Septembre 2008 Tribune

Une campagne de publicité vient d’être lancée pour convaincre les jeunes adolescents d’adhérer à l’offre de TMF Mobile (1). Cette campagne, pour persuader sa cible, utilise un visuel qui n’est pas sans rappeler l’apparence du cannabis, dont les feuilles sont faites de téléphones portables, accompagné d’un slogan accrocheur ‘Legalize it’.
Le CRIOC, Univers-santé et Infor-Drogues dénoncent cette publicité irresponsable et demandent, une nouvelle fois, que les pratiques publicitaires soient mieux encadrées.

La publicité et les jeunes

Comme tout le monde le sait, les jeunes sont particulièrement sensibles à la publicité. Aujourd’hui, de nouvelles pratiques commerciales agressives les ciblant particulièrement se développent. Ce constat avait déjà été fait dans le dossier ‘Les publicitaires savent pourquoi – Les jeunes, cibles des publicités pour l’alcool’. (2)
Aujourd’hui, pour vendre un produit, la publicité doit proposer des ‘contenus’ qui frappent, qui émeuvent, qui touchent.
Pour toucher et sensibiliser les adolescents, les publicitaires n’ont pas hésité ici à mettre en avant la consommation du cannabis et à se positionner pour sa légalisation. Il s’agit d’une pratique publicitaire presque systématique: pour valoriser son produit, il faut l’enrober d’un appel à la transgression. Transgression de la politesse, de la propreté, de l’autorité parentale et, dans ce cas-ci , de la loi pénale.

Le cannabis et les jeunes

Soyons clair. Notre rôle n’est pas de mettre le cannabis sur le banc des accusés mais bien les publicitaires qui n’hésitent pas à en faire un argument commercial pour la vente de leurs produits.
Que le cannabis soit dangereux ou pas, qu’il doive être légalisé ou pas, sont des questions dont il peut être logiquement et raisonnablement débattu. Cependant, le fait qu’il s’agisse d’une substance psychoactive et interdite est un fait incontesté. A ce titre, que celle-ci soit utilisée comme argument de vente est inacceptable, d’autant plus quand le message est adressé aux plus jeunes.
En agissant de la sorte, les publicitaires font indirectement la promotion du cannabis et, plus largement, incitent l’adolescent à se croire obligé de transgresser pour exister. Or, d’une part, le cannabis, quel que soit l’opinion portée sur sa dangerosité, est un produit tentant pour les jeunes, curieux d’essayer de nouvelles expériences et, d’autre part, les messages d’incitation à la transgression ne devraient pas être autorisés, surtout à destination des adolescents.
Gardons-nous de diaboliser mais soyons attentifs à une banalisation de la consommation de cannabis chez les jeunes, qui fait fi de l’énorme travail de prévention, d’information et de sensibilisation effectué sur les substances psychoactives par les professionnels de la santé (3). Si certaines personnes peuvent avoir une consommation responsable et modérée, on ne peut occulter les problèmes que ces drogues peuvent occasionner chez d’autres.
La promotion de la santé publique et du vivre ensemble ne devrait pas pouvoir être altérée et dénigrée par des industriels qui mettent en valeur, pour leurs profits immédiats, des produits et des comportements illégaux.

Rappels importants

La culture, l’importation, la vente et la détention de cannabis restent toujours interdites dans tous les cas.
Le CRIOC, Univers santé et Infor-Drogues souhaitent, à l’appui de ce nouvel exemple, réitérer une nouvelle fois la nécessité d’encadrer et de réguler plus fortement la publicité par une législation plus précise et contraignante, et par la création d’un Observatoire de la publicité, outil de dialogue et de concertation à vocation scientifique. Un tel outil permettrait de développer une véritable éthique publicitaire qui soit en adéquation avec les concepts de responsabilité sociétale des entreprises et de développement durable.
CRIOC , Infor-Drogues et Univers santé

(1) Proximus a récemment hérité de l’offre jeune TMF Mobile qui était chez Base. Les 285.000 clients concernés «appartiennent» toujours à Base, qui les a déjà migrés vers sa nouvelle offre Jim Mobile. Les nouveaux partenaires, quant à eux, se doivent donc de déployer des efforts relativement importants pour convaincre ces jeunes de les suivre.
(2) Les dossiers de l’éducation aux médias n° 3, Media Animations, 2007: ‘Les publicitaires savent pourquoi – Les jeunes, cibles des publicités pour l’alcool’. Voir http://www.educationsante.be/es/article.php?id=903 pour une présentation détaillée de cet excellent outil.
(3) A l’image du groupe porteur ‘Les jeunes et l’alcool’, initié en 2003 et piloté par Univers santé asbl, qui mène en Communauté française réflexions et actions pour une consommation plus responsable et moins risquée d’alcool par les jeunes. Celui-ci réunit les associations suivantes: Fédération des centres de jeunes en milieu populaire, Fédération des Etudiant(e)s Francophones, Groupe RAPID, Infor-Drogues, Jeunesse et Santé, Ligue des Familles, Latitude Jeunes, Prospective Jeunesse, Univers santé.