Le 6 mai dernier, à l’occasion d’une visite à Neufchâteau (une des quatorze municipalités retenues lors de l’appel à projets locaux, voir plus bas), Nicole Maréchal rappelait en ces termes la philosophie qui sous-tend son engagement de longue date pour la promotion de la santé au niveau local.
Il est toujours intéressant et motivant pour moi de me rendre compte directement, sur le terrain, de vos espoirs, de vos possibilités et de vos difficultés d’acteurs en première ligne.
Vous savez que, durant mon mandat, j’ai souhaité favoriser les politiques locales et communales de promotion de la santé. Ce souhait n’est pas né du hasard, ni d’un caprice.
Les actions de promotion de la santé se développent dans la participation des individus ou des groupes, dans l’intersectorialité (la santé n’étant plus l’apanage du seul secteur médical ) et dans la proximité. L’objectif essentiel est de travailler sur les facteurs qui déterminent la santé.
On sait en effet combien le statut social ou professionnel, le niveau d’éducation, le cadre de vie physique mais aussi relationnel, culturel, affectif sont des facteurs déterminants de la santé. Il faut donc les prendre en compte dans une approche globale et par des stratégies mobilisant divers secteurs de la vie sociale.
Il paraît assez évident que, grâce à la proximité entre la population et les pouvoirs publics au niveau d’une commune, la participation des habitants est facilitée.
La distance entre le bourgmestre, les échevins, les conseillers communaux et les habitants n’est pas trop grande et permet aux uns d’être plus directement à l’écoute et aux autres de se faire entendre.
Si à priori la commune dispose de compétences limitées en matière de santé (hygiène publique, application de la loi sanitaire, gestion des hôpitaux via les CPAS, de maisons de repos, de services d’aides familiales…), sitôt qu’on aborde les décisions prises en matière d’environnement, d’enseignement, d’aménagement du territoire, de politiques sociales, on constate qu’elles influencent l’état de santé des populations.
La proximité au sein des communes entre les différents secteurs et avec les pouvoirs locaux favorise également leurs collaborations. Les gens se croisent, se parlent, se rencontrent… Or, la participation des citoyens aux projets qui concernent leur santé, et le partenariat entre les acteurs de différents domaines sont deux objectifs prioritaires en promotion de la santé. Voilà pourquoi j’ai voulu développer au niveau communal la promotion de la santé.
Dans cette optique, j’ai lancé un premier appel à projets à l’intention des communes en 2002. En 2004, comme les deux années précédentes, une enveloppe budgétaire de quelque 250.000€ a été réservée à cet effet. Une quinzaine de projets ont ainsi été retenus.
A chaque fois, trois critères essentiels ont guidé mes choix. Ce sont:
– l’amélioration de la santé et de la qualité de vie des citoyens;
– la réduction des inégalités sociales en s’appuyant sur l’intersectorialité et les collaborations locales;
– une participation citoyenne réelle tant dans la définition des besoins que dans la construction du projet qui vise à y répondre.
Je pense que de tels projets montrent que la participation des citoyens et les partenariats ne sont pas des gadgets à la mode mais bien des manières d’agir qui sont efficaces, qui portent de plus beaux fruits que les projets menés sans implication des habitants et sans dépassement des barrières entre le social, l’éducation, l’environnement… et la santé.
La volonté des pouvoirs publics de s’engager pour la santé de la population, avec la population, est une chance pour les habitants d’une commune.
Afin de soutenir ces volontés au sein des communes, j’ai également initié la mise en oeuvre d’un réseau de mandataires communaux (il compte aujourd’hui environ 350 mandataires pour 280 communes). La décision de proposer une structure en réseau se base sur la conviction que ce cadre permet de construire une force collective plus importante que la juxtaposition des forces particulières.
La mise en contact et la confrontation d’expériences créent au fil du temps une expertise en promotion de la santé communale.
Nicole Maréchal , ancienne ministre de la santé de la Communauté française
Les projets retenus
Suite au deuxième appel à projets communaux (1), 27 dossiers ont été introduits, et 14 d’entre eux ont été retenus.
Anderlecht
Le projet a pour but de promouvoir la santé des habitants de différents quartiers très défavorisés de la commune via la mise en circulation d’un bus Info-Santé. Ce projet est largement pris en charge par la commune (achat du bus, prise en charge du salaire du personnel infirmier…). Le projet repose sur un partenariat local. Il est le résultat d’une large concertation. L’objectif du projet est d’aller à la rencontre de certains publics qui éprouvent des difficultés à consulter des services existants ou qui résident dans des quartiers manquant de structures de santé. L’absence de budget pour engager un chauffeur pour le bus semble actuellement freiner le développement du projet.
Binche
Le projet vise l’amélioration de la santé mentale et physique des jeunes mères de 18 à 25 ans (bénéficiant du RIS) ainsi que celle de leurs enfants. Il se base sur les attentes que certaines de ces jeunes femmes ont adressées à l’assistante sociale du CPAS.
Les objectifs du projet sont multiples:
– préparer l’arrivée de l’enfant;
– dédramatiser la précarité sociale dans laquelle vivent ces jeunes femmes;
– aider ces jeunes mères à prendre soin de leur enfant au quotidien (hygiène, alimentation, prévention accidents domestiques, suivi médical…);
– stimuler l’éveil de l’enfant tout en favorisant les interactions mère – enfant;
– favoriser la requalification de ces femmes au niveau social, professionnel…
Charleroi
Le projet vise à permettre aux habitants du quartier de Dampremy d’acquérir, de s’approprier et d’utiliser des outils pour l’amélioration de leur propre santé. Il prévoit l’analyse, la récolte des besoins et demandes des habitants, puis la mise sur pied d’une «Maison des familles» afin de développer des projets en collaboration avec les partenaires et les habitants.
Chastre
La commune a développé un processus communautaire local avec mise en place d’une pratique de réseau (plans sociaux intégrés, action de lutte contre l’exclusion sociale).
Dans le cadre de la prévention des assuétudes, les partenaires ont établi une cellule de réflexion qui a élaboré une stratégie d’action ayant abouti à la création d’un vidéogramme par des jeunes sur le thème de la consommation de cannabis. La demande porte sur la suite du projet qui vise à exploiter l’outil dans le cadre de séances d’information à destination des jeunes et d’un public familial élargi (2 ateliers: un pour les jeunes, l’autre pour les adultes). Dans ces ateliers, on aborderait la dépendance et ses représentations au départ du thème du cannabis. A la suite de ces soirées-débat, de nouveaux constats devraient permettre d’ouvrir de nouvelles pistes d’actions.
Durby
Projet de recherche-action. Analyse / enquête sur la santé, les besoins et les ressources, puis mise en place d’une politique concertée de promotion de la santé avec des projets investissant les comités de village.
Enghien
Le projet prévoit la création d’un centre de documentation, d’outils pédagogiques et formations visant à offrir aux relais locaux un espace de formation permanente en promotion de la santé. Le projet repose sur une demande des acteurs locaux. Il prévoit un partenariat intersectoriel. L’opérateur semble avoir une bonne expérience des projets participatifs.
La Bibliothèque communale chargée de promouvoir le projet en assurera la pérennité.
Jette
Le projet vise à récolter la parole des personnes âgées afin de mettre en place des actions pour améliorer leur intégration dans le quartier et ainsi leur bien-être. Le projet se base sur une coordination des partenaires et la mise en place d’activités qui impliqueraient progressivement les personnes dans le projet. Planification sur deux ans.
Liège
Le projet vise le soutien d’un groupe de pilotage interdépartemental chargé d’organiser «la semaine santé» et d’une manière plus générale «d’influer sur la mise en œuvre de politiques efficaces». En 2003, certaines actions se sont déjà déroulées: les exemples donnés sont des informations générales principalement à destination du personnel communal (tuberculose, ostéoporose, séropositivité dans les pays en voie de développement).
Manage
Continuation et renforcement d’un projet déjà existant. Plusieurs actions s’additionnent autour du thème de la santé: une journée santé, un calendrier santé, une campagne d’information diététique, des fiches santé avec médiatisation accrue par rapport à ce qui a été fait jusqu’à présent. Un coordinateur permettra d’établir des liaisons entre les anciens et les nouveaux partenaires et avec la population, d’aller vers des populations ne participant généralement pas aux activités, de guider dans la mise en place de nouveaux projets. Le financement pendant deux ans permettra d’établir une structure plus élargie.
Mons
Le projet vise à mettre en place une plate-forme d’observation et d’actions en matière de santé. Il s’inscrit dans les démarches déjà initiées au sein de la commune (plates-formes d’observations et d’actions en faveur des personnes vulnérables).
Le projet, en ce qui concerne les conditions d’adhésion communale, est au stade des intentions. Il est néanmoins intéressant dans ses objectifs d’établir un inventaire des ressources, de discuter entre partenaires publics et privés (milieu associatif) en vue de mettre en place des synergies et des partenariats entre les différents acteurs. La création de groupes de travail au sein de la plate-forme devrait permettre dans un second temps de dégager des pistes d’actions.
La participation de la population est explicitement prévue.
Neufchâteau
Le projet repose sur l’identification de deux besoins:
– mieux repérer les ressources locales en matière de santé et d’accompagnement social en vue de créer une plate-forme sociale;
– réduire les inégalités de santé en prenant en compte leurs racines sociales: sensibilisation de la population mais aussi adoption de mesures visant à améliorer les conditions de vie en matière de logement, accès aux activités sportives et culturelles…
Quiévrain
Un projet d’éducation à la santé en milieu précarisé en faisant des enfants des ambassadeurs de santé. La Commune estime que la santé s’est dégradée chez les habitants de l’entité (alcoolisme, drogue, alimentation), faute de promotion de la santé. En sensibilisant les enfants des milieux précarisés, via les écoles et les associations en contact avec les familles, la Commune veut faire des enfants «des vecteurs de santé».
Soumagne
Le projet vise des personnes âgées: enquête pour analyser leurs besoins la première année (questionnaire et contacts directs); la seconde année sera consacrée à la mise en place des actions découlant de l’analyse. Ces actions seront évaluées par le Conseil communal des aînés mis en place au début de l’année 2004. Objectif: rendre la vie plus agréable aux personnes âgées (meilleure insertion, aide dans la vie quotidienne…).
Villers-Le-Bouillet
Le projet abordera trois quartiers défavorisés de l’entité. Au départ d’une analyse de la situation (et de la population) pertinente réalisée avec les groupes concernés, des pistes sont proposées en partenariat avec les habitants à partir d’une réflexion sur les constats des habitants et sur les éléments d’intervention possibles (appartenance au quartier, image du quartier, conflits intergénérationnels, relations quartier – extérieur.
L’implication de la commune, du CPAS et de la Société de logement est acquise.
Outre certaines améliorations déjà entreprises, un éducateur de rue va être engagé et un lieu de rencontre au centre des quartiers sera mis en place.
Informations fournies par le Cabinet de Nicole Maréchal
(1)Lire ‘Deuxième appel à projets communaux de promotion de la santé’ (n°183)