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Mieux prévenir les maladies coronariennes

Le 30 Déc 20

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L’évolution du traitement des maladies coronariennes est positif. Mais les écarts entre la connaissance des facteurs de risque et leur incidence sur le mode de vie de la population reste énorme. Il est donc urgent d’intensifier la prévention auprès du plus large public.
Les maladies cardio-vasculaires restent la première cause de mortalité en Belgique. Toutes se caractérisent par un dépôt de lipides à la surface et à l’intérieur même de la paroi artérielle (athéromatose). Ces dépôts se forment petit à petit mais leurs manifestations extérieures (angine de poitrine, accident vasculaire cérébral, infarctus aigu du myocarde, etc.) surviennent généralement plusieurs décennies après le début des lésions vasculaires.
Le traitement de ces maladies a connu une évolution favorable au cours des dernières décennies, si l’on en croit les études réalisées à Charleroi et Gand depuis 1983. Cette évolution s’explique tant par une baisse des taux d’attaque que par une meilleure survie, surtout quand les patients sont hospitalisés à temps. Malgré cela, la maladie ischémique du cœur tue encore: en 1993-1994, elle était la cause du décès de 11 % des femmes et 13 % des hommes. De plus, les femmes malades bénéficient moins que les hommes de ces mesures positives puisque leur survie est moins bonne alors que leur risque absolu est moins élevé.

Facteurs de risque connus

Toutes ces données sont mises en évidence par le dernier ‘Rapport sur la maladie ischémique du cœur’ . Réalisé par le Centre de recherche opérationnelle en santé publique (CROSP), il a pour objectif d’ aider les ministres des Communautés française et flamande compétents en matière de prévention santé et leurs Administrations à rechercher une approche globale et harmonieuse des problèmes. Mais les données qu’il contient, accessibles très largement via l’internet, peuvent également intéresser le personnel médical et paramédical, les chercheurs, les enseignants et les étudiants, et la presse médicale. Elles montrent en effet l’écart entre la connaissance que le public a des risques encourus et l’influence étonnamment faible de ce savoir sur son mode de vie.
Les facteurs de risque des maladies cardio-vasculaires, en effet, sont bien connus. On sait que les facteurs génétiques jouent un rôle important dans la genèse de la maladie cardio-vasculaire ainsi que dans le développement de plusieurs de ses facteurs de risque majeurs: l’hypertension, la cholestérolémie, le diabète et la consommation de tabac. On sait aussi que le risque lié au manque d’exercice physique est clairement démontré, de même que l’influence directe du régime alimentaire. Enfin, on n’ignore plus que les facteurs psychosociaux (personnels, familiaux et professionnels) et les facteurs socioéconomiques jouent également un rôle important tant sur les facteurs de risque que dans la genèse de la maladie.

Intensifier la prévention primordiale

Pourtant, en Belgique, un cinquième des patients sont toujours fumeurs, quatre cinquièmes sont obèses ou présentent une surcharge pondérale. La moitié a une pression artérielle trop élevée. Trois cinquièmes présentent un excès de lipides…
Les progrès à réaliser en matière de détection et de prévention restent donc très importants, qu’il s’agisse de prévention primaire (auprès du public à risque) ou de prévention secondaire (accompagnement des patients après un accident coronarien). Le Rapport note aussi que le vieillissement de la population et l’amélioration de l’efficacité des traitements préventifs et curatifs font croître le nombre de patients qui nécessitent une prévention secondaire. Avec l’augmentation des coûts que cela suppose.
Ceci rend donc la ‘prévention primordiale’ (auprès du plus large public possible) plus nécessaire que jamais. Celle-ci relève de la promotion de la santé. Comment s’y prendre? Selon le Rapport , pour amener la population à adopter un mode de vie plus sain, il ne suffit pas d’influencer les connaissances, les attitudes et les pratiques des individus. Il faut surtout réussir à mobiliser tous les secteurs concernés: milieux de travail, écoles, transports, consommation, logements… Ces actions de prévention primordiale exigent un travail de longue haleine, mais ce sont elles qui doivent permettre d’atteindre les gains de santé les plus importants.
Le texte de ce Rapport peut être consulté sur le site ‘>https://www.iph.fgov.be/epidemio/morbidat
Renseignements complémentaires: Centre de recherche opérationnelle en santé publique (CROSP), Docteur Jean Tafforeau, ISP, Service d’épidémiologie, 14, rue J. Wytsman, à 1050 Bruxelles. Tél.: 02 – 642 57 71. Fax: 02 – 642 54 10.

Un être sain dans un logement sain

Le 30 Déc 20

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Comment faire du lieu où nous passons une grande partie de notre vie, notre logement, un espace propice à une bonne santé? Comment remédier au fait que tant de gens n’aient pas un logement décent? Ces questions sont au coeur du dossier ‘Ensanter l’habitat’ publié par la Fédération des maisons médicales et collectifs de santé.
Le rapport entre santé et habitat existe depuis les premières cavernes. Mais il connaît des développements nouveaux avec l’essor technologique. La Fédération des maisons médicales et collectifs de santé francophones aborde quelques aspects de cette vaste problématique dans un cahier spécial de son trimestriel, Santé conjuguée . Ce dossier se limite à l’habitat et à l’espace privé. Mais les relations qu’il entretient avec la politique de la ville, la santé mentale, les questions d’urbanisme, d’espace public et de santé communautaire seront abordées dans de prochains numéros.
Le champ d’analyse est déjà très vaste. En effet, ‘les conditions dans lesquelles se déroule la vie domestique influencent de manière non négligeable la santé et le bien-être des habitants’ constate Françoise Noël , directrice du Centre de recherche urbaine à l’ULB en conclusion générale à ce cahier qui traite de la santé dans son acception la plus large.

Alerte à la pollution

Elle rappelle que, selon l’OMS, les accidents (blessures accidentelles, intoxications, noyades, etc.) restaient les premières causes de décès chez les enfants de 4 à 14 ans en 1995 et que la majorité d’entre eux se déroulaient dans l’espace du logement. Elle note aussi que certains composants matériels agissent défavorablement sur la santé: exposition à l’amiante, exposition aux polluants chimiques ou biologiques (par exemple suite à un excès d’isolation ou un manque de ventilation). Enfin, elle met en cause les pollutions de l’air à l’intérieur du logement.
Le dossier détaille un certain nombre de ces problèmes: analyse des nuisances, rapport entre problèmes de santé et pollution intérieure, saturnisme infantile, intoxications au CO (monoxyde de carbone)… Il présente aussi une série d’initiatives destinées à rendre l’habitat plus sain: le projet Sandrine qui vise à prévenir les problèmes de santé liés à la pollution intérieure, le projet-pilote Ambulance verte mené au Luxembourg et dans quelques maisons médicales bruxelloises, en collaboration avec l’Institut bruxellois de la gestion de l’environnement, le projet Hector qui veut combler au plan communal le déficit de communication dans le domaine de la santé environnementale, etc.

Architecture, bien-être et santé

Le logement constitue aussi un élément clé sur le plan de la santé mentale et du bien-être psychologique. ‘Parler de son logement, en fin de compte, c’est parler de soi’ remarque encore Françoise Noël. Les permanences ‘logement’ sont d’ailleurs l’occasion pour de nombreuses personnes de parler de leur mal-être. Ne pas avoir de ‘chez soi’ agréable voire simplement décent constitue une souffrance d’autant plus grande que notre société privilégie fortement les valeurs d’intimité et d’épanouissement personnel et assigne au logement le rôle de ‘camp de base’, lieu privilégié du déploiement de la vie privée.
Dans la deuxième partie du dossier, plusieurs architectes se penchent sur ces différents thèmes: pour les auteurs, la santé devrait être l’affaire de tous et donc aussi des architectes (1). Les sujets abordés sont passionnants: comment concilier patrimoine historique et rôle du logement social, avec le cas concret de la cité Hellemans, à Bruxelles; le choix utopique (?) de l’habitat groupé; une approche de la distance fondamentale qui existe entre ‘loger’ et ‘habiter’ qui prend tout son sens quand on s’intéresse à l’impact de l’environnement immédiat sur la santé. Ces apports ouvrent des pistes de réflexion vraiment originales.

Les mal logés

Enfin, les problèmes cruciaux et souvent scandaleux qu’éprouvent certaines personnes à posséder un logement, entendu ici en son sens plein d’habiter, composent le troisième volet du cahier. Le thème est abordé sous des angles très différents: difficulté de vivre le lien de l’habitat avec le quartier et la ville, l’habitat comme facteur d’intégration, de marginalisation ou d’exclusion et dès lors vecteur d’épanouissement ou d’aliénation, rôle clé – mais exigeant humilité – des professionnels de la santé comme témoins et mobilisateurs. Et puis, la problématique décourageante du lien entre habitat et santé quand la pauvreté apparaît, difficulté pour les personnes vieillissantes de trouver un logement adapté, problèmes d’accès au logement d’une partie significative de la population et rôle de l’accompagnement social en matière de logement comme moyen de réinscription dans le milieu de vie.
Enfin, le cahier présente l’expérience menée à ‘L’Autre Lieu’ qui offre des possibilités d’accueil individualisées et chaleureuses aux personnes en difficulté.
Au total, un dossier très riche, très fouillé, bien au-delà des clichés et propos lénifiants trop souvent de mise en ce domaine.
A.M.P.
‘Ensanter l’habitat’, dossier spécial de Santé conjuguée n° 18 d’octobre 2001. Prix: 8,68 €. Numéro disponible à la Fédération des maisons médicales et collectifs de santé francophones, boulevard du Midi 25 bte 5, 1000 Bruxelles. Tél. : 02-514 40 14. Fax: 02-514 40 04. Courriel: fmmcsf@fmm.be. Site internet: https://www.maisonmedicale.org

(1) Sur ce sujet, signalons également la publication par Educa-Santé d’une enquête de la société Cooparch-R.U. sur l’intégration de la prévention des accidents dans les pratiques des architectes, qui s’inscrit dans un programme quadriennal de prévention des traumatismes et de promotion de la santé financé par la Communauté française Wallonie-Bruxelles. Renseignements: Martine Bantuelle, Educa-Santé, av. Gl Michel 1B, 6000 Charleroi. Tél.: 071-30 14 48. Fax: 071-31 82 11. Courriel: martine.bantuelle@educasante.org.

34.000 références sur 12 cm

Le 30 Déc 20

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RESOdoc vient de lancer sa première édition d’un cédérom auto-consultable contenant la totalité de la base de données Doctes .
Doctes , base de données partagée avec une dizaine de partenaires, développe une documentation spécifique en éducation et promotion de la santé. Elle contient environ 34.000 références bibliographiques issues de documentation scientifique d’une part, mais également de ‘littérature grise’, d’ouvrages de vulgarisation ainsi que de supports d’intervention en éducation pour la santé.
La recherche se fait par interrogation des champs suivants: auteur, titre, titre de revue, titre d’ouvrage collectif, mot-clé, titre de rencontre. Pour les auteurs et les mots-clés, il y a lieu d’utiliser un index.
La recherche peut être affinée en combinant les questions au moyen des opérateurs booléens ‘ET’, ‘OU’, ‘SAUF’.
Le tout est très simple à utiliser. Il ne manque que l’accès direct aux documents!
RESOdoc, membre et animateur du réseau Doctes, produit également Qui Santé , base de données contenant les adresses des organismes actifs dans le domaine de la promotion de la santé en Belgique francophone.
Pour cette version de lancement, seule la base Doctes a été reprise. Le cédérom sera actualisé chaque année et la deuxième édition contiendra aussi la base Qui-Santé .
Ce disque peut être obtenu sur simple demande au RESOdoc aux conditions suivantes:
– institutions belges en promotion de la santé: gratuit;
– institutions étrangères: 20 € (frais d’envoi compris);
– personnes privées: 10 € (+ 5 € de frais d’envoi).
A noter aussi que les deux bases de données sont également accessibles sur le site https://www.md.ucl.ac.be/entites/esp/reso .
Personnes de contact: Yvette Gossiaux et Karine Verstraeten, documentaliste, UCL-RESO, Av. Mounier 50, 1200 Bruxelles. Tél.: 02-764 50 37.

Les groupes d’entraide, des lieux d’ouverture et de soutien

Le 30 Déc 20

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Les groupes d’entraide et de soutien permettent de briser l’isolement des personnes, permettent le partage d’expérience, apportent une aide concrète, soutiennent la recherche scientifique et sensibilisent le grand public. Ils peuvent aussi jouer un rôle revendicatif. Et ils constituent une forme d’interrogation éthique de notre société.
Perdre un enfant, vivre avec la maladie de Parkinson, souffrir d’aphasie, envisager l’avenir après le diagnostic d’un cancer du sein, être atteint de troubles obsessionnels compulsifs,… Autant d’épreuves qui provoquent une profonde souffrance et un sentiment de solitude chez la personne qui doit les vivre. Malgré son affection, sa bonne volonté, l’entourage ne peut pas toujours comprendre ce bouleversement intime, ce chambardement des repères et des habitudes.
Dans pareilles circonstances, la rencontre des personnes qui vivent la même souffrance, partagent les mêmes réactions, doivent surmonter les mêmes obstacles permet de se décharger de quelque chose d’insupportable et d’ingérable, d’échanger des expériences et des solutions, de rebondir et de vivre mieux. C’est la raison d’être et l’objectif des groupes d’entraide.
Nés dans la foulée des Alcooliques Anonymes, ils font partie d’un mouvement bien plus large qu’ils ne l’imaginent souvent eux-mêmes: le self-help. En Belgique, ce mouvement s’est implanté dans les années ’70 et il se développe chaque année davantage. La revue L’Observatoire leur a consacré un important dossier, détaillé, clair et intéressant.

Pari sur la solidarité

La première partie, «Un pari sur la solidarité naturelle», tente de cerner la réalité de ces groupes et d’apporter des réponses à la question essentielle qu’ils suscitent: « Ne sont-ils pas une forme d’interrogation éthique de notre société?». En effet, comme le souligne Anne Fenaux , «l’entraide, l’écoute, le soutien psychologique mutuel, la compréhension, le partage de valeurs et l’action avec les membres d’un groupe, leur famille, leur entourage, les pairs et les professionnels de santé» caractérisent ces groupes. Les objectifs sont clairs: briser l’isolement des personnes et les amener à reprendre une vie sociale plus active, permettre le partage d’expériences et de vécus, l’expression de soi et l’écoute des autres, soutenir la recherche scientifique, apporter une aide sociale, juridique, matérielle aux membres du groupe…
Pour atteindre ces objectifs, les groupes de soutien utilisent divers modes d’action: soutien individuel moral et psychologique, aide administrative, juridique voire financière, aide matérielle, information et sensibilisation des professionnels et du grand public, travail de lobbying vers le monde politique, l’administration et les scientifiques et rôle de contre-pouvoir par rapport au système de santé et à ses différents représentants en vue d’améliorer l’humanisation des soins et la participation des patients.

Éviter le ghetto

Tels quels, les groupes d’entraide améliorent l’identité et ils offrent l’aide d’un groupe. Ils peuvent donc être vus comme une réponse à l’isolement et à l’anonymat des gens dus aux facteurs tels l’urbanisation et à la désagrégation des structures traditionnelles de soutien (familles, voisinage).
«Ils aident aussi leurs membres à répondre aux normes d’une société de plus en plus intolérante vis-à-vis de ce qui est différent, improductif, dépendant au lieu d’être performant, dynamique,…» remarque Anne Fenaux . Enfin, ils aident les personnes à répondre au coût sans cesse croissant des soins de santé, à trouver des informations, à connaître leurs droits et leurs devoirs. Ils permettent le développement d’une nouvelle catégorie d’intervenants bénévoles.
Bien sûr, ces groupes ont également leurs limites. Ainsi, ils doivent être vigilants et ne pas se transformer en ghetto: ceci irait à l’encontre de l’objectif poursuivi puisque les membres deviendraient dépendants vis-à-vis du groupe et s’isoleraient du monde extérieur.
Enfin, les groupes d’entraide et de soutien rencontrent de nombreux obstacles dont le manque de reconnaissance de certains médecins et autres professionnels de la santé, l’insuffisance d’intérêt des pouvoirs publics, la prise en charge du travail de l’association par quelques personnes seulement…

Expériences uniques et multiples

La deuxième partie du dossier dessine le contexte de la naissance et de l’évolution des groupes d’entraide en Belgique. Sont ainsi évoqués le passage de l’inventaire à un rôle de soutien des groupes d’entraide, les divers rôles des usagers face au système de santé (usager-citoyen, usager-consommateur de soins, usager-victime), les orientations des Mutualités socialistes et celles des Mutualités chrétiennes pour créer et soutenir des groupes d’entraide. Le droit des patients en Belgique est également traité de manière claire et approfondie.
Le dossier présente aussi une série de groupes d’entraide et de soutien: l’Association Parkinson, Vivre comme avant (cancer du sein), les Groupes de parents solidaires, le Gipso (groupe d’aide à la recherche et à l’information sur le psoriasis, les groupes de soutien pour parents endeuillés…). Chacun a son histoire, ses méthodologies, son style, ses priorités. La mosaïque témoigne de la variété, du dynamisme et de l’importance du self-help.
Le dossier se termine opportunément sur les méthodologies à mettre en place pour créer des groupes de soutien et pour les faire fonctionner de manière dynamique.
Dossier «Groupes d’entraide, de soutien, d’expression» in «L’Observatoire», revue d’action sociale et médico-sociale, n° 32, 2001. Renseignements: «L’Observatoire», boulevard d’Avroy 28-30, 4000 Liège. Tél.: 04–232 31 60 ou 61. Fax: 04 –232 31 79. Courriel: revueobservatoire@skynet.be

Le site du Centre d’information sur les groupes d’entraide et de self-help en Communauté française, une initiative du Service promotion santé des Mutualités socialistes, a été récemment retravaillé. Cela vaut le coup d’aller y jeter (plus qu’un coup d’oeil…
Il reprend les coordonnées des groupes d’entraide et une série de renseignements spécifiques tels que congrès, colloques, conférences, ouvrages, actions de prévention, actions de sensibilisation, publications…
https://www.self-help.be : une excellente adresse pour vos favoris!

Fous alliés, une BD pour dédramatiser les troubles mentaux

Le 30 Déc 20

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Le rire, dit-on, est le propre de l’homme. Même quand une situation n’a, en soi, rien d’amusant, l’humour permet de prendre distance, de saisir la drôlerie involontaire et de s’en amuser, de dédramatiser, de reprendre courage… Fous Alliés , une bande dessinée consacrée aux troubles mentaux et plus particulièrement à la schizophrénie, est l’incarnation même de cette démarche. Elle a été réalisée par une soixantaine de patients de l’hôpital du Petit Bourgogne, à Liège, en collaboration avec un jeune dessinateur professionnel, Benjamin Parent . Leur objectif est de dédramatiser et de déstigmatiser la maladie mentale et de permettre au grand public, aux malades et à leurs proches de comprendre mieux les personnes qui souffrent de troubles psychiques.

Casser les stéréotypes

Ce projet de BD est né dans une équipe de soins pluridisciplinaires du Centre hospitalier psychiatrique de Liège. Au cours de leur pratique hospitalière, les intervenants de la salle 13 avaient souvent constaté la profonde méconnaissance de leur maladie par les patients: ils ne connaissent que la souffrance qu’elle engendre et ne réussissent pas à la gérer par manque d’information et d’éducation. Une BD, en dédramatisant la maladie, permettait de diffuser dans le public un message constructif. Elle donnait aussi la possibilité aux patients de s’exprimer et de travailler en collaboration avec les soignants pour créer ensemble un outil prophylactique.
Le projet s’est inscrit dans le cadre de 2001, Année de la santé mentale . Il fournit un témoignage à la fois incisif et tendre, toujours haut en couleurs, de la réalité des troubles psychiques. Le résultat est bien loin de l’image stéréotypée et des préjugés liés au «fou» et au «malade mental».

Des talents propres

« J’ai bien vécu la réalisation de la bande dessinée. Cela m’a permis d’exprimer ma maladie par le dessin. Je me suis extériorisé en racontant ma propre pathologie. Je pense que le dessin est plus facile à faire passer que la parole , explique Alain, l’un des patients-auteurs. Le dessin nous rappelle qu’on a des talents propres à soi. La maladie est plus facile à dessiner qu’à exprimer de soi-même. Le dessin m’a apporté beaucoup de bonheur ».
Et Jacqueline témoigne : « Pour moi, cela a été le déclic. J’ai pu enfin m’exprimer. J’ai commencé à avoir confiance en moi, j’ai vu que j’étais capable de faire quelque chose de mes dix doigts. Pour finir, on m’a laissée choisir et faire moi-même les personnages et leur emplacement dans les cases. Et depuis bientôt un an, je reviens au dessin deux fois par semaine. Je peux dire que cela m’a changée».
Avec le personnel, une vingtaine de patients, souffrant de diverses pathologies, ont en effet participé, de près ou de loin, à l’élaboration du scénario, des dessins, de l’encrage et du coloriage. Au préalable, aucun d’eux ne savait vraiment dessiner! Mais ils ont bénéficié de l’aide et du soutien d’un dessinateur professionnel, Benjamin Parent, frais émoulu de Saint-Luc. Durant un an et demi, il a animé l’atelier, écouté les patients, leur proposant certaines tâches en fonction de leurs désirs et du travail restant à effectuer. Deux d’entre eux ont suivi le projet de l’origine à la fin, continuant leur contribution une fois sortis de l’hôpital, lors d’une post-cure.

Connaissances et tranches de vie

La BD est conçue en trois parties: la première, plus théorique, rappelle sur le mode humoristique les symptômes et les causes de la schizophrénie. Elle a été conçue par Benjamin Parent sur base d’ouvrages traitant du sujet. Toutes les planches ont été soumises à l’approbation d’une ergothérapeute, d’une psychologue, de médecins et d’infirmiers afin d’en valider et d’en compléter le contenu. La deuxième partie, «Quelques personnes vous parlent», rassemble des portraits réalisés par des patients hospitalisés, déjà assez «stabilisés» pour prendre un certain recul par rapport à leur pathologie. Ils se présentent en quelques lignes et, parfois, expliquent la raison de leur présence à l’hôpital. Enfin, la dernière partie, «Coup d’blues pour Oscar», propose un récit de vie conçu par une ergothérapeute, une psychologue et quelques patients. Il raconte l’arrivée à l’hôpital, les premières impressions, les visites…
Fous Alliés s’adresse aux personnes malades, à leurs familles et à leurs proches afin que tous puissent mieux comprendre ce qui leur arrive. Mais la BD concerne aussi le plus large public: en effet, grâce aux textes réalisés par les professionnels, elle permet d’acquérir des connaissances et grâce à l’apport des patients, elle aide à réaliser que les troubles psychiques concernent des personnes ordinaires, des hommes et des femmes comme vous et moi.
L’album peut être commandé à Murielle Nuyts, CHP site Petit Bourgogne, 84, rue Professeur Mahaim, à 4000 Liège. Renseignements : tél. : 04 – 254 78 31 et 04 – 254 78 56 ou 0494 – 21 55 34.

Les jeunes privilégient l’écoute et le respect

Le 30 Déc 20

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Ecoute, respect, occasion d’exprimer ses questions et ses craintes, informations claires… Tels sont les points les plus appréciés par les jeunes lors des animations sur l’éducation affective et sexuelle réalisées par le Service d’information psycho-sexuelle (SIPS) à Liège. L’enquête, menée par le Centre d’enseignement et de recherche en environnement et santé (CERES), montre la nécessité et la pertinence de telles actions.
Les jeunes sont confrontés à des tas de nouveautés: physiques, psychiques, émotionnelles, sentimentales. Pour qu’ils puissent s’y retrouver, et ‘se trouver’, ces nouveautés demandent à être identifiées, nommées. Ces questions ne peuvent pas toujours être abordées avec les parents, les proches, car elles appartiennent à ce nouveau ‘jardin secret’ que les jeunes créent et commencent à explorer avec, parfois, un profond sentiment de solitude. D’où l’intérêt d’échanges en groupes de jeunes, en présence de professionnels adultes, extérieurs au milieu quotidien de la famille et de l’école.

Une dimension unique et collective

Depuis plus de vingt-cinq ans, le SIPS (Service d’information psycho-sexuelle), centre de planning familial pour jeunes de l’Université de Liège, réalise ce travail d’information et d’animation pour les étudiants et les jeunes adultes jusqu’à 25 ans. Il essaie de leur donner la parole dans les domaines qui les concernent et réalise diverses brochures à leur intention. La plupart des animations se déroulent dans les locaux du SIPS et durent environ deux heures. Ceci permet aux participants d’avoir un premier contact avec un centre de planning familial, de se familiariser avec son travail et, éventuellement, de formuler des demandes individuelles.
Les animations sont conçues pour prendre en compte à la fois la dimension unique et individuelle de chaque jeune et la dimension sociale et collective des questions et des comportements abordés. En effet, les questions relatives à la séduction, à l’amour, au désir, au plaisir, à l’engagement, sont universelles et incontournables. Mais elles se posent de manière différente selon les histoires individuelles, familiales, historiques, sociales et culturelles différentes. Elles se posent autrement aussi selon l’âge et le groupe.

Un moment privilégié

Le SIPS a toujours mené une réflexion sur son propre travail pour le faire évoluer positivement. Mais l’équipe a souhaité aller plus loin et vérifier si les animations proposées sont pertinentes et répondent aux attentes et aux besoins des jeunes. Pour réaliser cette évaluation fine, le service a travaillé avec le Centre d’enseignement et de recherche en éducation pour la santé de l’Université de Liège (CERES).
Celui-ci a mené une enquête auprès des jeunes qui ont participé à des animations durant l’année scolaire 1999-2000, à l’exception des étudiants des deux premières années du secondaire et des étudiants de l’enseignement supérieur et universitaire. Le public interrogé était donc constitué majoritairement de jeunes de 16-17 ans, dont une large proportion issue de l’enseignement professionnel. Leur opinion est plus que positive puisque 95 % des jeunes interrogés ont aimé l’animation à laquelle ils ont participé. Ils apprécient tout particulièrement la liberté d’expression et la confidentialité associées aux animations, l’écoute et le respect développés par les animatrices envers eux. L’animation est vécue comme un moment privilégié où la parole circule, où l’on peut poser toutes ses questions, exprimer ses valeurs et ses craintes, découvrir ses limites, aborder les interdits dans une climat de confiance et en sécurité.

Information, changement de regard

Une grande majorité des jeunes (79 %) disent avoir acquis des informations sur la sexualité et s’estiment mieux informés sur les moyens contraceptifs et leur utilisation, les MST ainsi que les risques et modes de prévention qui y sont associés, l’avortement, la pilule du lendemain, l’anatomie et la physiologie sexuelle, les pratiques sexuelles. Pour la grande majorité des jeunes (95 %), il n’y a rien de choquant au cours de l’animation. Les quelques jeunes qui disent avoir été choqués, expliquent ce sentiment par le manque de respect de certains de leurs pairs ou par certaines informations sur des pratiques sexuelles (‘le cercle homo’).
Les filles sont un peu plus satisfaites des informations reçues que les garçons (89 % des filles et 78 % des garçons sont entièrement satisfaits). Sans doute est-ce parce que les filles se sentent plus directement concernées par les informations sur l’anatomie et la contraception. Le service va donc analyser les demandes plus spécifiques des garçons et les moyens d’y répondre.
Reste qu’au terme des animations, 43 % des jeunes (tant garçons que filles) estiment qu’ils verront autrement les choses de la vie. Un résultat significatif et encourageant. De plus, plus de la moitié des jeunes interrogés (52 % répartis en 64 % de filles et 42 % de garçons) pensent qu’ils consulteront probablement ou certainement le SIPS un jour, essentiellement en cas de problème.
Renseignements: SIPS, 9, rue Sœurs-de-Hasque, à 4000 Liège. Tél.: 04 – 223 62 82. Fax: 04 – 223 24 69. Courriel: sips@sips.be et site Internet: https://sips.be .

Fumer ou ne pas fumer… est-ce la question ?

Le 30 Déc 20

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A l’origine de ce document, deux journées d’études et de réflexion organisées en mai et novembre 2001 à l’initiative de Nicole Maréchal , Ministre de la santé et de l’aide à la jeunesse.
La première s’adressait aux mandataires communaux et aux intervenants du champ de la promotion de la santé. La seconde intitulée ‘La prévention peut-elle faire un tabac auprès des jeunes?’ s’adressait aux équipes pédagogiques et aux directeurs d’écoles ainsi qu’aux intervenants et partenaires de l’école.
Au cours de ces deux journées, les participants ont entendu à la fois des interventions d’experts et de professeurs en sociologie, en santé publique, en assuétudes, et des témoignages d’acteurs de terrain qui ont dans leurs missions le traitement des pathologies liées au tabac, l’information ou l’éducation pour la santé auprès d’enfants, de jeunes, d’adultes, la recherche, la gestion de programmes de prévention et de lutte contre le tabagisme, l’information des intervenants et la coordination de politiques liées à la problématique du tabagisme.
Les auteurs de ce document ont retranscrit fidèlement des extraits d’interventions , souvent complémentaires mais parfois contradictoires, selon 5 axes: le produit; l’individu; l’environnement; le rite, la loi et l’autorité; la prévention et l’éducation. Ils ne proposent aucune recommandation, aucune recette. Il s’agit plutôt d’un outil de réflexion, destiné à ‘soutenir un processus d’échanges et d’appropriation d’idées, d’aider les acteurs concernés par la gestion de la question du tabagisme à prendre du recul grâce à la diversité des approches illustrées par les orateurs lors des deux journées’.
CHERBONNIER A., ROUCLOUX A., SADZOT C. et TREFOIS P., Fumer ou ne pas fumer… est-ce la question?, Forum Santé / Question Santé, 2002, (Des outils pour les acteurs de la santé), 32 pages.
Cette collection est disponible auprès du Ministère de la Communauté française, Direction générale de la santé, boulevard Léopold II 44, 1080 Bruxelles. Tél. 02-413 26 02.
Les publications de la DG Santé sont téléchargeables sur le site https://www.cfwb.be/dgsante

Domicile et bientraitance

Le 30 Déc 20

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«Certes la personne a des droits mais elle a aussi des besoins. A son égard, je dois m’interroger à propos de ce que je peux lui apporter, en tant que personne en relation avec elle et en tant que professionnel.» (Monique Meyfroet, psychologue clinicienne)
Parler de bientraitance n’est pas un euphémisme comme quand on parle de malentendants ou de malvoyants. Il s’agit ici de positiver les choses, les gestes, les personnes. Il s’agit de vouloir aller au-delà des gestes techniques et rendre aux soins leur dimension humaine.
Le 1er décembre 2001, pour fêter son dixième anniversaire, l’asbl Permanence Soins à Domicile organisait un colloque sur le thème ‘Domicile et bientraitance’.

Au-delà du technique se produit la rencontre

L’accomplissement des prestations de soins est insuffisant. En dépassant le fonctionnel, une humanisation des soins et une prévention de la maltraitance sont possibles:
– parler avec celui qui ne semble pas entendre;
– toucher celui à qui la parole a échappé;
– écouter celui qui se révolte;
– habiller normalement celui qui reste alité;
– laver celui qui ne peut plus bouger…
Ce sont ces attitudes qui favorisent sans doute la démarche bientraitante.
Bien traiter , c’est garder la conviction que la personne est toujours en cheminement et reste maître de sa vie; c’est elle qui est compétente pour exprimer tous ses besoins.

Plusieurs thèmes ont également été abordés dans les ateliers tels que:
– handicap et bientraitance: la personne handicapée mentale nous enseigne l’incertitude et nous pousse à un continuel questionnement éthique pour garantir les droits et la dignité de chacun;
– en quoi l’art a-t-il un rapport avec la bientraitance? En quoi l’art peut-il être thérapeutique?
– être mal… aller bien: c’est la question du sens de leur souffrance pour les bénéficiaires, et sens de leur travail pour les soignants. Sens de sa vie pour chacun…
– le don et la dette sont intimement liés dans la relation d’aide à autrui. Le don n’est pas gratuit puisqu’il ouvre un droit à recevoir. Il s’inscrit dans un cycle, un système d’échange dont la fonction est d’entretenir le lien social;
– communiquer pour bien traiter: il importe de se relier à la personne et non à sa déficience.
Les actes de ce colloque sont disponibles auprès de l’asbl P.S.D. moyennant le versement de 6.50 € au compte 786-5689576-25 de P.S.D., avenue Dr G.Thérasse 1, 5530 Yvoir avec la mention ‘actes du colloque 01.12.01’.

Alma Wallonie-Bruxelles, un service d’écoute téléphonique de l’asbl PSD
Une écoute spécialisée, un rôle d’information et de prévention.
Un travail en réseau avec des professionnels formés à l’approche de la maltraitance.
Une articulation entre les centres d’aide et de soins à domicile, les médecins traitants, les CPAS, les services sociaux des mutualités, les hôpitaux, les maisons de repos,…
Plus de 1000 appels et 546 dossiers ouverts en 2000-2001.
Tél.: 081 – 420 150
Permanence téléphonique du lundi au vendredi (sauf mercredi) de 9 à 16 heures.

La débrouille des familles

Le 30 Déc 20

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Récits de vies traversées par les drogues et les conduites à risque

Pendant plusieurs années, Pascale Jamoulle, ethnologue au Service de Santé mentale du CPAS de Charleroi, a recueilli le vécu intime et collectif de familles touchées par des conduites à risques (addictions, violences, micro-trafics, tentatives de suicide, automutilations…). Elle a cherché à recomposer leurs réalités quotidiennes, leurs parcours et le sens des gestuelles de risques qui traversent les foyers.
Son nouvel ouvrage1, La débrouille des familles , est le fruit d’une enquête de terrain de deux années dans deux quartiers de milieu populaire.2 Par des sources variées (observations, entretiens, récits biographiques…), l’ethnologue fait émerger le vécu de ces familles, leur parole, leur condition et leur regard sur leur histoire. Tranches de vie, anecdotes, graffitis, tags, extraits de récits ou d’entretiens informels construisent l’ouvrage, le rendent vivant et accessible. Ils sont autant de petites lucarnes sur les dynamiques familiales, les codes de conduites et les systèmes de valeurs en vigueur dans les socialités locales.
Parents, fratries, proches racontent la vie ordinaire dans des quartiers aux marges de la mondialisation, où la vie est marquée par la précarité et l’incertitude. Les récits des familles se croisent sur des perturbations des relations sociales, familiales et judiciaires. Violences, addictions, ‘ fièvre du business ‘ et autres comportements ‘décalés’ et (auto)destructeurs de la jeunesse sont des conduites d’adaptation aux transformations récentes des lieux de vie et d’apprentissage des jeunes (vie domestique, sociabilités de quartier, écoles). Ils surgissent à la croisée d’un processus de socialisation particulier et d’histoires individuelles et familiales évolutives. Aux contraintes de l’espace social, s’ajoutent souvent des événements traumatiques et des scénarios relationnels qui ancrent les prises de risques dans les relations familiales depuis parfois plusieurs générations.

L’absence des pères

Toxicomanies et micro-trafics traversent la plupart des récits des familles. Ils sont analysés à travers le prisme plus large des ‘conduites à risque’, les trajectoires familiales faisant largement apparaître, simultanément ou en déplacement successif, un ensemble de comportements ‘décalés’, destructeurs ou auto-destructeurs, qui fragilisent les individus, traversent les univers domestiques et procèdent des mêmes substrats et styles de vie.
Les anciens quartiers miniers du Hainaut belge, où l’ethnologue a principalement enquêté, sont des points d’observation privilégiés de ces parcours familiaux. Adossés aux friches industrielles, de vastes complexes de logements sociaux rassemblent les populations les plus précarisées. Les familles monoparentales sont prioritaires pour l’octroi des logements. Beaucoup de pères ont disparu du décor ou sont très discrédités. Tout au long de l’étude de terrain, les femmes (grands-mères, mères, sœurs) semblaient les seules à nommer ce qui se passait dans les familles, Les mères doivent être ‘le père et la mère à la fois ‘ mais, parfois, elles n’y arrivent pas et l’un des enfants occupe dans la famille une place qui ne lui revient pas.
Au côté de mères parfois très envahissantes grandissent de ‘ petits hommes de la maison’ (ou des adolescentes) qui veulent soumettre leur famille à leur loi. Lorsque des liens trop serrés unissent ces jeunes à leur mère, les relations sont violentes. Pris dans ‘un trop plein’ d’amour maternel, ils se sentent impuissants à s’émanciper et leurs colères sont sans limites. Le sentiment d’injustice et de révolte des fratries, qui se vivent comme les laissées pour compte de l’amour parental, crée des états de guerre familiaux et multiplie les conduites d’appel des jeunes.
Les huis clos domestiques sont d’autant plus oppressants qu’il y a peu de régulations externes. Enfermées par leurs problèmes de santé et leurs conditions de vie précaires, beaucoup d’interlocutrices se tiennent à distance ou sont en conflit avec leur famille élargie et la communauté.
Dehors, dans les sociabilités de quartier, l’économie souterraine est très implantée. Les réseaux du ‘ business ‘ 3 et les conduites liées aux drogues offrent aux jeunes un espace ludique où s’associer, une liberté, une émancipation, un accès à la société de consommation. Ils peuvent y prouver leur valeur et y bénéficier de protections. Les circuits d’échanges économiques clandestins tendent à devenir leur lieu de structuration principal. A ‘ l’école de la rue ‘, ils intègrent un système de normes, de valeurs et de conduites (sociales, économiques et symboliques).
La ‘culture de la rue’ 4 subit des transformations rapides. ‘ Les mentalités de maintenant ‘ poussent à l’extrême la compétition entrepreneuriale, ‘ la fièvre de l’argent ‘, le jeu des réputations et du paraître. Les relations souterraines sont duelles, les positions sont incertaines et les arbitres manquants. La vie quotidienne des quartiers est tissée de défis, d’insécurité et d’affrontements. Dans ces contextes, les conduites à risques de la jeunesse sont souvent des tentatives d’adaptation au fonctionnement de leurs relais de socialisation. Elles ont des fonctions multiples dans les scénarios familiaux. Elles construisent les réputations de ‘ petits caïds ‘ dans les quartiers et les écoles. A long terme, ces styles de vie inscrivent trop de jeunes et de familles dans des parcours de souffrance et de précarisation. Les tensions incarnées dans la population pré-adulte sont un signal d’alarme. Cette enquête montre à quel point il devient difficile pour notre structure sociale d’inscrire la jeunesse des quartiers populaires dans un système de références et d’échanges capable de l’inclure et de construire la paix familiale et sociale.

Des raisons d’y croire

Pourtant, malgré le poids du passé et l’état de délabrement de la structure sociale, sous la pression des conduites à risques qui les traversent, des familles sortent du mutisme et de l’isolement. Beaucoup ont pu ‘ remettre de l’ordre ‘ dans leurs relations familiales en faisant appel aux représentants institutionnels (le monde scolaire, l’aide, les soins, la justice…) ou parce que des professionnels se sont rapprochés d’elles. Des familles ont trouvé certaines ‘ solutions ‘ dans leur réseau social de proximité. De nombreuses personnes sont intervenues dans les parcours des familles rencontrées et se sont montrées adéquates (pharmacien, médecin généraliste, enseignante, assistante sociale de l’école, patron d’entreprise, responsable communal…). Leur savoir-faire relationnel a eu une action déterminante. Ces gens ont opéré un déplacement vers les familles, leur montrant une attention, une compréhension de leur condition et de leurs contextes de vie. Ils ont été des points d’écoute, de prévention et d’aide. Ils ont souvent été la première marche de l’accès à la diversité des ressources des dispositifs d’aide et de soins. Certains ont même occupé, sur le long terme, des places structurantes dans la vie des jeunes et des familles pris dans des itinéraires de risques (rôle de tiers…).
Beaucoup de familles sont entrées dans un processus de changement ‘ en se mélangeant ‘, parce qu’elles ont fait partie de cercles locaux. Pour faire face aux difficultés qui la traversent, la communauté est inventive, elle s’organise, crée ou utilise des supports adaptés aux traditions et aux évolutions des conditions de vie. Des groupes de formation, d’auto-support, d’épargne collective, ethniques ou spirituels ont souvent joué un rôle de tiers dans les relations familiales. S’insérer dans de nouveaux échanges sociaux a permis à de nombreuses interlocutrices de trouver des lieux d’écoute et d’expression, des protections et des substitutions qui ont fait évoluer leurs scénarios de vie. Elles ont développé leurs centres d’intérêt et leurs compétences symboliques, intellectuelles, techniques et sociales. Elles ont alors pu ‘desserrer’ leurs liens familiaux et se construire une insertion sociale différente.
La densité de l’expérience des familles éclaire les pratiques et les politiques d’aide adaptées. Pour prévenir les itinéraires de risques et de marginalisation, il faut s’attaquer aux facteurs qui alimentent la précarisation, l’enclavement et les violences structurelles dans les zones ghettos. Des régulations économiques, politiques et sociales sont indispensables pour restaurer une économie licite et des emplois acceptables dans les quartiers qui regroupent les travailleurs ‘surnuméraires’ de l’économie de marché. Pour gagner du terrain sur l’économie souterraine, l’Etat devrait également prendre certaines responsabilités et ouvrir les yeux sur les conséquences concrètes de la prohibition des drogues.

Flora
Un pharmacien m’a présenté Flora. ‘ On va commencer notre collaboration avec quelqu’un qui va bien. Je pense à une maman dont le fils s’en est sorti, il suit un traitement de substitution à la méthadone. Là on a vraiment pu faire quelque chose pour elle. Elle est arrivée à la pharmacie en état de détresse. On a réussi à la convaincre de participer à un groupe de parents. Elle a vécu là-bas quelque chose qui l’a transformée. Probablement elle était prête à cela mais, quand même, c’était assez surprenant. Elle est partie comme une victime et elle est revenue comme une lionne. Elle a repris la famille en main et on a l’impression que les choses se sont bien mises en place .’
Flora habite un clos ‘bien noté’ de Fortier. ‘ C’est dans la cité, mais ici, on peut compter sur les voisins en cas de problème. C’est des gens qui travaillent ‘. Sa maison est fraîchement repeinte avec, sur l’avant, un jardinet entretenu. Toujours habillée et maquillée avec soin, elle a une quarantaine d’années. Elle me fait entrer dans un petit couloir, tapissé d’un papier peint à l’éponge sur une gamme rouge-orange. Un rideau bordeaux, à volant sur le faîte, ouvre une entrée d’escalier. Le décor est très théâtral, surprenant pour une maison de cité. La salle à manger et le salon sont si encombrés de meubles et de bibelots qu’on peut à peine s’y déplacer. Deux divans massifs encadrent une table basse et une télévision grand écran. Les murs sont couverts de tableaux, certains assez monumentaux. Il n’y a aucun espace libre, tous les supports sont occupés par des objets de décoration d’une propreté méticuleuse.
A l’arrière, une table vernie, où j’écris le récit de Flora, entre un Bambi, un Père Noël et toutes sortes d’objets posés sur la nappe en dentelle.
Flora s’est séparée de son mari il y a une dizaine d’années dans un contexte de violence familiale grave. Elle a deux fils. Le plus jeune, Ahmet, a treize ans et vit avec elle. L’aîné, Murad, a vingt-six ans et un long passé dans la drogue. Ahmet et Murad ne voient plus leur père. Dès le second entretien, ils assistent au récit, s’asseyant toujours à la même place, sur le divan, devant la télévision allumée.
L’aîné intervient ça et là dans la conversation, généralement sans détourner son regard de l’écran. C’est un garçon très aimable, réservé, discret. C’est lui qui s’occupe de la décoration intérieure, il a de l’or dans les mains. Il a fait un palace de l’intérieur maternel et s’occupe avec sa mère de l’éducation de son petit frère. ‘ Il fait le père pour lui ‘, me dit Flora. Murad habite au centre ville mais il vient tous les jours, avec le bus de onze heures, passer la journée dans la maison familiale.
Même si elle n’a jamais souhaité les modifier, Flora prenait soin des textes de nos entretiens. Ils représentaient pour elle une forme de reconnaissance de la valeur de son expérience. Murad et Ahmet les lisaient. Ils en parlaient en famille.
Extrait, p. 32 et 33

Remise en question des intervenants

Outre des interventions pragmatiques sur ces différents plans, les secteurs de l’éducation, de l’aide, des soins et de la prévention peuvent offrir de modestes régulations en se rapprochant davantage des familles éprouvées. Il s’agit d’aller vers elles en occupant les espaces où on peut les rencontrer (les relations de quartier, les « cercles locaux », le secteur de la santé, l’école, le monde carcéral ) et en leur proposant une première écoute, un dialogue et une aide concrète. Pour capter les familles les plus exposées, nous devons continuer à inventer des modes de relations qui reposent sur d’autres logiques que la demande d’aide.
Les professionnels de l’intervention sanitaire, sociale et éducative gagneraient à ‘se mélanger’ aux pratiques sociales spécifiques existant dans les quartiers. Participer aux cercles d’épargne collective, aller à la rencontre des groupes spirituels qui sont un support pour de nombreuses familles permettraient de réduire ‘les écarts’ de mentalité et de se rapprocher des familles qui cumulent les difficultés.
Quand les familles sont débordées par leurs relations familiales, beaucoup ne savent où s’adresser.
Elles ont peur de l’étiquetage public lié à la fréquentation de la psychiatrie ou des centres de cure pour toxicomanes, mais elles ont besoin de trouver des interlocuteurs. En ce sens le nouveau dispositif français de ‘lieux d’écoute’ de proximité est particulièrement intéressant.
Pour rapprocher les services des familles les plus précarisées, il est nécessaire de réfléchir au cas par cas, à partir des réalités locales, à des modes de travail qui permettraient de rencontrer les populations qui ne se rendent pas dans les structures d’aide, notamment les pères en rupture avec leurs enfants et les mères isolées. Il y a là un espace de prévention à occuper et des pratiques à inventer pour aider les mères à sortir de chez elles, à développer des intérêts extra-familiaux et, parfois, à restaurer certains liens avec la famille élargie, le père de leurs enfants et leurs proches.
Le succès et l’impact sur les trajectoires de vie des groupes d’entraide et d’auto-support montre également l’importance de mettre les parents ‘ qui ont vécu ça ‘ au cœur des processus d’aide. Pour franchir le seuil des structures, les familles ont besoin de rencontrer ‘ un familier ‘ à la porte d’entrée.
Il est également indispensable de faire évoluer les représentations sociales des jeunes qui se mettent en danger et de leurs familles. Si elles se sentent ‘mises à l’écart’ et jugées par la communauté, les familles se retranchent dans ‘ le mutisme ‘ et masquent les mises en danger du jeune. Les situations se dégradent alors, parfois jusqu’au drame, dans des univers domestiques confinés.
Aider le milieu scolaire à gérer les tensions et les parcours de risques de la jeunesse, aider à la socialiser et à la qualifier, sont essentiels en prévention. Le réseau de professionnels locaux pourrait davantage aller à la rencontre des difficultés et des ressources des écoles, les apprivoiser, établir la confiance et renforcer leurs ressources et potentialités.
L’ouvrage La débrouille des famille est adapté à un large public qui souhaite mieux comprendre les parcours de risques de la jeunesse et le vécu des familles éprouvées. Les récits des personnes qui y ont participé se sont répondu et mêlé jusqu’à construire une réflexion collective, basée sur la densité de l’expérience. Elle éclaire les pratiques et les politiques d’aide adaptées.
Pascale JAMOULLE, La débrouille des familles, Récits de vies traversées par les drogues et les conduites à risque, De Boeck Université, Collection Oxalis, 2002, 232 pages, 19,95 €.

1 Son précédent livre, Drogues de rue, récits et styles de vie , paru chez De Boeck dans la même collection Oxalis, est toujours disponible.
2 Elle a été réalisée avec le soutien de la Commission européenne, du Ministre wallon des Affaires sociales et de la Santé, Thierry Detienne, de la Ministre de l’Aide à la jeunesse et de la Santé, Nicole Maréchal et du CPAS de Charleroi.
3 Activités commerciales souterraines.
4 LEPOUTRE D., Cœur de banlieue, Codes, rites et langages , Paris, Poche Odile Jacob, 2001 (1997).

Facettes de la santé mentale à Bruxelles

Le 30 Déc 20

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«Je vais bien, je tiens la forme»… Un tel discours est signe de bonne santé mentale. Une maladie, une séparation, un deuil, la rencontre d’un autre trop différent, etc., peuvent venir bouleverser cet état qui paraît simple quand tout va bien. La santé mentale est par essence subjective. C’est un équilibre, instable, fragile, toujours à reconstruire.
Au terme de 2001, Année de la santé mentale, l’asbl Question Santé s’est penchée sur cette capacité de l’être humain de «se» penser et d’entrer en relation avec d’autres. Au terme d’un riche travail de rencontres et d’entretiens, elle publie une brochure extrêmement intéressante, « Facettes de la santé mentale aujourd’hui à Bruxelles ». Question Santé y aborde de manière accessible mais approfondie les différentes facettes de cette problématique complexe. Les situations décrites sont bien différentes les unes des autres, mais un fil rouge les relie toutes: la relation à l’autre, la capacité d’entrer en relation avec lui qui permet à chacun de se construire en tant qu’être humain et de se développer psychiquement et socialement.
Les travailleurs des services ambulatoires insistent sur cette dimension: «C’est en raison de problèmes psychologiques que les gens peuvent se retrouver dans des difficultés sociales et vice-versa». Les spécialistes de l’insertion socio-professionnelle des personnes qui ont connu des problèmes de santé (au sens large) soulignent d’ailleurs les attentes énormes de ces personnes par rapport au travail, à la valorisation et à l’insertion qu’il permet. Des attentes parfois excessives dans un monde socio-économique où l’organisation du travail génère souvent bien du stress et durcit les relations professionnelles. Ils déplorent d’ailleurs que la santé mentale en entreprise ait été sous-estimée jusqu’ici.
La brochure se penche aussi sur la santé mentale et l’enfance, l’adolescence, le vieillissement. Elle aborde encore la manière dont l’exil, les toxicomanies, les relations avec la justice (comme inculpé ou comme victime) affectent la santé mentale. Enfin, elle approche les soins ambulatoires en santé mentale, rend compte d’une alternative à l’hospitalisation psychiatrique et se termine par une présentation des soins de santé mentale à Bruxelles.
«Facettes de la santé mentale aujourd’hui à Bruxelles», numéro spécial 2001 de «Bruxelles Santé», une réalisation de l’asbl Question Santé. Renseignements : Question Santé, 72, rue du Viaduc, à 1050 Bruxelles. Tél. : 02 – 512 41 74. Fax : 02 – 512 54 36. Courriel: question.sante@skynet.be. Site web: https://www.questionsante.org

Comment assurer la santé et le bien-être des enfants et des jeunes?

Le 30 Déc 20

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Comment faire pour que les enfants et les jeunes âgés de 2 à 17 ans se développent sainement et s’intègrent harmonieusement dans la société? Un ouvrage collectif québécois fait le point sur les principaux facteurs qui déterminent la santé et le bien-être des jeunes.
La relation entre les parents et leurs enfants, les pratiques éducatives des parents, la compétence sociale, le soutien social, l’estime de soi, l’alimentation, l’activité physique et l’environnement scolaire: tels sont les sept facteurs qui concourent à la bonne santé et au bien-être des enfants et des jeunes en âge scolaire. Cinq chercheurs québécois les ont minutieusement analysés dans un ouvrage collectif passionnant: ‘6, 12, 17 Nous serons bien mieux!’.

De saines habitudes de vie

Cette démarche québécoise se voulait résolument positive et inscrite dans une perspective de promotion de la santé. Les auteurs constatent que bien des gens tentent de trouver des solutions aux maux qui affligent les jeunes, mais que l’on se demande trop peu comment faire pour qu’ils se développent harmonieusement. Ils notent aussi que les spécialistes qui travaillent en ce sens restent souvent cantonnés dans leur seule spécialisation et agissent fort peu ensemble. Les auteurs ont donc procédé tout autrement: chacun a développé les moyens à sa portée, dans sa discipline, pour aider les jeunes à se sentir bien. Et tous ont jeté des ponts entre leurs actions afin de les harmoniser pour agir de manière soutenue et cohérente, avec plus d’efficacité.
De saines habitudes de vie sont indéniablement des déterminants importants de la santé et du bien-être immédiats des adolescents. Les auteurs citent les activités physiques de l’enfant qui développent les habiletés motrices de base mais aussi les compétences sociales. Ils pointent aussi la qualité de l’alimentation essentielle dans la croissance et le développement, mais aussi au maintien de leurs capacités d’attention et de concentration. Or celles-ci créent un contexte favorable aux apprentissages, donc au succès scolaire.

L’estime de soi

Les compétences personnelles et sociales des enfants et des adolescents représentent à coup sûr d’autres déterminants essentiels de la santé et du bien-être présents et futurs des jeunes. L’évaluation qu’ils font de leurs propres compétences entre directement en compte dans leur sentiment d’estime de soi. Les auteurs ont particulièrement développé les compétences sociales c’est-à-dire la capacité de transiger harmonieusement avec les autres. Si cette compétence fait défaut, cela compromet l’adaptation sociale et peut conduire à des conduites de délinquance, de consommation d’alcool et de drogues et peut provoquer l’isolement et le retrait social. Bien sûr, cette compétence joue également un rôle dans le processus d’adaptation scolaire des enfants et adolescents.
Les environnements humains où évoluent les enfants sont aussi des déterminants clés. C’est en famille, à l’école, dans leurs groupes de pairs que les enfants et les adolescents établissent les premières relations affectives et sociales qui détermineront, en grande partie, la qualité de leurs échanges avec les autres. C’est dans ces milieux aussi qu’ils construiront les systèmes de soutien social dont ils sauront s’entourer.

Chère et difficile discipline

Les auteurs soulignent que les aspects relatifs à la relation entre parents et enfants et à l’exercice de la discipline affectent de façon particulière l’adaptation sociale des enfants et des adolescents. La façon dont les parents exercent la discipline et l’encadrement est également cruciale: une discipline consistante assurée par des parents chaleureux qui savent établir et faire respecter des limites claires et raisonnables ont plus de chances d’aider les enfants à devenir socialement compétents. Les auteurs notent d’ailleurs la difficulté pour les parents de mettre en oeuvre une telle discipline tout en s’adaptant à l’autonomie grandissante des adolescents. Reste qu’il est indispensable qu’ils encadrent l’enfant et supervisent ses activités jusqu’à l’adolescence.
L’environnement scolaire est capital lui aussi. Les pratiques pédagogiques auxquelles recourent les enseignants, le climat qui prévaut à l’école et l’ouverture manifestée par l’école à l’égard des parents et du reste de la communauté sont autant de caractéristiques susceptibles d’avoir un effet sur les enfants d’âge scolaire.
Encore faut-il considérer l’enfant et l’adolescent dans leur globalité et agir en cohérence dans ces différents domaines d’activités. ‘6, 12, 17 Nous serons mieux!’ est une mine d’informations pour soutenir la réflexion et construire les outils nécessaires à une telle éducation harmonieuse.
Sous la direction de Marthe Hamel, Luc Blanchet et Catherine Martin, ‘6.12.17 Nous serons bien mieux! Les déterminants de la santé et du bien-être des enfants d’âge scolaire’, Les Publications du Québec, Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, 2001.

Mieux comprendre le malade pour mieux l’accompagner

Le 30 Déc 20

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Depuis de nombreuses années, la Fédération belge contre le cancer publie une fois l’an un ouvrage destiné au grand public, afin de mieux faire comprendre certains aspects liés à la santé tels que l’alimentation, l’environnement, le fonctionnement du corps humain,…
Le présent ouvrage ne parle plus de la prévention, mais bien de la maladie, de son influence et de ses conséquences sur l’entourage du patient.
Il est destiné à un très large public, aux jeunes et aux moins jeunes, aux malades, mais plus particulièrement à leur entourage. Il a pour but de les aider à mieux comprendre ce que peut ressentir un malade, afin de pouvoir mieux réagir et ainsi mieux l’entourer, tout en restant soi-même.
Qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui dire? Cette question revient chaque fois qu’on aborde une personne gravement malade. A plus forte raison s’il s’agit de nos proches.
Pour trouver les mots ou les attitudes qui aident réellement, il faut au préalable interpréter correctement les réactions et attentes du patient. Il faut également tenir compte des sentiments que la maladie provoque chez nous.
C’est là l’objet de ce livre: comprendre d’abord pour pouvoir ensuite mieux accompagner ceux qui en ont besoin. On réalise alors que la parole juste, l’écoute chaleureuse ou simplement la présence respectueuse apportent une aide irremplaçable.
‘Mieux comprendre le malade pour mieux l’accompagner’ peut être obtenu gratuitement à la Fédération belge contre le cancer, tél. 070 22 22 10.

Ecstasy, pilules sans ordonnance

Le 30 Déc 20

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L’étude de Gilles Hacourt présente les résultats d’une recherche scientifique menée en Communauté française de Belgique. L’objectif était d’obtenir une meilleure connaissance du phénomène de la consommation des nouvelles drogues de synthèse (NOS), communément appelées «ecstasy ».
Les données ont été recueillies lors d’une enquête par questionnaire fermé auprès de 364 consommateurs d’ecstasy ou de produits qu’ils estiment en être, de 33 entretiens semi-directifs individuels et 4 interviews en groupes d’usagers et de non-usagers, et de 8 observations de terrain.

Des publics, des motivations et des lieux diversifiés

Dans l’échantillon de l’enquête, l’âge le plus fréquent lors du premier essai a été 17-18 ans.
Deux tiers (66,5%) des consommateurs d’ecstasy déclarent en prendre au maximum deux à trois fois par mois, et 5% déclarent un usage quasi quotidien.
La quantité moyenne est d’un peu moins de trois pilules par occasion de consommation, une bonne moitié de l’échantillon en prenant deux au maximum par occasion.
Le profil de l’usager d’ecstasy ne correspond pas, ou plus, aux idées reçues telles que posées par l’équation: public jeune et intégré socialement + musique techno + (méga)dancing = ecstasy.

Les motivations de la consommation

S’amuser plus, rire, être euphorique, avoir du plaisir, augmenter les sensations du délire de la fête, se défoncer, s’éclater 70 %
Tenir le coup, être plein(e) d’énergie, être plus fort(e), être au top 42,5 %
Ressentir mieux ou autrement les sons, les choses, les gens, le monde 42 %
Etre plus convivial(e), plus ouvert(e), plus sociable, être love , se faire des ami(e)s 29 %
Oublier les petits tracas du moment, se relaxer après une semaine de travail 21 %
Etre dans le même délire que les autres 19 %
Se sentir plus sûr(e) de soi, moins timide 18 %
Faire une recherche sur soi-même, une prise de conscience, rechercher de nouvelles sensations 18 %
Oublier tous ses problèmes 17 %
Danser mieux 14 %
Draguer, désirer des relations sexuelles 13 %
Avoir une sensation de risque 7 %
Rien de spécial/se droguer 4 %
Faire plaisir à des amis 2 %

En fait, le public consommateur est relativement large: personnes jeunes et plus âgées (jusqu’à 36 ans), à la fois bien et moins bien insérées en termes d’emploi, de revenu. D’autre part, l’association de l’ecstasy et de la musique techno ne constitue plus un facteur d’identité collective chez les usagers; à l’inverse, c’est le refus des catégories et la liberté de l’individu qui sont revendiqués.
Et enfin, si l’usage d’ecstasy est le plus fréquemment motivé par la recherche de l’euphorie dans un contexte festif, l’étude précise un double phénomène: l’usage pour d’autres raisons, comme la recherche sur soi, la facilitation des relations, et la consommation en des lieux autres que ceux des sorties: à domicile, dans des lieux publics, par exemple.

Entre vigilance et imprudence

La plupart des usagers rencontrés développent, individuellement, des procédés de contrôle de leur consommation. Le produit en tant que tel n’est pas maîtrisable par l’individu. Dès lors, ce dernier veille à consommer dans un état psychologique et un contexte qu’il juge propices. La surveillance exercée par les pairs est également un moyen de contrôle (ces facteurs jouent aussi lors de l’essai). S’y adjoint une consommation voulue « réfléchie » en termes de nombre d’occasions, de quantités consommées, ainsi qu’au travers de l’utilisation de drogues associées à l’ecstasy – l’alcool, le cannabis ou encore les amphétamines – qui remplissent assez souvent des fonctions précises. Enfin, le contrôle est alimenté par l’information, pour autant qu’elle soit estimée objective, sans jugement de valeur, et non moralisatrice par l’usager.
Cette vigilance n’empêche pas la prise de risques dans l’ensemble des usages de l’ecstasy. Le but resterait d’atteindre le maximum de ce qui est recherché (plaisir, résistance physique, etc.); la prudence lors de l’usage se fait quand le consommateur y pense et « là où c’est possible ». Ce sont surtout des risques liés au contexte d’usage qui sont cités (lieu, ambiance peu propices), et dans une moindre mesure, des risques dus à l’état psychologique (être déprimé…) ou physique (souffrir d’une maladie, etc.). Il arrive aussi à plus d’un consommateur de déclarer avoir conduit un véhicule, ou encore d’avoir eu des relations sexuelles non protégées sous influence de l’ecstasy.

Prévenir et agir pour réduire les risques

Les non-usagers rencontrés ne souhaitent généralement pas devenir consommateurs d’ecstasy. Mais certains montrent une relative vulnérabilité, lorsqu’ils disent n’avoir jamais essayé de NOS pour la simple raison qu’ils n’ont jamais été mis en contact avec de telles substances. Des dispositifs de prévention se justifient donc et méritent d’être poursuivis.
Il en est de même quant aux actions visant à la réduction des risques pris par les usagers lorsqu’ils consomment de l’ecstasy. Les analyses diverses présentées dans le livre devraient permettre de mieux adapter de telles actions aux usages (selon les lieux, les quantités, etc.) et aux publics (socio-économiquement insérés, fragilisés, etc.).
HACOURT G., Ecstasy, pilules sans ordonnances, usages et usagers de nouvelles drogues de synthèse, L’Harmattan, 2002, 232 p.

Du bon usage d’une information

Le 30 Déc 20

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Les médias ont relayé début octobre les résultats d’une étude américaine du Professeur Ricaurte qui prétend établir le lien entre la consommation de MDMA et le développement de la maladie de Parkinson, et ce même après une seule prise. Les signataires de cet encadré, professionnels de la prévention, de la promotion de la santé et de la réduction des risques, s’inquiètent de la diffusion d’une telle information sans vérification minimale et préalable de sa fiabilité. En effet, selon d’autres chercheurs et spécialistes, également américains, la méthodologie de cette étude serait discutable, ce qui en invaliderait les conclusions. Par ailleurs, malgré 20 ans de recul aux USA, aucun cas de maladie de Parkinson en lien avec la consommation d’XTC n’a été signalé jusqu’à ce jour.
Mais surtout, la diffusion de ce type d’information induit trop d’effets pervers qui contrarient les efforts de la prévention: en angoissant les adultes (par une information au contenu effrayant) et en braquant les jeunes usagers (qui ne programment généralement pas la préservation de leur capital-santé). Le risque de rupture de dialogue entre jeunes et adultes s’en trouve accru.
Certes les signataires n’expriment aucun doute sur la nocivité probable de la consommation à doses massives ou chronique d’XTC, (risque de dépression par exemple), et ne ménagent pas leurs efforts pour en informer les usagers, dans un dialogue qui respecte la culture de ces derniers. Il faut rappeler que les informations exagérées ou peu vraisemblables, créant des rumeurs fausses, nuisent à une politique raisonnée d’information et de prévention. Ce faisant, les adultes perdent de leur crédibilité auprès des jeunes, ceux-ci refusant alors toutes informations provenant des adultes et des médias.
Infor Drogues, Prospective Jeunesse et Modus Vivendi

Les nouvelles drogues de synthèse

Le 30 Déc 20

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L’XTC c’est quoi?

L’XTC (MDMA), synthétisée en 1912, fait son apparition sur le marché européen des drogues en 1988. Les effets qui sont recherchés sont: l’excitation, la résistance au sommeil, l’empathie, l’euphorie, la convivialité, une forme de béatitude. Peu à peu, cependant, ce terme devient générique. En effet, le contenu des comprimés, les molécules utilisées, sont très variables.
MDMA, amphétamines, méthamphétamines, nicotine, caféine, glycérine, saccharine, substances médicamenteuses… Certaines substances sont des tueuses: MTA ( qui donne une sensation de calme) ou PMA ( hallucinogène puissant). Les effets de ces pilules peuvent aussi être différents. Il est donc difficile de les appréhender.
L’impact à long terme de ces substances sur le cerveau est probablement la détérioration, même si elle n’est pas encore attestée scientifiquement chez l’homme. La neurotoxicité au-delà d’une semaine est en tout cas confirmée chez le rat et chez les primates. Il est donc urgent d’améliorer la connaissance scientifique et, si les risques de détérioration se confirment, de classer l’XTC au premier rang des drogues toxiques.

Pourquoi l’XTC?

L’XTC n’est pas consommée seulement lors de rave ou de soirées techno. Elle n’est pas consommée seulement par des adolescents en crise ou rebelles. Elle l’est aussi par des jeunes intégrés, scolarisés ou au travail, qui en font usage le week-end, lors de moments festifs. La plupart sont relativement vigilants par rapport aux risques qu’ils courent. Le risque est cependant évident.
Assiste-t-on à un mouvement particulier chez les jeunes, au développement d’une culture du plaisir immédiat? Cet aspect «consumériste» n’est pas propre à la jeunesse. Ce désir du « tout, tout de suite » est propre à notre civilisation.
La recherche d’un état psychique particulier n’est pas non plus spécifique aux jeunes. Alcool, antidépresseurs, amphétamines, produits dopants… la liste est longue des produits usités par la population en des pourcentages inquiétants.
Rappelons-nous aussi que chaque époque a vu naître des mouvements d’abord marginalisés qui avaient comme conséquence de stigmatiser la population jeune: les Festivals du Jazz dans les années 50, le flower power des années 60, la new wave et le punk fin des années 70. La différence, c’est la croissance de la consommation.
Ne faisons donc pas une déclaration de guerre aux jeunes. Affrontons la question de la drogue, des drogues.

Politique des drogues en Communauté française

En matière de toxicomanie, trois axes d’intervention politique doivent s’additionner de la façon la plus harmonieuse possible.

Répression

La première intervention relève de la Justice et de l’Intérieur : c’est la répression des trafics. Elle est nécessaire et légitime dans un Etat de droit. Je ne m’étendrai pas sur cet aspect du problème, puisqu’elle ne relève pas de nos actions communautaires. Mais nous serons tous d’accord pour dire que la lutte contre les trafics, les dealers et le blanchiment d’argent doit être renforcée.
La Communauté française est compétente en matière de santé. Notre regard sur le consommateur n’est donc pas celui qu’on pose sur un justiciable, mais sur une personne dont la santé doit être préservée.
Le décret du 14 juillet 1997 portant organisation de la promotion de la santé en Communauté française pose bien la problématique d’un des problèmes de santé prioritaires, à savoir les assuétudes. Le législateur a pointé d’emblée le paradoxe sur lequel repose la prévention des assuétudes: « il s’agit à la fois d’éviter un comportement – individuel et de groupe – et d’éduquer à la responsabilité et au libre choix. » Challenge de taille qui ne peut se résumer à quelques recommandations méthodologiques bien pensantes. C’est tout le sens du travail de prévention et de promotion de la santé qui se voit ainsi questionné. La question du sens de nos interventions prend ici toute sa pertinence non seulement en termes de santé publique mais en termes d’éducation et de politique d’avenir.

Prévention

Les stratégies proposées dans le Programme quinquennal de la promotion de la santé de la Communauté française tentent d’apporter une réponse à ce délicat problème.
C’est dans le champ de la prévention primaire – qui s’adresse à tous ceux qui ne consomment pas – que se développe le travail de la Communauté française . C’est elle qui reçoit le plus de moyens également. C’est un travail discret qui ne fait pas débat et dont on parle peu.
Le premier axe d’intervention en prévention concerne les adultes qui entourent les jeunes (parents, communauté éducative, responsables de jeunes).
La nécessité de poursuivre la sensibilisation et la formation des adulte s aux contacts des jeunes usagers ou non, reste primordiale. On sait combien les parents sont peu informés et donc désarmés.
Le deuxième axe redit l’importance de la réflexion et des échanges entre jeunes et adultes autour de la question des drogues, dans une perspective d’éducation générale. Il s’agit d’inscrire la question des drogues dans un questionnement plus large sur le sens de la vie, sur les choix de vie, à une époque déterminante .
Ici le décret renvoie aux bases mêmes de l’éducation pour la santé et de la promotion de la santé: les facteurs déterminants de santé, qui sont de trois ordres: les facteurs liés à l’individu, les facteurs liés à son milieu de vie et les facteurs liés à la société.
En matière de toxicomanie, on oublie bien souvent deux déterminants essentiels des conduites à risque pour se focaliser sur le produit. C’est un risque majeur, nous l’avons vu encore récemment dans les médias suite aux campagnes de cet été. Même si cette information reste importante.
N’entrevoir la prévention que par le prisme du danger potentiel ne pourrait conduire aux changements de comportements souhaités. Ce serait naïf de croire que l’argumentation de la peur et de la terreur va résoudre ce vaste problème lié aux opinions, aux valeurs, aux croyances, aux représentations non seulement des jeunes mais de la société tout entière.
Dans ce sens le troisième axe d’intervention du décret de 1997 recommande d’orienter la prévention sur les attitudes (les dispositions d’esprit) et les comportements et sur le sens que ceux-ci ont pour les jeunes, plutôt que sur les produits.
Les études ont montré combien la connaissance de soi, la confiance en soi conduisent au développement des capacités nécessaires à la vie avec les autres. Etre en santé, c’est communiquer, négocier, analyser, comprendre le monde qui nous entoure pour résister aux pressions négatives et résoudre les problèmes qui se posent à nous. La promotion de la santé, ce n’est rien d’autre qu’exercer ses capacités de vie dans les contextes qui se présentent à nous.
C’est dans cette optique résolument participative que doivent s’inscrire les actions de prévention des assuétudes. Elles doivent aider les jeunes à vivre en interaction avec non seulement d’autres jeunes, mais aussi avec la société tout entière. Les groupes de pairs ont montré toute leur importance dans l’initiation, la prévention et face à la consommation. Cela étant, cela ne veut pas dire que les adultes n’ont plus une place capitale à tenir dans les dispositifs de prévention. Ils restent les repères pour les jeunes dans cette période paradoxale qu’est l’adolescence où il faut grandir, se dépasser, se singulariser, se forger une identité et prendre des risques pour devenir adulte.
Entamer le boulot en se centrant sur la prévention des assuétudes, c’est mal l’entamer. Les conclusions de la recherche de Gilles Hacourt pour l’asbl Eurotox plaident encore une fois pour une approche généraliste qui commence tôt. C’est dès la maternelle que les compétences utiles à la santé doivent être abordées au travers d’approches positives et globales de la santé.
Quinze programmes sont actuellement subventionnés pour des programmes de prévention dite primaire à l’attention des jeunes, des professionnels de la santé et de la communauté éducative.

Réduction des risques

La réduction des risques a pour objectif d’informer les consommateurs sur le risque qu’ils font courir à leur santé par leur consommation. Cette approche non moralisante permet de renouer le lien, de donner au sujet les moyens de préserver sa propre santé. Elle offre des solutions à ceux qui n’ont pas les ressources pour réfléchir à des propositions durables meilleures pour leur vie et leur santé. Elle est un choix clair de la Communauté française depuis plusieurs années.
Elle permet donc:
– un contact avec les usagers et, pour ceux qui en font la demande, une orientation vers les services spécialisés;
– une meilleure connaissance des produits qui circulent, un inventaire, la prise de mesures en cas de découverte de substances mortelles;
– de réadapter les programmes de prévention et de réductions des risques.
C’est dans les années 80 qu’apparaît la politique de réduction des risques, dans le sillage du sida. En 1989, des actions de prévention toxicomanie par les pairs (‘boule de neige’) apparaissent en Belgique.
En 1990, les Pays-Bas mettent en place un programme d’analyse chimique du contenu des pilules d’XTC. Les analyses sont transmises aux consommateurs pour leur information, mais sont aussi récoltées pour répertorier les substances testées et développer des programmes de réduction des risques adaptés à ces consommations.
En 1994, on ouvre les trois premiers comptoirs d’échange de seringues à Liège, co-financés par la Communauté française.
En 2000, suite à une demande de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies, une étude a été réalisée sur les interventions de «Pill-testing» dans l’Union européenne (objectifs, méthode, résultats, évaluation). Ce document reprend l’analyse des projets réalisés en Autriche, France, Belgique, Allemagne, Hollande, Espagne et Suisse.
Dans le cadre des recommandations européennes, il est indiqué que [i«pour être capable de détecter de nouvelles substances ou des substances rares, par des moyens analytiques, nous devons être en possession d’échantillons de référence. Nous aurons également besoin d’expérimenter ces substances, sur des humains et sur des animaux, pour en évaluer les risques .
Une banque de données de toutes ces substances psycho-lactives connues devra être réalisée en Europe. Des projets scientifiques et des projets pill-testing devraient permettre d’obtenir des échantillons de référence pour des objectifs scientifiques et de réduction des risques
En 2000, des contacts ont lieu entre mon Cabinet et l’asbl Eurotox, concernant la pertinence de réaliser une recherche sur la consommation d’ecstasy en Communauté française.
Cette recherche fondamentale relève donc bien du champ de la prévention secondaire et de la réduction des risques, puisqu’elle s’adresse à des jeunes usagers et aussi à de futurs usagers déjà entrés dans une dynamique de consommation, de quasi consommation ou d’essai de consommation.
Les recommandations qui clôturent cette recherche, outre les éléments d’analyse qu’elle offre, doivent aider tous ceux qui sont concernés par cette question (politiques, juges, éducateurs, enseignants…) à rendre leurs interventions et actions plus pertinentes. Cette pertinence, c’est celle que leur reconnaîtront les jeunes consommateurs alors portés à se pencher de façon informée sur leur consommation et surtout sur leurs comportements.

Constats et recommandations

– Il importe de s’interroger avec les consommateurs sur les éventuelles conséquences à long terme de la consommation (alors qu’ils cherchent un plaisir éphémère).
– Il est utile de diversifier les actions de réduction des risques, vu la diversification des lieux de consommation, des consommateurs et de leurs conditions de vie, avec toujours une attention particulière pour les adolescents (goût du risque, attrait de l’extrême…).
– Le contenu du produit ne pouvant pas être maîtrisé par l’usager, ce sont les conditions de consommation qui peuvent les protéger. La surveillance par les pairs est une condition intéressante ainsi que l’information sur les risques liés aux produits et liés aux poly-assuétudes. La recherche scientifique doit être intensifiée pour donner plus d’informations à ce sujet.
– Le testing permet de donner une information sur le contenu du comprimé et donc de limiter les risques de l’usage.
– Les consommateurs ne se définissent pas comme toxicomanes; il faut les responsabiliser par rapport à leur usage, à leur mesure de contrôle car il n’est pas facile d’abandonner l’ecstasy.
– Une information sur les accidents survenus, imputables à la consommation d’ecstasy serviront à briser les croyances des consommateurs. Une recherche à ce sujet est nécessaire.
– L’information reste un élément crucial: son contenu doit être crédible, en relation directe avec l’expérience de l’individu, selon qu’il est ou non consommateur. Elle doit être rigoureuse, ne doit pas être intrusive, moralisante ou stigmatisante. Dans le cas contraire, le rejet est assuré. Néanmoins, elle doit pouvoir aborder l’excès de la consommation. Elle doit aussi insister sur la responsabilité de l’usager dans la consommation. Elle doit être compréhensible en fonction de l’interlocuteur, accessible et disponible.
– En ce qui concerne les «expérimentateurs» il faut aussi les responsabiliser et insister sur la notion d’effort personnel.
Nicole Maréchal

La Sale Infection qui Décourage l’Afrique

Le 30 Déc 20

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Trente millions d’Africains, un sur 23, vivent avec le virus du sida, l’équivalent de la moitié de la population de la France. Pour certains Africains, de moins en moins nombreux, le sida reste un ‘Syndrome Inventé pour Décourager les Amoureux’, une histoire sans fondement racontée pour mettre un frein au libertinage, voire inventée par les Blancs pour limiter la natalité des Noirs. Et même si le lien avec les relations sexuelles est désormais perçu, à quoi bon savoir si on n’a que peu d’espoir d’être soigné?
L’autre ‘sida’, disent les Africains, c’est le ‘Salaire Impayé Depuis des Années’, celui de la pauvreté qui fait tout accepter pour survivre et dont les femmes sont les premières victimes.
Selon l’Onusida, il faudrait, pour combattre efficacement la pandémie, 15 milliards de dollars par an jusqu’en 2007. En septembre 2002, seuls 2,1 milliards pour les quatre à cinq ans à venir avaient été récoltés.
Les reportages des journalistes de l’agence Syfia International, présentés dans ce recueil, racontent sans tabous ni détours ce que vivent ces hommes et ces femmes pour qui le pire n’est pas forcément le sida, tant la survie quotidienne est prioritaire. En filigrane, ce sont toutes les difficultés de la prévention et de la lutte contre le VIH qui apparaissent à travers ces tranches de vie croquées essentiellement en Afrique de l’Ouest et du Centre.
SIDA: la Sale Infection qui Décourage l’Afrique, par Syfia International, Editions Publibook, 136 pages, 14 € + port. Commandes par internet sur le site https://www.publibook.com ou par téléphone du lundi au samedi de 9 à 20h au + 33 1 47 00 05 07.

Quand le Quart monde et les professionnels se forment ensemble

Le 30 Déc 20

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Le livre Le croisement des pratiques est la chronique de la levée d’une frontière faite de préjugés, de peurs et d’incompréhensions entre deux mondes qui se côtoient au quotidien et qui pensaient se connaître: le monde des professionnels et le monde des personnes en grande pauvreté.
Les uns sont venus porteurs de pratiques exercées dans le cadre institutionnel, les autres détenteurs de l’expérience d’une vie dure en butte à l’injustice et d’une pratique associative.
Pendant 18 mois, un groupe de travail composé à part égale de militants d’ATD Quart Monde, ayant vécu ou vivant encore dans des conditions d’exclusion et de professionnels formateurs mandatés par leurs institutions et issus de différents secteurs (l’école, la justice, la police, la culture, le travail social, la petite enfance, le logement, la formation professionnelle, l’éducation permanente, la culture, l’aide à la jeunesse…), a travaillé à trouver des chemins pour améliorer ces relations.
Poussés par la volonté de comprendre l’autre, sans renier ce qu’ils portent, ils ont ouvert un chemin de dialogue et de formation commune qu’ils nous invitent à emprunter à notre tour afin d’agir plus efficacement contre la misère.
Ensemble, ils ont analysé leurs expériences; les familles démunies méconnaissent les missions et les contraintes des professionnels et, de leur côté, les professionnels n’imaginent souvent pas ce qu’endurent les personnes en difficultés.
‘Ce qu’on a vécu pendant un an et demi[, ce qu’on a écrit, ce n’est assis ni sur de la théorie, ni sur des décrets .
On a travaillé sur nos propres expériences, expériences dures, vécues comme des souffrances, des injustices, des échecs. Ce n’est pas comme si on travaillait sur un problème de maths extérieur à nous. Mais on ne pouvait pas dialoguer entre nous sans prendre distance. Les professionnels ont du mal à prendre distance à certains moments, mais c’est difficile aussi et très exigeant du côté des militants qui vivent la pauvreté au quotidien .
À ceux qui voudraient se lancer dans une démarche de co-formation, je dirais qu’il faut de l’audace et croire que c’est possible.’
L’amélioration des relations entre personnes en difficultés et professionnels ne peut se faire que par la transformation des conditions dans lesquelles se nouent leurs rapports et se construisent les solutions. Il faut un véritable travail en commun où les uns et les autres échangent leurs savoirs, connaissances et expériences. Il faut que se forment ensemble, et réciproquement, les différents acteurs en vue de créer de nouveaux rapports et de répercuter les acquis sur leurs collègues et institutions pour les uns, leur milieu et les autres militants de la lutte contre la misère pour les autres.
Le Croisement des pratiques rend compte de ce travail et donne des pistes d’action, de formation et de réflexion.
Groupe de recherche action-formation Quart Monde Partenaire, Le croisement des pratiques, Editions Quart Monde, 2002, 228 p., 11 €.

La santé en Belgique

Le 30 Déc 20

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Pour la deuxième fois, l’Institut scientifique de la santé publique publie la synthèse de l’Enquête sur la santé en Belgique. Réalisée par interview en 2001, elle présente un aperçu global de l’état de santé et des comportements de l’ensemble de la population. De plus, la répétition de ce type d’enquête (la première date de 1997) permet d’étudier l’évolution des problématiques au cours du temps.
Voici dans les grandes lignes ce qu’elle nous apprend.
Comme le soulignent les auteurs, les résultats d’une telle enquête doivent être interprétés avec prudence notamment parce qu’elle se base sur des informations de caractère subjectif (les interviewés disent ce qu’ils veulent bien et n’ont pas toujours une image correcte de leur état de santé) mais aussi parce que la représentativité d’un échantillon n’est jamais parfaite. Pour cette enquête, ce sont 12.111 personnes qui ont été interviewées à domicile. Ces personnes ont été choisies au hasard sans tenir compte de leur nationalité ou de leur groupe d’âge. Bien que les résultats présentés n’aient qu’une valeur d’estimation, ils donnent néanmoins une bonne image de la santé de la population.
L’enquête, basée sur les principaux objectifs de santé publique ainsi que sur les recommandations internationales en matière d’information sanitaire, aborde 5 grands thèmes: l’état de santé de la population, les styles de vie et les comportements, les mesures préventives, la consommation de soins ainsi que la santé et la société.

Etat de santé

Ce chapitre se focalise sur les problèmes de santé physique (maladies chroniques et affections aiguës) et mentale (mal-être, maladies mentales). Il aborde également la santé subjective, c’est-à-dire l’appréciation que se font les individus de leur propre état de santé. Cette appréciation permet d’évaluer les progrès en matière de santé et de donner une bonne idée de l’état de santé réel de la population. On y lit par exemple que près d’un quart de la population belge (23%) n’est pas satisfait de son état de santé.
Ce chapitre nous apprend aussi que les publics les moins ‘scolarisés’ déclarent plus souvent une mauvaise santé, présentent en moyenne plus de maladies chroniques, souffrent plus souvent de pathologies multiples et de troubles de la santé mentale. C’est également dans ce public que l’on retrouve le plus d’affections de longue durée, de limitations ou d’incapacités de travail.

Styles de vie

Ce chapitre fait le bilan des habitudes et des modes de vie qui ont une influence sur la santé, l’espérance et la qualité de vie. L’enquête pointe plus précisément quatre comportements révélateurs: l’activité physique, les habitudes alimentaires, la consommation d’alcool et de tabac.
D’autres thèmes tels que la consommation de drogues, l’utilisation de méthodes de planning familial et la protection de maladies sexuellement transmissibles sont abordés de manière moins détaillée.
On voit ainsi que 33% de la population pratique au moins une fois par semaine une activité physique de loisir suffisamment importante pour transpirer et que 46 % des gens courent un risque par manque d’activité physique. On note ici aussi que le pourcentage de personnes qui pratiquent une activité physique de loisir augmente avec le niveau d’instruction. Autre enseignement: les femmes pratiquent moins d’activité physique que les hommes.
La nutrition a un impact important sur la santé. L’enquête s’est attachée à récolter quelques informations sur les habitudes alimentaires, l’état nutritionnel des personnes et leurs préoccupations pour leur poids. On apprend que 78% de la population prend ses repas de manière régulière, que 45% présente une surcharge pondérale (ICM de 25 à 29.9); l’ICM est l’indice de masse corporelle qui rend compte du rapport entre la taille et le poids de l’individu ), que 12% souffre d’obésité (ICM de 30 et +) et que 24% désire maigrir.
Concernant la consommation d’alcool , elle est considérée comme abusive si elle s’élève à 6 verres d’alcool ou plus le même jour. En vrac: 20% de la population de 15 ans ou plus consomme au moins une fois par mois 6 verres d’alcool ou plus le même jour, 29% consomme de l’alcool pendant les jours de la semaine, 57% pendant le week-end, 9% en consomme quotidiennement et 6% sont dépendants.
Le tabagisme représente un facteur de risque critique en termes de morbidité et de mortalité. En Belgique, on estime que le tabac est responsable de 20% des décès liés à la maladie. La diminution de la consommation de tabac est par conséquent une priorité de premier plan en santé publique. On compte chez nous 28% de fumeurs et 10% de grands fumeurs (20 cigarettes ou plus par jour). Les hommes sont plus nombreux à fumer (34%) que les femmes (24%). Ils sont également plus nombreux à avoir fumé dans le passé et ils ont aussi commencé à fumer plus tôt. 25% de fumeurs, hommes et femmes confondus, fumaient déjà avant l’âge de 15 ans. L’âge et le niveau socio-économique favorisent l’arrêt du tabac. La comparaison avec l’étude de 1997 suggère qu’il y a une diminution du tabagisme chez les hommes et une légère augmentation chez les femmes, surtout les jeunes (excepté en Région bruxelloise).
Quant à l’usage de drogues : 9% de la population de 15 ans ou plus a déjà consommé au moins une fois du cannabis et quasiment 2% a essayé au moins une fois de l’ecstasy, du speed et/ou des amphétamines. Environ 2% de la population a consommé du cannabis au cours du dernier mois.
Au sujet de la sexualité , on apprend également que 75% des femmes de 15 à 49 ans sexuellement actives utilisent une méthode de contraception. L’utilisation d’une méthode de contraception semble augmenter avec le niveau d’instruction mais la différence n’est pas importante (sauf en Région wallonne).

Mesures préventives

La troisième partie consacrée à la prévention, traite de la vaccination contre le tétanos, la grippe et l’hépatite B (des enfants et des adultes), de la prévention des maladies cardiovasculaires qui représente la première cause de mortalité chez nous, des dépistages du diabète et de certains types de cancers.
Pour le tétanos , 68% de la population est en ordre de vaccination.
Une personne sur quatre est vaccinée contre l’hépatite B . Pour ce vaccin, les taux sont encourageants car le programme ne date que de quelques années, ce qui laisse présager une diminution des cas dans un avenir proche.
Concernant la vaccination contre la grippe , on note que 20% de la population (15 ans et plus) a été vaccinée au cours des 12 derniers mois.
Au sujet du dépistage de l’hypertension et de l’hypercholestérolémie , facteurs de risques dans les maladies cardio-vasculaires, 92% des personnes âgées de 15 ans et plus ont bénéficié d’un contrôle de leur tension artérielle au cours des 5 dernières années et 77% au cours des 12 derniers mois. 50% des 75 ans et plus ont appris avoir un taux trop élevé. Il apparaît que ce problème touche davantage les couches de la population les moins scolarisées.
Pour le cholestérol, 63% des 15 ans et plus disent avoir été contrôlés au cours des 5 dernières années et 43% au cours de l’année écoulée. Le taux de couverture augmente avec l’âge. Ce dépistage est passé de 56% en 97 à 63% en 2001. 36% des 15 ans et plus ont un taux trop élevé.
La couverture du dépistage du diabète est de 47% chez les 15 ans et plus. Elle augmente avec l’âge. 13% des personnes dépistées ont un taux de glycémie trop élevé. Un résultat qui inquiète. Ici encore, ce problème touche davantage les personnes moins instruites.
Au sujet du cancer du sein (cancer le plus fréquent chez la femme): 37% des 15 ans et plus ont pratiqué l’auto-examen du sein au cours du dernier mois. La pratique augmente avec l’âge. 40% des femmes ont eu un examen clinique au cours de la dernière année. Cette pratique semble avoir diminué par rapport à 1997 où 53% des femmes avaient eu recours à cet examen au cours de la dernière année. 30% des femmes de 15 ans et plus déclarent avoir subi une mammographie au cours des 2 dernières années. Ce taux atteint 40% chez les 40-49 ans et 57% chez les 50-69 ans. Les femmes moins scolarisées sont moins bien couvertes. On note des disparités régionales du taux de mammographie chez les 50-69 ans: 72% à Bruxelles, 59% en Wallonie et 53% en Flandre. L’enquête montre que le médecin généraliste pourrait davantage motiver les femmes à passer une mammographie surtout dans les milieux défavorisés et parmi les étrangers.
Le cancer du col de l’utérus occupe la 5e place parmi les cancers chez la femme. Le frottis du col est un test de dépistage efficace. La population cible sont les femmes entre 25 et 64 ans. La fréquence proposée est d’un test tous les trois ans. En Belgique, 70% des 25-64 ans déclarent avoir eu un frottis, c’est plus que le taux de dépistage du cancer du sein. 16% ont reçu une invitation au cours des 3 dernières années pour le passer. Les femmes socio-économiquement défavorisées et les étrangères sont moins dépistées.

Consommation de soins et médicaments

Ce chapitre permet d’évaluer l’utilisation des services de santé spécifiques et de collecter des informations sur les personnes qui ne les utilisent pas. Ces informations sont utiles aux responsables des politiques de santé et aident à mieux orienter les campagnes de promotion de la santé et également diminuer la surconsommation médicale.
La grande majorité (94%) de la population a un médecin généraliste . 81% a eu un contact avec lui au cours des 12 derniers mois. Le nombre moyen de contacts par personne et par an est de 6,5. Les personnes défavorisées contactent plus souvent leur médecin (ils sont aussi plus souvent malades). A noter: les habitants de Bruxelles vont moins facilement chez le généraliste que ceux des autres grandes villes du pays. Dans 10% des cas, le généraliste envoie son patient chez un autre dispensateur de soins que ce soit pour traitement, avis ou examen complémentaire.
Par rapport aux médecins spécialistes , 50% de la population a eu au moins un contact avec un spécialiste au cours de l’année écoulée. Le nombre de contacts avec un spécialiste est de 3,2 par personne et par an. Les femmes les visitent davantage que les hommes. Sept contacts sur dix chez le spécialiste sont des examens de contrôle.
Le tableau récapitulatif concernant la fréquentation du service d’urgences montre que 12% de la population y a été au cours de l’année écoulée, que 73% des contacts avec ces services se sont faits sans indication d’un médecin et que 56% de ces contacts ont lieu en semaine pendant la journée.
Les données concernant les contacts avec les dentistes constituent une information importante pour les responsables politiques car il est difficile de faire une estimation des moyens nécessaires pour les soins dentaires en Belgique.
On note que 83% de la population possède encore sa dentition. Un pourcentage qui baisse en fonction de l’âge jusqu’à 45% chez les 75 ans et plus. Plus bas est le niveau d’étude, plus le pourcentage de personnes sans leur dentition est élevé. Le pourcentage de personnes ayant leur dentition complète a baissé par rapport à 1997.
49% de la population dit avoir consulté un dentiste au cours de l’année. 8% n’ont jamais été chez le dentiste. 15% des 6-12 ans ont consulté.
Le nombre moyen de consultation chez le dentiste par an et par personne est de 2,1.
Les personnes appartenant aux milieux plus instruits sont plus nombreuses à avoir vu leur dentiste au cours des 12 derniers mois. Toutefois, le nombre moyen de consultations chez le dentiste par an ne varie pas en fonction du niveau d’instruction.
Les gens ont davantage consulté un dentiste en Région flamande que dans les 2 autres régions. Enfin, on n’observe pas de différence dans l’utilisation des soins dentaires entre 1997 et 2001.
Concernant les contacts avec les services paramédicaux (on parle ici de l’infirmier à domicile, du kinésithérapeute, du diététicien, du logopède, de l’ergothérapeute et du psychologue): 13% de la population dit avoir eu au moins un contact avec un kiné, 6% avec un infirmier à domicile et 2% avec un psychologue.
Les groupes de population qui font appel aux différents services paramédicaux peuvent être bien cernés en fonction de l’âge. Les 75 ans et plus font plus souvent appel aux soins infirmiers à domicile. Les jeunes femmes ont plus souvent recours aux services de psychologues et de diététicien. Les enfants et les adolescents sollicitent davantage les logopèdes. Le recours à l’ergothérapeute n’est pas différencié selon l’âge ou le sexe des personnes demandeuses.
On n’observe pas de barrière socio-économique importante au regard des contacts avec les différents professionnels paramédicaux. Au contraire, les personnes issues des milieux moins éduqués ont plus souvent recours aux soins à domicile que les personnes des milieux plus favorisés. Ce qui s’explique en partie par le fait qu’ils ont une moins bonne santé.
Les hôpitaux constituent une partie essentielle de notre système de santé. Le secteur hospitalier représente aussi une partie importante des dépenses de santé. Les informations récoltées à ce sujet sont donc précieuses.
En Belgique, 14% de la population déclare avoir été hospitalisée au cours de l’année écoulée (accouchements non compris). Sur base des données de l’Enquête, on estime le nombre moyen d’hospitalisations à 17 pour 100 personnes par année.
Parmi les admissions, 28% sont des hospitalisations de jour. La durée moyenne d’une hospitalisation classique est de 8 nuits. Dans 56% des cas, l’hospitalisation est due à une intervention chirurgicale. Les principales causes d’hospitalisation sont: les problèmes respiratoires, digestifs et auditifs chez les 0-14 ans, les problèmes locomoteurs chez les 15-64 ans et les 65 ans et plus, les problèmes cardiaques et vasculaires chez les hommes de 65 ans et plus.
La durée de l’hospitalisation augmente à mesure que le niveau d’éducation diminue. Globalement, le nombre d’admissions n’a pas augmenté en 2001 par rapport à 1997. On observe que le taux d’hospitalisations de jour est passé de 20% en 1997 à 28% en 2001. Cette augmentation se situe presque exclusivement dans les régions bruxelloise et wallonne qui ont ainsi rattrapé les taux déjà constatés en Région flamande.
Les données sur la consommation de médicaments sont importantes car elles permettent d’assurer la qualité de leur utilisation.
Environ la moitié de la population dit avoir consommé un médicament sur prescription du médecin aux cours des deux dernières semaines. Les femmes consomment plus souvent ce genre de médicaments que les hommes. Chez les enfants, il s’agit surtout de médicaments contre la toux, les refroidissements, la grippe et les maux de gorge.
Les personnes ayant un statut socio-économique plus élevé utilisent moins de médicaments soumis à une prescription. Ce qui peut s’expliquer par leur meilleur état de santé par rapport au public moins favorisé.
Chez les 45-64 ans, les Beta-bloquants sont les médicaments les plus utilisés. On note aussi une consommation importante de médicaments hypolipémiants, de psychotropes (surtout des benzodiazépines), d’anti-inflammatoires, de produits anti-rhumatismaux et de psychoanaleptiques (surtout des antidépresseurs).
28% de la population dit avoir consommé un médicament de comptoir (sans prescription) au cours des deux dernières semaines. Les femmes en consomment davantage que les hommes. Chez les enfants, il s’agit surtout de médicaments contre la toux, les refroidissements, la grippe et les maux de gorge. Chez les adultes, il s’agit surtout d’anti-douleurs et de médicaments contre la fièvre.
Les personnes de milieux socio-économiques favorisés en consomment davantage. La consommation de médicaments de comptoir semble avoir diminué par rapport à 1997 (mais pas en Région wallonne), surtout dans les produits contre la toux, les refroidissements, la grippe et les maux de gorge.
La qualité de soins dépend en grande partie de facteurs relatifs aux patients, à leur comportement et à leur fidélité. La satisfaction du patient en est donc un aspect crucial. Les patients ont souvent d’autres attentes, souhaits, priorités que les professionnels de la santé. Pour une organisation des soins efficace, il est important de pouvoir s’en rendre compte. Cinq aspects spécifiques ont été approfondis pour rendre compte de la satisfaction du patient:
– l’écoute du patient;
– le soulagement rapide des symptômes;
– l’information fournie sur la maladie ou les symptômes;
– l’information fournie quant au renvoi chez un spécialiste ou une admission à l’hôpital;
– la durée d’attente dans la salle d’attente.
La grande majorité de la population est satisfaite des soins dispensés par les médecins généralistes et spécialistes. Environ la moitié de la population est très satisfaite pour les 5 aspects étudiés. L’aspect le moins apprécié concerne le temps d’attente.
La satisfaction des soins varie avec l’âge et le niveau d’éducation: les personnes plus instruites se montrent plus critiques par rapport aux soins donnés.
Pour 63% des hospitalisations, les patients se disent très satisfaits des soins donnés.
Les thérapies non conventionnelles font référence à l’ensemble des pratiques qui n’appartiennent pas au domaine des sciences médicales et qui offrent des soins ‘alternatifs’ Les patients qui y ont recours le font par curiosité et/ou parce qu’ils sont mécontents du traitement reçu en médecine traditionnelle. Les thérapies non conventionnelles peuvent compléter une thérapie conventionnelle ou la remplacer. En Belgique, ces thérapies deviennent de plus en plus populaires même si leur efficacité et pertinence ne sont pas prouvées. En 1997, 8% de la population avait fait appel à une des thérapies non conventionnelles. En 2001, ce chiffre est passé à 11% (surtout au bénéfice de l’homéopathie, l’ostéopathie-chiropraxie). Les femmes ont davantage recours aux thérapies non conventionnelles que les hommes. Ces thérapies sont plus populaires auprès des 35-44 ans que dans les classes d’âge plus avancées. Les personnes plus ‘instruites’ y ont plus recours que celles de milieux moins favorisés.

Santé et société

La santé est un phénomène social. La maladie et la santé s’inscrivent dans une société déterminée et nouent des relations étroites avec une série d’autres dimensions de cette société. L’enquête aborde 6 domaines particuliers:
– l’accès aux soins de santé;
– les différences socio-économiques en matière de santé;
– la santé et l’environnement;
– les accidents, la violence et la sécurité routière;
– la consommation de services préventifs de santé et de soins sociaux;
– enfin, la santé sociale.
Au travers de ces six domaines, l’enquête s’attache à faire ressortir l’aspect sociétal des problèmes de santé publique.
L’accès aux soins de santé : les dépenses en matière de santé constituent un poste fixe dans le budget d’un ménage. En Belgique, une famille consacre en moyenne 110 euros par mois, soit 8% de ses revenus pour des dépenses de soins comme des honoraires de médecin, des médicaments, des hospitalisations… Cette dépense augmente avec l’âge par rapport au budget global. Elle est aussi proportionnellement plus élevée au sein des ménages appartenant aux classes sociales défavorisées.
Par rapport à 1997, les dépenses ont augmenté en chiffres absolus (97 euros par mois en 97 et 110 euros par mois en 2001). Elles n’ont par contre pas augmenté lorsqu’on évalue la proportion des dépenses pour des soins de santé par rapport au budget global du ménage.
29% des ménages estiment que ces dépenses sont (très) difficiles à supporter sur le plan financier. Le problème est encore plus marqué dans les ménages défavorisés.
Différences socio-économiques en matière de santé : le niveau d’instruction a été utilisé comme indicateur socio-économique. Sur cette base, on observe des inégalités sociales dans divers domaines de la santé.
L’état de santé : les personnes issues de milieux socio-économiques défavorisés déclarent plus souvent que leur état de santé général n’est pas satisfaisant. Elles souffrent davantage de maladies chroniques (notamment d’hypertension, affections persistantes du dos), de limitations de longue durée ou d’un handicap. Les incapacités temporaires sont plus fréquentes. Elles ont également plus de problèmes de santé mentale. Les résultats de l’enquête mettent clairement en évidence un lien entre l’état de santé des individus et leurs caractéristiques socio-économiques.
Styles de vie : la proportion de personnes qui exercent une activité physique de loisir augmente avec le niveau d’instruction. Le gradient tend à s’inverser si l’on tient compte également des activités physiques accomplies durant la journée dans le cadre professionnel ou durant les activités de la journée.
L’obésité est nettement plus présente dans les classes défavorisées. Les habitudes alimentaires sont moins bonnes dans ce milieu et le nombre de fumeurs y est plus important. Par contre, concernant la consommation d’alcool et de drogues illégales, le gradient social est inversé.
Globalement, on peut dire que les personnes issues de classes sociales défavorisées tendent à adopter des comportements néfastes pour leur santé. Les groupes les plus favorisés sont toutefois plus vulnérables en ce qui concerne la consommation d’alcool et de drogues illégales. Il est donc indispensable de bien cibler les efforts de prévention et/ou les campagnes de promotion de la santé.
Prévention : la couverture vaccinale contre le tétanos et l’hépatite B est moins bonne dans les groupes défavorisés. Pour le vaccin contre la grippe, on n’observe pas ce genre de différence.
Le dépistage de l’hypertension, le contrôle du niveau de cholestérol et le dépistage du diabète ne varient pas au regard du milieu social.
La couverture en matière de dépistage du cancer du sein et du cancer du col de l’utérus est moins bonne parmi les femmes des groupes défavorisés.
En matière de médecine préventive, les inégalités sociales sont plus mitigées: une attention particulière devrait être accordée à la vaccination et au dépistage du cancer dans les milieux socio-économiques défavorisés.
Consommation de soins : les personnes moins favorisées consultent davantage leur médecin généraliste (leur état de santé est moins bon) et les personnes plus favorisées consultent davantage les spécialistes et les dentistes. par les différents milieux.
Le nombre et la durée des hospitalisations sont plus importants dans les groupes défavorisés.
Ces groupes défavorisés consomment aussi davantage de médicaments prescrits. Un phénomène qui s’inverse concernant la consommation de médicaments en vente libre.
Enfin, les personnes défavorisées consultent moins les praticiens de thérapies non conventionnelles.
Santé et société : généralement, un niveau d’éducation plus élevé se traduit par une meilleure intégration sociale, un meilleur support de l’entourage et une plus grande satisfaction à l’égard des rapports sociaux.
Les personnes des couches sociales favorisées déclarent plus souvent avoir été victimes de violence que les autres.
Les personnes des milieux défavorisés sont plus nombreuses à ne pas attacher leur ceinture de sécurité en voiture et sont moins bien au courant de la limite légale d’alcoolémie autorisée au volant.
Le module consacré à la santé et à l’environnement aborde la question de la qualité de l’environnement physique sur le lieu d’habitation. Les informations recueillies concernent le niveau de nuisance dû aux facteurs d’environnement, les effets du bruit sur la qualité de vie et les actions entreprises pour contrer ces effets.
En Belgique, un ménage sur 5 se dit gêné par des facteurs environnementaux sur son lieu d’habitation (odeurs, immondices, humidité, moisissure, bruits…).
Les accidents, la sécurité routière et la violence sont traités dans un module s’intéressant au problème général des traumatismes: accidents, morsures de chien, actes de violence verbale, physiques ou vols. Les mesures de prévention en matière de sécurité routière sont également abordées.
En Belgique, 9% de la population a été victime d’un accident sérieux au cours de l’année écoulée: 37% d’accidents domestiques, 27% d’accidents au travail ou à l’école, 20% d’accidents de sport et 17% d’accidents de circulation. Généralement, les accidents sérieux impliquent plus fréquemment les hommes que les femmes. Ces dernières rapportent plutôt des accidents domestiques et de voiture alors que les hommes ont plutôt des accidents au travail/école et lors de leurs activités sportives.
La gravité des accidents diminue avec l’âge. Les personnes âgées ont plus d’accidents domestiques. Les accidents de la route sont plus souvent rapportés en Région flamande.
15% de la population déclare avoir subi des actes de violence (surtout verbale, et dans une moindre mesure physique et/ou vols). La violence touche davantage les jeunes. Les violences verbales et physiques prédominent chez les 15-24 ans et diminuent avec l’âge tandis que les vols et cambriolages augmentent avec l’âge.
En matière de sécurité routière, 28% de la population déclare ne pas mettre systématiquement sa ceinture de sécurité à l’avant de la voiture et 65% à l’arrière. 23% ne connaît pas la limite d’alcoolémie autorisée.
La santé sociale est mesurée au travers de l’intégration sociale des individus dans un réseau de relations et du support social dont ils peuvent bénéficier de leur entourage.
En Belgique, 71% des personnes sont satisfaites de leurs contacts sociaux et 7% ont peu de contacts avec leur famille, leurs amis ou connaissances (soit moins souvent qu’une fois par semaine).
16% ont un réseau de relations restreint (de 0 à 3 personnes) alors que la taille moyenne du réseau relationnel est de 9 personnes, 13% reçoivent peu d’aide concrète de leur entourage et 9% des personnes ne bénéficient pas de soutien (pour besoins émotionnels, affectifs, récréatifs, d’information…) de leur entourage.
Les différents aspects de la santé sociale sont jugés satisfaisants chez les 15-34 ans mais déclinent après cet âge. On remarque les hommes de 45 à 64 ans sont moins susceptibles de recevoir une aide concrète de leur entourage.
Généralement, les personnes au niveau d’instruction plus élevé ont une meilleure intégration sociale, un support de l’entourage de meilleure qualité et une plus grande satisfaction à l’égard des contacts sociaux.
Le dernier point a trait aux services sociaux et préventifs . Si on s’intéresse aux populations cibles et aux objectifs spécifiques des différents services de santé sociale et préventive, on observe que l’utilisation de ces derniers est assez faible. Sur 12 services étudiés, seuls 5 sont effectivement contactés par plus d’1% de la population: les services de médecine du travail (15%), la médecine scolaire (13%), l’ONE et Kind en Gezin (5%), les services d’aide à domicile (3% pour la population générale et 28% chez les 75 ans et plus) et les CPAS (2%).

Notre avis:

Cette enquête fournit des informations précieuses qui permettront sans doute aux décideurs politiques mais aussi à tous les intervenants du secteur de la santé et de la promotion de la santé de mieux cibler leurs actions et, on l’espère, de mettre la priorité sur les défavorisés, ‘grands insatisfaits de leur état de santé’, celles et ceux qui, chez nous, souffrent socialement, économiquement, moralement et physiquement davantage que les autres. La santé pour tous reste encore et toujours un des grands défis à relever ensemble!
Sylvie Bourguignon
d’après la synthèse ‘Enquête de santé par interview, Belgique 2001’ de l’Institut scientifique de la santé publique
Enquête de santé par interview Belgique 2001, IPH/EPI REPORTS 2002 – 25. ISP, rue J. Wytsman 14, 1050 Bruxelles. Tél.: 02-642 57 94. Courriel: his@iph.fogv.be. Internet: https://www.iph.figov.be/epidemio/epifr/index4.htm

Exploitation des données de l’enquête

Il est loisible d’obtenir pas mal d’informations en faisant appel au site internet, qui contient le résumé mais aussi des rapports plus complets par chapitre de l’enquête.
Il offre aussi la possibilité d’extraire des données de la base sous forme de tableaux et de graphiques. C’est relativement simple: il suffit de choisir un sujet dans une liste, et ensuite de sélectionner trois paramètres maximum parmi six possibilités (sexe – âge ou groupe d’âge – diplôme – région – province – niveau d’urbanisation). On peut obtenir les résultats pour 1997 et 2001.
Par exemple, vous découvrirez que 52,4% des personnes âgées de 65 à 74 ans déclarent s’être fait vacciner contre la grippe en 2001, pour 46,2% quatre ans plus tôt, le même tableau vous précisant en plus les pourcentages par sexe et région.
Pas mal! Notez que l’ISP décline toute responsabilité par rapport aux conclusions que vous tirerez de vos requêtes…
L’ISP va plus loin puisqu’il est à même de fournir la base sur cédérom pour une meilleure exploitation des informations qu’elle contient.
Cette fourniture est soumise à certaines conditions. Elle est gratuite pour les administrations, coûte 1500 € pour les universités et minimum 5000 € pour les autres instituts de recherche.
C.D.B.
Renseignements: Lydia Gisle, ISP, section épidémiologie, rue J Wytsman 14, 1050 Bruxelles. Tél.: 02-642 57 53. Fax: 02-642 54 10. Courriel: lydia.gisle@iph.fgov.be.