Les 3es rencontres de l’Institut Renaudot ont eu lieu à Mulhouse les 11 et 12 juin 2004.
Le partage des pouvoirs dans les relations des acteurs en santé me paraissant un thème très alléchant, me voilà donc au sud de l’Alsace, à deux pas de l’Allemagne et de la Suisse, et vous livre un bout de mon regard sur cet événement.
Les acteurs pressentis en santé communautaire étaient présents: habitants, décideurs, professionnels. Le pouvoir a été mis sous la loupe deux jours durant comme prévu. J’ai appris ainsi que les Grecs dans les agora mettaient au centre de l’assemblée un rocher où chacun déposait en entrant sa parcelle de pouvoir le temps d’un échange de parole. Un modèle historique dont certains d’entre nous feraient bien de s’inspirer!
Dans les travaux en sous-groupe l’exercice de la prise de parole fut facilité mais pas toujours évident à exercer. Une habitante, parmi une dizaine de professionnels, s’est lancée courageusement le second jour dans l’exposé du projet de son quartier. J’ai eu une impression de sacralisation de cette parole par le groupe. Celui-ci, (interprétation que vous pourrez considérer comme très personnelle) à la fois heureux d’accueillir cette vie pleine de sens et soucieux de garder une distance toute professionnelle. Cette habitante n’a pas manqué de réagir: il est vraiment difficile de suivre les professionnels dans leurs échanges très codifiés! Il est clair qu’en relation avec la fonction que j’exerce au moment où je parle (usager, professionnel, défense officielle d’un point de vue…) , je ne «dis» pas les choses de la même manière.
En terme de pouvoir ce furent le pouvoir de dire et de faire qui ont été le plus évoqués. Elus locaux et professionnels de santé français ont pu confronter leurs positions respectives: pouvoir d’influence, pouvoir politique, démocratie représentative opposée à démocratie participative. L’échange nous a menés à l’idée de prise de responsabilité (prendre sa parcelle de pouvoir et l’exercer) et à la notion de limite (de l’exercice du pouvoir).
La prise de parole est apparue comme une clé fondamentale dans la prise de pouvoir: donner la parole, recevoir la parole, prendre la parole. Cela m’apparaît une fois de plus comme un des axes fondamentaux du travail de promotion de la santé. Sans oublier le droit au silence et à la position de retrait dans la participation qu’il faut respecter et qui ont été pris en compte à Mulhouse.
La qualité de la relation entre les acteurs de santé a été mise également en évidence. Dans ces interrelations la place de l’usager, comme acteur détenteur d’un pouvoir, n’est pas la plus évidente à occuper. Des projets sont menés sur base de besoins pointés par les professionnels au travers d’un vécu avec les usagers. Cependant la prise de parole de l’usager dans un partage de pouvoir est loin d’être acquise. Ceci d’autant plus lorsqu’il s’agit d’usagers dits faibles: jeunes en difficulté, personnes en réinsertion professionnelle… Et même lorsqu’une part de pouvoir est laissée aux usagers, il ne va pas de soi de s’en emparer. De nombreux professionnels ont mis en évidence l’intérêt de l’accompagnement de l’exercice d’un pouvoir.
Confiance, écoute… que de questions qui restent à travailler, me disais-je en revenant en Belgique!
Cécile Plas , Coordinatrice promotion santé, Service prévention tabac, FARES