Juin 2011 Par A. LEVEQUE Martine BANTUELLE Christian DE BOCK Initiatives

Après Besançon (été), après Dakar (automne), Bruxelles a pu trouver une fenêtre dans l’agenda déjà très chargé des formations francophones en santé publique et promotion de la santé à vocation internationale.
La première Université de printemps francophone en santé publique a donc eu lieu à l’École de Santé publique de l’Université libre de Bruxelles du 11 au 15 avril 2011. S’agissant d’une ‘première’, qui plus est soutenue par notre mensuel, il nous a semblé intéressant d’en dresser un rapide bilan auprès des chevilles ouvrières de cette initiative, le Prof . Alain Levêque (Président de l’ESP ULB) et Mme Martine Bantuelle (asbl Éduca Santé).
Éducation Santé: Tout d’abord, quel était le programme de cette semaine? S’agissait-il de cours ex cathedra, d’ateliers, de séminaires? Vous êtes-vous inspirés de l’organisation en modules, qui a fait ses preuves en Franche-Comté?
Martine Bantuelle ( MB ): c’est plus qu’une inspiration! Notre Université de printemps a rejoint le réseau des ‘Universités sœurs’, nées à l’initiative de l’Université d’été de Besançon qui existe depuis huit ans, et voit grandir le nombre de ses participants au point d’en refuser de plus en plus chaque année. C’est ainsi que sont nées l’Université d’automne de Dakar, celle de printemps de Bruxelles et une petite sœur est annoncée pour bientôt en Tunisie.
Les Universités sœurs partagent les mêmes objectifs et le même esprit: ouvrir une formation à toutes les personnes concernées par les questions actuelles de santé publique; fédérer les savoirs et les savoir-faire autour du concept de promotion de la santé; stimuler les échanges entre enseignants, chercheurs, décideurs, intervenants de terrain; relier l’action et la recherche; répondre à des problématiques concrètes en favorisant la réflexion et les échanges autour d’expériences originales. Le choix d’une organisation partenariale université/association a pour but d’unir le potentiel d’équipes universitaires et de professionnels de santé publique et de promotion de la santé engagés dans une pratique de terrain et d’associer des intervenants et des participants issus de différents pays francophones.
Les deux partenaires principaux (ESP ULB et Éduca Santé) partagent le même souhait d’agir et de réfléchir avec d’autres sur leur pratique, et de mettre en interaction la théorie et la pratique en privilégiant les apports des participants comme matériau à travailler durant la formation.
ES: Avez-vous facilement trouvé des intervenants de qualité prêts à ‘sacrifier’ une semaine de vacances de Pâques?
Alain Levêque ( AL ): sans difficulté! Nous avons eu la chance de réunir plus de 25 intervenants de qualité séduits par les objectifs et l’esprit de cette Université de printemps. Près de la moitié sont venus de l’extérieur de la Belgique. Et je peux vous dire que tous, sans exception, étaient ravis de cette expérience!
Nous avons également bénéficié de la présence d’experts nationaux et internationaux lors de la séance inaugurale et de la table ronde. Martine Cornil , journaliste bien connue de la RTBF, nous a même consacré une partie de ses vacances pour animer les débats! Vous pouvez constater que la mobilisation a été large et enthousiaste.
ES: Le tout n’est pas d’avoir un bon programme, encore faut-il qu’il attire suffisamment de participants! Bilan positif de ce côté? Combien de participants attendiez-vous? Combien ont fait le déplacement de Bruxelles?
AL : Avant de démarrer la semaine, nous avions une petite centaine d’inscrits, ce qui était notre objectif pour cette première! Mais les désistements de dernière minute, les difficultés d’obtention de visa pour certains, les maladies intercurrentes… ont ramené le total de participants inscrits à une septantaine. À ce nombre, il convient d’ajouter plusieurs habitants de Bruxelles venus participer aux travaux du module traitant des études d’impact en santé ainsi que quelques étudiants en santé publique venus prendre part aux débats sur les politiques de coopération en santé internationale. Bref, beaucoup de monde, beaucoup de débats et d’échanges durant cette semaine… de vacances!
ES: La formation a-t-elle attiré surtout des compatriotes, ou bien le recrutement a-t-il été international comme vous le souhaitiez? Quelles nationalités étaient présentes?
AL : Un tiers des participants venaient de Belgique. Quinze nationalités étaient réunies: Algérie, Belgique, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Comores, République Démocratique du Congo, France, Haïti, Martinique, Maroc, Sénégal, Suisse, Tchad, Togo. La mixité des publics n’est pas très habituelle dans les programmes de formation. Elle crée une dynamique d’échange exceptionnelle tant par l’enrichissement des apports et des points de vue de chacun que par le climat de curiosité et de tolérance qu’elle induit.
ES: Les frais d’inscription étaient plutôt élevés. Cela n’en a-t-il pas découragé certains? Je pense en particulier aux personnes issues de l’espace francophone africain.
MB : Les frais d’inscription ont été alignés sur ceux en cours à Besançon et à Dakar. Pas question de se faire concurrence. Nous avons eu l’opportunité d’offrir quelques bourses mais des efforts doivent encore être faits pour multiplier les possibilités de bourses offertes aux participants issus des pays du sud. De même, des ‘stimulants’ devraient être déployés afin de renforcer l’accès aux acteurs de terrain de la Communauté française.
ES: À propos de moyens financiers, les recettes de la semaine représentent-elles le coût vérité de cette première Université de printemps, ou avez-vous pu compter sur d’autres apports? Je pense par exemple à la mise à disposition de locaux par l’École de Santé publique…
AL : Outre les soutiens financiers octroyés par la Fondation Roi Baudouin, le Ministère de la Santé de la Communauté française, la Région wallonne, l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) et l’INPES, l’Université de printemps a bénéficié pour sa logistique (locaux, secrétariat, organisation, relations publiques, etc.) du soutien de l’École de santé publique et de l’asbl Éduca Santé. Il faut rappeler que les intervenants, d’où qu’ils viennent, ont apporté gracieusement leur contribution à cette initiative. Cela mérite d’être souligné.
ES: Des motifs particuliers de satisfaction?
MB et AL : Lorsqu’on décide de se lancer dans cette aventure, et même si l’on sait que le ‘produit’ a été testé ailleurs et donne entière satisfaction, il y a évidemment beaucoup de doutes et de craintes. Est-ce que cela va fonctionner chez nous? Aurons-nous suffisamment d’inscrits? Nos universitaires et nos acteurs de terrain vont-ils adhérer au concept? À toutes ces questions, nous avons maintenant une réponse et celle-ci est très positive!
Dans ce type d’événement, l’organisation administrative et logistique est aussi une grande source de questionnement et de stress! Nous avons eu la chance de bénéficier d’un appui très précieux et très professionnel de Myriam Dekerpel de l’École de Santé Publique qui a largement participé au succès de cette première!
Mais le motif de satisfaction le plus important est certainement l’enthousiasme sans faille des participants!
ES: Des points à améliorer?
AL : Sans aucun doute! Il y a toujours des points à améliorer. Pour nous y préparer, chaque module a fait l’objet d’une évaluation interne et l’ensemble de la semaine a fait l’objet d’une évaluation anonyme dont l’analyse est en cours. Mais sans anticiper les résultats de ces évaluations, je peux déjà vous dire que de nombreuses idées fusent pour la deuxième édition, pour laquelle nous avons déjà reçu une demande d’inscription!
ES: En-dehors de la formation proprement dite, les participants ont-ils pu découvrir certains aspects touristiques ou culturels de notre capitale? Il faut bien admettre que le Campus Érasme n’est pas très représentatif des charmes de la ville…
MB : Vous avez raison. Le Campus Érasme est à la fois excentré et peu propice aux découvertes esthétiques ou historiques. Nous en sommes conscients et c’est pour cette raison que nous avons souhaité que tous les participants soient hébergés en ville.
Quelques activités sociales ont été organisées; nous avons également été reçus à l’hôtel de ville (sur le balcon!) par les autorités de la Ville de Bruxelles, avec sa vue imprenable sur la Grand-Place. Des activités sportives étaient également organisées durant la pause de midi. Bref, vous voyez que nous avons essayé de rendre cette semaine formative, conviviale et festive!
ES: Une dernière question inévitable. Y aura-t-il une deuxième Université de printemps l’an prochain?
MB et AL : À votre avis?
Propos recueillis par Christian De Bock