Septembre 2006 Par C. STERCKX Réflexions

Qui ne glorifierait la promotion de la santé? Mais cela fait parfois penser à une satire publicitaire des Monty Python, «Ayez de l’argent». On y voyait un homme au volant d’un bolide, habillé comme un dandy, couvert de femmes, distribuant des billets à tire-larigot. Ayez de l’argent et vous serez comme lui!
La promotion de la santé a parfois ce tort d’enfoncer des portes ouvertes, ce qu’on pourrait caricaturer également sous le slogan «Soyez en bonne santé»!

L’objectivité

Nous sommes envahis par les conseils: évitez ceci, prenez cela. Ces conseils sont souvent des… publicités, dont les seuls bénéfices iront à des promoteurs qui n’ont rien à voir avec la promotion de la santé. Comment séparer le bon grain de l’ivraie? Comment s’y retrouver dans les messages que l’on peut lire dans les magazines féminins, dans les «magazines de santé», dans les revues de pharmacies, dans le «Journal du médecin» (qui en fait est écrit de A à Z par les firmes pharmaceutiques), les revues de mutuelles, les messages de votre supermarché (ah le light, le sans sucre, les ferments lactiques…)?
Il apparaît indispensable de toujours prendre du recul et d’au moins se dire: d’où vient ce message? L’information est-elle libre ou dirigée? À qui profite-t-elle? Quelle objectivité puis-je accorder à ces informations?

Les conseilleurs ne sont pas les payeurs

On promeut l’accès aux soins pour tous, mais pour certains, la santé est un luxe qu’ils ne se permettent pas. Des besoins primaires tels se chauffer, se loger, manger prennent parfois déjà 80% de leur budget…
De plus, et cela est vrai pour tout le monde, on ne change pas de style de vie comme on change de chemise. Le poids des manques sociaux, culturels, matériels est là et il ne suffit pas de simplement informer sur les comportements à risque comme l’alcool, le tabac ou l’alimentation peu adaptée. Il en est de même du cadre de vie, de l’environnement.

Les changements

L’individu seul ne peut tout changer. Les initiatives, les solutions doivent être plus globales. Et si l’on pense à la promotion de la santé dans d’autres pays que le nôtre, que dire alors de la latitude de l’individu dans la prise en charge de sa santé quand il vit par exemple en Afrique?
Dans un monde basé sur la logique du profit, la mondialisation vise plus les échanges commerciaux que les politiques sanitaires. Quelle place est laissée aux changements favorables à la santé de tout un chacun? Puisse-t-on associer à la mondialisation des progrès sanitaires dans les pays moins favorisés, des progrès qui ne soient pas seulement des progrès d’extension de marché. Peut-être la mondialisation nous donnera-t-elle ainsi à l’avenir une meilleure image d’elle…

Hier à la télévision

Revenons chez nous. Hier, j’ai vu à la télévision les messages publicitaires suivants:
«Nouveau: Silan aromathérapie», ou comment se soigner en lessivant…
Dans une autre pub, on ridiculise une personne en train de pousser péniblement une charrue pour cultiver des légumes. Puis on glorifie une maman qui prend si bien en charge sa marmaille: non seulement elle a du temps à lui consacrer, mais elle lui fournit un potage en boîte «plein de santé».
Et enfin ce papy qui fait découvrir le goût des bonnes choses à ses petits-enfants en «préparant» en deux coups de cuiller à pot un gâteau tout fait, une poudre chocolatée, du lait et hop… la saveur d’antan… Merci papy!

La santé est notre préoccupation à tous, mais attention, elle est devenue un marché. Soyons vigilants. En même temps, ne jetons pas l’enfant avec l’eau du bain. Il ne s’agit pas de se boucher les oreilles. Nous avons tous beaucoup à apprendre pour mieux prendre en charge notre santé. Et en tant qu’association de patients, nous avons aussi beaucoup à dire!
Claude Sterckx , Président de la Ligue des usagers des services de santé, LUSS asbl
Cet article est une version légèrement modifiée d’un texte paru dans Le Chaînon, le bulletin de liaison de la Ligue des usagers des services de santé, n° 3, 1er trimestre 2006