L’asbl Nos Oignons a récemment été reconnue comme opérateur en promotion de la santé et a rejoint la Fédération bruxelloise de promotion de la santé (FBPSanté), l’occasion toute trouvée de vous en dire plus dans la revue Education Santé ! Nos Oignons met en lien des agriculteur·ices et des personnes désireuses de mettre les mains dans la terre. Parmi un panel d’activités, les journées collectives s’adressent en priorité aux personnes que la vie a amenées à fréquenter des services de santé mentale, addictions et aide sociale. Ces journées sont placées sous le signe de l’entraide et du rétablissement.
De projet pilote à opérateur en promotion de la santé
Cette année 2023, notre asbl a reçu une reconnaissance en tant qu’opérateur en promotion de la santé des Bruxellois·es, après quatre années de subsides en initiative pour son projet-pilote « Sème qui peut » et dix années d’existence en Wallonie. Désormais, le projet-pilote se rallie derrière le nom Nos Oignons, pour plus de lisibilité ; mais sur le terrain, rien ne change.
La formule de base – qui a fait l’objet d’une démarche de recherche-action participative – consiste en l’organisation de journées de volontariat collectif, libre, accompagné et défrayé, auprès de fermes partenaires. Les fermes avec lesquelles nous avons établi un partenariat sont reconnues pour leur fonction d’accueil et de transmission de savoir. Concrètement, les partenaires agricoles ouvrent leurs fermes, mettent à disposition leurs infrastructures et partagent leur savoir-faire à un groupe de volontaires libres de venir ou pas, d’accorder leur mode de présence à leur énergie du jour, en présence d’un.e chargé.e de projet qui veille à accompagner la dynamique de groupe et les cheminements individuels.
A cette formule hebdomadaire s’ajoutent des expériences résidentielles (stages de partage de savoir-faire paysans), des actions ponctuelles (mobilisations) et un ensemble de temps de rencontre axés sur la prise de décisions (assemblées locales), l’évaluation continue (focus group via la méthode d’analyse de groupe) et la création collective (dépliants, calendrier, fanzines…).
Cette offre portée par Nos Oignons est le fruit d’un riche processus co-porté et participatif. A Bruxelles, 4 co-porteurs initiaux (La Trace, Nos Oignons, Commune Racine et le Début des Haricots) se sont impliqués activement, mais également des volontaires qui ont co-construit les balises du projet (telles que la liberté d’aller et venir, l’écoute des rythmes de chacun·e, la non-consommation de drogues et d’alcool articulée à un intérêt pour la mise en débat de tout ce qui fait addiction et consommation au sens large ; la co-existence du défraiement des volontaires et de l’accès pour elleux aux légumes du champ – via un abonnement aux paniers souscrit par le projet…).
Des finalités qui traversent les découpages sectoriels
Les finalités générales de Nos Oignons sont intersectorielles :
- soutenir la résilience alimentaire, écologique et sociale de nos régions et favoriser l’accès à une alimentation locale, paysanne et durable pour tous·tes ;
- soutenir l’émancipation et le rétablissement du vivant et des vivant·es en valorisant les ressources individuelles et collectives ; participer à déconstruire les dynamiques d’exclusions et de stigmatisations ;
- soutenir l’agriculture paysanne rurale et urbaine, et valoriser leurs apports sociaux et écologiques.
Ainsi, nos actions agissent sur plusieurs déterminants de la santé de l’humain et du vivant que sont le lien social, l’accès à l’alimentation de qualité et à des environnements naturels, l’activité physique, etc.
Les volontaires, inscrit.es dans une démarche participative
Le public auquel Nos Oignons s’adresse a été défini, à l’issue d’un processus participatif, comme tel : « toute personne qui souhaite mettre les mains dans la terre, respirer au grand air et se faire du bien. Le projet s’adresse prioritairement aux personnes que la vie a amenées à fréquenter des services actifs en santé mentale, addictions ou aide sociale ».
Les personnes qui rejoignent le projet sont désignées comme « volontaires ». La plupart d’entre elles arrivent initialement avec un besoin de
- retrouver un rythme et des repères après une hospitalisation, une cure, une incarcération, un exil, un burn-out ou toute autre expérience qui appelle un temps de rétablissement;
- sortir de la solitude et de l’isolement, renouer contact avec son corps, apaiser l’angoisse existentielle ;
- partager des moments de convivialité, en particulier grâce au repas partagé du midi ;
- être dehors en faisant quelque chose (pas seulement être dans un parc à « tourner en rond »), participer à une activité « réelle », inscrite dans la vie du quartier, faire partie d’un projet ;
- être valorisé pour son travail, sa participation, sa présence ;
- découvrir le travail de la terre, retrouver des pratiques anciennes, partager des savoir-faire.
Ce qui rassemble, c’est l’élan de mettre les mains dans la terre, pas l’enjeu diagnostique ou toute autre qualification porteuse de stigmate. Mais notre vigilance partagée est que soient largement majoritaires (en termes de nombre et d’occupation de la parole et de l’espace) celles et ceux qui, dans notre société, sont plus facilement amené·es à être en situation d’exclusion sociale et de marginalisation par leur parcours en santé mentale, addiction ou aide sociale.
A Nos Oignons, les volontaires font partie de la gouvernance à plusieurs niveaux de la structure : il y a des réunions décisionnelles, des rencontres d’évaluation et des rencontres de création.
L’accès à l’alimentation local, paysanne et durable pour les volontaires ?
Cette question est centrale pour nous, et la manière dont Nos Oignons vise à y contribuer est assez spécifique. Comme expliqué plus tôt, les personnes qui nous rejoignent ont souvent au départ une autre demande et d’autres besoins. Mais notre action favorise l’accès à l’alimentation durable parce qu’elle permet d’y arriver par des chemins variés. Par exemple, l’asbl souscrit à des paniers de légumes au bénéfice des volontaires pour que soit garantie la possibilité de repartir avec des légumes comme les autres « mangeur·euses de paniers ».
Mais ce n’est parfois qu’au bout de quelques mois que certain·es s’intéressent aux légumes produits et repartent avec un panier. Parce que les repas partagés ont permis de les goûter et de les cuisiner. Parce qu’iels ont accès entre-temps à une cuisine personnelle. Parce que les conversations ont amené à découvrir d’autres pratiques de consommation (l’abonnement à un panier de légumes ou l’achat commun des produits secs via le projet VRAC [1] par exemple). Même si la consommation alimentaire n’est pas nécessairement une préoccupation initialement, favoriser la participation à des lieux de production agricole permet d’en faire un objet de débats et d’améliorer concrètement les conditions d’accès à cette alimentation dite « durable ».
Témoignages de volontaires
Pour moi travailler la terre c’est un bien-être. Comme je dis souvent, pour moi c’est une forme de méditation. Je vis le moment présent, je suis au contact avec la terre et elle me procure un bien-être. Au niveau collectif aussi c’est bien. On rencontre beaucoup de gens, on participe à des réunions, et les réunions en dehors du maraîchage m’apportent aussi. Au niveau émotionnel, au niveau savoirs et au niveau du partage, c’est très important de le dire parce qu’il y a un contexte aussi en dehors du maraîchage. Cela je voulais le souligner quand même parce que je trouve que c’est très important. Maraîchage, Amour et Partage ! (rire) »
« Quand je suis arrivée dans le projet la première fois, j’ai vu un lieu vivant, souriant, où on m’a directement ouvert les bras. Peu importe ce que j’étais. J’ai découvert un lieu super sain. A savoir que pendant deux ans ce sont les hôpitaux qui ont fait à manger pour moi. Et là je rencontrais un monde où les légumes étaient valorisés, où les tisanes étaient valorisées, où ce qu’on consomme est bon pour nous et bon pour la nature aussi. J’avais besoin d’un environnement comme cela où je pouvais m’épanouir, un environnement où il n’y avait pas de consommation d’alcool durant les journées de travail, où la non-consommation est demandée pour tous. Et malgré cette absence d’alcool, tout le midi c’est la fête. Parce qu’on mange bien, on se fait des soupes avec les légumes du champ. Cela m’a permis de me rendre compte qu’on peut être dans un repas festif où la boisson n’a pas sa place et on s’amuse tout autant. C’est quelque chose que je savais déjà, mais là je l’ai vécu et pouvoir le revivre chaque semaine je trouve cela vraiment très très chouette. Cela me fait du bien.
Pour plus d’informations
Les journées collectives ont lieu de 9h30 à 16h tous les mercredis au Champ du Chaudron à Anderlecht (rue du Chaudron 62) et tous les vendredis au Courtileke à Bruxelles-Haren (rue de Verdun 145).
Des journées « portes ouvertes » ont lieu environ tous les deux mois pour des visites groupées d’institution du secteur social-santé. Car, parfois, venir en groupe avec des référents d’institutions du secteur social-santé facilite la découverte. Si vous souhaitez venir ou si vous avez des questions sur le projet, vous pouvez contacter Bryce pour les mercredis (0470/48.43.27) et Aurélie pour les vendredis (0488/588.981), mais également nous suivre sur la page Facebook de Nos Oignons, ou sur notre site internet : www.nosoignons.org.