaine Hanquet, de l’ISP

France: pas de vaccination généralisée

L’incidence de la maladie en France est stable et estimée à 3 cas pour 1.000.000 d’habitants, ce qui est inférieur à la situation belge (9 nouveaux cas pour 1.000.000 d’habitants en 2002, effet campagne compris).
Le Conseil supérieur d’hygiène publique recommande de ne pas généraliser la vaccination à l’échelon national, sur base de ces chiffres mais aussi de l’incertitude de voir les infections se déplacer vers d’autres sérogroupes en cas de vaccination massive. A ce propos, on n’a pas observé ce phénomène en Belgique, les infections à méningocoque B étant aussi en (légère) diminution en 2002.
D’après ‘Méningocoque C: recommandations (suite), Revue Prescrire, mars 2003, tome 23, n° 237