Une convention ‘Alimentation équilibrée’ a donc été signée par la FEVIA (Fédération de l’industrie alimentaire belge), COMEOS, (Fédération pour le commerce et les services), et la Ministre de la Santé publique, Maggie De Block. L’industrie et la grande distribution s’engagent ainsi à diminuer l’apport calorique des produits transformés de 5%. Positif cet engagement? Certainement oui, mais pour Solidaris il devrait aller bien plus loin!
Il faut saluer la volonté de proposer ce plan concret qui ambitionne de diminuer de 5% l’apport calorique en ciblant les graisses et les sucres dans les produits alimentaires transformés. La politique des petits pas ça permet d’avancer, sans doute, mais pas assez vite et pas assez loin.
Il ne faut pas rêver, cela ne permettra pas d’enrayer l’épidémie européenne d’obésité prévue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2030. Chez nous, le taux d’obésité n’a cessé d’augmenter ces dernières décennies passant de 11% à 14% entre 1997 et 2008. Selon l’OMS, ce taux passera à 20% en 2030. Le constat est également inquiétant en ce qui concerne la progression du diabète de type 2.
Et la volonté affichée d’informer et de sensibiliser le consommateur ne permettra pas de contrebalancer ce manque d’ambition. C’est bien l’offre qui détermine l’enveloppe des choix possibles. Il convient donc de la modifier en profondeur, d’aller plus loin.
Ce genre d’initiatives devrait être plus ambitieux et éviter de n’être qu’un écran de fumée. Mieux encore, ce type d’engagement doit s’inscrire dans une réelle politique intégrée et cohérente de l’alimentation, ce qui n’est pas encore le cas.
Un engagement qui doit lui-même gagner en cohérence
Même accompagnée d’information et de sensibilisation, cette convention risque bien de voir son efficacité compromise par un manque de cohérence de la part du secteur.
Prenons par exemple la nécessaire amélioration de l’étiquetage qui ne suscite pas autant de ‘bonne volonté’. En effet, sous prétexte de responsabiliser les consommateurs, le secteur alimentaire a choisi le système d’étiquetage des repères nutritionnels journaliers (RNJ). Or une récente étude de l’INRA a testé différents logos et démontré que tous permettaient d’améliorer la composition nutritionnelle du panier alimentaire, tous sauf précisément les repères nutritionnels journaliers. Dommage!
Le consommateur décide au final, certes, mais on peut l’y aider à l’aide d’un étiquetage plus clair et en évitant de le matraquer de publicités le poussant à manger toujours plus gras, sucré et salé. Même si certains efforts sont entrepris comme pour la publicité envers les enfants, les pratiques commerciales doivent être régulées de manière à ce qu’elles n’annihilent plus les campagnes de santé publique.
Une politique alimentaire elle-même cohérente
Reformulation des produits, campagne d’information, sensibilisation, étiquetage, régulation de la publicité, amélioration de l’offre alimentaire dans les écoles… Il est clair que les nombreuses actions à entreprendre dans ces domaines doivent être intégrées dans une politique belge et européenne cohérente de l’alimentation.
En la matière, du chemin reste à parcourir comme en témoigne l’étonnante taxe soda entrée en vigueur le 1er janvier 2016.
La taxe nutritionnelle présentée par le gouvernement comme une taxe ‘santé’ n’en a en réalité que le nom. En effet, au regard de son homologue britannique récemment mise en place, ainsi que d’autres initiatives européennes, on peut douter de l’efficacité de notre taxe et de son prétendu objectif de santé. Les recettes générées ne sont pas réutilisées pour stimuler les modes de vie sains, la faiblesse de l’augmentation du prix des boissons sucrées (0,03 euro par litre de soda contre 0,23 à 0,31 euro pour l’initiative britannique) risque de n’avoir aucun impact sur la consommation de ces dernières et enfin, elle s’applique également aux boissons ‘light’ et ‘zéro’, n’incitant donc pas les consommateurs à substituer les boissons sucrées par les boissons allégées. Pour l’ambition et la cohérence, on repassera donc.
Une telle taxe nutritionnelle doit être pensée dans le but de lutter réellement contre l’obésité. L’augmentation de prix doit être perceptible et les recettes générées doivent servir à financer des actions de prévention ou encore permettre d’alléger la fiscalité sur les fruits et légumes par ailleurs insuffisamment consommés par les belges.
Rappelons enfin que la consommation alimentaire est un domaine fortement marqué par les inégalités sociales. Les catégories socio-économiques défavorisées se tournent bien plus vers les produits transformés plus gras, plus sucrés et plus salés notamment parce qu’ils sont moins chers ! Une politique responsable doit donc tenir compte de ces inégalités et c’est tout le système alimentaire à bas prix qui doit être repensé.
Le monde politique et le secteur alimentaire peuvent donc mieux faire en termes d’ambition et de cohérence.
Voir dans ce même numéro, ‘Les autorités belges et les secteurs de l’alimentation et de la distribution pour une meilleure alimentation’ par la FEVIA.