En matière d’alcoolisme et de toxicomanie, les femmes accèdent moins aux consultations et aux soins que les hommes. Tenir compte des spécificités liées au genre permettrait une aide plus efficace, mieux adaptée à leurs besoins. La Politique scientifique fédérale (BELSPO) et le SPF Santé publique développent une étude multidisciplinaire afin d’étudier la question.
L’usage comme l’abus d’alcool et autres drogues apparaissent moins fréquents chez les femmes que chez les hommes. Constat connu et peu surprenant. On sait moins que la différence réside également dans l’accès aux soins, les femmes y ayant moins recours et plus tardivement, surtout dans les services spécialisés (elles sont davantage recensées en ambulatoire).
Comment expliquer cette différence? La responsabilité qu’elles ont par rapport à leur famille (enfants partenaire) constitue souvent un obstacle à aller consulter.
Les femmes souffrent davantage de stigmatisation mais d’autres facteurs entrent également en jeu tels que la situation socio-économique (pauvreté et chômage accrus chez les femmes) ou encore les horaires d’ouverture des services, souvent peu compatibles avec la garde d’un enfant.
Il paraît donc important de tenir compte de ces spécificités pour parvenir à une offre en matière de prévention, de réduction des risques et de traitement qui soit la plus adaptée possible aux besoins des femmes.
La Politique scientifique fédérale (BELSPO) et le SPF Santé publique ont récemment entamé une étude multidisciplinaire pour approfondir le sujet. Une journée était organisée le 7 juin pour évoquer le lancement du projet.
Portée et objectifs de la recherche
L’étude est portée par des chercheurs de l’Université de Gand (UGent), la Haute École de Gand (HoGent) et l’Institut scientifique de santé publique (ISP), en collaboration avec le VAD, la FEDITO BXL et Eurotox.
Elle vise à mieux cerner la dimension de genre dans la prévention et le traitement de l’alcoolisme et des toxicomanies et à identifier les obstacles que rencontrent plus spécifiquement les femmes dans ces situations. Outre l’analyse des besoins spécifiques des femmes en la matière, il s’agit aussi d’évaluer les services qui pourraient répondre à ces besoins ainsi que les initiatives existantes.
Au final, cette étude devrait aboutir à établir une série de recommandations qui soient utiles aux acteurs de terrain mais aussi aux législateurs pour élaborer des interventions et politiques qui tiennent compte des différences de genre.
Renforcer le recueil de données permettra, par la suite, de prendre en compte les différences entre hommes et femmes et de mieux adapter les pratiques en fonction du public cible. À ce propos, il n’est pas nécessaire de tout réinventer. Mieux vaut utiliser et adapter les bonnes pratiques du passé. C’est ce qu’a recommandé Elizabeth Ettorre, professeur de sociologie aux Universités de Liverpool et d’Helsinki.
Depuis plusieurs années, des initiatives se développent qui tiennent compte de la question du genre. C’est le cas par exemple de programmes de traitement des femmes qui intègrent les enfants.
Christiane Baldus, du centre de recherche allemand sur les addictions chez les enfants et adolescents, aborda quant à elle plus spécifiquement la prévention. Elle insista sur la nécessité de connaître les théories existantes lorsque l’on conçoit des programmes mais aussi de développer de nouvelles recherches.
En effet, les théories sur le genre (théorie de l’évolution, apprentissage social, cognitivisme…) n’expliquent pas toutes les différences. Des inconnues résident encore dans de nombreux domaines tels que le choix de carrière, les préférences en matière de jeux (poupée Barbie contre camion de pompier!) ou encore l’influence de la publicité dans la construction du genre.