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Les médias, freins ou leviers pour les consommateurs à risque?

Le 30 Déc 20

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Le Collectif Prévenir 59 réunit Epicéa (Service du Département du Nord), le Comité Départemental des maladies respiratoires et des associations actives dans le domaine de la prévention des assuétudes au tabac et à l’alcool. Le Collectif a récemment choisi de se pencher sur la question vaste des médias comme freins ou leviers des consommations à risque.
Vaste, puisqu’elle couvre l’impact des émissions et des publicités sur les représentations, les attitudes et les comportements; la couverture variable accordée par les médias à des sujets comme l’alcool ou le cannabis; l’efficacité des campagnes de prévention…
Prenons une des premières questions abordées lors du colloque, soit la responsabilité des médias dans l’obésité croissante des enfants. Du côté des médias et des annonceurs, on se retranche rapidement derrière l’exemple de la Suède guère épargnée par l’obésité et où, pourtant, la publicité vers les enfants est interdite.
Thiphaine de Raguenel , Directrice d’études pour le Pôle Jeunesse du Groupe Lagardère Active (soit les chaînes Gulli, Canal J, Tiji et Filles TV) en profite pour avancer quelques arguments à la décharge de son employeur: annonceurs et programmateurs travaillent de manière indépendante, et, de plus, un comité d’éthique a été mis sur pied – il est dirigé (et cautionné) par le psychologue Marcel Rufo .
« Il ne faut pas incriminer les émissions pour enfants », plaide-t-elle. « Elles ne représentent tout de même que 20 % du temps passé par les enfants devant la télé
Quant à la question de la place occupée par les messages pour des aliments gras et sucrés, elle est éludée, dans le discours de Thiphaine de Raguenel, par une autre question, celle du caractère anxiogène, voire anorexigène des messages de promotion de l’équilibre alimentaire qui feraient oublier que manger est un plaisir…

Des documents pour alimenter le débat

Pour alimenter la réflexion, les organisateurs du colloque ont compilé une trentaine d’articles en un riche portefeuille de lecture. Les articles se structurent autour des questions suivantes:
-les enfants acteurs de l’économie marchande, et cibles du marketing. Les enfants sont présents à l’écran ou audibles dans une annonce sur cinq. Seule la Suède a fait un élément clé de sa réglementation publicitaire en interdisant cette présence enfantine;
-la compréhension par les enfants des intentions commerciales des publicités. Les études les plus récentes enregistreraient en moyenne de meilleurs scores d’attribution d’intention persuasive que les plus anciennes. Un enfant sur dix à l’âge de douze ans «croirait» cependant dans le message véhiculé par la publicité;
-la normalisation de la consommation de produits engendrée par la publicité et le recul de ces comportements produit par une régulation ou une interdiction de la publicité concernant ces produits. Ainsi, un travail anglais a-t-il montré qu’une diminution de 1% du volume des annonces publicitaires est susceptible d’entraîner une diminution de la consommation de 0,1%. D’autres données font valoir qu’une interdiction totale de la publicité aboutirait aux mêmes effets que le doublement du prix des boissons alcooliques, à savoir une réduction de 24 % de la consommation moyenne des jeunes et de 42 % du binge drinking ;
-les médias comme acteurs de la définition sociale des drogues. Les médias mettent en avant des usages, des groupes d’utilisateurs, des interprétations des comportements à risque. Ils peuvent aussi promouvoir des ressources pour aider les consommateurs à risque. Les médias peuvent participer à la banalisation de l’utilisation de substances licites ou illicites, mais aussi traiter de certains produits (drogues) sur le ton de la panique morale, les faire apparaître sous le jour de phénomènes culturels ou encore se centrer sur une approche «réduction de risques»;
-la peur peut-elle constituer un levier dans la prévention, la réduction voire l’arrêt de comportements à risque? Des modèles théoriques portant sur le mode d’action présumé de la peur dans la communication sociale sont présentés.
Les articles sont accompagnés d’une sélection d’outils de prévention belges et français. Ces outils sont des dépliants, des dossiers, des guides, des expositions, des vidéos.
Infos et dossier disponibles gratuitement au (0033) 3 20 63 48 41

Le point de vue est tout autre du côté de Jean-Philippe Desbordes , journaliste et auteur du livre «Mon enfant n’est pas un cœur de cible» (paru chez Actes Sud) : « Bien sûr que les régies publicitaires conditionnent les grilles des programmes ! Des dessins animés vont se faire les chantres de certains comportements et de certaines valeurs
Et de rappeler que l’agro-alimentaire représente 470.000 emplois en France. « Dans ce contexte », lance-t-il, « un consensus s’est établi pour ne pas rentrer dans le lard de l’agro alimentaire !» L’homme fut blessé de voir diffusé à une heure très tardive, en crypté, et à une seule reprise, son documentaire sur l’impact des dessins animés et de la publicité. On y voit des enfants, à la rencontre desquels il a pris la peine d’aller, pour le moins chamboulés (énervés, stressés, insécurisés) par certaines émissions, et ne faisant pas clairement la distinction entre pubs et programmes télé. Jean-Philippe Desbordes a crié à la censure à sa manière, en prenant la plume pour rédiger son coup de gueule sous forme de livre.
Du côté du Groupe Contact (radios privées), on tient à relativiser le rôle des médias en ce qui concerne l’incitation à consommer certains produits, et pas des plus licites. « On n’a jamais donné un cours en radio sur la manière de rouler un joint », assène Eric Carpeus .
Pour la Responsable de la communication au Conseil général du Nord, Evelyne Duhaut , la question n’en reste pas moins posée. Selon elle, des médias banalisent l’usage du cannabis quand ils donnent la parole à telle vedette de tennis prompte à dédramatiser (pour ne pas dire vanter) l’usage du shit. « Même si », ajoute-t-elle, « il convient de raison garder , puisqu’on évalue à 3 % l’impact des médias sur les changements de comportements contre 30 % d’impact estimé pour les actions au sein de la population
Un point de vue qui confond somme toute l’aval (les changements de comportements) et l’amont (l’influence des médias sur les comportements). La confusion justement structurait l’intervention du Dr Frédéric Kochman , pédopsychiatre. Il la pointe et la dénonce dans ces publicités pour des produits gras ou sucrés qui se voient flanqués (sous-titrés) de messages de promotion de la santé.
Cette bonne idée du PNNS (voir à ce sujet Education Santé n° 233) n’en serait pas une dans la mesure où les spots publicitaires doublés d’un message santé recrutent simultanément deux parties du cerveau. D’une part, le système limbique, siège des émotions, celui que viennent titiller des messages qui incitent à la consommation, à la pulsion d’achat. D’autre part, le cortex frontal, haut lieu de notre esprit critique. « Les deux endroits ne peuvent être allumés en même temps », commente le spécialiste. « On est dans une posture intenable , confinant à la schizophrénie
Véronique Janzyk

Recommandations pour l’activité physique en Belgique.

Le 30 Déc 20

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Document de consensus scientifique (Plan national nutrition santé)

(1)

Introduction

Le rapport sur la santé dans le monde de l’Organisation mondiale de la santé (2002) (2) montre de manière détaillée que, dans la plupart des pays, un petit nombre de facteurs de risque majeurs sont responsables de l’essentiel de la morbidité et de la mortalité. Les plus grands risques de maladies non transmissibles sont l’hypertension, l’hypercholestérolémie, une faible consommation de fruits et légumes, la surcharge pondérale et l’obésité, la sédentarité et le tabagisme. Les cinq premiers facteurs de risque sont étroitement liés à l’alimentation et à l’activité physique.

Pourquoi combiner activité physique et alimentation est-il essentiel?

La promotion d’une alimentation saine va de pair avec la promotion d’une activité physique régulière. Des thèmes tels que les apports et dépenses énergétiques, la surcharge pondérale et les maladies liées au régime alimentaire nécessitent une approche commune. Les dernières recommandations internationales publiées par l’OMS et Eurodiet ne manquent pas de le souligner: alimentation et activité physique forment un tout. Encourager les gens à manger plus sainement et à pratiquer une activité physique régulière exige la mise en place d’une collaboration entre les entités fédérées (Communautés française, germanophone et flamande, Région bruxelloise), le pouvoir fédéral et les nombreux acteurs concernés du secteur de l’alimentation et de l’activité physique.
Le fait d’intégrer les notions d’activité physique et d’alimentation dans un plan unique s’explique par l’évidence de plus en plus nette que ces deux facteurs sont indissociables pour la promotion d’une vie saine. Il importe de les promouvoir de manière conjointe et complémentaire.

Quel est le niveau d’activité physique des Belges?

Enquête de santé 1997, 2001 et 2004
En 1997, 2001 et 2004, la population belge (âgée de 15 ans et plus) a été interrogée sur ses habitudes en matière d’activité physique. Les principales conclusions de cette enquête sont les suivantes.
Généralités – Depuis 1997, les rapports montrent de manière constante que seuls 17 à 18 % de la population âgée de 15 ans et plus pratiquent une activité physique (sportive) au moins 4 heures par semaine. Les dernières enquêtes réalisées à l’échelon national montrent que la population belge, dans sa grande majorité, est inactive (41 %) ou ne développe qu’une activité minimale (31 %) (Enquête de consommation alimentaire).
D’autres données font état d’une activité physique modérée ou intense nulle chez 54 % des Belges (HIS 2004). Le pourcentage de la population qui présente un risque dû à un manque d’exercice physique est estimé à 57 % si l’on considère l’ensemble des activités (en période de loisirs mais aussi au travail ou sur le chemin du travail).
Environ 73 % font trop peu d’exercice pour éviter la prise de poids, et 62 % ont une activité physique insuffisante pour réduire le risque de maladies cardiovasculaires (MCV). Nous pouvons dire, sans crainte de nous tromper, qu’il s’agit là de sous-estimations, dans la mesure où les personnes interrogées ont tendance à répondre aux questions d’une manière socialement acceptable.
Âge – Le pourcentage des personnes exposées à un risque dû à un manque d’activité physique augmente avec l’âge, passant de 66 % (15 – 24 ans) à 89 % pour les plus de 75 ans. Le pourcentage de la population dont l’activité physique est insuffisante pour engendrer des effets bénéfiques sur la santé, augmente lui aussi avec l’âge (38 % des plus jeunes et 74 % des personnes âgées).
Sexe – Les femmes s’adonnent moins souvent à une activité physique et courent ainsi un risque plus important par rapport à leurs homologues masculins. Les femmes (de 15 ans et plus) font également moins de sport que les hommes et déclarent aussi plus souvent ne faire aucune activité physique. 65 % des hommes et 82 % des femmes pratiquent une activité physique qui ne suffit pas à limiter la prise de poids. Chez 46 % des hommes et 66 % des femmes, l’activité physique pratiquée est trop faible pour engendrer des effets bénéfiques sur la santé.
Education – Si l’on considère l’ensemble des activités (en période de loisirs mais aussi au travail et en termes de déplacements), rien ne permet de mettre clairement en évidence un quelconque lien entre le niveau d’éducation et les risques que représente le manque d’activité physique pour la santé. Les personnes peu qualifiées ont souvent une activité physique davantage liée au travail qui compense une activité rapportée comme moins importante en période de loisirs.
Région – Le pourcentage d’individus exerçant une activité physique suffisante pour avoir un impact positif sur la santé est en général plus élevé en Flandre que dans les deux autres régions.
Evolution 1997-2004 – En dépit des quelques efforts réalisés ces dernières années pour encourager l’activité physique, nous ne constatons aucun progrès significatif entre 1997 et 2004. En 1997, 18 % de la population déclarait faire du sport à raison de 4 heures ou plus par semaine; en 2001, ce chiffre était de 17 %, et en 2004, de 18 %. Le pourcentage de la population qui présente un risque dû à un manque d’exercice physique était estimé à 56 % en 2001 et à 57 % en 2004 si l’on considère l’ensemble des activités (en période de loisirs mais aussi au travail ou sur le chemin du travail). 60 % (2001) à 62 % (2004) n’ont pas une activité physique suffisante pour réduire le risque de MCV.
Etude HBSC
L’étude internationale quadriennale « Health Behaviour in School-aged Children » (HBSC) sur les comportements de santé des jeunes a été menée dans 35 pays, auprès d’un échantillon représentatif d’au moins 1500 élèves de 11, 13 et 15 ans. Cette étude a démontré qu’une majorité des adolescents européens et nord-américains ne suivent pas les recommandations en matière d’activité physique. Tous les pays se caractérisaient par une faible activité physique (minimum de 60 min d’activité physique modérée durant seulement 3,8 jours/semaine) et ce chiffre diminuait avec l’âge. La dernière étude HBSC (2005-2006) a montré qu’en Flandre, 43,7 % des garçons et 33,3 % des filles (moyenne d’âge: 12,5 ans) ont satisfait au critère demandé, à savoir exercer une activité physique journalière de 60 minutes, ce au moins 5 jours par semaine. Lorsque l’on fixait le critère à 60 minutes par jour à raison de 7 jours par semaine, les pourcentages passaient à 20,8 % chez les garçons et à 12,3 % chez les filles.
Etude PAN-UE
Une étude réalisée sur des échantillons représentatifs de toute l’Europe (Margets et al. 1999 ) a donné des résultats peu brillants en ce qui concerne l’activité physique des Belges. Cette étude européenne montre que pas moins de 68 % des personnes sondées en Belgique n’ont pas atteint le seuil minimal nécessaire à une activité physique suffisante. La Belgique se situe ainsi dans le top 4 des pays européens les plus sédentaires, en compagnie du Portugal, de la Grèce et de l’Italie.

Conclusion: trop sédentaires

D’un point de vue général, on peut définir la population belge comme étant trop sédentaire. Nous pouvons donc supposer qu’au moins la moitié de la population ne pratique pas une activité physique qui soit suffisante pour avoir un effet bénéfique sur la santé. Le risque de maladies chroniques pour ces personnes est bien plus grand. Au regard de la santé publique, une des priorités consiste dès lors à inciter les gens à bouger régulièrement.
En outre, le Belge obtient des scores médiocres par rapport aux autres nations européennes. La Belgique compte parmi les pays les plus sédentaires, même si l’on interprète la notion d’ « activité physique » au sens large. L’inactivité augmente avec l’âge. Les femmes et les jeunes filles sont moins actives que leurs homologues masculins. Les personnes ayant un niveau d’éducation bas font moins d’exercices physiques que celles dont le niveau d’éducation est plus élevé. Il y a aussi un pourcentage non négligeable de jeunes en Belgique qui ne pratiquent pas une activité physique suffisante. On remarque la plus forte baisse durant l’adolescence. De même, il est tout à fait probable que des jeunes inactifs adopteront dans leur vie d’adulte un mode de vie sédentaire (ils sont inactifs et le resteront).
La sédentarité de nombreux Belges est un problème significatif de santé publique. Un changement de comportement dans ce domaine ne sera toutefois pas facile à réaliser. Or, il est important de formuler des objectifs en la matière. Il serait surtout utile de se concentrer sur une activité physique modérée quotidienne (ex. prendre les escaliers, aller travailler à pied, à vélo ou de tout autre manière «active»…) plutôt que sur des activités intensives de loisirs.

Quels sont les bienfaits d’une activité physique suffisante sur la santé?

Bienfaits pour la santé physique

Des synthèses des publications produites sur les bénéfices de l’activité physique, comme celles réalisées dans le Surgeon General (U.S. Department of Health and Human Services, 1998) et celle du Comité scientifique de Kino-Québec (Ministère de la santé et des services sociaux), permettent d’argumenter sur les bénéfices de l’activité physique.
Mortalité – Diverses études longitudinales à grande échelle montrent qu’une activité physique régulière réduit le risque de décès prématuré en ce sens que le taux de mortalité des personnes actives est inférieur à celui des personnes sédentaires (3) (4).
Maladies cardiovasculaires – Dans son rapport sur l’activité physique, le Surgeon General des États-Unis a recensé 7 études traitant de la relation entre la quantité d’activité physique pratiquée et le risque total de souffrir de maladies cardiovasculaires et 36 études portant particulièrement sur les maladies coronariennes. Globalement, ces travaux démontrent qu’il existe une relation inverse entre le niveau habituel d’activité physique et l’incidence des maladies cardiovasculaires et, plus précisément, les maladies coronariennes. Un recensement détaillé de ces études révèle que le risque de développer une maladie coronarienne est 1,8 fois plus élevé chez les sédentaires que chez les personnes les plus actives. La sédentarité est un élément déterminant dans l’éventail des facteurs de risque des maladies cardiovasculaires.
Hypertension – La pratique régulière d’activités physiques retarde le développement d’une pression artérielle élevée . De plus, elle réduit la pression artérielle des personnes souffrant d’hypertension. À l’opposé, l’inactivité physique ou une faible condition physique augmente de 30 à 50 % le risque de développer une hypertension artérielle au cours des années. Une faible condition physique augmente également le risque de mourir de façon prématurée chez les hommes hypertendus.
Diabète – La pratique régulière d’activités physiques diminue le risque de développer un diabète non insulino-dépendant. L’activité physique aide à prévenir le diabète de deux façons: d’abord en augmentant la sensibilité à l’action de l’insuline dans le muscle squelettique, le tissu adipeux et le foie, puis en diminuant la sécrétion pancréatique d’insuline en réponse à un taux donné de glucose dans le sang.
L’activité physique d’une intensité faible ou modérée semble suffisante pour réduire le risque de développer la maladie, mais également pour accroître substantiellement l’action physiologique de l’insuline sur la glycémie. Le facteur le plus important semble être la régularité des séances d’activité physique. Du fait que les effets favorables d’une activité physique durent au plus 48 heures, il est recommandé de pratiquer une forme d’activité physique au moins tous les deux jours afin de maintenir une bonne sensibilité des tissus à l’action de l’insuline.
Obésité – L’obésité constitue un important problème de santé publique. Elle joue un rôle dans l’apparition du diabète et augmente les risques de souffrir de maladies cardiovasculaires, d’hypertension, de certains cancers et d’arthrose ou de mourir de façon prématurée.
L’activité physique apparaît comme un excellent moyen d’augmenter la dépense énergétique quotidienne et contribue, de ce fait, au maintien d’un poids stable. En conséquence, les personnes actives ont moins tendance à prendre du poids et à devenir obèses avec les années . Chez les personnes ayant un surplus pondéral, la perte de poids est proportionnelle à la quantité totale d’activité physique et au nombre de kilocalories dépensées. La fréquence et la durée des séances , de même que la durée du programme d’activité physique , s’avèrent plus importantes que leur intensité . De fait, il faut miser sur la constance et la régularité afin d’influer sur le poids de façon notable. Pour obtenir des pertes de poids importantes, il faut être prêt à persévérer et à modifier ses habitudes sur le plan de l’activité physique d’une façon permanente. De plus, on constate que le maintien d’une perte de poids importante chez les ex-obèses est plus facile si ceux-ci sont physiquement actifs.
Dyslipidémies et facteurs de coagulation – L’activité physique modifie favorablement le profil sanguin des lipides et des lipoprotéines. La pratique régulière d’une activité physique est associée à de plus hauts niveaux plasmatiques de lipoprotéines de haute densité ( HDL ). Les concentrations de ces lipoprotéines «protectrices» contre les maladies coronariennes augmentent généralement de 5 % à 10 % chez les personnes qui deviennent physiquement actives, des effets encore plus notables étant souvent observés chez celles qui, en plus, perdent du poids (5) (6).
Cancer – L’idée selon laquelle une activité physique régulière est profitable à la santé en général n’est pas neuve. On avance aussi depuis quelque temps, l’hypothèse d’une relation indirecte entre l’activité physique et le risque de cancer, étant donné le rôle important joué par la pratique d’une activité physique régulière dans la prévention de l’obésité.
Ce qui est relativement nouveau en revanche, c’est la prise de conscience que le niveau d’activité en lui-même est directement lié au risque de cancer. Les cancers du côlon et du sein nous offrent actuellement les meilleurs éléments de preuve à cet égard. Ces preuves sont un peu moins solides en ce qui concerne le cancer de l’endomètre. Concernant le cancer de la prostate et du poumon, en raison d’une recherche moins consistante dans ces domaines, les liens avec ces cancers sont toujours qualifiés de « possibles ». (Source: American Institute for Cancer Research, www.aicr.org/activity).

Bienfaits pour la santé mentale

Les effets bénéfiques sur la santé mentale (dépression, anxiété, qualité de vie perçue) sont relativement peu développés pour des raisons d’incertitudes relatives à la variabilité de la « dose-réponse » (activité physique – bénéfices pour la santé mentale). Des effets bénéfiques de l’activité physique ont été enregistrés sur la réduction ou le traitement des symptômes dépressifs et d’anxiété comme sur l’amélioration générale de l’humeur. L’activité physique semble améliorer le bien-être psychologique de manière générale. Pour les personnes avec des problèmes de santé, l’activité physique semble améliorer aussi leur aptitude à réaliser des tâches de la vie courante4.
Concernant les effets de l’activité physique sur le bien-être psychologique, plusieurs études soulignent l’action favorable résultant d’exercices aérobiques d’intensité modérée durant 15 à 60 minutes par jour. Comme ces effets sur la santé mentale (amélioration de l’humeur, bien-être général, aptitude à accomplir des tâches de la vie quotidienne, qualité de vie) sont des bienfaits très universels auxquels aspirent la plupart d’entre nous, ils peuvent contribuer de manière considérable aux messages d’éducation à la santé.

Quels sont les risques et dangers d’une activité physique pour la santé?

Le risque d’accidents s’accroît suivant le niveau de pratique, du non sportif au sportif avec pratique intense (plus de 500 heures par an): douleurs intenses (tendinites…), traumatismes déclarés, arrêts de travail, hospitalisations.
L’apparition de lésions sportives est proportionnelle à l’intensité, la fréquence et la durée de la pratique sportive. Les lésions et blessures surviennent principalement dans le cadre de la pratique intensive d’un sport de compétition. Une activité physique journalière comporte très peu de risques. Les avantages que représente une activité physique accrue pour l’individu et la santé publique compensent le risque – certes limité – de lésions susceptibles d’en découler. Il est bien entendu conseillé aux personnes qui sont restées longtemps inactives et qui veulent se lancer dans la pratique d’un sport, de consulter un médecin et de gravir progressivement les échelons en fonction de leur niveau.

Recommandations générales

Recommandations pour les adultes

Des progrès considérables sur le plan de la prévention de plusieurs maladies courantes et de la mortalité prématurée seraient enregistrés si un pourcentage élevé de la population sédentaire ou peu active changeait son mode de vie afin d’y incorporer une activité physique modérée mais régulière. (Kino-Québec – Avis du Comité scientifique).
En 1995, l’American College of Sports Medicine et les Centers for Disease Control and Prevention ont publié des recommandations nationales en matière d’activité physique et de santé publique. Le Committee on Exercise and Cardiac Rehabilitation de l’American Heart Association a avalisé et soutenu ces recommandations. En 2007, une actualisation de ces recommandations a permis de clarifier les points relatifs aux types et à la quantité d’activité physique nécessaires aux adultes en bonne santé pour améliorer leur santé et l’entretenir.
Afin de promouvoir et entretenir leur état de santé, tous les adultes en bonne santé et âgés entre 18 et 65 ans doivent s’adonner à une activité physique aérobique (endurance) d’intensité modérée, d’une durée minimale de 30 minutes par jour, à raison de cinq jours par semaine, ou à une activité physique aérobique vigoureuse de minimum 20 minutes par jour, à raison de trois jours par semaine. Les deux types d’activité (modérée et vigoureuse) peuvent être combinés afin de satisfaire à cette recommandation.
Une activité aérobique modérée équivaut généralement à marcher d’un pas soutenu et donne lieu à une accélération notable du rythme cardiaque. Le minimum de 30 minutes d’activité par jour peut être atteint en accumulant des séances de 10 minutes (ou plus) chacune.
Un exemple d’activité physique vigoureuse est le jogging et engendre une respiration rapide et une hausse substantielle du rythme cardiaque. Chaque adulte devrait également pratiquer, au moins deux fois par semaine, des activités permettant d’entretenir ou d’accroître leur force musculaire et leur endurance.
Etant donné la relation dose-réponse entre activité physique et santé, les personnes qui souhaitent continuer à améliorer leur état de forme personnel, réduire le risque de maladies et invalidités chroniques ou prévenir la prise de poids néfaste, peuvent être avantagées en s’adonnant à des exercices supplémentaires qui les aideront à aller au-delà du niveau d’activité physique minimum recommandé.

Un minimum de 30 minutes d’activité physique modérée 5 jours par semaine ( mode de vie actif )
ou
Un minimum de 20 minutes d’activité physique aérobique intense , 3 jours par semaine ( pratique sportive )
Consacrer au moins 30 minutes par jour à des activités physiques modérées. Cette durée doit être augmentée à 60 minutes si l’activité physique est de faible intensité (marche lente) ou si elle est pratiquée irrégulièrement (moins de 5 jours par semaine).
Le temps actif total d’activité physique peut être atteint en accumulant des périodes d’activité physique d’au moins 10 minutes.
Toute augmentation de la dépense énergétique associée à l’activité physique est susceptible d’avoir des retombées favorables sur la santé.
Maintenir la régularité dans la pratique d’activités physiques tout au long de l’année. Les personnes sédentaires qui sont dans cet état depuis plusieurs années doivent débuter lentement et augmenter progressivement leur dépense énergétique quotidienne.

La meilleure façon de « bouger » sainement ne se limite pas à la pratique d’un sport, mais consiste également à intégrer l’activité physique dans son quotidien, par exemple se rendre à vélo à l’école ou au bureau, aller à pied au supermarché, préférer les escaliers à l’ascenseur ou à l’escalator.

Recommandations pour les jeunes

En 1998, en Grande-Bretagne, la Health Education Authority (HEA) a émis des recommandations qui mettaient l’accent sur la participation à une activité physique d’intensité modérée d’une heure par jour. Ces recommandations avaient pour but de prendre en considération les modes de vie des jeunes d’aujourd’hui et leurs habitudes en matière d’activité physique.
En Belgique, le groupe HEPA a repris cette directive, en conseillant également aux jeunes de bouger de manière plus intensive, deux fois par semaine, de façon à faire progresser ou entretenir leur niveau de condition physique.

Déterminants et stratégies générales d’intervention

Préalablement à la mise au point de toute intervention, il est important d’examiner quels sont les principaux déterminants de l’activité physique (voir tableau de synthèse). Dès que nous saurons pourquoi les gens sont physiquement (in)actifs, nous serons en mesure d’agir sur ces facteurs pour augmenter l’activité physique.

Déterminants

Stratégies générales d’intervention
Facteurs démographiques et biologiques Actions vers
Âge Enfants, adolescents, adultes, seniors
Sexe Jeunes filles et femmes
Niveau de formation/statut socio-économique Catégories socio-économiques défavorisées
Région/urbanisation Zones géographiques prioritaires
Facteurs individuels
Connaissances dans le domaine de la santé et de l’activité physique Adaptation des messages sport/activité physique
Obstacles perçus (manque de temps, pas sportif, santé déficiente) Gestion du temps (travail, loisirs), qualité de vie
Avantages perçus (plaisir, contact social, santé) Accent sur les avantages et le plaisir
Efficacité personnelle Mode de vie actif, objectifs réalisables
Facteurs sociaux et culturels
Appui social de la part d’amis, collègues, conjoint(e), famille, staff, instructeur, décideurs locaux Mobilisation de l’appui social. Recherche d’un compagnon pour la pratique d’un sport / d’une activité
Facteurs physiques environnementaux
Accès aux équipements Politique (sports et mobilité) de la ville et des régions (urbanisme, sécurisation des espaces)
Accessibilité à pied / à vélo Promotion et information sur la mobilité lente ( marche, vélo…)

Facteurs démographiques et biologiques

Toutes les études montrent que l’activité physique diminue avec l’âge. On observe la plus forte baisse chez les adolescents.
Les interventions doivent être axées entre autres sur cette période qu’est l’adolescence . La plupart du temps, les jeunes enfants ont une activité physique suffisante. Nous savons aussi que les jeunes enfants inactifs conserveront fort probablement cette inactivité à l’âge adulte. Il est dès lors important de se concentrer sur ces enfants inactifs . D’un autre côté, nous ne devons pas partir du principe que tous les enfants et adolescents actifs deviendront automatiquement des adultes actifs. Les activités de promotion ne doivent donc pas se focaliser sur les seuls enfants et adolescents.
En effet, il est aussi nécessaire d’encourager un style de vie actif chez les adultes qui en ont besoin. En d’autres termes, il faut encourager toutes les catégories d’âge à intégrer la pratique d’une activité physique dans leur quotidien.
Les garçons et les hommes sont plus actifs que les filles et les femmes. À partir de 10 ans, les filles sont considérées comme un important groupe à risque. Il nous faut par conséquent accorder une attention particulière aux filles et aux femmes .
Le risque de sédentarité est plus grand chez les gens ayant un niveau d’éducation peu élevé et issus de milieux sociaux modestes. Ces groupes à risque doivent également être pris spécifiquement en compte dans le cadre des actions de promotion d’une activité physique. De plus, on suppose qu’il existe un lien entre un statut socio-économique (SSE) modeste, un degré d’urbanisation plus élevé et certaines régions spécifiques. Les projets régionaux jouent ici un rôle important.

Facteurs individuels

Bon nombre d’études réalisées dans le passé ont démontré qu’il ne suffit pas d’« enseigner » aux gens la relation entre comportement et santé. Si on sait que pratiquer une activité physique est bon pour la santé, ce n’est pas pour autant qu’on va le faire.
Nous devons néanmoins être conscients du fait qu’une certaine connaissance de base s’impose. Il ressort de plusieurs études belges que la norme actuellement en vigueur en matière d’activité physique est peu connue dans notre pays. Une première stratégie pourrait dès lors consister à:
faire connaître à la population ladite norme actuelle, notamment 30 minutes d’activité physique modérée chaque jour, ceci afin de dissiper un malentendu selon lequel seule une activité sportive intensive peut avoir un effet positif sur la santé physique et mentale;
-faire clairement comprendre que toutes les formes d’activité physique sont bonnes pour la santé (se promener, faire du vélo, prendre l’escalier, etc.) et qu’une intensification progressive des activités procure un effet bénéfique supplémentaire pour la santé.
La motivation (interne) de rester actif tout au long de sa vie est favorisée par le fait de sensibiliser les gens aux bienfaits qu’apporte l’activité physique (plaisir, contacts sociaux, meilleure santé) et d’éliminer la perception des obstacles qui rendent difficile la pratique d’une activité physique (accrue) comme par exemple le manque de temps, l’idée de penser qu’on n’est pas sportif, les problèmes de santé… Les gens doivent se dire qu’ils sont capables d’être physiquement actifs et qu’ils peuvent tenir le coup («self-efficacy»).
En faisant la promotion d’un mode de vie actif qui intègre l’activité physique dans le quotidien de la personne, il sera plus facile pour cette dernière de trouver le temps pour s’adonner aux joies de l’activité physique. En outre, il ne faut pas nécessairement être très sportif, et les gens dont la santé est moins bonne ou les personnes plus âgées peuvent également pratiquer des activités tels que se promener, rouler à vélo, monter les escaliers, travailler dans le jardin… (éliminer les obstacles).
Il est important d’opter pour une activité que l’on aime faire, qui permet de rencontrer d’autres gens ou d’être avec des amis/la famille si on le désire, et de comprendre l’importance que représente l’activité physique pour sa santé à court et à moyen terme (insister sur les avantages).
Si les gens optent pour un mode de vie actif et choisissent des activités qu’ils aiment faire, ils persévéreront et seront confiants quant au fait qu’ils sont en mesure de rester actifs. Pour les jeunes, cela signifie par exemple qu’à côté du sport de compétition dans les clubs actuels, il doit également être possible à chacun et chacune, à son niveau, de prendre part à une activité sportive de loisir.

Facteurs sociaux

Les facteurs sociaux jouent aussi un rôle important dans la pratique d’une activité sportive. Il y aura lieu de penser à
-améliorer le soutien social de l’activité physique: dans le cas des jeunes enfants, il faudra surtout encourager les parents. Il convient d’organiser des projets parents-enfants axés sur la pratique (« comment faire pour… »), en mettant l’accent sur la composante familiale. Dans le cas des enfants plus âgés, un rôle important est réservé aux amis, frères et soeurs, « petit(e)s ami(e)s », partenaires et collègues;
-encourager la recherche d’un(e) partenaire pour pratiquer ensemble une activité physique ou un sport, étant donné qu’il est apparu que ce partenaire peut constituer un soutien social considérable.

Facteurs environnementaux

Les interventions individuelles doivent s’accompagner d’interventions orientées sur les changements d’environnement afin d’accroître les possibilités d’induire un changement de comportement réel.
La disponibilité et l’accessibilité de structures (sportives) aident à déterminer dans quelle mesure jeunes et adultes s’adonneront à une activité sportive (piscine, hall sportif…). La présence d’espaces ouverts, plaines, culs-de-sac, prairies… ont également un impact non négligeable sur l’activité physique des enfants et adolescents.
Dans le contexte scolaire et professionnel, l’environnement est un facteur déterminant de l’activité physique: des structures sont-elles prévues? Les écoles doivent veiller à dispenser suffisamment d’heures d’éducation physique, de préférence 3 à 4 heures par semaine. Ces cours d’éducation physique doivent être actifs et amusants pour les enfants, de sorte à les amener à adopter un mode de vie actif tout au long de leur vie.
Il convient donc d’organiser, autant que possible, des activités extra-scolaires dans le but de consolider un style de vie actif à partir du principe de l’apprentissage par la pratique («learning by doing»), et de créer et concevoir les conditions dans et autour de l’école propices à toutes formes d’activités physiques amusantes et informelles destinées aux jeunes et basées sur les jeux avec ballons, rollers et vélos.
Des études récentes ont démontré l’importance des facteurs environnementaux dans la pratique d’une activité physique peu intensive ou modérée. Que ce soit pour se déplacer ou à titre récréatif, il est toujours plus facile de se promener ou de rouler à vélo si l’environnement s’y prête («walkability»).
Les personnes qui vivent dans des quartiers à forte densité de population, à proximité de transports en commun, et qui peuvent faire leurs courses au magasin du coin… auront plus l’occasion d’opter pour la marche à pied ou le vélo comme mode de déplacement que les personnes vivant éloignées de ce type d’infrastructure. D’autres facteurs qui déterminent le choix de la marche à pied ou du vélo comme moyen de transport sont la mise à disposition de trottoirs et pistes cyclables, sûrs, attrayants et où la circulation n’est pas trop dense.
Les mesures prises par les autorités locales en matière d’urbanisme occupent une place cruciale dans la lutte contre la sédentarité; il importe notamment de veiller à ce que les terrains de sport soient situés à proximité des zones résidentielles, de s’assurer que les routes soient sûres, que les rues soient accessibles aux piétons, que les espaces verts et autres soient ouverts au public et propres… Dans le cadre de l’évolution vers une plus grande individualisation des activités sportives de loisir, une promenade revigorante, la pratique du jogging de façon modérée, du patin (roller), du vélo, etc., dépendent de plus en plus du respect de ces conditions d’environnement et de la qualité des lieux, si l’on veut faire en sorte que la pratique d’une activité physique « au coin de la rue » puisse conserver tout son attrait.
D’un point de vue général, nous pouvons conclure que les interventions environnementales sont nécessaires si nous voulons que la population adopte un style de vie plus actif sur le plan physique. Les responsables de la gestion de nos environnements quotidiens (écoles, lieux de travail, espaces publics, environnement urbain…) ont par conséquent un rôle très important à jouer dans le changement de comportement physique de la population belge. Leurs projets doivent tenir compte des éventuels obstacles et opportunités rencontrés par quiconque souhaite être physiquement plus actif en journée. Dans le cas contraire, le changement des attitudes au niveau individuel n’aura que peu ou pas d’impact et les initiatives consenties en termes d’éducation pour la santé et de promotion afin d’atteindre ce but seront perçues comme peu cohérentes.
Ilse De Bourdeaudhuij (Universiteit van Gent, Faculteit Geneeskunde en Gezondheidswetenschappen, Department of Movement and Sport Sciences), Pierre Bizel (Province de Hainaut, Observatoire de la santé du Hainaut, secteur Education Santé)
Texte reproduit avec l’aimable autorisation du Service public fédéral santé publique, qui gère le Plan national nutrition santé. Site: https://www.monplannutrition.be

Principales références

U.S. Department of Health and Human Services. Physical Activity and Health. A Report of the Surgeon General, Atlanta, Georgie, U.S. Department of Health and Human Services, Centers for Disease Control and Prevention, National Center for Chronic Disease Prevention and Health Promotion, 1998.
Secrétariat au loisir et au sport, Ministère de la Santé et des Services Sociaux. Quantité d’activité physique requise pour en retirer des bénéfices pour la santé. Avis du Comité scientifique Kino-Quebec, 1999.
Eurodiet. Nutrition & Diet for Healthy Lifestyles in Europe: the EURODIET Evidence. Public Health Nutrition Vol 4. 2(A) and 2(B), 2001.
Organisation mondiale de la santé, Rapport sur la santé dans le monde, Réduire les risques et promouvoir une vie saine. Genève, 2002.
World Health Organisation, nutrition and the prevention of chronic diseases. Report of a joint WHO/FAO Expert consultation. WHO Technical Report Series N° 916. WHO Geneva, 2003.
OPPERT J.M., SIMON Ch., RIVIERE D., GUEZENNEC Ch Y., Activité physique et santé, Arguments scientifiques, pistes pratiques, Ministère de la santé et des solidarités, Société Française de Nutrition, Plan National Nutrition Santé, France, 2004.
HASKELL, W. L., I.-M. LEE, R. R. PATE, K. E. POWELL, S. N. BLAIR, B. A. FRANKLIN, C. A. MACERA, G. W. HEATH, P. D. THOMPSON, and A. BAUMAN. Physical Activity and Public Health: Updated Recommendation for Adults from the American College of Sports Medicine and the American Heart Association. Med. Sci. Sports Exerc., Vol. 39, No. 8, pp. 1423–1434, 2007.

(1) Le présent document a été élaboré après avoir fait l’objet d’une large consultation auprès du groupe de travail «Activité physique», qui s’est réuni à intervalles réguliers de janvier à juin 2005 dans le cadre de la phase préparatoire du Plan national nutrition santé belge. Tous les membres du groupe de travail ont activement contribué à trouver un consensus quant à la situation actuelle, aux objectifs et aux mesures à prendre pour améliorer l’état de l’activité physique en Belgique.
Il a été révisé et actualisé à l’occasion des réunions du Groupe de travail du PNNS sur l’activité physique qui se sont tenues en 2007 sous la coordination de Mme Ilse De Bourdeaudhuij .
(2) Rapport sur la santé dans le monde, 2002 -Réduire les risques et promouvoir une vie saine. Genève, Organisation mondiale de la santé, 2002.
(3) U.S. Department of Health and Human Services. Physical Activity and Health. A Report of the Surgeon General,
Atlanta, Georgie, U.S. Department of Health and Human Services, Centers for Disease Control and Prevention,
National Center for Chronic Disease Prevention and Health Promotion, 1998.
(4) Secrétariat au loisir et au sport, Ministère de la Santé et des Services sociaux, Quantité d’activité physique requise pour en retirer des bénéfices pour la santé. Avis du Comité scientifique Kino-Quebec, 1999.
(5) 4.Askell, W. L., I.-M. Lee, R. R. Pate, K. E. Powell, S. N. Blair, B. A. Franklin, C. A. Macera, G. W. Heath, P. D. Thompson, and A. Bauman. Physical Activity and Public Health: Updated Recommendation for Adults from the American College of Sports Medicine and the American Heart Association. Med. Sci. Sports Exerc., Vol. 39, No.8, pp. 1423–1434, 2007.
(6) Geneste C et coll. Activités sportives et état de santé déclaré. Santé publique 1998.

Pourquoi pauvreté ne rime pas avec santé

Le 30 Déc 20

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Les inégalités socio-économiques de santé vont bien au-delà des inégalités en termes de disponibilité et d’accessibilité des services de santé. La santé dépend de toute une série de facteurs distribués de manière inégale entre les différentes classes socio-économiques.
Quelques faits assez frappants – que nous développerons plus en détail dans les pages qui suivent – en attestent:
-les personnes sans diplôme vivent en moyenne 3 à 5 ans de moins que les personnes diplômées de l’enseignement supérieur de type long (Bossuyt et al., 2004);
-ces personnes vivent en bonne santé en moyenne 18 à 25 années de moins (Bossuyt et al., 2004);
-les personnes au chômage et les personnes malades ou invalides ont un risque respectivement 3 et 8 fois plus important que les personnes au travail, d’avoir des problèmes dépressifs et d’anxiété (De Boyser, 2007);
-plus de la moitié des personnes sans diplôme ou diplômées de l’enseignement primaire sont en surpoids, contre «seulement» un peu plus d’un tiers des diplômés de l’enseignement supérieur (Vancorenland, 2006).
De plus, quand on parle d’inégalités socio-économiques de santé, on part de l’hypothèse que la santé suit un gradient social : à position socio-économique décroissante, la santé individuelle tend à se détériorer et l’espérance de vie à diminuer.
L’étendue des différences varie selon l’indicateur choisi (traditionnellement la formation, le revenu et l’emploi), le groupe ou la population étudiée et l’endroit où l’étude a été menée. Il s’agit bien d’un phénomène de gradient (progressivité) et non de seuil (Whitehead et Dahlgren, 2006).

Indicateurs des inégalités socio-économiques de santé

Dans tous les pays occidentaux pour lesquels des données sont accessibles, la mortalité et la morbidité augmentent au fur et à mesure qu’on descend dans l’échelle sociale (Stronks, 1997). Ceci a été mis en évidence dans de nombreuses études.

La mortalité

Mackenbach et al. (1997) ont observé, pour 11 pays européens, que le risque de mortalité pour les hommes exerçant une activité professionnelle manuelle est plus important que pour les hommes exerçant une activité intellectuelle, ceci pour les catégories d’âges 30-44 ans et 45-59 ans. Siegrist et Marmot (Willems, 2005) ont étudié pour différents pays européens les différences de mortalité entre les classes du haut et du bas de l’échelle sociale. Ils ont observé que ces différences pouvaient aller de 4 à 10 ans selon les pays.
Une étude récente sur les inégalités socio-économiques chez les personnes âgées dans 11 pays européens confirme cette thèse (Huisman M et al., 2004). Elle montre que pour les hommes et les femmes âgés de 60 à 69 ans, le taux de mortalité est plus important pour les personnes ayant un faible niveau de formation (voir figure 1 pour les hommes).

Figure 1 – Taux de mortalité (par 1000 personnes et par an) pour les hommes les plus et les moins formés, âgés de 60 à 69 ans Source: Huisman et al. (2004). Socioeconomic differences in mortality among eldery people in 11 European population.
En Belgique aussi, il apparaît que les risques de décès dépendent du niveau de formation, du statut socio-professionnel et du revenu. Si on analyse l’espérance de vie des hommes et des femmes à 25 ans, on observe une différence significative entre les diplômés de l’enseignement supérieur de type long et les personnes non diplômées: les premiers peuvent espérer atteindre 78,6 ans (hommes) et 83,5 ans (femmes), tandis que pour les seconds, l’espérance de vie se limite à 73,1 ans (hommes) et 80 ans (femmes). Cela fait en moyenne 3 ans d’écart pour les hommes, et 5 ans pour les femmes (Bossuyt et al., 2004). La figure 2 montre clairement qu’il s’agit d’un gradient qui englobe toute l’étendue des niveaux de formation. Figure 2 – Espérance de vie des hommes et des femmes de 25 ans en fonction du niveau de formation Source: Bossuyt N et al. (2004) Socio-economic inequalities in health expectancy in Belgium.

La morbidité

Mackenbach et al. (1997) ont également observé des inégalités socio-économiques en termes de morbidité. Il s’agit du nombre de personnes souffrant d’une maladie donnée pendant un temps donné, en général une année, dans une population.
L’incidence (nouveaux cas) ou la prévalence (la somme de tous les cas) sont deux façons d’exprimer la morbidité d’une maladie. Différents types d’indicateurs ont été utilisés pour mesurer le taux de morbidité: la santé perçue, l’invalidité, les maladies chroniques et les problèmes de santé de longue durée.
De manière générale, parmi les hommes de 25 à 69 ans, les diplômés de l’enseignement secondaire inférieur et en dessous ont un niveau de santé subjective moins bon que les diplômés de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur. Ils ont également un risque plus important d’avoir des problèmes d’invalidité (difficultés pour monter les escaliers, pour marcher, pour lire, etc.), des problèmes liés à des affections chroniques (cancer, diabète, maladies de cœur, etc.), et d’avoir des problèmes de santé de longue durée.
En Belgique, les résultats des enquêtes de santé de 2001 et 2004 vont dans le même sens. Hardonk et al. (2004) ont analysé les résultats de l’enquête de santé de 2001, et ont entre autres mis en évidence la corrélation négative qui existe entre le niveau de formation (5 niveaux différents) et le risque de morbidité. Ils ont utilisé différents indicateurs, dont la santé subjective, les affections, les maladies chroniques et handicaps de longue durée, et les limites auxquelles une personne est confrontée suite à une affection de longue durée. Ces résultats ont été confirmés par les résultats de l’enquête 2004 (De Boyser, 2007).
Quand on parle de morbidité, le plus frappant est sans doute l’analyse des différences en termes d’espérance de vie en bonne santé. Les résultats sont encore plus impressionnants que ceux de l’analyse de l’espérance de vie tout court (figure 3). Les diplômés de l’enseignement supérieur de type long ont une espérance de vie en bonne santé, respectivement pour les hommes et les femmes, de 70,9 ans et 74,1 ans, contre 55,8 ans et 54,8 pour les non diplômés. Cela fait en moyenne 18 ans d’écart pour les hommes, et 24 ans pour les femmes (Bossuyt et al., 2004).

Figure 3 – Espérance de vie en bonne santé perçue chez les hommes et les femmes de 25 ans, en fonction du niveau de formation Source: Bossuyt N. et al. (2004) Socio-economic inequalities in health expectancy in Belgium.
A noter que le gradient observé en termes d’espérance de vie et d’espérance de vie en bonne santé à mesure qu’on descend dans le niveau de formation a également été observé pour d’autres indicateurs de la position socio-économique, comme le revenu et la catégorie socio-professionnelle.

Des inégalités qui s’accroissent…

Malgré une amélioration constante de l’état de santé moyen – en Belgique, le gain annuel de survie s’est élevé en moyenne à plus de trois mois par an entre 1885 et 1995 (Defeyt Ph. et al., 1997) –, plusieurs études européennes ont mis en évidence le fait que ces dernières décennies, les inégalités en termes de mortalité ont augmenté.
Si on prend le cas de la Suède, on observe qu’entre 1980 et 1997 le différentiel d’espérance de vie entre un homme de 20 ans issu du groupe socio-économique le plus élevé et un homme issu du groupe socio-économique le plus bas, est passé de 2,11 ans à 3,79 ans. L’augmentation des inégalités est essentiellement due à une diminution plus importante du taux de mortalité dans les groupes socio-économiques en haut de l’échelle sociale relativement aux groupes dans le bas de l’échelle (Willems, 2005).
Dans le cas de la Belgique, certaines estimations quant à l’évolution des inégalités en termes de santé subjective, de maladies et d’affections chroniques ont été faites à partir des données des enquêtes de santé de 1997 et 2001. On y observe que les inégalités, tant au niveau de la santé subjective que des maladies et affections chroniques, ont diminué. Cependant, vu le manque de recul, ces résultats sont à interpréter avec prudence, et ne nous permettent pas de donner une tendance claire quant à l’évolution des inégalités de santé pour la Belgique (Willems, 2005).

Déterminants des inégalités socio-économiques de santé

Différents mécanismes explicatifs ont été proposés dans différentes études traitant de la problématique des inégalités socio-économiques de santé. Mackenbach (1994) a proposé une synthèse de ces mécanismes qu’il a systématisés en quelques modèles explicatifs. Dans le cadre de cet article, nous en développerons deux (les plus travaillés par les différentes études): celui de la mobilité sociale sélective et celui des causes sociales .
Nous développerons davantage le deuxième modèle, celui-ci ayant été le plus exploité, et étant le plus significatif quant à la compréhension des inégalités socio-économiques de santé (Mackenbach, 2005).

La mobilité sociale sélective

Le modèle de la mobilité sociale sélective fait l’hypothèse que l’état de santé ou un déterminant de l’état de santé influence la position socio-économique d’un individu, et donc sa mobilité sociale au sein de la société. La position socio-économique est dès lors, dans le cadre de ce modèle, une conséquence plutôt qu’une cause de l’état de santé ou de ses déterminants. Les théories défendant la thèse de la sélection sociale en distinguent deux types: la sélection directe et la sélection indirecte (Peersman, 2000).
Le modèle de sélection directe fait l’hypothèse que la santé influence directement la mobilité sociale d’un individu. Selon que l’individu est en bonne ou en mauvaise santé, il aura tendance à monter ou à descendre dans l’échelle sociale. Cela signifie que les personnes en moins bonne santé, et par conséquent ayant une espérance de vie moins élevée, se concentreront au bas de l’échelle sociale.
Le modèle de sélection indirecte implique que les facteurs déterminant la mobilité sociale influencent également l’état de santé d’un individu. Par exemple, le fait qu’un individu ait une perception positive et proactive par rapport à son avenir influencera sa motivation à investir dans l’éducation et la formation, mais également sa motivation à adopter des comportements sanitaires favorables à sa santé.
« Des recherches montrent qu’il existe effectivement une mobilité sociale descendante dépendant des problèmes de santé mais que l’impact de ce mécanisme est minime et ne peut expliquer les inégalités de santé . De même , le mécanisme de sélection indirecte est confirmé mais sans pour autant être capable d’expliquer les différences de mortalité et de morbidité entre les groupes sociaux .» (Willems et al., 2007).

Les causalités sociales

Le modèle de causalités sociales implique que la position socio-économique d’un individu influence son état de santé. Cette influence se fait par l’intermédiaire de toute une série de déterminants, qui peuvent être regroupés en deux catégories: les facteurs structurels (matériels et non matériels), liés aux conditions de vie, et les facteurs culturels , liés aux comportements et styles de vie (Peersman, 2000).
Déterminants structurels
Bien que les conditions de vie des individus se soient, ces dernières décennies, relativement améliorées dans nos pays occidentaux, les personnes se situant au bas de l’échelle sociale ont, relativement au haut de l’échelle, de moins bonnes conditions de vie (Peersman, 2000). Dans ce qui suit, on distinguera les conditions matérielles (de vie, d’habitat et de travail) des conditions psychosociales .
Les conditions matérielles
La qualité des conditions matérielles est traditionnellement expliquée par le niveau de privation économique. « Un manque de moyens financiers se traduit par un habitat peu sain et avec moins d’espace , situé dans un quartier peu sûr offrant moins de possibilités de loisirs pour les enfants . (…) Les conditions matérielles de travail sont moins favorables aux groupes de faible statut socio économique . Les personnes appartenant à ces groupes sont plus souvent soumises à un travail physique dur (…)» (Willems, 2007).
A titre d’exemple, le CBS néerlandais (Centraal Bureau voor de Statistiek) a mis en évidence le lien entre la catégorie socio-économique et différents indicateurs, dont notamment le pourcentage de personnes témoignant avoir des conditions de travail difficiles. Plus on descend dans l’échelle sociale, plus le pourcentage de personnes se plaignant de mauvaises conditions de travail augmente: on passe de 10 % pour les classes sociales supérieures à 37 % pour les classes sociales se situant dans le bas de l’échelle (Stronks, 1997).
Pour la Belgique, des données récentes (SILC 2004 – Statistics on Income and Living Conditions) vont dans le même sens. Raeymaeckers et Dewilde (2007) ont observé des différentiels assez significatifs entre riches et pauvres, notamment au niveau du logement, de l’environnement et des moyens financiers (tableau 1).

Tableau 1 – Différences dans les conditions matérielles, selon le revenu par rapport au seuil de pauvreté

Pauvres Non pauvres
Logement
Insuffisance d’équipements sanitaires 15% 3%
Mauvais état de l’habitation 49% 9%
Impossibilité de chauffer correctement le logement 41% 3%
Environnement
Pollution, smog et bruit 36% 4%
Criminalité, vandalisme 53% 12%
Propreté du quartier 49% 8%
Accessibilité limitée aux transports en commun 23% 19%
Moyens financiers
Ne peuvent se permettre:
– des petits achats 26% 1%
– des gros achats 78% 7%
– des outils technologiques 37% 5%

Source: Enquête de santé 2004 (Raeymaeckers P., Dewilde C., 2007).

Les différences entre «pauvres» et «non pauvres» sont très significatives (1). Concernant le logement, on observe que les personnes pauvres ont 5 fois plus de risque de faire face à une insuffisance en matière d’équipements sanitaires ainsi qu’à un logement en mauvais état (ce qui représente près d’une personne sur deux en situation de pauvreté), et 13 fois plus de risque d’avoir des problèmes de chauffage (cela concerne 4 personnes en situation de pauvreté sur 10).
Du point de vue de l’environnement, les différences les plus significatives concernent la pollution et le bruit, la criminalité et le vandalisme, et la propreté du quartier: les personnes en situation de pauvreté risquent respectivement neuf, quatre et six fois plus souvent d’être confrontées à ce genre de problèmes.
Enfin, concernant les moyens financiers, les différences les plus importantes concernent les gros achats, qui constituent un problème pour près de 80 % des personnes pauvres, contre moins de 10 % pour les personnes non pauvres. Plus d’un quart des personnes pauvres ont également des difficultés pour les petits achats.
Le manque de moyens financiers a également un impact sur la difficulté de faire face aux dépenses en soins de santé, et dès lors sur le report des soins: 60 % des personnes pauvres ne peuvent intégrer les coûts liés aux soins de santé dans le budget du ménage, et 17 % doivent reporter les soins dont ils ont besoin (De Boyser, 2007). Ainsi, bien qu’en principe tout le monde ait accès aux soins de santé, le volet financier pose souvent problème.
Concernant la part relative des frais de santé dans le budget familial, on observe que celle-ci est plus lourde pour les ménages dont la personne de référence n’a qu’une formation limitée et dont le revenu est limité. Près de la moitié des personnes ayant un diplôme primaire ou sans diplôme avouent que leurs dépenses de santé sont très difficiles à supporter (alors que cela ne concerne même pas 15 % des personnes issues de l’enseignement supérieur).
On peut penser que les frais de santé difficiles à supporter mènent à un report de la consommation médicale. On observe une différence de 10 % entre les personnes diplômées de l’enseignement primaire ou sans diplôme et les personnes issues de l’enseignement supérieur (tableau 2). Une chose est sûre: l’accessibilité financière aux soins de santé n’est pas garantie à tous (Vancorenland, 2006).

Tableau 2 – Différences dans l’accès aux soins de santé, selon le niveau de formation

Part relative des frais de santé dans le budget familial Frais de santé difficiles à supporter Nécessité de reporter une consommation médicale
Primaire ou sans diplôme 9,4% 51,2% 16,5%
Secondaire inférieur 9,7% 38,7% 10,8%
Secondaire supérieur 5,1% 28% 9,7%
Enseignement supérieur 4,1% 13,8% 6,8%
TOTAL 6% 28,1% 9,9%

Source: Enquête de santé 2004 (Vancorenland S. 2006).

Les conditions psychosociales
L’état de santé d’un individu est également influencé par le contexte psychologique et social dans lequel il vit. Celui-ci est influencé par divers facteurs: sa santé mentale (au sens large du terme), l’étendue et la qualité de son réseau social, mais aussi le degré de contrôle qu’il a sur sa vie («locus of control»). A noter qu’outre le fait que ces différents indicateurs peuvent avoir un impact l’un sur l’autre – par exemple, le degré de contrôle sur le niveau de santé mentale – les conditions de vie matérielles ont également un impact sur les conditions psychosociales – par exemple, l’environnement sur le niveau de santé mentale (Stronks, 1997).
De manière générale, on observe que les personnes se situant dans le bas de l’échelle sociale ont une moins bonne santé mentale , peuvent moins compter sur leur réseau social en cas de problèmes matériels ou psychologiques, et ont un degré de contrôle moins important que les personnes issues des catégories socio-économiques plus favorisées.
La santé mentale
Outre le réseau social qu’une personne peut mobiliser en cas de problèmes, ainsi que son degré de contrôle dans la gestion de son quotidien, différents éléments ont été avancés dans la littérature comme ayant une influence sur la santé mentale d’une personne: le décès d’un conjoint, le divorce, les problèmes financiers, le chômage de longue durée, etc. (Stronks, 1997). Pour la Belgique, différents auteurs ont récemment mis en évidence le lien qui existe entre situation socio-économique et santé mentale (dont les problèmes dépressifs, d’anxiété et les troubles du sommeil).
En se basant sur les enquêtes de santé de 2001 et 2004, De Boyser (2007) a notamment mis en évidence que les personnes ayant un revenu en dessous du seuil de pauvreté (2) ont un risque plus important d’avoir des problèmes dépressifs (différence de 5 %) et d’anxiété (différence de 4 %) (tableau 3).
Les résultats sont encore plus significatifs lorsqu’on compare les personnes ayant un emploi, les personnes au chômage et les personnes malades ou invalides. Ainsi, on observe que les chômeurs et les malades ou invalides ont un risque respectivement 3 et 8 fois plus important que les travailleurs d’avoir des problèmes dépressifs et d’anxiété. Pour ce qui est des troubles du sommeil, les différences sont moins importantes, mais on observe que cela concernerait près d’un quart des chômeurs et près de la moitié des personnes malades ou invalides.
Enfin, De Boyser observe que près de 20 % des chômeurs et 40 % des malades ou invalides ont de graves problèmes mentaux, alors que cela ne concerne que moins de 10 % des travailleurs. Quant au mal-être psychologique, cela concernerait près d’un tiers des chômeurs et la moitié des personnes malades et invalides, pour «seulement» 20 % des personnes au travail.

Tableau 3 – Différences dans la santé mentale, selon le revenu et l’activité (données pour la Flandre)

Mal-être psychologique Graves problèmes mentaux Problèmes dépressifs Anxiété Troubles du sommeil
Revenu
Pauvres Non significatif Non significatif 10,8% 9,0% Non significatif
Non pauvres Non significatif Non significatif 6,8% 5,3% Non significatif
Activité
Au travail 19,8% 9,5% 4,5% 3,5% 16,2%
Chômeur 30,7% 18,9% 15,3% 10,9% 24,5%
Malade ou invalide 49,7% 37,9% 37,5% 26,5% 48,4%

Source: Enquêtes de santé 2001-2004 (De Boyser 2007).

Le réseau social
Quand on parle de réseau social, on distingue l’aspect structurel de l’aspect fonctionnel. La structure d’un réseau social réfère à un facteur quantitatif: le nombre de personnes que connaît une personne, la fréquence des contacts qu’elle entretient avec celles-ci, et le type de personnes qu’elle connaît. L’aspect fonctionnel réfère davantage à un facteur qualitatif: le soutien social (matériel et moral) qu’une personne peut espérer mobiliser au sein de son réseau (De Boyser et Levecque, 2007).
Outre le fait d’être davantage sujet à des problèmes psychologiques, «(…) les personnes de faible statut socio économique semblent avoir un réseau social moins important et une moindre possibilité de faire appel à un soutien social . Cela a un impact sur la santé parce que le réseau et le soutien social sont des éléments cruciaux dans la gestion des facteurs de stress .» (Willems, 2007).
De Boyser et Levecque (2007) ont, pour la Belgique, étudié le lien entre statut socio-économique et réseau social, dans ses dimensions structurelles et fonctionnelles. Du point de vue de l’étendue du réseau social et de la fréquence des contacts, elles ont observé qu’il n’y a pas de différences significatives au dessus et en dessous du seuil de pauvreté.

Tableau 4 – Différences dans le soutien social, selon le revenu par rapport au seuil de pauvreté

Non pauvres Pauvres
Ne peut pas compter sur l’aide de l’entourage ou de la famille en cas de problèmes 5,5% 8,5%
Sentiments de solitude 8,8% 13,1%
Manque de soutien matériel
Rester à son chevet 18,1% 25,5%
Aider pour préparer les repas en cas de maladie 13,3% 16,7%
Manque de soutien affectif
de quelqu’un qui tient à vous et à qui vous tenez 11,6% 16,2%
de quelqu’un qui peut vous câliner 19,0% 25,6%
Manque de soutien émotionnel
Discuter 10,7% 18,8%
Confier ses problèmes intimes et ses angoisses 16,0% 22,7%
Avoir des bons conseils 11,4% 16,8%
Manque d’interaction sociale positive
Passer de bons moments 8,3% 14,1%
Se détendre 11,7% 19,0%

Source: Enquête de santé 2001 (De Boyser et Levecque 2007).

Il n’en est pas de même pour ce qui est de la qualité du réseau social, où on observe des différences significatives entre pauvres et non pauvres. De manière générale, on observe que les personnes vivant sous le seuil de pauvreté peuvent moins compter sur leur entourage en cas de problèmes et ont davantage de sentiments de solitude que les personnes au dessus de ce seuil. Elles ont également moins de chance d’avoir un soutien matériel et moral de qualité, ainsi que des relations sociales positives (tableau 4).
L’empowerment
Le degré d’ «empowerment» (littéralement le fait d’acquérir et d’avoir un certain pouvoir) fait référence au degré de contrôle qu’un individu a dans la gestion de sa vie au quotidien, à l’étendue de sa liberté quant aux choix qu’il doit faire (étudier plutôt que travailler, avoir une certaine autonomie dans la gestion de ses tâches professionnelles ainsi que par rapport à ses collègues, etc.).
Selon Marmot (2006), il existe un lien entre «empowerment», situation socio-économique et santé: les conditions sociales d’un individu déterminent positivement son degré de liberté et d’autonomie, qui lui-même a une influence positive sur son état de santé.
Ceci a été mis en évidence dans l’étude britannique «Whitehall II». Elle montre que plus on descend dans la hiérarchie professionnelle, plus le risque d’infarctus et d’autres affections est élevé. Deux modèles explicatifs ont été mis en évidence:
-le degré de contrôle de la demande : ce modèle met en évidence le fait que le stress au travail (qui a un impact sur l’état de santé d’un individu) est moins causé par l’ampleur du travail que par le degré d’autonomie qu’un individu a dans la gestion des différentes tâches qui lui sont attribuées;
-le degré de reconnaissance sociale : le déséquilibre entre efforts consentis et reconnaissance a une influence sur le niveau de stress.
Les travailleurs dans le bas de l’échelle professionnelle, de par leur manque de contrôle de la demande et de reconnaissance, auraient un risque d’infarctus et d’autres affections plus important.
L’étude Whitehall II met également en évidence que le degré de contrôle d’un individu n’est pas uniquement déterminé par son cadre professionnel. Elle montre par exemple que les femmes qui ont moins d’autonomie et de liberté dans la gestion du ménage ont un risque d’infarctus plus élevé que les femmes avec davantage de contrôle. Ceci est également confirmé pour les maladies mentales.
En se basant sur la hiérarchie sociale et pas seulement professionnelle, Wilkinson (dans Lynch et al., 2000) fait les mêmes observations. Il démontre que les inégalités de revenus affectent la santé au travers des perceptions liées à la position relative dans la hiérarchie sociale. Ces perceptions produisent des ressentiments négatifs, tels que la honte et la méfiance, qui engendrent des comportements négatifs pour la santé, mais également des comportements qui ont indirectement un impact néfaste sur la santé (comportements antisociaux, manque de participation civique, ce qui implique une carence en capital social et en cohésion au sein de la société).
Déterminants culturels
« Des études épidémiologiques ont démontré de manière convaincante que le comportement individuel relatif à la consommation de tabac , à l’activité physique , aux habitudes alimentaires , à l’utilisation des structures de soins de santé préventives et à d’autres activités sont en étroite relation avec la santé et la maladie . (…) Différentes études ont montré que les groupes socio économiques bas présentent un profil de risque plus important .» (Willems, 2007).
L’enquête de santé de 2004 a clairement montré le lien entre style de vie à risque et position socio-économique (Vancorenland, 2006).
En règle générale, les personnes moins qualifiées ont un style de vie moins sain. Elles mangent généralement de manière moins saine (moins de légumes, de fruits, de poisson et de pain gris) et présentent davantage de surpoids et d’obésité (tableau 5).
Les jeunes issus d’une famille peu qualifiée ont également plus de problèmes de surpoids. En outre, les personnes moins qualifiées et en surcharge pondérale s’en préoccupent moins que les personnes qualifiées et entreprennent donc moins d’actions pour changer leur situation.

Tableau 5 – Différences de style de vie selon le niveau de formation: alimentation

Surpoids Surpoids Consommation insuffisante de… Consommation insuffisante de… Consommation insuffisante de… Consommation insuffisante de…
Présent Pas préoccupé Légumes Fruits Pain gris Poisson
Primaire ou sans diplôme 55% 53% 21% 44% 53% 37%
Secondaire inférieur 48% 49% 18% 45% 49% 43%
Secondaire supérieur 47% 40% 15% 46% 51% 41%
Enseignement supérieur 36% 38% 12% 35% 42% 32%
TOTAL 44% 42% 15% 41% 47% 37%

Source: Enquête de santé 2004 (Vancorenland S. 2006).

La consommation de tabac est également fortement dépendante du niveau de formation. On trouve plus de fumeurs parmi les gens moins qualifiés. Ils ont également commencé à fumer plus tôt, fument davantage et sont plus dépendants du tabac. Pour les comportements alimentaires et tabagiques, c’est surtout le groupe avec une qualification élevée qui se distingue favorablement des autres groupes (tableau 6).

Tableau 6 – Différences de style de vie selon le niveau de formation: tabagisme

% fumeurs Age de début Nombre de cigarettes % gros fumeurs
Primaire ou sans diplôme 27% 16,6 ans 18,5 12%
Secondaire inférieur 31% 17,1 ans 18,3 13%
Secondaire supérieur 31% 17,2 ans 17,6 12%
Enseignement supérieur 23% 17,9 ans 15 7%
TOTAL !28% 17,3 ans 17,1 10%

Source: Enquête de santé 2004 (Vancorenland S. 2006).

Au niveau du comportement sexuel, les personnes moins qualifiées appartenant au groupe à risque (sexuellement actif sans relation fixe) utilisent nettement moins souvent le préservatif comme moyen de protection contre les MST que les gens qualifiés issu du même groupe à risque. De plus, ils connaissent moins bien le sida (transmission, protection et gravité) et se soumettent moins souvent à un test VIH.
Un dernier élément intéressant à mentionner concerne la santé buccale et les soins dentaires. De manière générale, on observe que les gens moins qualifiés montrent une image nettement moins favorable que les gens qualifiés. Souvent, les gens moins qualifiés n’ont plus d’éléments masticateurs, ont davantage de problèmes de mastication, se brossent moins souvent les dents et vont moins souvent chez le dentiste (tableau 7).

Tableau 7 – Différences dans la santé buccale et les soins dentaires, selon le niveau de formation

Plus d’éléments masticateurs naturels Prothèse dentaire Difficultés à mâcher les aliments durs Se brosse les dents 2 x par jour Contrôle régulier chez le dentiste
Primaire ou sans diplôme 36% 56,7% 32,9% 38,3% 34,1%
Secondaire inférieur 23% 49,5% 21,2% 43,9% 41,7%
Secondaire supérieur 10,8% 35,8% 12,2% 49,4% 49,5%
Enseignement supérieur 5% 26% 5,3% 55,9% 56,2%
TOTAL 14,5% 37,7% 14,3% 50,3% 49,1%

Source: Enquête de santé 2004 (Vancorenland S. 2006).

Comment expliquer ces différences de comportements? Beaucoup d’éléments explicatifs déjà présentés ci-dessus peuvent en partie nous aider à mieux comprendre ces différences de comportements et de styles de vie. Par exemple, les conditions matérielles et les conditions psychosociales, qui ont un impact sur le stress, peuvent indirectement influencer les bonnes ou mauvaises pratiques en matière de tabagisme.
D’autres facteurs plutôt de type identitaire peuvent être avancés. Dans les milieux défavorisés, « sans que l’on puisse généraliser , le corps est moins un objet de valorisation et donc moins un objet de soins et de précautions . Il est un outil qui doit résister au travail . Les affections , la fatigue sont courantes et donc considérées comme normales . L’horizon temporel davantage axé sur le présent pour cause de précarité ou de niveau de formation générale , n’incite guère à projeter dans le futur les conséquences de comportements risqués et de problèmes de santé révélés par des symptômes ressentis » (Avalosse et Feltesse, 1997).
D’autres éléments encore peuvent être à l’origine de ces inégalités de comportements: un manque d’information, par exemple, concernant les conséquences néfastes du tabac, l’utilisation correcte des moyens contraceptifs ou encore la préparation d’un repas sain et équilibré. Ce manque d’information peut être en partie lié aux campagnes de prévention pas suffisamment axées sur les groupes socio-économiques défavorisés (Willems, 2007).

Conclusion

Certes, l’accès financier aux soins de santé n’est pas le même pour tous les groupes socio-économiques, et peut dès lors en partie expliquer les différences en termes de santé qu’on observe entre ceux-ci. Cependant, sur la base de la revue de la littérature quant aux déterminants des inégalités de santé, il apparaît que la problématique de l’accessibilité financière aux soins n’est qu’un élément parmi beaucoup d’autres.
De manière prépondérante, la situation socio-économique d’un individu – dont les indicateurs principalement utilisés sont le niveau de formation, de revenu et la catégorie socioprofessionnelle – a, en soi, un impact sur son état de santé, ceci par le biais de différents facteurs, tant structurels que culturels.
Si les éléments explicatifs des inégalités de santé, tels que détaillés dans cet article, font l’objet d’un consensus, c’est moins le cas quant à la part de l’impact de chaque facteur. A ce jour, peu d’études donnent des chiffres quant à l’effet relatif de tel ou tel facteur sur l’état de santé. Au vu des différents facteurs présentés ci-dessus, il paraît en effet extrêmement complexe de différencier l’effet relatif de chaque facteur, dans la mesure où ces facteurs sont en interaction les uns avec les autres. C’est ce qui fait sans doute toute la complexité de la mise en place de politiques efficaces quant à la diminution des inégalités de santé.
Malgré la difficulté de la tâche, il est essentiel de prendre des mesures qui ne soient pas uniquement centrées sur le domaine de la santé, mais davantage transversales: améliorer l’accès à l’enseignement, diminuer l’analphabétisme, diminuer les inégalités de revenus (notamment en augmentant les allocations et revenus minimums), améliorer la sécurité et le cadre de vie dans les logements et les quartiers les plus précarisés, impliquer davantage les personnes dans la gestion de leur vie quotidienne, au travail ou au niveau de leur quartier, de leur commune, etc. La diminution des inégalités de santé passe par l’amélioration de tous ces éléments, et c’est sans doute le défi majeur auquel sera confrontée notre société demain. Il s’agit d’une approche intégrée, et solidement ancrée dans la situation locale particulière. En tant que mutualité, nous devons nous inscrire de manière volontariste dans cet effort sociétal pour réduire les écarts en matière de santé. Outre notre préoccupation traditionnelle pour un accès égal aux soins, battons-nous aussi pour réduire l’inégalité en termes de besoins.
Olivier Gillis , Raf Mertens , Département Recherche et Développement de l’ANMC
Cet article a été publié initialement dans MC-Informations – Analyses et points de vue, périodique trimestriel de l’Alliance nationale des mutualités chrétiennes, n° 231, mars 2008. Il est reproduit avec son aimable autorisation.
La même revue a publié dans son numéro 232 (juin 2008) ‘Mesures concrètes de réduction des inégalités de santé: quelques exemples européens’, des mêmes auteurs Olivier Gillis et Raf Mertens. Vous pouvez télécharger ce texte à l’adresse https://www.mc.be/fr/135/info_et_actualite/mc_informations/mc_info_mars_2008/inegalite_sociale/index.jsp?ComponentId=43882&SourcePageId;=44115 (document de 12 pages (113 Ko).
La Mutualité chrétienne vient aussi de réaliser une étude sur les inégalités sociales de santé en Belgique au départ des données de consommation de soins de tous ses affiliés (environ 4.500.000 de personnes). Nous vous en reparlerons prochainement.

(1) La pauvreté est ici définie – à partir d’une série d’indicateurs – comme «la non-réalisation d’un niveau de standard de vie, dans le sens d’un manque «imposé», lié à des moyens économiques insuffisants» (Raeymaeckers et Dewilde, 2007).
(2) Le seuil de pauvreté est le niveau en dessous duquel un individu est considéré comme pauvre. Il est fixé à 60 % du revenu médian (De Boyser, 2007).

Bibliographie

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Dix ans d’observation des comportements alimentaires des jeunes en Hainaut

Le 30 Déc 20

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Un peu d’histoire

En 1997, grâce au programme européen Interreg II, une enquête transfrontalière sur la santé des jeunes était réalisée dans la province du Hainaut et le département de l’Aisne. Cette enquête a permis de mettre en évidence l’importance du problème de l’excès de poids dans la population des 10-16 ans grâce à des mesures effectuées dans des conditions standardisées. L’enquête a aussi montré la présence non négligeable d’autres facteurs de risque pour les maladies cardio-vasculaires et d’autres maladies chroniques, facteurs tant comportementaux (sédentarité, alimentation, consommation d’alcool ou tabac) que biologiques (cholestérol) ou biométriques (hypertension artérielle).
Enfin, il est apparu de façon non équivoque que les inégalités de santé mesurées pour ces différents facteurs s’installent très tôt. Dans le décours de cette enquête, une collaboration fructueuse a été mise en place entre l’Observatoire de santé du Hainaut (OSH) et les centres de santé scolaire de l’ensemble des réseaux d’enseignement (centres PSE et PMS). Grâce à un réseau international pour la santé du cœur, les résultats du Hainaut de 1997 ont aussi pu être comparés à ceux de 3 autres régions outre le département de l’Aisne: le canton de Vaud (Suisse), le Québec et la région de Sousse (Tunisie).
Devant l’ampleur des phénomènes observés, l’OSH a souhaité poursuivre la surveillance épidémiologique. En collaboration avec une dizaine de centres de santé scolaire partenaires, un réseau des centres de santé scolaire vigies a été mis sur pied. L’idée était de réaliser des enquêtes périodiques sur les comportements de santé, couplées à des mesures objectives lors des visites médicales obligatoires en 6e primaire, 2e secondaire et 4e 5e secondaire.
Un quota de 400 élèves par groupe d’âge est interrogé, pesé et mesuré. L’échantillon est représentatif de la population (sexe, filières scolaires, réseaux d’enseignement et arrondissements de scolarisation). La possibilité de coupler les mesures objectives aux déclarations sur les comportements en répétant l’opération tous les ans ou tous les deux ans est unique à ce jour en Communauté française.
A côté des données de surveillance épidémiologique, chaque enquête fait l’objet d’une recherche thématique dont les résultats sont destinés à alimenter les activités de promotion de la santé. Ainsi, des enquêtes dont le thème de recherche était les assuétudes, le bien-être, la vie affective, la santé buccodentaire, l’asthme et les allergies ont déjà été menées. Cette année, le thème de recherche porte sur la consommation d’alcool et les représentations liées à cette consommation.

Ce qui nous pousse à réaliser une surveillance continue de la santé

L’épidémie d’obésité et d’excès de poids est alarmante. L’excès de poids constitue en soi un facteur de risque pour les maladies cardio-vasculaires et pour d’autres types d’affections chroniques (diabète, cancer, affections ostéoarticulaires, estime de soi et dépression etc.)
L’excès de poids est la pointe visible d’un iceberg. D’autres facteurs de risque comme l’hypertension artérielle et l’hypercholestérolémie sont également présents dès le plus jeune âge. Et c’est aussi dès le plus jeune âge que les comportements défavorables à la santé (alimentation de mauvaise qualité, activité physique insuffisante, consommations excessives de produits comme le tabac, l’alcool ou les autres substances psycho-actives) commencent à produire leurs effets.
L’ensemble des facteurs de risque pour la santé ne sont pas distribués aléatoirement dans la population: il existe un gradient socio-économique défavorable. Les inégalités sociales de santé sont déjà présentes chez les enfants.
En luttant contre les inégalités sociales et en améliorant les comportements alimentaires, en augmentant la pratique de l’activité physique et en réduisant la consommation de produits nocifs, on agit sur les facteurs de risque de la plupart des maladies chroniques.

Les résultats

L’épidémie d’excès de poids semble se stabiliser peu à peu mais à un niveau qui reste inacceptable. En effet, entre 1997 et 2006, on n’observe quasi pas d’augmentation de la proportion des jeunes touchés par ce fléau. Globalement, un quart des jeunes souffre d’excès de poids et parmi eux, environ un quart à un tiers présente une obésité franche.
Après une aggravation des comportements non favorables à la santé depuis 1997, on voit une stabilisation voire une amélioration progressive de la qualité de l’alimentation.
Cependant, 15% des jeunes de 10 ans, 25% des jeunes de 13 ans et près de 30% des jeunes de 16 ans ne prennent toujours pas de petit déjeuner, compromettant par là même leurs rythmes alimentaires pour toute la journée. Les jeunes qui ne prennent pas de petit déjeuner sont aussi plus nombreux que les autres à ne pas prendre de goûter et à consommer des produits sucrés et gras à toutes les pauses et ce, d’autant plus qu’ils peuvent s’approvisionner dans leur environnement immédiat.

Les recommandations au quotidien pour une alimentation saine des élèves

Pour tous
Prendre un vrai petit déjeuner, avec le moins de sucre raffiné possible;
Goûter pour éviter les fringales de 18h;
Boire de l’eau: 5 moments d’hydratation par jour, par exemple avant de sortir en récréation;
Eviter la consommation de calories vides (sans autre apport nutritif) surtout sous forme liquide;
Consommer fruits et légumes;
Consommer des fruits secs pour emporter des omégas 3;
Apprendre le respect de la différence: les quolibets et remarques sont les plus grands facteurs de risque de développer une vraie obésité ou des troubles du comportement alimentaire de type anorexie ou boulimie;
Stimuler les partenariats: écoles, parents, associations…
Pour les plus jeunes
Mettre en lien l’offre alimentaire à l’école et le contenu de l’éducation nutritionnelle: eau de distribution disponible facilement, pas de vente ou de distribution de produits gras et/ou sucrés;
Lutter contre la sédentarité: garderies actives.
Pour les aînés
Insister sur le petit déjeuner;
Repérer les jeunes qui sautent des repas, qui sont en souffrance avec leur poids;
Se rappeler que bière et alcool sont des grands pourvoyeurs de calories.

La consommation de fruits et légumes, qui constitue un des indicateurs les plus valides de la qualité de l’alimentation, connaît un sursaut favorable. Toutefois en 2005, seuls 4 garçons sur 10 et 5 filles sur 10 déclaraient consommer des légumes au moins six fois par semaine. Pour les fruits, après un sursaut en 2004 peut-être en partie lié à une méthode d’enquête un peu différente, les chiffres sont encore moins favorables puisque seuls 3 garçons sur 10 et 4 filles sur 10 ont déclaré manger un fruit frais au moins six fois par semaine. Rappelons que les recommandations du PNNS sont de consommer chaque jour 5 portions de fruits et légumes, on est donc ici très loin du compte.
Parmi les jeunes qui prennent des sodas chaque jour, la moitié seulement déclare boire de l’eau chaque jour.
La sédentarité quant à elle continue à s’aggraver. Trois quarts des jeunes de 10 ans regardent la télévision au moins deux fois par jour (le matin et le soir, l’après quatre-heure et le soir…) sans compter les heures passées devant les consoles de jeux ou les GSM.
La consommation de tabac par contre a nettement diminué. Elle résulte d’un ensemble combiné d’efforts portant sur plusieurs tableaux: éducation à la santé bien sûr mais aussi législation sur le tabac et augmentation des prix. Cette approche multifactorielle a été essentielle dans les progrès observés
Cette conjonction d’efforts n’existe pas encore vraiment dans le champ de l’alimentation où les jeunes sont soumis à des tentations énormes en totale contradiction avec les recommandations de santé publique.
Enfin, notons que par rapport à l’ensemble des symptômes observés et des comportements de santé défavorables, le gradient socio-économique défavorable persiste. Luc Berghmans et Véronique Tellier , Observatoire de la Santé du Hainaut
Adresse des auteurs: Observatoire de la Santé du Hainaut, rue St Antoine 1, 7021 Havré
Tél.: 065 87 96 00. Fax: 065 87 96 79.
Cet article a fait l’objet d’une présentation à l’occasion de la journée ‘Manger et bouger à l’école’ qui s’est tenue à Bruxelles le 30 janvier 2008.

Les inégalités socio-économiques de santé

Le 30 Déc 20

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A l’occasion du 3e Colloque international des programmes locaux et régionaux de santé, qui s’est tenu à Mons en avril dernier, Michel Roland, médecin généraliste à la Maison Médicale Santé Plurielle (Saint-Gilles à Bruxelles), a montré les relations qui existent entre les inégalités socio-économiques et l’état de santé des individus, tout en apportant des éléments d’explication susceptibles de nous donner des pistes de réflexion.
Se situant dans le domaine des soins curatifs et individuels, avec une approche relationnelle importante du patient, le Dr Michel Roland témoigne aussi d’une volonté d’approche collective en politique de la santé. « Mon exposé est un exemple de ce genre d’approche car il part des individus et de leurs maladies prises l’une après l’autre , explique le généraliste. Si on s’élève au dessus des cas individuels et que l’on se place d’un point de vue collectif et de santé publique , on se rend compte que ce n’est pas un hasard si Monsieur X souffre de telle maladie et Madame Y de telle autre dans les conditions socio économiques belges actuelles . Cela signifie qu’il existe des déterminants non médicaux de la santé
Parmi ces déterminants, les inégalités sociales entraînent des inégalités de santé. « Les plus défavorisés seront toujours les plus malades et mourront plus vite . Aussi retrouve t on certaines maladies parmi les populations défavorisées , comme par exemple la tuberculose qui connaît une nette recrudescence parmi les populations immunodéprimées ou paupérisées
Et pourtant, souligne Michel Roland, « la population des pays industrialisés n’a jamais été en aussi bonne santé’ : les maladies infectieuses qui , il y a 100 ans étaient une cause majeure de mortalité , sont aujourd’hui sous contrôle . A l’exception du sida et de l’apparition d’affections nouvelles tel le SARS ( Syndrome Respiratoire Aigu Sévère ), ou de la persistance d’affections anciennes , comme la tuberculose , les maladies infectieuses ne sont plus considérées chez nous comme dangereuses en terme de santé publique
Dans le même sens, l’accroissement de l’espérance de vie au cours de la dernière décennie s’est confirmé dans tous les pays européens. « Mais les différentes classes sociales ne bénéficient pas , dans une même mesure , des avancées globales en matière de santé et d’espérance de vie », analyse Michel Roland. En effet, les personnes issues des classes socio-économiques élevées – possédant un diplôme d’études supérieures, ayant un revenu élevé et vivant dans des quartiers prospères – vivent plus longtemps et sont en meilleure santé que les personnes appartenant aux classes socio-économiques basses. « Les inégalités socio économiques de santé ne se résument cependant pas à une simple différence entre la classe la plus haute et la classe la plus basse . Il a effectivement été démontré que l’état de santé connaît une gradation : à chaque fois qu’un individu gravit un échelon de l’échelle sociale , il réduit son risque de maladie et de mort prématurée

Mortalité, espérance de vie et risques de décès

La différence de mortalité selon la profession, les revenus ou le niveau d’éducation constitue un phénomène général dans les pays industrialisés. « Quels que soient le pays , les méthodes ou les outils de recherche utilisés , il est prouvé que les personnes issues d’une strate sociale moins privilégiée ont une espérance de vie moindre que celles issues des strates plus privilégiées
En Belgique également les risques de décès, des hommes comme des femmes, dépendent de leur niveau d’éducation, de leur statut professionnel et de la qualité de leur logement. Ainsi, relève Michel Roland, « l’espérance de vie d’un homme de 25 ans sans diplôme est inférieure de 5 , 5 années à celle d’un homme du même âge titulaire d’un diplôme de l’enseignement supérieur de type long . A l’âge de 45 ans , la différence entre ces deux catégories a un peu diminué à 4 , 4 ans . Parmi les femmes de 25 ans , l’espérance de vie de celles qui ne possèdent pas de diplôme est inférieure de 3 , 5 ans par rapport aux femmes diplômées . A 45 ans , cette différence est encore de 3 , 1 ans
En ce qui concerne le risque de décès, le fossé socio-économique se réduit progressivement au fil des classes d’âge. Cela montre que la différence de risque de décès entre les classes socio-économiques hautes et basses se réduit au fur et à mesure que l’âge des individus augmente. « Ceci dit , une différence existera toujours . A titre d’exemple , les hommes belges qui louaient un logement entre 1991 et 1995 présentaient un risque de décès plus élevé que ceux du même âge qui étaient propriétaires de leur logement . Ce risque accru de mortalité pour les personnes de statut socio économique faible , mesuré par la location / propriété du logement diminue au fil des âges , mais reste présent dans toutes les catégories d’âge

La mortalité spécifique

Si les inégalités sociales en matière d’espérance de vie se retrouvent dans tous les pays d’Europe, les causes de mortalité dues à ces inégalités ne sont pas identiques dans notre continent. « En Belgique , les inégalités socio économiques en matière de mortalité spécifique sont constatées pour les maladies sur lesquelles la prévention a un impact important . Il s’agit notamment de la cirrhose du foie , du cancer de l’intestin , du suicide et des accidents . Par exemple , les cirrhoses du foie sont 2 , 13 fois plus diagnostiquées dans les quartiers socio économiquement défavorisés que dans les quartiers plus aisés
A noter également que les maladies ischémiques (1), responsables de 2,7 millions de décès par an dans les pays industrialisés, apportent un tribut important aux inégalités socio-économiques en matière d’espérance de vie et de mortalité en Europe. « En Belgique , les hommes et les femmes d’âge moyen et ayant un faible niveau d’éducation courent respectivement 1 , 41 et 1 , 84 fois plus de risques de mourir d’une maladie ischémique que ceux ayant un niveau d’éducation plus élevé

Inégalités sociales dans le déroulement des maladies

Les inégalités socio-économiques se retrouvent également dans les chances de survie selon les types de maladies. On constate ainsi que les chances de survie après un cancer, une maladie cardiaque ou une infection VIH sont meilleures parmi les personnes qui se trouvent en haut de l’échelle sociale. « Cette différence peut , d’une part , s’expliquer par le fait que le diagnostic des maladies est posé plus tôt dans la population des classes socio économiques aisées . D’autre part , les campagnes de prévention ne touchent pas de la même manière les différentes classes sociales : bien qu’elles s’adressent à toutes les classes de la population , elles atteignent souvent uniquement les classes les plus élevées . A cet égard , la campagne de dépistage du cancer du sein constitue un bel exemple : ce sont principalement les femmes issues des classes socio économiques privilégiées qui réagissent aux lettres de convocation pourtant envoyées à toutes les femmes de la classe d’âge concernée ( 50 69 ans ) en Belgique . A titre d’exemple , à l’occasion de la campagne en faveur du mammotest , le pourcentage de dépistage a augmenté de 39 % chez les femmes ayant un emploi contre seulement 23 % chez les femmes au chômage
Enfin, l’utilisation des soins de santé curatifs joue également un rôle dans les inégalités sociales de santé. « L’accès aux services de soins de santé en général et aux services spécialisés comme la chirurgie de pontage coronarien et l’angiographie en particulier comporte beaucoup plus de barrières pour les patients ayant un statut socio économique faible que pour ceux ayant un statut élevé

Inégalités sociales dans l’apparition de la maladie

Les hommes âgés de 25 ans ont en moyenne une espérance de vie en bonne santé de 37,5 ans. Chez les hommes ayant un faible niveau d’éducation, l’espérance de vie en bonne santé est de 28,1 ans tandis que pour ceux possédant un diplôme de l’enseignement supérieur de type long, elle est de 45,9 ans, soit une différence énorme de 17,8 ans. Cette différence est encore plus importante, de l’ordre de 24,7 années pour les femmes âgées de 25 ans.
Les inégalités socio-économiques de santé se manifestent donc, non seulement, en termes d’années à vivre, mais également et encore plus en termes d’années à vivre en bonne santé.
La plupart des affections sont plus fréquentes parmi les classes socio-économiques faibles: maladies coronariennes, cancers liés au tabagisme, problèmes de santé psychique, diabètes de type 1, affections dentaires, lombalgies, etc.
« En Belgique , l’Enquête nationale de santé par interview révèle que les personnes de faible statut socio économique disent souffrir de plus de maladies chroniques , avoir plus de difficultés liées à un handicap de longue durée et plus de risques de handicap de courte durée . Elles ont une image moins positive de leur état de santé actuel et de leur état de santé psychique que les personnes ayant un statut socio économique supérieur . A titre d’exemple , 60 , 2 % des personnes issues du groupe socio économique faible se considèrent en bonne ou en très bonne santé , alors que cette proportion est de 86 , 5 % dans le groupe ayant le niveau d’éducation le plus élevé . De même , les personnes d’un statut inférieur rapportent en moyenne 1 , 71 maladie chronique contre 0 , 98 maladie rapportée par les personnes ayant un statut plus élevé
Les différences socio-économiques en terme de morbidité se manifestent aussi dès le plus jeune âge. En 1995, les enfants ayant leurs deux parents chômeurs couraient un risque 1,58 fois supérieur de naître avec un petit poids par rapport aux enfants dont au moins un des parents travaillait. Cette première catégorie d’enfants courait également 1,4 fois plus de risque de naissance prématurée. Ces deux risques s’élevaient respectivement à 1,64 et 1,33 pour les mères non mariées par rapport aux mères mariées.

Modèles explicatifs

« De nombreuses théories existent quant aux mécanismes qui sous tendent la relation entre les inégalités sociales et les différences de statuts socio économiques , poursuit Michel Roland. La compréhension de ces mécanismes représente une plus value importante d’un point de vue pratique , notamment pour le développement d’une stratégie efficace de promotion de la santé . Deux types d’explication des différences en matière de santé , de morbidité et de mortalité peuvent être distingués : le modèle basé sur les mécanismes de mobilité sociale sélective et le modèle explicatif de la cause sociale

La mobilité sociale sélective

Selon ce modèle, les inégalités socio-économiques de santé naissent par une sélection en matière de santé au cours de la mobilité sociale. Cela signifie qu’elles sont liées au fait de monter ou de descendre d’une classe sur l’échelle sociale. La mobilité sociale peut se produire entre deux générations ou au sein d’une même génération. Elle peut être directe ou indirecte.
Dans le cas de la sélection directe , la mobilité sociale est la conséquence directe d’un bon ou d’un mauvais état de santé. Les personnes souffrant d’un état de santé moins bon descendent sur l’échelle sociale tandis que celles en meilleure santé ont une mobilité sociale ascendante. Cela a pour effet une concentration de personnes présentant plus de problèmes de santé dans les catégories socio-économiques les plus faibles et, par conséquent, un risque de décès plus élevé dans ces catégories.
Dans le modèle de la sélection indirecte , les facteurs qui causent la mobilité sociale descendante ou ascendante influencent également l’état de santé à long terme d’un individu. Ces facteurs sont donc la cause de la mobilité sociale descendante et de la morbidité à un âge plus avancé. « Par exemple , l’attitude d’une personne face à l’avenir peut influencer sa décision de s’investir ou non dans une formation professionnelle et , par là , concourir à une mobilité sociale descendante ou ascendante . De même , une attitude favorable face à l’avenir peut influencer le comportement en matière de santé ( pratique de l’exercice physique , régime alimentaire , consommation de tabac ou d’alcool ), ce qui se répercutera sur la santé , la morbidité et la mortalité . L’état de santé et le statut socio économique peuvent donc être reliés via certains facteurs communautaires ( déterminants ) comme , par exemple , une certaine perception face à l’avenir

Les causalités sociales

Selon ce modèle, la situation socio-économique d’un individu influence son état de santé. Cette influence ne s’exerce pas directement mais par l’intermédiaire de divers facteurs.
Deux angles d’approche peuvent être distingués. Le premier se concentre sur les conditions de vie et est souvent appelé «facteur structurel». Le second étudie l’influence du savoir, des attitudes, des valeurs, des comportements et du style de vie sur la santé: il est habituellement dénommé «facteur culturel».

Comportements associés à la santé et style de vie: un choix individuel?

Il est souvent supposé que le comportement et le style de vie d’un individu relèvent d’un choix personnel. Pourtant, précise le Dr Roland, « un comportement est aussi la résultante du contexte social dans lequel un individu a grandi et vit . Les différences de comportement ne peuvent donc pas être entièrement attribuées à un choix exercé librement mais trouvent leur origine dans le contexte social . Les habitudes alimentaires sont par exemple développées en majeure partie pendant l’enfance et l’adolescence . Ce qu’une personne mange ne dépend pas seulement de ses connaissances en matière de nourriture mais aussi de la nourriture disponible à la cantine ou de ses moyens financiers pour se procurer une nourriture saine . Il en va de même pour l’abonnement à un club de sport qui suppose qu’il n’y ait pas d’empêchement financier ou culturel
Dans le même sens, les comportements qui semblent irrationnels ne sont parfois qu’un moyen permettant d’adoucir l’impact de l’environnement social. C’est par exemple le cas des personnes qui se réfugient dans l’alcool pour échapper aux problèmes quotidiens.
Michel Roland souligne encore un élément important concernant le fonctionnement et l’impact des campagnes de prévention: « Si ces campagnes tentent d’intervenir sur les connaissances , attitudes , valeurs et normes dans l’espoir de modifier les comportements , elles sont malgré tout souvent inadéquates parce qu’elles ne tiennent pas compte des conditions de vie des groupes socio économiques les plus faibles . En conséquence , elles n’ont généralement que très peu d’influence sur ces groupes

Les services de soins de santé face aux inégalités socio-économiques

La recherche relative aux structures de soins de santé peut aussi bien être entreprise à travers les études qui traitent des comportements et du style de vie qu’à travers celles qui se concentrent sur les conditions de vie et les facteurs structurels. L’utilisation des services de santé présuppose toujours un certain comportement mais dépend aussi de facteurs structurels comme l’accessibilité et la qualité des services proposés.
« De nombreuses recherches ont démontré que le statut socio économique est lié à l’utilisation différentielle des services de soins , explique Michel Roland. En règle générale , les personnes ayant un faible statut socio économique ont une utilisation quantitativement plus importante des services de santé . Mais si les besoins différentiels sont pris en compte , cette conclusion est moins univoque . En d’autres termes , si l’utilisation des services de soins de santé est comparée uniquement entre des individus ayant des besoins de soins comparables , la différence de l’utilisation quantitative des soins de santé en fonction de la position socio économique n’est plus aussi marquée . Les études montrent souvent mais pas toujours qu’après un ajustement selon l’état de santé , les personnes de faible statut sont plus enclines à consulter un généraliste tandis que les personnes de statut élevé auront plus de contact avec les médecins spécialistes
En outre, même s’il n’y a pas de différence en termes quantitatifs, il peut y avoir des différences en termes de qualité des soins reçus. « Une étude fait ainsi apparaître que les médecins généralistes consacrent moins de temps à leurs patients issus des groupes socio économiques faibles
De même, l’utilisation des services de santé préventive est généralement moindre dans les groupes de faible statut par rapport aux groupes de statut socio-économique élevé. « Des chercheurs espagnols sont arrivés à la conclusion que les enfants des familles à revenus modestes ou avec un niveau d’instruction faible utilisent moins les services de santé préventifs malgré le fait que ces services soient gratuits . En Flandre , ce sont principalement les femmes ayant un haut niveau d’éducation qui bénéficient du dépistage des cancers de l’utérus . La participation aux actions de prévention du cancer du sein à Gand est faible dans les quartiers à problèmes caractérisés par un taux d’inactivité important et un haut pourcentage de bénéficiaires du CPAS

Des actions adaptées aux populations défavorisées

La vraie solution aux inégalités sociales de santé serait bien évidemment de les diminuer, tout simplement… « Cela exige un changement de société , ce qui relève de l’utopie », constate le Dr Roland.
Que faire alors? « Quelles que soient les mesures prises , il faut toujours veiller à ce qu’elles s’appliquent de préférence aux populations défavorisées . Si tel n’est pas le cas , les mesures prises ne feront qu’augmenter les inégalités . Des actions spécifiques doivent donc être élaborées et appliquées de manière à toucher les personnes qui en ont le plus besoin
Colette Barbier

(1) Ce terme désigne toutes les affections du coeur déterminées par des lésions ou un fonctionnement inefficace du muscle cardiaque, consécutives à un arrêt ou à une réduction relative de l’irrigation sanguine et généralement liées à l’athérosclérose. Ce terme s’applique aussi bien à l’angine de poitrine et à l’infarctus aigu du myocarde qu’à la maladie ischémique chronique et à la mort subite.

Mangez sain, bougez bien! Quand l’industrie alimentaire nous fait la leçon…

Le 30 Déc 20

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On le sait: pour éviter l’obésité, il n’y a pas de miracle. Il faut, pour faire simple, adapter ses apports caloriques à ses dépenses. Et pour nous y aider, l’industrie agro-alimentaire, le COIB et Nubel ont mis le paquet, en lançant une grande opération marketing: «Happy Body». Mais on se pose tout de même la question: pourquoi ces partenaires du Plan national nutrition santé font-ils cavaliers seuls pour, théoriquement, arriver au même résultat?

De quoi s’agit-il?

Commençons par vous présenter Happy Body. Il s’agit d’une fondation d’utilité publique mise sur pied par la FEVIA (représentant une grande partie des industriels de l’agro-alimentaire), le Comité olympique et interfédéral belge (COIB) et l’asbl Nubel (Nutriments Belgique). Peut-être avez-vous déjà vu fleurir les différents supports de campagne, dont le moindre n’est certainement pas le spot télévisé, pourtant peu évocateur. Disons qu’il peut susciter la curiosité et inciter à aller visiter le site auquel il se réfère…
La raison d’être de cette fondation: aider la population belge à adopter des bonnes habitudes de vie, tout particulièrement en termes d’alimentation et d’activité physique.
« Un Belge sur deux est en surpoids ou obèse », argue le Pr André Huyghebaert , Président de la Fondation Happy Body. « Cela est dû à un déséquilibre énergétique , avec de mauvaises habitudes alimentaires couplées à une trop grande sédentarité , le tout dans un environnement obésogène’ . Il est donc grand temps d’agir sur tous les plans , en pesant sur les comportements individuels , sur l’environnement et le contexte de vie et en optant pour une approche multi acteurs’ . Notre but est de créer un effet sociétal en induisant un changement de mentalité et de comportement , de ne pas limiter notre action à une action ponctuelle , mais à l’inscrire dans la durée

Une initiative de plus

Il faut bien l’avouer, bon nombre d’initiatives sont menées dans différents secteurs, qui poursuivent grosso modo le même objectif: inciter ici les écoliers à manger sain, là à faire du sport à l’école ou en-dehors de l’école, là encore à donner des conseils personnalisés de diététique sur internet, etc…
Mais – martèlent les organisateurs – le principe de Happy Body est plus global et compte bien agir sur tous les plans. Ainsi, d’un côté, la fondation compte mener – sous son propre nom – différentes initiatives, comme par exemple le «web- coaching », calqué sur ce qui existe déjà en matière d’arrêt tabagique. Les personnes qui veulent changer leur mode de vie peuvent aller sur le site internet pour obtenir une évaluation, des informations, fixer des objectifs, recevoir des conseils et des encouragements afin de parvenir à leur but.
De l’autre côté, la fondation souhaite chapeauter diverses initiatives qui ont le même objectif de promotion du manger sain et de la pratique d’une activité physique régulière.
« Happy Body offre un cadre pour une action globale pour les initiatives existantes et pour de nouvelles . Souvent , ces initiatives ont peu ou pas d’effet , en tout cas visible , sur le comportement . Aussi , Happy Body offre un soutien en matière de mise en place des projets , une collaboration entre les campagnes ayant les mêmes objectifs et enfin vise à évaluer les résultats obtenus par cette collaboration », explique le Pr Jan Vinck , président du comité d’accompagnement de la fondation. Celle-ci proposera également à toutes ces campagnes d’information et de sensibilisation plus de visibilité.
Mais ce rôle là n’incombe-t-il pas au PNNS? « Je ne comprends pas cette volonté de faire cavalier seul , d’autant que ces trois partenaires , la FEVIA , le COIB et Nubel font partie du PNNS . Pour le public , on a évidemment intérêt à tenir un langage commun , avec un seul logo , et cela devrait être celui du PNNS On peut discuter de l’opportunité de mener des actions plus locales ou plus spécifiques , mais cette réflexion devrait être menée entre les partenaires du PNNS », s’étonne Luc Berghmans , Directeur de l’Observatoire de la Santé du Hainaut et membre du comité directeur du PNNS. Notons que la Fondation Happy Body va investir environ le double du budget octroyé au Plan national, dont les moyens déjà insuffisants ont encore été grignotés cette année, passant de quelque 800.000 à 700.000 euros… « Le PNNS est certainement perfectible , mais pour y arriver , il faudrait lui donner les moyens de fonctionner …», suggère Luc Berghmans.

Juge et partie

A l’annonce du lancement de cette grande campagne nationale, les responsables ont donc fait part de leur ambition de diriger («pour plus de cohérence et de moyens financiers») celles qui pourraient être menées par tout intervenant en prévention (imaginons une association qui voudrait mener une campagne d’alimentation saine dans les écoles…). On ne peut que s’interroger sur cette main-mise de cette Fondation Happy Body – qui est on le rappelle financée pour une grande partie par l’industrie agro-alimentaire – par rapport aux critères de reconnaissance des projets qui pourront porter le label.
Les responsables de la fondation précisent en effet que les initiatives devront promouvoir une alimentation plus saine et l’activité physique vers tous les groupes et couches de la population, mais devront adopter pour ce faire une approche positive et non stigmatisante… Cela signifie-t-il que les projets qui conseilleraient de rayer les confiseries de nos habitudes alimentaires ne pourraient pas obtenir le fameux «sésame»? Réponse de Chris Moris , administrateur délégué de la fondation et également directeur de FEVIA: « Notre philosophie est de ne pas diaboliser certains aliments : certaines personnes peuvent avoir envie de consommer des produits qui ne sont pas idéaux pour leur ligne ! Il n’est pas question pour nous d’avoir une démarche normative …»
Luc Berghmans s’interroge aussi sur cette manière de procéder: « Il faut une rigueur scientifique et des procédures de sélection indépendantes . Je ne suis certainement pas opposé à la participation de l’industrie dans des initiatives de promotion de la santé , mais à condition que cela soit supervisé par des organismes indépendants , comme par le PNNS qui a pour vocation de fédérer des initiatives et d’en assurer la qualité en appliquant des critères de santé publique .
Mais qu’est-ce qui peut inciter l’industrie alimentaire, premier annonceur dans la presse et qui se fait parfois remonter les bretelles pour des pratiques quelque peu douteuses, à lancer son propre programme?
« Nous voulons une autorégulation encore plus stricte de notre secteur . Nous souhaitons éviter les taxes sur les produits trop énergétiques , ou des mentions obligatoires dans nos écrans publicitaires jetant ainsi le discrédit sur les produits (comme en France où on oblige les annonceurs de produits alimentaires à ajouter des messages conseillant de ne pas manger trop gras, trop sucré, trop salé et de faire de l’exercice, ndlr). La demande pour des produits plus sains peut aussi inciter l’industrie à investir dans la recherche pour les produire !», poursuit Chris Moris. Autrement dit, l’industrie prend les devants, afin de ne pas être accusée d’être responsable de la mauvaise alimentation de la population, rester maître de sa communication et éviter les sanctions…

Convertir des croyants?

Outre le message – qui soit dit en passant est particulièrement banal –, ce type d’initiative ne risque-t-il donc pas de ne cibler que des personnes qui adoptent déjà un mode de vie sain? Pire: ne risque-t-elle pas d’exclure la population la plus à risque, à savoir les personnes défavorisées où l’on retrouve les plus mauvaises habitudes alimentaires et la sédentarité? Déjà que les campagnes classiques ont beaucoup de mal à les toucher, précisons que ce qui est présenté comme le support essentiel des initiatives de Happy Body est le site internet, dont l’accès est nettement plus limité dans ces populations.
« Vous touchez là un point important : il est essentiel de travailler avec des personnes du secteur social pour avoir leur opinion sur la meilleure méthode pour toucher cette population . De plus , ce n’est pas nous qui pourrons influencer le prix des matières premières et des produits sains , inciter à construire des infrastructures sportives ou rendre les prix des clubs sportifs plus démocratiques !», confirme le Pr Vinck. Pour information, le sport présenté comme l’un des plus démocratiques, le football, demande un investissement déjà important: l’affiliation d’un jeune enfant coûte au moins 150 euros dans un petit club de village, plus du double (au bas mot) dans les plus grands clubs…
Et nous en arrivons au troisième axe d’actions de Happy Body: parallèlement aux modifications d’habitudes de vie à conseiller aux individus (via le site web et les campagnes de sensibilisation), la fondation annonce donc comme objectif de discuter avec les instances responsables (responsables politiques, secteur économique, médias, secteur social, enseignement, secteur médical, secteur de la prévention, scientifiques, mutuelles…), pour supprimer cet «environnement obésogène».
Mais n’est-ce pas là une campagne de lobbying destinée à attirer l’attention dans une autre direction, puisqu’à l’heure actuelle, les «coupables» désignés sont avant tout la mauvaise nutrition et la sédentarité?
« Cette initiative Happy Body est un contre feu à celles menées par le PNNS . Elle disperse à la fois les initiatives , donc les messages et de ce fait , les moyens financiers …», regrette Luc Berghmans.

Le loup dans la bergerie?

Autre aspect à prendre en compte, le risque d’immixtion du privé par des moyens détournés dans des sphères protégées depuis peu. Comme dans le cas de la publicité à l’école. En effet, la Fondation Happy Body est aussi là pour faire la promotion des initiatives à destination des écoles, toujours dans la logique de sa philosophie. « Mais attention ! Les entreprises ne pourront pas directement placer leur logo ou leurs marques sur les campagnes destinées aux écoles . De même , une marque ne pourra pas apposer le logo Happy Body’ sur son emballage !», précise Chris Moris.
Il n’empêche: la fondation elle-même ne veille-t-elle pas d’emblée à la «cohérence» des messages? Aussi, Happy Body ne serait-il pas un moyen de contourner cette interdiction, à travers des associations soutenues par la fondation, mais qui respecteraient ses conditions d’admission? Il s’agira donc de garder l’œil ouvert!
Pour des infos sur Happy Body: https://www.happybodytoyou.be
Carine Maillard

Le petit chat est mort’. Quand les normes de santé nous gouvernent

Le 30 Déc 20

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Agir sur les comportements individuels afin que l’individu fasse des choix favorables à sa santé: l’idée semble excellente. Les nouveaux combats de la prévention nous offrent un champ d’observation propice à la réflexion. Ainsi, la lutte contre le tabac ou l’obésité nous démontre combien est ténue la limite à respecter pour ne pas tomber dans la stigmatisation des consommateurs de tabac ou des personnes de poids «hors normes».
Question Santé nous a proposé le 6 mai dernier une journée de réflexion pour aborder cette question mais aussi (ou plutôt surtout dirions-nous connaissant les bonnes vieilles habitudes de l’asbl) pour en soulever d’autres.
Quatre intervenants ont alimenté les débats.
Tout d’abord, Jean-Pierre Dozon , anthropologue, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement et directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales nous a rappelé comment les sociétés ont édicté leurs normes de santé. Quatre modèles de la prévention sont apparus au cours des âges, qui coexistent encore aujourd’hui. Même le plus ancien, le plus ‘obscur’, le modèle magico-religieux n’a pas du tout disparu de nos sociétés postmodernes et rationnelles, comme en témoignent les succès des thérapies alternatives ou de l’astrologie.
Le deuxième modèle, celui de la contrainte profane, qui organise la ‘police sanitaire’ (léproseries, quarantaines), a encore de beaux jours devant lui à en juger par les règles d’éviction des fumeurs des lieux publics.
Le troisième, le modèle pasteurien, vieux de moins de deux siècles, marque l’entrée dans la rationalité bio-médicale : un agent infectieux, une maladie, un vaccin pour s’en protéger, c’est net et sans bavure.
Le plus récent, le modèle contractuel, fait florès aujourd’hui. Il s’appuie sur des standards de comportement largement partagés, et s’applique à un large spectre de pathologies en se concentrant sur leurs facteurs de risque (liés pour partie aux comportements jugés irresponsables des individus) plutôt que sur leurs causes.
Ce dernier modèle se base sur des évidences scientifiques souvent solides, mais il fait l’impasse sur la complexité de l’être humain, dont la vie n’aurait guère de sel (d’ailleurs proscrit vu notre niveau de consommation!) ni de sens si elle était guidée par le seul souci de minimisation rationnelle des risques.
Les normes sanitaires évoluent selon les époques. Parfois pour des raisons scientifiques, mais il n’est pas rare que les motivations soient plus obscures. Souvent, le désir de changer les comportements pour les adapter aux nouvelles normes s’accompagne d’une irritation vis-à-vis des individus rebelles aux bonnes pratiques sanitaires. De l’irritation à la culpabilisation voire à la punition, le pas peut être vite franchi.
Marianne Prévost , sociologue, chercheuse à la Fédération des maisons médicales et des collectifs de santé francophones, se fit la porte-parole de groupes ne correspondant pas à la ‘norme’ de santé publique, en prenant comme exemples les obèses, les sourds, les fumeurs et les militants américains anti-vaccination (1). Elle souligna entre autres avec une pointe d’humour perfide le fait que la ‘norme’ en matière de surcharge pondérale pourrait bien basculer, vu le pourcentage de plus en plus élevé de gens dont le BMI est à l’orange ou au rouge! L’arroseur arrosé en quelque sorte…
Elle ne pouvait pas cacher une certaine sympathie pour ces mouvements de résistance, ces minorités qui essaient de faire entendre leur voix dans le bruit prescriptif du discours dominant. Plus finement, elle constatait aussi que les axes ‘normatifs’ et de ‘résistance’ ne sont peut-être pas radicalement inconciliables dès l’instant où il y a encore un espace pour le débat.
Le citoyen a-t-il, de manière générale, l’obligation de veiller à sa santé? La recherche par l’Etat du bien-être de la population crée-t-elle un devoir de santé? Cette obligation met-elle à mal notre liberté à disposer de nous-mêmes comme les droits de l’Homme limitent la souveraineté des Etats? Que disent les lois? Que recouvre la notion de «libre consentement» en matière de prévention?
Bruno Dayez , avocat, chercheur associé aux Facultés universitaires St-Louis, observa (en se refusant tout jugement de valeur), qu’il arrive que la société érige des règles destinées à promouvoir la dignité humaine contre la volonté même de l’individu désireux d’exercer pleinement son ‘droit de propriété’ sur son propre corps, d’en user, d’en jouir, d’en abuser.
Autre constatation, notre société est de plus en plus normative en matière de santé (sinon, pas besoin de journée d’étude!), et dans ce domaine, le durcissement des lois ne fait en réalité que suivre une tendance lourde de notre société, le contexte légal épousant une contrainte ‘douce’ qui s’impose à nous de façon parfois insidieuse.
Pour clôturer la journée, Thierry Poucet , journaliste de santé publique à l’Union nationale des mutualités socialistes, rédacteur en chef de la revue Renouer , sortit du sujet du jour, pour témoigner de son expérience en matière d’information sur la santé dans la presse associative versus les médias ‘grand public’, et analyser rapidement les représentations de certains supports en matière de vieillissement ou d’image du médicament. Il eut une jolie formule pour illustrer le souci d’illustrer dans la presse de façon ‘déontologiquement responsable’ des sujets sensibles, en ‘demandant aux photographes d’éviter les clichés’.
Par rapport au rôle des médias dans l’information (voire la manipulation) de l’opinion, le mot de la fin revint à Jean-Pierre Dozon, qui cita une phrase mise en exergue du ’20 heures’ de France 2 au plus fort (si on peut dire) de la ‘crise’ de la grippe aviaire. Le journaliste démarra son journal par cette phrase célèbre dont les amoureux du théâtre de Molière se souviennent: ‘Le petit chat est mort’ (2). Il s’agissait vraiment du décès d’un chat, infecté il est vrai par un oiseau porteur du virus H5N1.
Faire la une d’un JT avec une information aussi essentielle, c’est très fort, alors que le décès chaque hiver de plusieurs milliers de personnes âgées atteintes par la grippe saisonnière ne suscite même pas une phrase en fin de journal!
Christian De Bock
Les actes de la journée ‘Les normes de santé’ paraîtront fin septembre 2008. (1) Lire son article ‘Quand les a-normaux se rebiffent’, paru dans ‘Santé conjuguée’ n° 41 en juillet 2007.
(2) L’école des femmes’, Acte II, Scène 5

Favoriser le bien-être des étudiants de l’enseignement supérieur. Un projet de promotion de la santé au département de la Haute école de Namur

Le 30 Déc 20

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Dans le cadre du cours d’éducation pour la santé donné aux étudiants infirmiers de première année de la Haute Ecole de Namur, un projet d’envergure a été mis en place.
L’année passée, il a pris une tournure inédite. Pourquoi ne pas essayer d’améliorer le bien-être de nos étudiants de première?
Le défi est lancé, l’équipe professorale prépare le cadre du projet. Un travail à réaliser pour les étudiants et par les étudiants. Nos 186 étudiants de première deviennent donc acteurs de leur projet, qui vise à améliorer leur bien-être et leur santé, tout en impulsant une dynamique santé durable au sein de l’école.
La première étape consiste à analyser les besoins et identifier les problèmes vécus par nos étudiants entrant dans le supérieur. Sur base d’une enquête imaginée par Univers santé (Louvain-la-Neuve), et avec l’aide d’une de nos étudiantes en 4e santé communautaire, Emilie Detré (dans le cadre de son stage PSE), nos étudiants de première mettent en évidence leurs difficultés.
Sept problématiques sont dégagées: la difficulté de s’adapter à un environnement nouveau, le stress, la fatigue, les problèmes de sommeil, l’alimentation peu équilibrée, les changements dans la vie affective, le manque d’activité physique.
Un travail par groupe commence, l’objectif premier est de réfléchir et faire un constat pour chacun de ces problèmes, le deuxième objectif est de pouvoir émettre des propositions d’amélioration afin que les futurs étudiants puissent en bénéficier.

S’adapter à un environnement nouveau

L’entrée dans l’enseignement supérieur et la séparation du milieu familial est le premier problème auquel sont confrontés les étudiants dès septembre. Ils vivent une adaptation difficile, et ce d’autant plus si, et cela est de plus en plus souvent le cas, ils sont plus âgés, ont charge de famille, ou sont étrangers.
Les problèmes rencontrés sont d’ordre administratif, financier, connaissance du milieu, garde des enfants, gestion de l’étude…
Par le biais de notre projet, les étudiants mettent en évidence les difficultés de leur parcours.
De façon imagée, ils retracent la rentrée d’un étudiant de 17 ans, une journée d’une étudiante maman, les nombreuses démarches administratives pour l’étudiant étranger ou aussi la difficulté pour une étudiante française de comprendre certains mots utilisés par les professeurs belges.
Des propositions concrètes émergent de la réflexion: fascicule d’aide, accueil plus personnalisé, petit lexique de mots typiquement belges…

Le stress

Ce problème est très présent dans la vie des étudiants. Dans l’ordre d’importance: examens, blocus, horaires chargés, peur du regard des autres, changements de vie liés au passage dans l’enseignement supérieur, il y a beaucoup d’occasions qui confrontent l’étudiant à un stress intense.
L’objectif poursuivi par ce groupe est d’apprendre aux futurs étudiants à gérer celui-ci pour éviter les problèmes de santé qui y sont liés (céphalée, fatigue…) en le rendant positif et motivant.
Ils proposent pour ce faire d’installer dans l’école un local de détente et d’organiser des séances de relaxation à plusieurs moments clés de l’année.
Un diaporama mis en ligne sur le site web de l’école présenterait différentes situations stressantes pour l’étudiant et les conseils pour y répondre. Ces conseils seraient repris dans un fascicule.
Un petit test d’autoévaluation du stress peut également être proposé avant et après ces actions afin d’évaluer l’impact de l’outil.

La fatigue

Après analyse des résultats de l’enquête, les étudiants ayant travaillé sur le thème de la fatigue ont fait le constat que 80 % des élèves de première année se disent sujets à la fatigue. Les principales sources de fatigue identifiées sont par ordre d’importance: la période de blocus et d’examens (liée à un manque d’organisation, à un planning chargé et à une mauvaise alimentation), les périodes de stages (changements d’horaires, de rythme de travail, de responsabilités), les horaires de cours (cumulés avec le travail à domicile, les trajets, l’adaptation à la vie en kot), la charge de cours (beaucoup plus lourde qu’en secondaire), les problèmes de sommeil (dus au changement d’environnement, aux nouveaux horaires).
De ces constatations, les étudiants tirent comme conséquences un important problème de fatigue mais aussi de stress, d’alimentation déséquilibrée, de sommeil de moindre qualité ou de relations sociales perturbées.
Dès lors, une demande est faite aux professeurs de mieux répartir sur l’année et en dehors des périodes de blocus les travaux demandant un fort investissement personnel, tels que les cours d’initiation à la recherche ou d’éducation pour la santé. Les étudiants sont aussi demandeurs d’une période de blocus plus longue.
Afin de sensibiliser les étudiants futurs à cette problématique, le groupe a réalisé un petit test leur permettant de se situer par rapport à leur sensibilité à la fatigue. Une série de petits conseils pour mieux respecter leurs besoins en sommeil leur est ensuite proposée dans un fascicule.

Le sommeil

Les difficultés de sommeil le plus souvent rencontrées par les étudiants en début d’année sont liées au changement d’environnement (vie en kot, bruit…), au nouveau mode de vie (horaires de cours et stages, fêtes estudiantines, gestion du ménage…), et aux changements dans la vie affective.
Durant les premières semaines, les étudiants devront donc passer par une période d’adaptation pouvant altérer leur sommeil.
Mais d’autres problèmes de sommeil pourront également être rencontrés lors des périodes de blocus, de stages, d’examens, de conflits ou de consommation de produits toxiques.
Il leur sera proposé un prospectus leur rappelant la physiologie du sommeil et quelques conseils leur permettant de mieux gérer leur sommeil tout au long de l’année.
Une activité de sensibilisation aux conditions favorables à un bon sommeil pourra également être proposée aux étudiants dans le courant de l’année scolaire suivante.

L’alimentation

Avoir une alimentation équilibrée pose problème chez nos étudiants de première année. Les causes mises en évidence sont les rythmes scolaires, la fatigue engendrée par les stages, la solitude en kot et le… manque d’imagination.
Les étudiants étrangers relèvent aussi le fait que non seulement ils ont du mal à trouver les aliments de base propre à leur culture mais aussi que par facilité, ils imitent le style de repas des étudiants belges.
La consommation de boissons énergisantes ainsi que celle d’alcool est aussi soulignée.
Pour sensibiliser les futurs étudiants, le groupe imagine la «pyramide alimentaire estudiantine», qui a bien du mal à tenir son équilibre!
Des conseils de base sont rappelés, et un livret de recettes est réalisé en collaboration avec le professeur de diététique: recettes équilibrées, pas chères, vite faites, conviviales.

La vie affective

La vie affective occupe une place importante dans la liste des préoccupations des étudiants. Il est donc apparu nécessaire d’aider les futurs étudiants à gérer les conflits, les changements de vie, les difficultés, tout en maintenant une stabilité dans les études.
Les chiffres de l’enquête révèlent que la pression familiale et les problèmes amoureux génèrent beaucoup de stress et de fatigue chez les étudiants. On peut en déduire une difficulté d’adaptation à la nouvelle vie estudiantine tant du côté des parents que des étudiants.
En effet, de nombreux changements familiaux et sentimentaux sont rencontrés au cours de la première année: les jeunes quittent le cocon familial pour prendre en charge les responsabilités de la gestion du quotidien, certains délaissent leur vie amoureuse pour se consacrer exclusivement aux études… ou inversement!
Les étudiants participant très activement aux fêtes estudiantines constituent une minorité.
Un grand nombre d’étudiants attend de l’école des activités organisées pour et avec eux. Celles-ci viseraient à favoriser de nouvelles rencontres qui remplaceront les amitiés perdues suite au changement d’orientation et de situation géographique. Ils sont demandeurs d’un accès à Internet au sein de l’école pour leur permettre de rester en contact avec leurs proches.
Ils proposent à l’école d’organiser le jour de la rentrée académique une conférence présentée par le Planning Familial «Exposition plaisir d’amour» et de terminer la journée par le partage d’un repas et une visite de la ville de Namur.
L’objectif de cette activité est de sensibiliser les étudiants à l’importance d’une bonne santé affective pour mener à bien leurs études, et de favoriser les nouvelles rencontres entre étudiants.
Une seconde journée récréative est proposée après la session de janvier. Il s’agit de la visite du musée Notre Dame à la Rose, qui leur permettra à la fois de découvrir les origines du métier d’infirmier et de se rencontrer en dehors du cadre scolaire pour se détendre et partager leurs motivations et leurs déceptions après la première session d’examens.
Enfin, il leur sera proposé un fascicule reprenant une série de petits conseils destinés à mieux vivre leur vie affective de jeune étudiant: comment garder ses anciens amis, créer de nouvelles relations, maintenir de bon contacts avec sa famille, gérer les relations amoureuses…

L’activité physique

L’entrée dans le supérieur et le changement de milieu entraînent une diminution de l’activité physique. Très peu d’étudiants continuent leur sport. Le besoin est pourtant crucial et la recherche d’un équilibre entre l’étude livresque et le stress des situations de vie vécues en stage est fondamental.
Nos étudiants ont envie de bouger. Ils demandent la possibilité d’accéder aux infrastructures sportives déjà existantes et rappellent que certaines mutuelles interviennent actuellement dans la pratique d’un sport. Ils mettent aussi l’accent sur la prévention des dorsalgies, pathologie fréquente dans notre profession.

Toutes ces constatations et propositions ont été présentées de façon ludique et amusante aux membres de la direction, aux professeurs, aux membres du PSE.
Une idée concrète est avancée par les étudiants pour le suivi du projet: avec l’aide du PSE, les étudiants de l’année prochaine se verront sensibiliser et aider régulièrement. Mois après mois, une thématique sera développée, des panneaux attireront l’attention des étudiants, des brochures déjà réalisées dans le cadre de ce projet seront distribuées et des fascicules mis à leur disposition. Le souhait est émis que la cellule PSE soit régulièrement présente dans nos locaux, afin que les étudiants qui le souhaitent puissent en bénéficier.
Gwenaëlle Cliquet et Marie Madeleine Van den Abeele , Maîtres-Assistants
Adresse des auteurs: Haute Ecole de Namur, rue Louis Loiseau 39, 5000 Namur. Internet: https://www.henac.be .

Etat des lieux de la campagne sur le sevrage tabagique de la femme enceinte et de son partenaire

Le 30 Déc 20

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Introduction

Descriptif de la campagne

La campagne «Sevrage tabagique de la femme enceinte et de son partenaire» se définit par un ensemble de démarches soutenant l’arrêté royal du 17 septembre 2005 et développées par le FARES – VRGT. Il s’agit de la sensibilisation et de la mobilisation des professionnels de santé à la question du tabagisme chez la femme enceinte. Plusieurs interventions telles que des séminaires, des formations, des campagnes de communication via dépliants et affiches, visent à développer des collaborations entre les tabacologues et les professionnels de santé qui assurent les suivis de grossesse afin de créer un véritable réseau d’intervenants au profit de la prise en charge de la femme enceinte fumeuse.
Il s’agit, entre autres, d’informer les professionnels de santé sur le programme de remboursement de huit consultations de tabacologie pour la femme fumeuse et son partenaire fumeur. Les professionnels en question, actuellement, regroupent les gynécologues, les sages-femmes et les tabacologues. Il est prévu d’élargir la sensibilisation aux médecins de famille, aux pédiatres et aux pharmaciens.
Il s’agit aussi bien entendu de sensibiliser et mobiliser directement les femmes enceintes fumeuses et leur partenaire par rapport à la question du tabagisme via une campagne de communication et un site internet spécifique reprenant la liste de tabacologues spécialisés. L’objectif est, ici également, de faire connaître le programme d’accompagnement au sevrage (voir le visuel de la campagne).
La campagne est menée en partenariat avec le Centre de développement scientifique des pharmaciens, le Groupement des gynécologues obstrétriciens de langue française de Belgique (GGOLF), l’Union professionnelle des sages-femmes belges, la Fondation contre le cancer, l’Office de la naissance et de l’enfance, l’Inami et le Plan fédéral de lutte contre le tabagisme.

Descriptif du programme

Le programme d’aide à l’arrêt du tabac prévoit le remboursement des consultations auprès de tabacologues reconnus par l’INAMI (soit un remboursement de 120 euros). La femme enceinte doit commencer le suivi au plus tard trois mois avant la date d’accouchement et doit participer au minimum à huit consultations. La huitième consultation doit avoir lieu au plus tard six mois après l’accouchement. Les conditions sont les mêmes pour le partenaire fumeur. En outre, il a la possibilité d’obtenir un remboursement de 55 euros pour des substituts nicotiniques et le bupropion. Le partenaire fumeur ne peut participer au programme que si sa femme est elle-même fumeuse.

Contexte de l’enquête

La campagne a été initiée en 2005. Après deux périodes successives de démarches (2005-2006 et 2006-2007), il a semblé pertinent d’évaluer le retentissement de cette campagne, appelée à se prolonger. Dans un premier temps, il convenait d’évaluer l’impact de la campagne directement auprès des femmes séjournant en maternité.
Lors d’une prochaine étude, il pourra être intéressant d’évaluer l’impact de la campagne auprès des professionnels de santé et des tabacologues. Le choix de l’enquête, via la passation de questionnaires aux jeunes accouchées, nous a semblé le moyen le plus objectif et adéquat afin de réaliser une analyse précise.

Objectifs

Objectif général

L’enquête a pour objectif d’établir un état des lieux de la campagne. Elle cherche à faire une mise au point sur le comportement tabagique des femmes enceintes et de leur partenaire et à évaluer leur sensibilisation à la question du tabagisme pendant la grossesse. Elle cherche à évaluer leur connaissance par rapport au programme d’aide à l’arrêt du tabac et le cas échéant leur participation au programme.

Objectifs spécifiques

Les cinq objectifs spécifiques de l’enquête sont:
-investiguer le comportement tabagique des femmes enceintes (quantifier le nombre de non-fumeuses, ex-fumeuses et fumeuses actives) ainsi que celui de leur partenaire;
-investiguer l’exposition des femmes enceintes au tabagisme passif ainsi que leurs connaissances quant à cette problématique;
-investiguer le rôle des professionnels de santé quant à l’identification du statut tabagique de la femme enceinte ainsi que les éventuels conseils qui lui sont prodigués en matière de sevrage;
-investiguer si les femmes enceintes fumeuses ont eu connaissance du programme et par quels moyens;
-investiguer la participation des femmes enceintes fumeuses (et de leur partenaire fumeur) au programme et leur satisfaction par rapport à celui-ci.

Cadre méthodologique

Population

La population de notre échantillon rassemble toutes les jeunes accouchées, à l’aveugle quant à leur statut tabagique, de toutes les maternités des régions bruxelloise et wallonne ayant renvoyé la feuille d’accord pour participer à l’enquête.
Au niveau des critères d’exclusion, les femmes ayant accouché la veille pendant la nuit et celles ayant accouchées le jour-même n’ont pas été reprises dans notre échantillon. De plus, les femmes n’ayant pas une connaissance suffisante du français ont été exclues.
Trente-trois maternités ont donné leur accord pour participer à l’enquête (1).
L’enquête s’est déroulée dans 29 d’entre elles (pour des raisons pratiques, l’enquête n’a pas pu se faire dans 4 maternités).

Procédure de recrutement

Concernant le recrutement, un envoi (comprenant un canevas du questionnaire, une lettre explicative ainsi qu’une feuille d’accord à renvoyer au FARES) a été fait à l’ensemble des maternités de Bruxelles et de Wallonie. Lorsque la maternité donnait son accord de collaboration, un rendez-vous était fixé avec le chef de service pour le jour de la passation du questionnaire. Une psychologue/tabacologue du FARES proposait à chaque patiente de participer à l’enquête et en cas de réponse positive lui soumettait le questionnaire en fonction de son statut tabagique. Un pré-test a été effectué à l’hôpital Erasme afin de s’assurer du bon déroulement de la procédure.

Outil d’évaluation

L’outil d’évaluation utilisé dans cette enquête était le questionnaire. Par souci de clarté au moment de la passation, nous l’avons divisé en trois en fonction du statut tabagique. Le volet non fumeuse était destiné aux mères n’ayant jamais fumé. Le volet fumeuse était destiné à celles ayant fumé durant la grossesse. Le volet ex-fumeuse était destiné à celles n’ayant pas fumé au moins durant tout le dernier trimestre de la grossesse après avoir fumé au moins 100 cigarettes pendant toute leur vie. Les questions se rapportaient au comportement tabagique de la femme pendant sa grossesse et à celui de son partenaire, au tabagisme passif, à la connaissance du programme d’aide, à la satisfaction par rapport au programme, aux informations fournies par les professionnels de santé. Plusieurs questions étaient également destinées à recueillir des données sociodémographiques telles que l’âge, l’état civil, le niveau d’études, la situation professionnelle, le code postal. D’autres questions ont été destinées à recueillir des données sur le nombre d’enfants, le nombre de jours depuis l’accouchement et le type d’alimentation.

Résultats et discussion

Les jeunes mères

Sur les 413 jeunes accouchées interviewées, 46% d’entre elles avaient entre 21 et 30 ans et 46,2% avaient entre 31 et 40 ans. La majorité, soit 78,7% d’entre elles, étaient mariées ou cohabitantes et 52,7% avaient un statut d’employé. 33,5% des femmes interviewées habitaient à Bruxelles, 9,5% habitaient dans le Brabant wallon, 17,8% dans le Hainaut, 16% à Liège, 5% dans la province du Luxembourg et 10,7% dans la province de Namur. 47,9% des femmes étaient primipares; elles (92,6%) avaient accouché, en majorité, dans les 5 jours précédents l’interview et 77,9% allaitaient leur enfant .

Tableau 1 – Statut tabagique de la jeune accouchée (n = 413)

Fréquence (n) Pourcentage (%)
Non-fumeuse 259 62,7
Ex-fumeuse 62 15,0
(Arrêt plusieurs années auparavant) (50) (12,1)
(Arrêt dans l’année précédant la grossesse) (12) (2,9)
Fumeuse 61 14,8
Sevrage en cours de grossesse 31 7,5

Les résultats montrent que 14,8% des femmes continuent à fumer pendant leur grossesse; 7,8% ont arrêté en cours de grossesse et 2,9% ont arrêté dans l’année avant la grossesse (tableau 1). La majorité des femmes enceintes fumeuses consomment des cigarettes manufacturées. Plus de la moitié des femmes fumeuses (59,6%) ont fumé plus de 5 cigarettes par jour pendant leur grossesse (tableau 2). Les dernières données sur le tabagisme des femmes enceintes, issues de la conférence de consensus «Grossesse et Tabac» 2004 (2), estiment, quant à elles, que la prévalence du tabagisme chez les femmes enceintes était de 28% en 2004. Nos résultats sont inférieurs, mais il faut savoir que les proportions varient largement suivant les classes d’âge et les niveaux socio-économiques. Il conviendrait de réaliser une enquête nationale destinée à évaluer, avec l’aide d’un marqueur du tabagisme, la prévalence du tabagisme pendant la grossesse.

Tableau 2 – Consommation quotidienne de cigarettes industrielles pendant la grossesse (n= 57)

Fréquence (n) Pourcentage (%)
Moins d’1 cigarette 1 1,8
Entre 1 et 5 cigarettes 22 38,6
Entre 6 et 10 cigarettes 19 33,3
Entre 11 et 15 cigarettes 9 15,8
Entre 16 et 20 cigarettes 4 7,0
Entre 21 et 25 cigarettes 2 3,5

La majorité des fumeuses (52,5%) ont essayé de diminuer leur consommation (sans prendre de substitution nicotinique) pendant leur grossesse et 18,6% ont essayé un arrêt complet (sans substituts) sans y parvenir (tableau 3). Concernant les femmes ayant arrêté en cours de grossesse, la majorité (77,4%) a arrêté au premier trimestre et la quasi totalité (96,5%) rapporte avoir arrêté sans prendre ni substitut, ni autre produit d’aide à l’arrêt du tabac. On peut remarquer que la prise de substituts nicotiniques dans l’aide à l’arrêt du tabac reste encore rare. D’autres résultats, qui seront abordés par la suite, vont dans le même sens.
Concernant le tabagisme de l’entourage, 36,8% des partenaires sont fumeurs et les fumeuses ont trois fois plus souvent un partenaire fumeur que les non ou ex-fumeuses. De plus, l’enquête a également permis de se rendre compte de la fréquence d’exposition de la femme enceinte au tabagisme passif. Les fumeuses (54,1%) sont quatre fois plus souvent soumises (11,7%) plusieurs heures par jour au tabagisme de leur entourage que les non ou ex-fumeuses.
Ces résultats vont dans le même sens que ceux récoltés par le Ministère de la santé canadien. Ceux-ci indiquent que les femmes qui continuent de fumer lorsqu’elles sont enceintes sont généralement entourées de membres de la famille et d’amis qui fument (3). Un survol de la documentation sur le tabagisme et les femmes montre que le maintien de l’habitude de la cigarette pendant la grossesse est associé entre autres au fait d’avoir un partenaire fumeur et à l’exposition à la fumée de tabac ambiante (4). Il semble donc nécessaire de prendre en charge tant le tabagisme de la femme enceinte, que celui de son partenaire (5). Surtout que parmi ceux-ci, 39,5% ont essayé d’arrêté sans y parvenir et 32,4% fument en présence de leur femme.
Au niveau de l’information reçue, 69,1% de femmes rapportent avoir été informées sur les effets du tabagisme passif. 7,8% de ces femmes ont reçu les informations par leur gynécologue, la grande majorité des femmes ayant été informée par les dépliants, les articles, les spots TV et radio et les documentaires.

Les professionnels

L’enquête a également permis d’évaluer le rôle occupé par les professionnels de santé dans le cadre du tabagisme. Le gynécologue identifie presque systématiquement le statut tabagique de la femme enceinte. Dans 70% des cas, il donne un conseil par rapport au tabac. En général, il préconise soit l’arrêt complet (41,3%) soit la diminution (31,7%) sans substituts nicotiniques (tableau 3).

Tableau 3 – Types d’essais par rapport à leur consommation pendant la grossesse (n = 59)

Fréquence (n) Pourcentage (%)
Essai arrêt complet sans substitution nicotinique 11 18,6
Essai arrêt complet avec substitution nicotinique 2 3,4
Essai diminution sans substitution nicotinique 31 52,5
Essai diminution avec substitution nicotinique 3 5,1
Essai pas plus de 10 cigarettes/ jour 3 5,1
Essai pas plus de 5 cigarettes/ jour 3 5,1
Consommation inchangée 5 8,5
Autre 1 1,7

Très rares sont les professionnels de santé qui conseillent la substitution (11,1%). Il est, pourtant, actuellement admis que les risques éventuels liés à la prise contrôlée de nicotine seule sont largement compensés par les bénéfices de l’arrêt et par l’absence d’exposition du fœtus aux différents composés toxiques de la fumée de tabac, en particulier au monoxyde de carbone responsable d’une hypoxie chronique et de ses conséquences sur le développement du fœtus. Différents consensus, français, américain et anglais, préconisent donc la prescription de substituts nicotiniques pour le sevrage tabagique des femmes enceintes si l’arrêt du tabac n’a pas été possible sans traitement, si la dépendance physique est importante et si la seule alternative est la reprise de la consommation de tabac(6).

Tableau 4 – Biais par lesquels la jeune accouchée a eu connaissance du programme (n = 45)

Fréquence (n) Pourcentage (%)
Affiche/dépliant 37 82,2
Site https://www.grossessesanstabac.be 1 2,2
Gynécologue 12 26,6
Sage-femme 2 4,4
Médecin traitant 0 0,0
Consultation ONE 3 6,6
Ligne Tabac-Stop 0 0,0
Amis/famille 0 0,0
Autre 2 4,4

L’enquête indique également que la moitié (51,1%) des femmes fumeuses actives et en sevrage au cours de la grossesse rapportent avoir eu connaissance du programme; dans 82% des cas via l’affiche ou le dépliant; dans 26,6% des cas seulement via leur gynécologue (tableau 4). Parmi les femmes ayant eu connaissance de la campagne, seulement 55,8% ont compris que le programme d’aide comprenait 8 consultations de tabacologie; 30,2% seulement ont compris qu’ils avaient droit à un remboursement de 120 euros; 32,5% ont compris que ce programme était également destiné aux partenaires fumeurs; 25,6% ont compris que le partenaire pouvait bénéficier d’un remboursement de 55 euros pour une substitution. Il n’y a qu’une seule femme fumeuse qui a participé au programme. Elle a suivi deux consultations de tabacologie. Elle était satisfaite dans l’ensemble du programme mais trouvait les délais de participation trop courts, surtout le délai pour la première consultation qui est de 6 mois de grossesse maximum.

Conclusion

Au vu des résultats obtenus, il semble que la campagne a eu un certain impact. En effet, il semble que les professionnels de santé, en majorité, s’intéressent au comportement tabagique de leurs patientes enceintes et leur apportent des conseils la plupart du temps. Il semble également que les campagnes de communication via dépliants et affiches ont été un moyen efficace pour faire connaître le programme. Mais il semble qu’il convient d’améliorer la communication sur les différents aspects du programme d’aide et de réfléchir à une plus grande accessibilité au programme. Celle-ci serait améliorée en apportant des modifications à l’A.R. du 17 septembre 2005, notamment en diminuant le nombre de séances et en incluant les médecins généralistes, comme professionnels relais pouvant, comme le tabacologue, accompagner la femme enceinte et son partenaire dans une démarche de cessation tabagique.
Dans une perspective future, il serait pertinent de réaliser une enquête analogue auprès des gynécologues afin d’éclaircir la situation quant au manque de relais aux femmes enceintes fumeuses du programme d’aide à l’arrêt. L’enquête permettrait un contact personnalisé avec le professionnel de santé et nous apporterait ainsi un matériel riche en vue de préparer les prochaines campagnes de communication. En effet, cette enquête-ci a permis d’avoir un contact personnalisé avec les jeunes accouchées et ainsi de mieux comprendre la réalité sur le terrain.
Pour conclure, il est encourageant de voir que cette enquête a récolté un grand engouement de la part des acteurs de terrain. En effet, lors de chaque déplacement, un contact personnalisé était établi avec l’infirmière en chef ou le chef de service de la maternité. La majorité d’entre eux ont montré un réel intérêt par rapport à l’enquête et souhaitaient être mis au courant des résultats obtenus.
Françoise Cousin , Stéphanie Buonomo , Bérengère Janssen , Jacques Dumont , Service Prévention Tabac, Fares asbl
Adresse des auteurs: FARES, rue de la Concorde 56, 1050 Bruxelles.

Le rapport complet de l’étude se trouve sur le site https://www.grossessesanstabac.be

Références

Delcroix M., La grossesse et le tabac, Que sais-je?, Presses universitaires de France, 1999.
Pattenden S., Antova T, Neuburger M., Nikiforov B., De Sario M., Grize L., Heinrich J., Hruba F., Janssen N., Luttmann-Gibson H., Privalova L., Rudnai P., Splichalova A., Zlotkowska R., Fletcher T., Parental smoking and children respiratory health: independent effects of prenatal and postnatal exposure. Tob Control 2006; 15(4):294-301.

(1) Pour la province de Liège , il s’agit de la Clinique Reine Astrid (Malmedy), du CHC-Clinique Saint-Vincent (Rocourt) et Sainte-Elisabeth (Heusy), CHR de la Citadelle (Liège), CHU de Liège, CH Peltzer-La Tourelle (Verviers), CHR de Huy.
Pour la province du Hainaut , il s’agit du CHR Haute-Senne (Soignies), CH de Mouscron, du CHU Ambroise Paré (Mons), CH Notre-Dame et Reine Fabiola (Charleroi), Clinique Notre-Dame de Grâce (Gosselies), Clinique Notre-Dame de Tournai, CHR Clinique Saint-Joseph (Mons) et Hôpital de Warquignies, CH Hornu-Frameries.
Pour la province du Luxembourg , il s’agit du CH de l’Ardenne (Libramont), Cliniques du Sud-Luxembourg (Arlon), IFAC Hôpital Princesse Paola (Marche-en-Famenne).
Pour la province du Brabant wallon , il s’agit de l’hôpital de Braine-l’Alleud – Waterloo et de la Clinique Saint-Pierre (Ottignies).
Pour la province de Namur , il s’agit de la Clinique et Maternité Sainte-Elisabeth (Namur), CHR de Namur, CH Saint-Vincent (Dinant).
Pour Bruxelles , il s’agit des Cliniques universitaires Saint-Luc, CHU Brugmann, Cliniques de l’Europe Saint-Michel et Sainte-Elisabeth, Clinique Edith Cavell, Hôpital Erasme, CHU Saint-Pierre, Hôpitaux Iris-Sud Etterbeek-Ixelles, Hôpital français.
(2) “Grossesse et tabac, conférence de consensus”, Journal de Gynécologie obstétrique et biologie de la reproduction, Volume 34, Hors série n°1, 2005.
(3) Edwards N., Wynn M., Prenatal and Postpartum Women and Tobacco, Santé Canada, 2001.
(4) Reducing Smoking Relapse During Pregnancy and Postpartum of Women and Their Partners, Centre de recherche pour la santé communautaire, Département d’épidémiologie et de médecine communautaire, Université d’Ottawa, 1997.
(5) DiClemente C., Dolan-Mullen P., Windsor R., The process of pregnancy smoking cessation: implications for interventions, Tob Control 2000;9 (Suppl 3).
(6) Galanti L, Comment arrêter de fumer pendant la grossesse, GUNAIKEIA – Vol 12 n°2 – 2007.

Scinder les soins de santé?

Le 30 Déc 20

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En 1999, le Parlement flamand approuvait une résolution demandant plus de cohérence dans les compétences régionales, entre autres en santé publique et en soins de santé. Bien que les thèmes communautaires aient été au premier plan de la dernière campagne électorale en Flandre, il a été peu question des soins de santé dans les médias. Le débat social à ce sujet est pourtant urgent et nécessaire car ce thème est au menu des travaux qui doivent préparer la réforme de l’Etat à mettre en place pour le 15 juillet prochain.
Les partisans d’une scission de notre santé publique se basent sur deux types d’arguments. Certains invoquent les «fameux transferts» financiers entre la Flandre et la Wallonie. D’autres insistent sur les grandes différences qui existent entre régions dans la problématique de santé et en appellent à respecter ces différences culturelles.
Examinons d’abord ces flux financiers. Clairement, les dépenses de l’assurance-maladie par habitant étaient autrefois plus importantes à Bruxelles et en Wallonie qu’en Flandre. Mais, depuis 2004, ces dépenses sont pratiquement équivalentes. En Flandre, elles augmentent du fait du vieillissement de la population.
Mais il reste qu’en Flandre, les contributions par habitant restent plus élevées que les dépenses, à l’inverse de Bruxelles et de la Wallonie. Cela tient au mécanisme de solidarité qui suppose que les gens aisés contribuent effectivement à soutenir les personnes moins aisées. Ainsi, du Brabant wallon (la province belge la plus riche) partent des ‘transferts’ vers Liège et le Hainaut… mais aussi vers le Westhoek et le Limbourg!
Ensuite, les partisans d’une scission des soins de santé tirent argument de différences d’approches de la santé entre le nord et le sud du pays. Une organisation séparée, disent-ils, tiendrait mieux compte des besoins locaux.
Ils mettent alors en évidence qu’il y a plus de maladies cardio-vasculaires à Charleroi qu’à Gand, que les Liégeois ont une moins bonne santé physique, sociale et mentale que les habitants d’Alost, etc. Or, la dernière enquête de santé nationale, qui remonte à 2004, nous apprend qu’il y a plus de différences à l’intérieur d’une même région qu’entre les régions. Beaucoup de maladies chroniques, par exemple, apparaissent davantage chez les gens qui ont moins de formation, indépendamment du lieu où ils habitent. La plupart des limites fonctionnelles des personnes âgées apparaissent également sans que cela ait à voir avec la région où ils habitent. Nous devons en conclure que les différences, en ce qui concerne les soins de santé, ont beaucoup plus à voir avec les inégalités sociales qu’avec l’endroit où on habite!

Des différences de consommation complexes à appréhender

Comment alors s’appuyer sur des différences culturelles pour défendre une séparation de la politique de santé?
On dit souvent que les Flamands vont plus souvent chez le médecin généraliste et que les Wallons vont plus vite à l’hôpital. Pourtant, selon l’enquête de santé nationale, le nombre des gens fidèles à leur généraliste est aussi élevé en Flandre qu’en Wallonie. Certes, en Flandre, le dossier médical global est davantage intégré qu’en Wallonie. C’est aussi à Bruxelles et en Wallonie que l’on prescrit plus de radiographies, d’examens préopératoires, d’antibiotiques et de tranquillisants. Ces différences ne sont pourtant pas univoques.
Selon les études du Centre fédéral d’expertise en soins de santé (KCE), il y a presque deux fois plus de césariennes dans l’est que dans l’ouest de la Belgique. La carte de l’ablation de l’utérus suit un modèle en forme de mosaïque avec une prépondérance dans le nord. Selon le KCE, toutes ces opérations ne semblent pas justifiées et ce quelle que soit la région du pays où elles sont réalisées. Pour expliquer cette surconsommation, le Centre fédéral d’expertise met en avant entre autres une «politique conduite par l’offre» et un «enthousiasme exagéré» de certains prestataires…
À côté de la surconsommation, il existe aussi dans notre pays des problèmes de sous-consommation! Selon l’enquête annuelle sur la pauvreté de 2007, dans notre pays, certaines personnes renoncent à des soins réguliers pour des raisons financières. Cela arrive en moyenne à un Belge sur dix mais avec une distribution très inégale: trois fois plus en Wallonie qu’en Flandre. Au sujet de la distribution de la sous-consommation par province, nous n’avons pas de données.
Flamands, Wallons et Bruxellois ont les mêmes droits d’accéder à des soins de santé de qualité à des prix accessibles. Pour garantir ces droits, il est nécessaire de garantir plus de solidarité avec les plus fragiles. La solidarité, cela signifie des transferts financiers, entre les personnes qui habitent une région différente ou qui appartiennent à une communauté différente, mais surtout des bien-portants vers les malades et ceux qui ont moins de chance.
Pour cette raison la sécurité sociale ne peut pas être divisée! Nous devons absolument défendre l’objectif social tant vanté de nos services de santé. La santé publique doit se tenir à l’écart de toute logique commerciale. Nous devons veiller à ce que les moyens du gouvernement soient utilisés de la meilleure façon possible. Par exemple, le prix des médicaments pour le patient peut descendre beaucoup plus bas si nous les mettons en adjudication publique selon le modèle kiwi.
Nous sommes convaincus qu’une sécurité sociale organisée au niveau fédéral est le meilleur cadre pour la lutte contre les inégalités sociales. Une santé publique fédérale offre plus de possibilités pour une politique de santé socialement justifiée et de qualité qu’une politique de santé qui serait conduite selon les régions ou des communautés divisées.
Auteurs: Michel Vanhoorne , Dirk Van Duppen , Marleen Temmerman . Co-auteurs: Bert De Belder , Francis Dewalque , Bruno Dujardin , Bernard Duterme , Yves Hellendorff , Jean Hermesse , Jean Marie Léonard , Jan Vancoppenolle
Les auteurs et les co-auteurs sont membres de la Plate-forme santé et solidarité. une initiative des deux grands syndicats et mutualités, de divers réseaux et associations, d’ONG et de représentants d’universités. Ils ont décidé d’unir leurs forces pour prévenir les conséquences de la politique néolibérale sur le plan social et sanitaire. Ils se mobilisent pour une politique de santé et de bien-être solidaire et pour que la santé reste un droit pour tout le monde. Internet: https://www.sante-solidarite.be .

L’espoir de vaincre la malaria

Le 30 Déc 20

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La fin du paludisme comme problème prioritaire de santé publique n’est plus une utopie. Aujourd’hui des moyens de lutte efficaces existent et d’importants financements de la communauté internationale sont disponibles. Reste aux États à former le personnel de santé et à organiser le combat contre ce fléau qui pèse sur leur développement.
Jamais la conjoncture n’a été aussi favorable à une lutte efficace contre le paludisme. Depuis dix ans, les financements internationaux ont été multipliés par dix et de nouveaux traitements très efficaces ont vu le jour. Longtemps délaissée, cette maladie, qui tue 2,6 millions d’Africains chaque année, dont de très nombreux enfants, est sortie de l’oubli grâce au sida. La forte mobilisation contre cette pandémie a entraîné dans son sillage celle contre le paludisme qui pèse lourd sur les économies africaines. ‘ Le paludisme est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté ‘, reconnaît-on aujourd’hui. Il ferait perdre près d’1,5% de croissance chaque année à l’Afrique. A l’échelle locale, c’est, par exemple, la première cause de non-remboursement des micro-crédits comme l’ont montré les études menées par Planet Finance au Bénin. Il représente près d’un quart des dépenses globales des familles et 40 % des dépenses de santé publique.
La création du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme en 2001, qui regroupe actuellement les deux tiers des fonds mondiaux internationaux, a marqué un tournant dans l’implication de la communauté internationale. Le Fonds travaille main dans la main avec Faire reculer le paludisme , un partenariat lancé en 1998, qui regroupe organismes internationaux, gouvernements des pays du Sud, entreprises privées, organisations non gouvernementales, et permet de coordonner les actions, d’éviter les incohérences et de renforcer les synergies.

Des moyens de lutte efficaces

Ces actions s’appuient sur les résultats de la recherche qui ont démontré l’efficacité des nouveaux médicaments à base d’artémisinine, à condition que celle-ci ne soit pas administrée seule pour éviter l’apparition de résistances, comme celle à la chloroquine: ce sont les combinaisons thérapeutiques, appelées communément ACT, encore onéreuses (1,3 $ par traitement pour un adulte) largement financées par les bailleurs de fonds.
Seulement, là où le bât blesse trop souvent, c’est dans l’administration de ces traitements. Pour avoir les meilleurs résultats, il faut traiter le plus tôt possible, dès l’apparition de la crise. Or, la plupart du temps, les malades commencent par se soigner eux-mêmes avec les médicaments dont ils disposent chez eux et ne vont au centre de santé le plus proche qu’en dernier recours. Là, ils ont souvent affaire à du personnel de santé mal payé, peu formé et mal informé des nouveaux traitements. Des études menées par l’IRD (Institut de recherche pour le développement) au Cameroun ont montré que ces soignants prescrivaient des anti-paludéens dépassés ainsi que des antibiotiques inutiles.
Le constat est unanime: le secteur de la santé publique, rendu exsangue par les ajustements structurels qui ont stoppé les recrutements, a donc besoin d’être reconstruit. Mais les populations ont aussi besoin d’être mieux informées. Comme l’explique Flore Gangbo , ex-ministre de la Santé du Bénin, gouvernants et société civile doivent s’impliquer. Dans son pays, des téléthons ont ainsi été organisés ainsi que des tontines pour l’achat de moustiquaires. La prévention par l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide a depuis longtemps prouvé son efficacité. Mais il ne suffit pas de les rendre disponibles à bas coût ou de les distribuer gratuitement, il faut ensuite savoir si et comment elles sont utilisées, si, par exemple, elles ne sont pas revendues ou utilisées comme filets de pêche ! Autre mode de prévention complémentaire: la pulvérisation d’insecticides répulsifs, en particulier de DDT, dans les maisons, est la dernière arme de l’arsenal, déjà effective dans quelques pays comme le Rwanda.

Des résultats spectaculaires

Là où les gouvernements ont pris le problème à bras le corps, les résultats ont été spectaculaires. C’est le cas, par exemple, au Mozambique où le nombre de morts du paludisme a diminué de plus de 80 %, ou du Burundi où les ACT sont désormais disponibles dans tous les centres de santé primaire et où les cas de paludisme ont diminué de 39 % entre 2000 et 2005. En Éthiopie, les trois quarts des enfants dorment maintenant sous une moustiquaire ce qui fait baisser drastiquement le nombre de morts des moins de 5 ans. Ces chiffres donnés par le Fonds mondial montrent bien l’efficacité de la lutte lorsqu’elle est menée à grande échelle dans un pays. Certains espèrent même que cette maladie ne sera plus un problème de santé d’ici une dizaine d’années.
C’est désormais aux Etats, insiste Awa Marie Coll-Seck , Secrétaire exécutive du partenariat Faire reculer le paludisme , de se prendre en charge. Seule une forte volonté politique pour mettre en œuvre des programmes nationaux peut permettre de juguler ce fléau ont affirmé les participants à la conférence ‘Faire plus et mieux contre le paludisme’, tenue en septembre 2007 à Paris, et qui a réuni les principaux opérateurs de la lutte, chercheurs comme financeurs.
En 2000, les chefs d’État africains se sont engagés à réduire de moitié d’ici 2010 la mortalité liée au paludisme et, en 2001, à allouer 15 % des budgets nationaux au secteur de la santé. Les conditions d’une lutte efficace contre ‘ cette maladie invisible qui nous perturbe sans cesse ‘, comme le dit Flore Gangbo, sont réunies. Les premiers résultats sont là, l’espoir aussi.
Marie-Agnès Leplaideur , InfoSud – Syfia

La Mutualité chrétienne du Hainaut oriental se bouge pour le sport!

Le 30 Déc 20

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La Mutualité chrétienne du Hainaut oriental ne ménage pas ses efforts pour promouvoir l’activité physique. Ses divers services et associations collaborent volontiers sur cette thématique: service de promotion de la santé, asbl sportives dédiées aux personnes actives et aux seniors. Il ne manque pas d’huile de bras pour faire bouger tous les publics! La mutualité possède même ses propres clubs! Découvrons ensemble la philosophie qui l’anime…
En cette période où le surpoids, l’obésité et la sédentarité font la une des magazines, la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental souhaite inverser la tendance. Sa devise en matière d’activité physique est «Bougeons-nous, ça fait un bien fou». Elle a choisi résolument la voie du sport pour tous. On n’y parle ni d’élite ni de compétition, la première préoccupation est que tout un chacun trouve le sport qui lui convienne et y prenne avant tout du plaisir.
Pour y parvenir, la mutualité, avec ses asbl Promusport (1) et Sport Seniors (2), organise notamment des journées (voir encadré) lors desquelles le public peut s’initier gratuitement à des activités qu’il n’a pas l’occasion de découvrir autrement, par manque d’accessibilité ou de moyens financiers. Citons par exemple l’indiaka (3) ou le nordic walking (4).
Ces journées sportives proposent aussi des activités à la portée de tous. « N’importe qui , avec une bonne paire de baskets , peut venir s’initier à la marche » nous explique Dominique Serbruyns , responsable du service Infor Santé.
La mutualité joue aussi la carte de la proximité. Elle tente d’aller à la rencontre des gens grâce à la collaboration précieuse de ses circonscriptions, c’est-à-dire de comités locaux de bénévoles qui se réunissent pour organiser des événements avec le soutien du siège régional.
Le service communication n’est pas en reste puisqu’il collabore activement aux projets en aidant ses collègues à attirer le public: annonces dans En Marche (5), dans le journal gratuit 7Dimanche et dans le toute-boîte local.
Cela permet de montrer aux personnes de la région que leur mutualité se bouge pour elles! A côté de cela, des dépliants sont distribués par les asbl partenaires de la Mutualité chrétienne et dans quelques salles de sport. Bien entendu, ce type d’événement est aussi l’occasion de mettre en avant l’avantage sport de la mutualité et le concept Réflexe Santé (voir encadré).
Le service promotion de la santé de la mutualité ne s’arrête pas là. Des ateliers du dos se sont déroulés à Soignies (6) durant l’année 2007-2008, une après-midi de promotion de l’activité physique (7) pour les plus de 50 ans a été organisée avec Carolo-Prévention-Santé, les ateliers de sophrologie ont aussi beaucoup de succès…
Des partenariats solides ont également été mis en place dans la région depuis de nombreuses années: La Louvière Ville santé, Educa-Santé, Carolo-Prévention-Santé et Infor Santé constituent des groupes de travail mixtes et ont l’habitude de mener une réflexion commune. Des ateliers Equilibre sont en préparation dans la région (8).

Le concept Réflexe Santé de la Mutualité chrétienne

L’ensemble des mutualités régionales francophones et germanophone de la Mutualité chrétienne ont entamé un grand chantier: faire connaître toutes leurs initiatives en matière d’activité physique et d’alimentation saine et se profiler dans ce cadre, comme un organisme de référence. C’est ainsi que chaque initiative touchant à ces deux thématiques se voit attribuer depuis un peu plus d’un an le logo (9) Réflexe Santé .
Dans cette optique, la Mutualité chrétienne du Hainaut Oriental, comme ses consoeurs, propose un avantage sport (10) visant le public des 0-30 ans. Mais ce n’est pas tout puisqu’elle organise aussi des journées spécialement dédiées aux familles ou aux seniors. Enfin, elle tient aussi particulièrement à s’attacher à la tranche d’âge 30-50 ans, difficile à atteindre.

Promusport, du sur mesure

Promusport, l’asbl sportive de la mutualité, prône aussi le sport pour tous. Education Santé a rencontré pour vous son responsable, Etienne Mathues .
Education Santé: Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est Promusport?
Etienne Mathues: Promusport est une asbl de la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental qui soutient les initiatives et les projets bien-être par le sport et l’activité physique. Elle est née d’une initiative de la Mutualité chrétienne de La Louvière, avant la fusion (11). Progressivement, les activités de Promusport se sont répandues au-delà de la région du Centre mais à cause de l’ancrage historique, la majorité des activités des clubs (voir plus loin) est toujours principalement située dans cette région.
A l’époque de la création, l’idée était de cibler les personnes actives car les enfants avaient leurs clubs et les seniors disposaient de structures adaptées. Le défi était alors de faire bouger les gens pris dans la vie active. Comme il y avait alors un grand engouement pour les joggings, l’asbl s’est d’abord lancée dans l’organisation de challenges. On en est au quinzième aujourd’hui!
E.S.: Quel est le principe de ces challenges?
E.M.: Nos challenges rassemblent des organisateurs de joggings qui partagent notre philosophie: favoriser la participation, pas la performance. L’année passée, nous avons battu un record avec 21 joggings organisés! Les distances, les parcours, les difficultés sont variables. Parfois, il y a deux boucles, une courte et une longue. Parfois, il n’y en a qu’une…
Nous encourageons les organisateurs à prévoir des circuits pour les enfants. De cette manière, les gens se déplacent en famille. Si les parents choisissent de venir courir, l’enfant, lui, peut faire, selon sa catégorie d’âge, des parcours entre 100 et 1500 mètres.
Vous l’aurez compris, les joggings sont ouverts à tout le monde. Même les aînés y participent!
Nous tentons d’encourager la participation en promettant aux participants une récompense à l’issue des 21 joggings. Pour avoir une chance de la remporter et être reconnus comme «challengers», les coureurs doivent s’engager à participer à un minimum de 8 courses. Dès lors, ils gagnent le droit de participer à un tirage au sort qui a lieu au mois de mars, avant la relance du cycle suivant.
Les lots sont toujours en lien avec le sport bien entendu: un vélo, des séances de relaxation bien-être…
Pour favoriser encore davantage la participation, ces challenges sont entièrement gratuits, que les participants soient membres ou non de la Mutualité chrétienne.
En général on compte environ 50 challengers par course, mais depuis 2 ans on frôle la centaine d’inscriptions. Et lors de la course au terme de laquelle a lieu la remise des prix, ce sont pas moins de 250 joggeurs que nous attendons!
Depuis peu nous essayons d’insuffler un courant solidaire dans les challenges, en collaborant avec Solidarité Mondiale. Nous essayons donc de sensibiliser au sport éthique. Par exemple, nous encourageons le public à s’interroger sur l’origine de ses chaussures de course.
E.S.: Quelles sont les autres activités de Promusport?
E.M.: Promusport dispose d’une dizaine de clubs actifs tout au long de l’année, ce qui représente environ 500 à 600 personnes. Gymnastique, yoga, sophrologie… Le choix des activités pratiquées dans les clubs dépend surtout de la personne qui prend en charge l’organisation au niveau local. Nous privilégions la forme associative. Nous ne déléguons donc pas d’employés de Promusport pour gérer les activités, ce sont des personnes bénévoles de la localité qui s’en chargent. Comme le service est en partie financé par les cotisations de nos affiliés, nous appliquons un tarif de participation différencié pour les membres de la mutualité chrétienne et les autres.
Le troisième type d’activités que nous organisons, ce sont les stages sportifs pour les 3-13 ans. Jusqu’il y a peu, ils étaient organisés pendant les vacances de Pâques et d’été, aujourd’hui il y en a aussi pendant la semaine de Carnaval et bientôt à la Toussaint. Ils ont lieu partout sur le territoire de notre mutualité, dans des infrastructures sportives ou des écoles.
Nous travaillons souvent en partenariat avec l’asbl Jeunesse & Santé (12). Nous profitons de leur expérience avec le public jeune et en retour, ils bénéficient de matériel sportif.
Nous organisons une douzaine de stages par an, pour environ 800 enfants. Ceux-ci sont encadrés par des psychomotriciens ou des licenciés en éducation physique, ce n’est pas du volontariat. A nouveau, l’intention n’est pas de travailler une seule discipline ni la performance, mais de redécouvrir le plaisir de bouger, en harmonie avec son corps.
Enfin, nous organisons des activités collectives d’initiation à la marche d’orientation, au nordic walking… en gardant à l’esprit notre objectif, qui est d’en faire une activité permanente.
Comme pour toutes les activités de la mutualité, la promotion est importante. Le programme des joggings est publié dans des journaux spécialisés, les stages sont annoncés grâce à un mailing aux familles (environ 12 000 courriers). Pour atteindre un large public, on profite aussi du lectorat d’En Marche et de la fréquentation de nos clubs. Nous disposons en outre d’un trimestriel propre «Le Zest», et une page sur le site https://www.mc.be nous est réservée. Vous y trouverez la philosophie de l’asbl, un agenda des activités, et bien d’autres choses encore. En somme, les ressources internes sont telles qu’elles nous permettent largement d’assurer notre propre promotion.
E.S.: L’asbl a-t-elle des partenaires extérieurs?
E.M.: Nous travaillerons probablement bientôt avec les associations de parents, mais nous n’avons pas encore bien exploré cette piste à l’heure actuelle. Nous avons des contacts avec les associations de quartier, et les autres clubs sportifs. Bien entendu, nous collaborons aussi avec les circonscriptions. Enfin, les administrations communales peuvent être considérées comme des partenaires puisqu’elles mettent des lieux à notre disposition et nous offrent un financement.
E.S.: Quels sont les défis de Promusport actuellement?
E.M.: Nous devons redynamiser nos clubs en rajeunissant leurs participants. Ceux-ci ont grandi avec l’asbl en quelque sorte. Dès lors, nous nous rapprochons du public aîné de Sport Seniors . Nous sommes donc confrontés au défi de renouveler la formule ou de recruter des membres faisant partie de la tranche d’âge correspondant à la cible de l’asbl. Ce n’est pas simple car les actifs sont fort occupés. S’ils répondent à notre invitation lors de gros événements, inscrire leur participation à des activités régulières et les convaincre de s’engager reste difficile.
Par contre, je mène une expérience intéressante avec une association de parents: je leur ai proposé d’intégrer le jogging de l’école dans notre challenge. C’est une course particulière, pendant laquelle un duo se relaie pendant une heure sur une boucle d’un kilomètre et demi. En lien avec cette activité, j’ai créé un club où parents et enfants sont invités à «apprendre» à courir. Nous y sommes une dizaine de réguliers. Cela crée une dynamique d’exemple. Travailler avec les associations de parents est donc une piste d’action pour nous.
Enfin, étant donné que l’asbl ne dispose pas d’assez de personnel pour gérer ses activités, elle pourrait s’attacher à un périmètre restreint, et tenter un travail de réseau avec les associations, les clubs de sport et autres. Nous travaillerions main dans la main. En réalité, il serait intéressant de mettre en place une dynamique Réflexe Santé associant parents et enfants, et s’inscrivant dans le temps. Cela permettrait de montrer encore mieux au public que la Mutualité chrétienne essaye de le faire bouger!
E.S.: Des projets concrets pour le futur?
E.M.: Nous devons nous réunir bientôt pour définir des priorités pour l’asbl.
Je peux déjà vous dire que nous préparons ses 20 ans, qu’elle fêtera en septembre-octobre 2008. Pour l’occasion, nous envisagerons peut-être même un changement de logo…
Enfin, on parle de mettre au point un séjour pour familles dans l’optique de Réflexe Santé , avec 3 dimensions: l’expression (estime de soi), la découverte de la pyramide alimentaire (expérimentation de recettes, aller faire les courses…), et le plaisir de bouger (journée promenade à vélo…).

Une journée ‘sport et santé’ à Anderlues…

Le 23 septembre de l’an dernier, la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental organisait pour la troisième année consécutive une journée sport et santé destinée aux familles.
Dans la ligne de la philosophie générale du concept Réflexe Santé , la journée avait pour objectif de favoriser la pratique d’une activité physique régulière et l’alimentation équilibrée.
Pour l’occasion, tous les services et asbl de la mutualité ont uni leur force et leur savoir-faire.
Sur place, diverses activités aussi intéressantes qu’amusantes étaient organisées.

L’espace mutu

Jeunesse & Santé proposait des jeux coopératifs ayant pour objectif d’inciter le public à pratiquer une activité physique ensemble, pour arriver à un but commun. Des adolescents tentaient de se coordonner pour avancer par deux sur les mêmes skis, d’autres portaient un engin à deux roues sur lequel l’un de leurs camarades tentait d’attraper des anneaux avec un bâton…
Le parcours Yamakasi de Promusport avait pour objectif de faire réfléchir les gens sur leur approche de l’activité physique. Il s’agit d’un parcours de 10 minutes, comprenant 5 obstacles. Grâce à l’accompagnement d’animateurs, il permet aux participants de tester leur audace et de se rendre compte de leur capacité à surmonter les obstacles, de même qu’ils pourraient le faire s’ils s’engageaient dans une activité régulière. Le Yamakasi amorce donc la discussion et met les gens en réflexion. Il s’agit d’une activité attractive, mais elle nécessite la présence d’un animateur.
Des marches fléchées avaient lieu toute la journée: le public pouvait partir se balader quand il le souhaitait, pour un parcours de 5 ou 10 kilomètres.
Le Spéléobox, un semi-remorque à l’intérieur des méandres duquel les jeunes pouvaient découvrir les sensations d’un spéléologue, était une activité assez originale.
Un mur d’escalade de 6 mètres de haut avec divers degrés de difficulté avait aussi été dressé pour l’événement.
Des balades en poney étaient organisées dans un champ voisin.
Les tout-petits n’étaient pas en reste: des jeux de psychomotricité étaient à leur disposition.

La place du village

Sur «la place du village», les personnes en chaise roulante pouvaient s’initier au cyclo-danse, les autres à la salsa ou à l’art du cirque.
Un vélo presse-fruits permettait aussi au public de faire de l’activité physique et de savourer ensuite un excellent jus de fruits frais. Rien de tel pour allier sport, plaisir et alimentation saine!

L’espace «zen», ou «bien dans ma peau»

Au premier étage se trouvait un atelier d’initiation à la sophrologie, aux massages et un apprentissage de l’utilisation des huiles essentielles.
On y trouvait aussi le «parcours saveurs» dont l’objectif est de découvrir de nouveaux parfums. Le matin, des verrines contenant divers produits étaient disposées sur le bar. Les participants devaient deviner ce qu’elles contenaient. L’après-midi ce sont des glaces vanille sans sucre, nature ou au soja que le public pouvait découvrir et savourer.
Le Planning familial La Bulle (13) était aussi de la partie et proposait un parcours «estime de soi». Un premier stand consistait à traverser un parcours semé d’embûches, les yeux bandés. Cet exercice demande d’avoir confiance en soi pour ne pas tomber et avancer, ainsi que d’accepter de se laisser guider par un tiers. Sur un second stand, les participants étaient invités à s’allonger sur une feuille de papier, sur laquelle une animatrice contournait leur silhouette. Ensuite, après s’être relevés, on proposait à chacun d’indiquer sur le dessin ses défauts et ses qualités, sur chaque partie du corps. Un exercice intéressant pour travailler l’image de soi.
Enfin, un dernier stand leur proposait de dessiner leur blason, le but étant de développer leur sentiment d’appartenance. Finalement, les candidats revenaient au point de départ et étaient invités à se regarder dans le miroir. C’est alors qu’ils faisaient le point avec une animatrice sur ce que le parcours avait changé en eux, ce qu’il leur avait permis d’apprendre.
Au deuxième étage, l’atelier «Mon look à moi» a remporté un réel succès. Son objectif était de «rehausser» l’estime de soi, d’aider à reprendre confiance grâce à son look. Cela peut paraître superficiel mais rares sont les gens qui peuvent se permettre financièrement de faire appel à une professionnelle pour demander ce type de conseils. Cela fait pourtant partie du bien-être.
Un atelier «gymnastique douce» sur ballon était animé par un kinésithérapeute: des exercices simples à refaire chez soi!

L’espace livres, contes et jeux et l’espace pour les tout-petits

Les jeunes enfants pouvaient se rendre dans un espace qui leur était spécialement dédié: jeux de société sur la santé (alimentation saine, accidents domestiques…), espace contes, atelier déguisement et grimage, animations musicales…Le hall omnisportAu hall omnisport proche de la mutualité étaient organisés un tournoi de pétanque intergénérationnel, une initiation à la pétanque pour aveugles et malvoyants, un tournoi de mini-hockey, une initiation au rugby…
Un parcours de sensibilisation permettait aussi aux personnes valides de se rendre compte des obstacles que peuvent rencontrer quotidiennement les personnes à mobilité réduite.En somme, une superbe journée ensoleillée, tout en santé!
Nous vous donnons rendez-vous pour la quatrième édition de cette journée ‘sport et santé’ le 28 septembre 2008. Parmi les nouveautés, j’épinglerai spécialement des ateliers créatifs pour tous, une démonstration de kapuera, un vol de mini-montgolfières, des initiations à différentes danses – de la tectonique à la ‘country’ -, des initiations au cirque pour les enfants, du tir à l’arc pour les plus adroits, des combats médiévaux pour les nostalgiques…

Un témoignage

Philippe , invité lors de la journée du 23 septembre , nous parle de sa passion pour le sport qui rime avec plaisir d’abord’ .
« Un jour , je me suis retrouvé à l’hôpital , dans le coma pendant un mois et demi . Mes amis ont bien cru que j’allais mourir Je me suis finalement réveillé et je suis encore resté immobilisé plusieurs mois . C’est alors qu’on réfléchit . Je me suis rendu compte que la vie se savourait par les échanges , l’amitié mais aussi par le monde qui nous entoure tout simplement : la nature , les arbres ,…
Couché sur mon lit d’hôpital , voyant les saisons changer , les arbres perdre leurs feuilles et verdir à nouveau , le ciel devenir de plus en plus clair , la pluie tomber je me sentais enfermé . J’ai pensé que j’avais loupé quelque chose pendant 20 ans . Ainsi , à ma sortie , j’ai choisi un sport en lien avec la nature . Il faut pouvoir y entrer et la respecter . Le vélo est un outil remarquable pour le faire
Depuis lors , je suis un sportif passionné . Je fais du VTT de manière intensive . Je me mets en forme les premiers mois de l’année pour faire ensuite un grand tour de 7 journées avec mon fils . C’est la sixième fois qu’on le fait . En fait , ce sont d’énormes randonnées de 600 700 km en VTT , uniquement en forêts et dans les champs , jamais de route ! On nous parachute à 700 km de notre village et nous revenons à vélo , logeant chaque nuit à l’hôtel après des étapes de 80 90 100 km selon la difficulté . Cela nous a permis de découvrir le Rhin , les Vosges
C’est un plaisir fabuleux de faire tous ces kilomètres . D’abord , c’est super de pouvoir réaliser ce genre d’exploit avec son fils . On partage beaucoup de choses : on rigole de tout , on apprend à dédramatiser , on peut aussi parler d’un tas de choses sérieuses . Ce sont des moments privilégiés .
Ensuite , le plaisir réside dans le fait de découvrir des paysages . Les choses les plus simples prennent un autre goût , comme par exemple un pique nique au bord d’une rivière après un bon effort , se reposer , écouter la nature , se dorer au soleil Ce sont des plaisirs simples qu’on savoure d’une manière plus intense .
Après 7 jours d’efforts , on revient au village : la famille et les amis sont là , ils nous attendent , on boit un verre tous ensemble et on raconte ce qu’on a vécu . On est heureux , on a pris l’air , on a pris énormément de plaisir aussi .
Le vélo c’est génial : une fois qu’on a fait 100 km , cela devient facile , on peut passer une journée entière dessus . Avec une centaine de kilomètres de plus , on peut commencer à aborder des montées En plus , c’est accessible à tout le monde , et plus on en fait , mieux on se sent

Vous l’aurez compris, à la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental, on ne plaisante pas avec le sport, on fait les choses en grand… et ça marche!Pour en savoir plus sur les activités organisées à la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental, n’hésitez pas à consulter le site Internet https://www.mc.be (choisir la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental).
Vous pouvez aussi prendre contact avec:

  • Infor Santé (service de promotion de la santé): Dominique Serbruyns, responsable, 071 548 318, dominique.serbruyns@mc.be
  • Promusport (asbl sportive): Etienne Mathues, responsable, 071 548 319, promusport.anderlues@mc.be
  • Sports Seniors (asbl sportive pour les aînés): Renée Michel, responsable, 071 548 408, renee.michel@mc.be

(1) Asbl sportive de la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental. Public cible: personnes actives. Voir https://www.jspromusport.be
(2) Sports Seniors est l’asbl sportive de l’UCP, mouvement social des aînés de la Mutualité chrétienne. Pour en savoir plus: https://www.sportsseniors.be
(3) L’indiaka est un sport mettant en jeu deux équipes évoluant sur un terrain séparé par un filet au-dessus duquel est envoyé un volant spécial, l’indiaka, joué de la main.
(4) Le nordic walking est un sport de plein air qui consiste en une marche accélérée avec des bâtons de marche spécifiques.
(5) Le journal de la mutualité, distribué dans toute la région.
(6) Voir Infor Santé ou comment faire de la promotion de la santé de 1001 façons , Education Santé n° 231, février 2008.
(7) A venir prochainement dans Education Santé .
(8) A découvrir dans quelques mois dans Education Santé .
(9) Pour en savoir plus: https://www.reflexesante.be
(10) Remboursement annuel de 35 euros pour les membres âgés de moins de 30 ans pratiquant une activité sportive régulière dans une infrastructure. Pour en savoir plus: https://www.mc.be
(11) En 1995, les Mutualités chrétiennes de Charleroi, Lobbes et La Louvière ont fusionné pour former la Mutualité chrétienne du Hainaut oriental. Il y a une seconde Mutualité chrétienne (Tournai, Mons, Mouscron) dans la province.
(12) Jeunesse & Santé est l’organisation de jeunesse de la Mutualité chrétienne. Pour en savoir plus: https://www.jeunesseetsante.be
(13) Pour en savoir plus: https://www.la-bulle.be

Diabolo-Manques’, histoire d’une évaluation

Le 30 Déc 20

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Pour vous mettre l’eau à la bouche…

Cet article présente les grandes lignes d’une brochure, coéditée par l’APES-ULg et par la Maison du Social de la Province de Liège, et intitulée «Diabolo-Manques – Une exploration à la découverte de soi – L’évaluation d’un programme de prévention des assuétudes en Province de Liège». Cette brochure d’une vingtaine de pages décrit de façon synthétique et intégrée les différentes phases d’évaluation de ce programme ainsi que leurs résultats.
Cette évaluation s’est déroulée entre fin 1999 et fin 2003. Depuis lors, le programme «Diabolo-Manques» a évolué. L’intérêt actuel de ce document réside donc surtout dans la découverte d’une démarche d’évaluation participative et négociée, telle que l’équipe de l’APES-ULg la propose. Vous y trouverez également des exemples concrets et utilisables d’outils d’évaluation.
De façon plus globale, cet exemple montre qu’il est possible de travailler sur l’évaluation d’un programme de prévention des assuétudes. L’évaluation dans ce domaine représente certes un défi. Les participants à l’atelier «Evaluation» du Premier Congrès International de la Francophonie en Prévention des Assuétudes (mai 2006) ont documenté les principales problématiques et les principaux enjeux liés à cette question (Absil G., Vandoorne C. et al, 2006). Un défi donc, mais un défi qui peut être relevé, pour autant qu’on y consacre les moyens et la rigueur nécessaires.
Par ailleurs, les auteurs de cette brochure espèrent que les résultats présentés enrichiront vos réflexions et vous encourageront à mettre en question diverses modalités d’intervention en matière de prévention des assuétudes…
Le texte intégral est disponible à l’APES-ULg et dans les CLPS /points d’appui assuétudes, dans le cadre de la collection «Stop, j’agis». Il est aussi téléchargeable sur https://www.apes.be .
En voici donc un avant-goût…
En parallèle à cette brochure, l’article ci-dessous est constitué de trois parties principales:
-une introduction exposant à la fois les grandes lignes du programme «Diabolo-Manques» et les caractéristiques de l’évaluation proposée (évaluation négociée, organisée en trois phases cumulatives);
-une brève partie méthodologique fournissant des informations sur les questions d’évaluation étudiées ainsi que sur les outils de recueil de données;
-une présentation des principaux résultats, présentation structurée en fonction des questions d’évaluation retenues.

Présentation du programme «Diabolo-Manques»

En octobre 1999, était inaugurée à Liège une exposition itinérante, intégrée dans un programme de prévention des assuétudes destiné au milieu scolaire. «Diabolo-Manques» a depuis lors fait le tour de la Province de Liège, entraînant dans son sillage élèves (essentiellement du niveau secondaire inférieur mais aussi de 5e et 6e primaire), professeurs, éducateurs, intervenants de terrain en prévention… et évaluateurs.
La visite du bus «Diabolo-Manques», support attractif et hautement symbolique, s’intègre dans une multitude d’autres démarches:
-création (ou renforcement) d’un partenariat entre diverses associations de terrain spécialisées en prévention des assuétudes (dites «associations-partenaires») afin d’initier la démarche dans les écoles (volontaires) de la région;
-formation des enseignants, par les associations-partenaires, dans les écoles participantes;
-visite de l’exposition par les élèves (visite proposée, dans certains cas, à l’ensemble de la communauté éducative, y compris les parents);
-exploitation de la visite par les enseignants formés, en étroite collaboration avec les associations-partenaires;
– forum, rassemblant les acteurs ayant participé au projet, et dont l’objectif est de lancer une dynamique concrète et des projets dans l’école.

Une évaluation participative et négociée

Dès le départ, les promoteurs du programme ont souhaité consacrer un budget et de l’énergie à l’évaluation du programme. Ils se sont adressés à l’APES-ULg pour cette évaluation, qui a été voulue négociée et participative. Elle a été négociée sur le plan du choix des objets d’évaluation, de la construction des outils de recueil de données et de la diffusion des résultats. Chaque protocole d’évaluation a été négocié avec les promoteurs et les principaux acteurs impliqués dans la construction du programme «Diabolo-Manques». Cette négociation a permis:
-d’assurer la pertinence et la faisabilité du travail de récolte et d’analyse des données;
-de favoriser l’utilisation des résultats;
-de favoriser l’acceptation de la présence sur le terrain d’un évaluateur externe;
-de stimuler l’implication des intervenants de terrain dans l’évaluation.
L’évaluation a été participative, car les intervenants de terrain encadrant le programme ont été activement impliqués dans le recueil et l’interprétation des données.
Au total, trois phases d’évaluation ont permis de poser sur le programme un regard nuancé et, surtout, ont fourni aux promoteurs et aux intervenants des pistes concrètes pour l’action.

Une évaluation itérative

La première phase de l’évaluation (2000) s’est déroulée pendant la première année d’implantation du programme; elle a essentiellement porté sur des éléments de processus et d’implantation.
Après deux années de fonctionnement (2002), les promoteurs ont souhaité que soit réalisée une évaluation à moyen terme des résultats. On s’est surtout intéressé, lors de cette deuxième phase, au suivi à moyen terme (lancement d’actions, ouverture vers l’extérieur, modifications positives ressenties au sein de l’école…), à la qualité et la richesse du partenariat, à l’implication de l’équipe éducative, ainsi qu’à la formulation et l’atteinte d’objectifs.
En 2003, l’impact à court terme du programme auprès des élèves a été étudié. En concertation, cette troisième phase d’évaluation a porté sur l’impact immédiat de la visite du bus et des animations, soit sur trois catégories d’objectifs: des objectifs portant sur l’expression et le dialogue, sur l’implication et la participation, ainsi que sur l’élargissement des représentations.

Les huit questions d’évaluation retenues

Contraintes techniques et institutionnelles
Quelles ont été les difficultés organisationnelles et les contraintes techniques? Dans quelle mesure ce programme est-il facile à mettre en place?
Niveau de participation de la communauté éducative
Quelle était la motivation à participer? Quelle a été la qualité / l’intensité de la participation et des partenariats?
Travail des associations-partenaires
Quelles difficultés ont-elles rencontrées? De quel soutien auraient-elles besoin pour appliquer le dispositif? Quel intérêt ont-elles eu à participer au programme?
Eléments moteurs sur lesquels construire les pistes d’avenir du programme
Les différents acteurs ont été interrogés sur leur opinion quant à quelques pistes de développement du programme.
Impact à court terme du programme dans l’école
Dans quelle mesure le programme a-t-il permis une progression de l’école quant à la prévention des toxicomanies ou à d’autres objectifs du projet d’établissement?
Impact à moyen terme du programme dans les écoles
Dans quelle mesure le passage du bus «Diabolo-Manques» a-t-il laissé des traces dans l’école durant l’année ou les deux années qui ont suivi celui-ci?
Impact du programme au niveau des élèves
Les objectifs portant sur les élèves ont-ils été atteints? Cette évaluation a porté sur certains objectifs seulement.
Visibilité du programme
Dans quelle mesure l’action a-t-elle été visible auprès du grand public?

Les conclusions intégrées des trois phases d’évaluation

L’évaluation donne de «Diabolo-Manques» une image globalement positive…
Le programme est mobilisateur ; il suscite la participation d’un grand nombre de personnes; il rencontre du succès auprès des élèves, qui pour la plupart estiment qu’il a permis l’instauration d’un dialogue et d’un climat de confiance. La majorité des écoles expriment leur satisfaction quant à l’outil «Bus» pour son effet dynamisant, l’ouverture qu’il apporte dans le dialogue, le repositionnement qu’il entraîne chez les enseignants et les éducateurs, la visibilité qu’il donne à l’intérêt d’un établissement pour la prévention des toxicomanies…
Le programme stimule le partenariat: en grande partie, il a atteint ses objectifs de renforcer le travail d’équipe, de créer des partenariats dans et à l’extérieur de l’école, de favoriser le dialogue et la communication…
Le programme a des effets concrets : son impact dans les écoles est réel. Les principaux effets mis en évidence sont les suivants:
-la naissance d’une réflexion approfondie et d’une approche critique sur ce sujet;
-la dédramatisation et l’élargissement des conceptions des adultes concernant la toxicomanie;
-la mise en place de collaborations internes à l’école;
-la création d’un groupe-relais au sein des écoles;
-l’ouverture d’un dialogue avec les élèves;
-la mise en place de projets de prévention concrets et l’implication des jeunes dans ceux-ci.
Le programme comporte une formation pertinente pour les associations de terrain: les résultats de la première phase de l’évaluation avaient pointé toute une série de difficultés rapportées par certaines associations-partenaires. Les conclusions de l’évaluation suggéraient l’organisation d’une formation à l’encadrement du programme. Cette formation a très rapidement été mise en place et est proposée chaque année depuis lors.
Cette image positive est néanmoins assortie de quelques réserves et points faibles à améliorer si l’on veut qu’elle concerne une plus grande proportion d’écoles participantes
Une planification mieux prévue: les différents partenaires doivent avoir la possibilité de s’engager dans le programme suffisamment tôt avant la venue du bus.
Une convention à conserver et à clarifier: la convention qui lie les écoles et la Province facilite la participation car les écoles, en s’inscrivant, s’engagent en connaissance de cause.
Certains éléments pourraient cependant être revus:
-adapter la convention selon que l’école accueille ou non le bus;
-clarifier l’information à donner aux parents et l’implication souhaitée de ceux-ci;
-insister sur certaines conditions favorables à une plus grande implication des enseignants.
Une continuité dans l’encadrement: il est important que les personnes inscrites participent à toutes les séances de formation et encadrent les élèves lors du déroulement du programme. Inversement, les personnes encadrant les élèves doivent avoir suivi la formation depuis le début.
Tous reconnaissent la difficulté à mobiliser de façon suivie la communauté éducative sur le long terme. Divers éléments pourraient être mis en place pour contourner cette difficulté:
-ne pas planifier de visite du bus durant les derniers mois de l’année scolaire, car dans ces situations, il est difficile d’organiser un suivi;
-valoriser l’investissement des professeurs, qui très souvent sont en petit nombre et s’investissent sur la base du volontariat;
-favoriser la reconnaissance de l’action de certains professeurs par la direction et par le reste du corps enseignant; pour ce faire, il faut qu’une stratégie de communication soit établie au sein de l’école afin de renforcer la visibilité interne de l’action;
-augmenter les moyens matériels et humains: subsides particuliers, formations complémentaires du personnel enseignant, collaboration avec d’autres intervenants ou associations…
Finalement, l’évaluation laisse une question classique en suspens: quelle place pour une approche des produits?
Un nombre non négligeable d’établissements (et d’élèves) regrettent le manque d’informations sur les produits et craignent un excès dans la dédramatisation du thème des toxicomanies. On constate ainsi que plusieurs établissements ont organisé, en complément du programme «Diabolo-Manques», la visite d’autres expositions ou des informations par la gendarmerie, centrées sur les produits.
La participation au programme «Diabolo-Manques» n’a donc pas résolu entièrement la rupture classique entre les demandes explicites de la population (enseignants, élèves, parents) et le projet des professionnels de la prévention et de la promotion de la santé, qui situent clairement la prévention par rapport aux comportements et situations de consommation plus que par rapport aux produits.
Les professionnels de promotion de la santé évaluent l’impact de leurs interventions en prévention des assuétudes à l’aune des effets sur la santé globale de la personne. Selon le programme quinquennal de promotion de la santé de la Communauté française, la prévention des assuétudes poursuit ainsi les objectifs suivants:
-développer les compétences favorisant la santé mentale et relationnelle et promouvoir un équilibre de vie qui ne soit pas dépendant de la consommation régulière de substances psycho-actives;
-aider les jeunes à se situer personnellement par rapport à la consommation de substances psycho-actives, en prenant en compte les projets de vie personnels des jeunes et leurs conditions de vie, mais aussi la réalité sociale.
Ainsi, la rencontre entre d’une part des demandes persistantes d’information sur les produits et d’autre part des pratiques professionnelles jugées efficaces en prévention des assuétudes, constitue un défi sans cesse renouvelé. Pour continuer à documenter celui-ci, nous vous donnons rendez-vous dans un prochain numéro pour l’évaluation d’un autre type de programme de prévention des assuétudes.
Sophie Grignard et Chantal Vandoorne , APES-ULg
Adresse des auteures: APES-ULg, Sart Tilman, Bât B23, 4000 Liège.

Bibliographie

-Grignard S., Vandoorne C. «Diabolo-Manques»: rapport d’évaluation de la première année. Liège: Université de Liège, juillet 2000.
-De Waele A., Grignard S., Vandoorne C. «Diabolo-Manques»: rapport d’évaluation de la troisième année. Liège: Université de Liège, novembre 2002.
-Garot J. «Diabolo-Manques»: évaluation auprès des élèves [mémoire de fin d’études]. Liège: Université de Liège, année scolaire 2002-2003.
-Grignard S., De Waele A., Garot J., Vandoorne C., en collaboration avec la Maison du Social de la Province de Liège et la Commission provinciale de Prévention des Assuétudes . «Diabolo-Manques», une exploration à la découverte de soi: l’évaluation d’un programme de prévention des assuétudes en Province de Liège. Liège: APES-ULg [coll. Stop J’agis]. Mai 2006.
-Grignard S., Vandoorne C. L’évaluation d’un programme de prévention des assuétudes en milieu scolaire: un exemple d’évaluation participative et négociée. Communication présentée au Colloque international de Promotion de la santé, Luxembourg, 2007.
-Absil G., Vandoorne C., Coupienne V., Leva C., Anceaux P., Bastin P., Anciaux G., Dungelhoef C., Humblet D. L’évaluation des projets de prévention des assuétudes. L’Observatoire. 2006. N° 51-52. pp. 139-145.
-Scruel, S. Contribution à l’évaluation d’un outil de prévention des assuétudes: le labyrinthe des toxicomanies. Mémoire présenté en vue de l’obtention du titre de Licencié en Sciences de la santé publique, orientation Promotion de la santé, section Prévention et Education pour la santé. Année académique 2006-2007. Liège: Université de Liège, 2007, 36 p.

Manger et bouger à l’école

Le 30 Déc 20

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Le 30 janvier dernier, le Plan national nutrition santé organisait une journée d’échanges sur cet enjeu fondamental, en étroite collaboration avec la Communauté française.
Cela se passait sur le campus du Ceria (Centre d’enseignement et de recherche des industries alimentaires et chimiques, Anderlecht), un lieu particulièrement adapté à la problématique. Beaucoup de gens s’étaient déplacés, enseignants, étudiants, professionnels de la promotion de la santé, pour suivre le matin un programme varié, ‘modéré’ avec une pointe d’humour acide par Eric Frère .
Après le mot d’accueil de l’hôtesse du jour, Françoise Dupuis (Secrétaire d’Etat de la Région de Bruxelles-Capitale), Laurence Doughan , une des chevilles ouvrières du PNNS, nous en rappela les priorités.
Carine Seeuws , responsable de l’asbl Nubel, expliqua le rôle de ce projet commun des secteurs public et privé, en particulier le logiciel du planning alimentaire, qui permet un suivi diaboliquement précis des apports et dépenses énergétiques d’un individu.
Pour suivre, Anne Boucquiau (Cabinet de la Ministre de la Santé Catherine Fonck ) et Rajae Essefiani (Cabinet de la Ministre-Présidente Marie Arena ) eurent l’occasion de décrire les nombreuses initiatives prises par la Communauté française dans le domaine depuis plusieurs années.
Un exemple concret de journée sportive au profit de près de 1500 enfants (1) nous fut relaté par Fabienne Henry (PSE de la Ville de Bruxelles), avec son enthousiasme communicatif.
Marie-Josée Mozin , du Club européen de l’enfance, nous présenta une étude (avec classe expérimentale et classe témoin) sur l’influence de l’alimentation scolaire sur l’évolution staturo-pondérale et le comportement d’enfants de 5 à 6 ans. Outre le caractère encourageant des résultats, on retiendra de son exposé qu’il y a plus de publications scientifiques sur le comportement alimentaire des chiens que des enfants!
Luc Berghmans et Véronique Tellier (Observatoire de la Santé du Hainaut) nous firent part de dix ans d’observations des comportements alimentaires des jeunes dans la province belge. Le verdict: l’épidémie de surpoids semble se stabiliser peu à peu, mais à un niveau malheureusement très élevé, 25% des jeunes étant touchés, avec parmi eux un quart présentant une obésité franche…
Après une brève respiration, quelques exercices de tai-chi qui mirent la salle de bonne humeur, le lunch fut évidemment très ‘santé’ : potage, waterzooi pommes nature et fruit.
L’après-midi fut consacrée à une demi-douzaine d’ateliers, qui ne purent pas favoriser les échanges autant que souhaité pour des raisons indépendantes de la volonté des organisateurs.
Enfin, Marie Arena remit (au pas de course, ouf) à une cinquantaine d’écoles de la Communauté française le label ‘Manger bouger’ qui récompense pendant un an leur créativité en la matière.
En résumé, il ne fallait pas attendre de cette journée l’apparition d’un nouveau paradigme en matière de promotion de l’alimentation saine et de l’exercice physique, mais elle témoigna avec succès que le sujet est maintenant clairement à l’agenda, et mobilise notamment pas mal de parties prenantes autour de l’environnement scolaire. C’est déjà un acquis appréciable.
Christian De Bock (1) Nous l’avons évoqué dans Education Santé : Sportez-vous bien une fois… , B. Cerisier, n°222, avril 2007.

La sécurité des enfants en Belgique

Le 30 Déc 20

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Les traumatismes sont la cause principale de mortalité chez les enfants et les jeunes de 0 à 19 ans en Belgique. Chaque année, 300 enfants de 0 à 19 ans en moyenne meurent en Belgique suite à un traumatisme non intentionnel (accidentel). C’est dans ce contexte qu’a été développé, au niveau européen, le ‘Child Safety Report Card’, un outil visant à mesurer les prestations d’un pays dans le domaine de la sécurité des enfants. La Belgique, avec une moyenne de 3 sur 5, obtient juste ‘une satisfaction’, mais un peu plus d’ambition serait probablement bienvenue!
La ‘European Child Safety Alliance (ECSA)’ a examiné, en collaboration avec ses membres nationaux, le niveau de sécurité des enfants dans 18 pays de l’Union européenne. Un aperçu des scores par pays est repris dans une ‘Child Safety Report Card’, qui est basée sur un examen de bonnes pratiques prestées en Belgique dans le domaine de la sécurité des enfants et des jeunes jusqu’en juillet 2006.
Les scores concernant la sécurité des enfants démontrent que la Belgique peut mieux faire dans le domaine de l’introduction de mesures en faveur d’une amélioration de la sécurité des passagers et des cyclistes ainsi que de la prévention des noyades, chutes, brûlures et étouffements/strangulations.

Vers une approche consolidée

Les chiffres ne sont pas du tout encourageants et soulignent le besoin d’une approche plus stricte. Il faut par exemple qu’une stratégie nationale soit développée qui envisage des buts spécifiques relatifs à la sécurité des enfants et des adolescents.
A cause de la complexité institutionnelle belge, les compétences en matière de sécurité des enfants sont dispersées. Le secteur de la ‘prévention des accidents’ est tout aussi disséminé. Une approche coordonnée de toutes les actions en vue d’améliorer la sécurité des enfants, tant au niveau des autorités publiques que dans le secteur de la ‘prévention des accidents’, s’impose.
Les données chiffrées concernant les accidents dans la sphère privée sont plutôt rares et souvent incomplètes en Belgique. Pourtant la connaissance des causes et caractéristiques des accidents est une condition importante pour pouvoir mener une politique de prévention et garantir la sécurité des consommateurs. Disposer de données uniformes, scientifiques et représentatives sur les accidents, doit devenir une priorité absolue.
Par ailleurs, il y a un besoin spécifique de formation d’experts techniques et de construction de réseaux pour promouvoir l’échange d’informations sur les bonnes pratiques et l’expertise.

Actions concrètes

La Belgique ne baisse cependant pas les bras. Le CRIOC, en tant que représentant belge et membre de l’ECSA, a coordonné l’élaboration d’une proposition pour un plan d’action belge pour la sécurité des enfants (1) en concertation avec toutes les parties prenantes. Le processus fut mené par un Comité de planification (2). La proposition repose sur huit priorités thématiques, dont chacune souligne un aspect spécifique de la sécurité des enfants, et contient des recommandations concrètes, comme une éducation permanente à la sécurité routière (connaissances, aptitudes et attitudes) dans l’enseignement fondamental et secondaire.
Pour la prévention de brûlures , le plan d’action plaide pour l’obligation d’utiliser des détecteurs de fumée dans tous les logements privés et d’imposer que seuls des chauffe-eau équipés d’un système sécurisé de pré-programmation de la température puissent être introduits sur le marché.
Pour la prévention des chutes , les constructions doivent être rendues plus sûres pour les jeunes enfants de 0 à 4 ans, notamment en adaptant la norme pour les balustrades.
Ce ne sont que trois exemples parmi d’autres. La proposition complète du plan d’action belge pour la sécurité des enfants, un résumé de chaque priorité, ainsi que toute autre information concernant le Plan d’Action belge et la Report Card, sont disponibles sur le site [L]www.crioc.be[/L].
D’après un communiqué du CRIOC

(1) Le plan d’action traite uniquement les traumatismes non intentionnels (tous les accidents).
(2) Voici sa composition: Jan Deconinck (Cabinet fédéral de la Consommation), Maureen Logghe (Service public fédéral Economie, PME, Classes moyennes et Energie, Service Sécurité des Consommateurs), Anne Vandenberghe (Service publique fédéral Mobilité et Transport, Direction Sécurité Routière), Christophe Courouble (Service public de Programmation Protection des Consommateurs), Lynn Dupuis et Kirsten De Muler (Institut Belge pour la Sécurité Routière – Cellule Education), Kirsten De Mulder, Institut Belge pour la Sécurité Routière (IBSR), Barbara Vanden Bulcke (Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap, Agentschap Zorg en Gezondheid), Mia Van Laeken (Vlaams Instituut voor Gezondheidspromotie), Martine Bantuelle (Educa Santé), Martine Bauwens (Cellule Environnement et Santé)

Les jeunes et le porno

Le 30 Déc 20

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La Mutualité socialiste et ses asbl développent leurs actions en fonction des problématiques particulières rencontrées par des groupes d’individus spécifiques. Il est incontestable que la sexualité est un domaine qui touche particulièrement les jeunes, il renvoie au bien-être de manière générale mais il touche aussi aux MST ainsi qu’aux grossesses non désirées.
Afin de coller au mieux aux préoccupations d’un public par essence hétérogène, la Mutualité socialiste lance chaque année une vaste enquête auprès des 15-24 ans. L’année dernière, l’étude a traité plus particulièrement du rapport à la pornographie.

Constats

La pornographie n’est pas un phénomène marginal. Elle touche les ados dès leur plus jeune âge:
– seuls 16% des mineurs d’âge échappent aux images pornographiques;
– près d’un jeune sur 3 regarde des images pornographiques au moins une fois par mois;
– 8% des jeunes déclarent avoir vu leurs premières images pornographiques avant l’âge de 11 ans (17% avant 13 ans).
Bien que la consommation de pornographie ne soit pas toujours liée à un plaisir ou un souhait, les jeunes sont relativement peu nombreux à considérer qu’elle a un effet négatif:
– plus de 15 % des jeunes filles déclarent avoir été quasi obligées de regarder des images pornographiques;
– 32% des jeunes considèrent que la pornographie a des effets positifs sur leur sexualité, pour 8% qui déclarent que les effets sont négatifs.
Les jeunes ont une image négative de la pornographie qu’ils jugent plutôt dégradante, dégoûtante, violente et dénuée de tendresse:
– si les consommateurs réguliers (au moins une fois par semaine) jugent la pornographie comme un peu plus excitante que les consommateurs occasionnels, ils en soulignent tout autant le caractère dégradant, violent et dégoûtant;
– avec une cote de 3,7 sur 10, ‘relaxant’ est le terme qui correspond le moins à la pornographie pour les jeunes;
– ‘dégradant’ est le terme qui définit le mieux la pornographie. Il obtient en moyenne un score de 6,5 sur 10.
La majorité des jeunes condamnent l’absence de protection contre les MST dans l’industrie porno.
Les garçons sont 3 fois plus nombreux que les filles à penser qu’acteur / actrice porno est un beau métier.
– 70% des jeunes déclarent que les acteurs porno devraient porter des préservatifs;
– 6,8 % des jeunes déclarent que les acteurs porno ne doivent pas utiliser de préservatifs;
– 17% des garçons pensent qu’acteur porno est un beau métier, seuls 5% des filles pensent qu’actrice porno est un beau métier.

Les actions de la Mutualité socialiste

Les résultats de cette enquête nous enseignent combien la Mutualité socialiste a raison d’investir dans des actions de promotion de la santé en matière de sexualité. Voici pour rappel ses 3 principales actions.
Safekit
Durant tout l’été, la Mutualité socialiste va à la rencontre des jeunes pour les sensibiliser à la protection contre les MST, via la distribution de préservatifs.
https://www.ifeelgood.be
Ce site contient une mine d’informations concernant les sujets qui touchent les jeunes (l’amour, la sexualité, la société, les drogues, l’équilibre, le bien-être…). Il a été enrichi par un dossier traitant de la pornographie ainsi que par un espace de dialogue dédié au sujet sur son forum.
Planning
La Fédération des centres de planning familial met à la disposition des jeunes un lieu de rencontre et d’accueil où ils peuvent s’informer et être aidés par des professionnels. De plus, la FCPF organise des animations sur tous les sujets concernant la vie sexuelle et affective.

Les Commentaires des Femmes prévoyantes à propos de l’enquête

Les centres de planning accueillent toutes sortes de questions et celles relatives à la pornographie y sont évidemment les bienvenues. Les centres ne souhaitent pas diaboliser ou stigmatiser les consommateurs de matériel pornographique mais veulent plutôt réaffirmer l’importance du respect des partenaires et d’une vie affective et sexuelle épanouissante.
Nous aborderons ici plusieurs points: dimension sociétale du phénomène, réalité et pornographie, pornographie et protection ainsi que les relations égalitaires dans la sexualité adolescente.

Un phénomène social non marginal

L’enquête réalisée par la Mutualité socialiste permet de montrer que les jeunes sont en contact régulier avec la pornographie. Ces images font partie de leur quotidien, de leur monde visuel et parfois très tôt, puisque certains jeunes dans l’enquête situent leur première vision d’images pornographiques vers 11 ans.
D’autres enquêtes (1) confirment à la fois l’exposition assez courante des ados à la pornographie (80 % des garçons et 45 % des filles de 14 à 18 ans ont vu au moins un film pornographique dans l’année précédant l’enquête) et l’âge précoce de cette exposition. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel français réalise en outre le même constat via son étude de médiamétrie au travers de l’utilisation de Canal Plus (2) révélant qu’environ 11 % des enfants de 4 à 11 ans ont déjà été exposés à un film X au moins une minute.
La pornographie (images, sites pornos, mails, films…) fait donc partie de la vie des jeunes et devient de moins en moins taboue. Ce phénomène s’inscrit également dans une ère d’érotisation et d’hypersexualisation (3) dans la société. Tout est ‘sexe’, tout est désir, tout est érotisé: les voitures, le sport, les appareils ménagers, les aliments, les vêtements… tout doit être plaisir et jouissance.
L’épanouissement par une vie sexuelle libérée, riche, diversifiée, active, multiforme se trouve au sommet de la nouvelle pyramide des besoins générée par le monde médiatique (4). La sexualité (satisfaisante) occupe une place importante – voire sacrée – et est devenue une norme, presque une obligation, véhiculée largement par les médias et par la société dans son ensemble.
Parler du porno, c’est donc aussi relier ce phénomène à la société qui le ‘produit’, c’est-à-dire celle qui glorifie la jouissance et la liberté sexuelle totale. En effet, le porno est un phénomène éminemment sociétal et non un épiphénomène rare et isolé, lié à la pratique de quelques individus.
Ajoutons qu’aujourd’hui, la pornographie devient un sujet banalisé (5) n’étant plus lié à une honte ou à une culpabilité. La visibilité du monde de la pornographie, notamment via Internet, accentue encore ce phénomène de diffusion large et d’acception sociale.

Ne pas diaboliser la pornographie, en parler!

Loin de nous l’idée de condamner ou de diaboliser les consommateurs et la pornographie. Entre les moralistes qui luttent de manière acharnée contre le phénomène via une démarche frisant parfois le puritanisme et les libertaires prêts à affirmer haut et fort que ‘tout est permis’, nous souhaitons nous situer davantage dans la perspective d’une troisième voie, celle du dialogue.
Le message délivré par nos centres est très clair: la vie sexuelle a de multiples facettes, il n’y a pas de comportements ‘prédéfinis’ à suivre, chacun(e) est libre de ses actes (6), de ses envies mais nous voudrions simplement rappeler que le respect de chaque partenaire est une valeur fondamentale ne pouvant être bafouée au nom d’une pseudo ‘liberté sexuelle’.

Les images et le réel

Les jeunes interrogés ont confié parfois croire que les pratiques sexuelles montrées dans les films pornographiques étaient représentatives de la réalité. Cela n’est pas étonnant.
D’une part, la pornographie propose des modèles sexuels stéréotypés et des rôles définis pour les hommes et les femmes, nous y reviendrons. D’autre part, l’attrait des images et leur force est également un aspect important du phénomène. En effet, de nombreux théoriciens des médias ont montré que les images étaient souvent perçues par le spectateur comme bien plus réelles que le réel lui-même.
Face à une image ou un film, l’individu se trouve en effet comme étant ‘tout percevant’ (7): il ressent beaucoup de sensations, d’émotions, fortement et sans la barrière du réel, puisque c’est lui-même qui produit le sens de l’image et crée son existence en la regardant. L’image lui «appartient», l’image est sienne, il n’y a pas d’altérité. Cette position du spectateur rappelle assez bien celle du sommeil et du rêve, provoquant souvent une impression de réalité décuplée (8). La barrière du réel – de la complexité inhérente à la réalité – inexistante car sublimée par l’image, le spectateur peut ainsi éprouver le sentiment que ce qu’il voit est la réalité la plus exacte possible.
Ainsi dans les films pornographiques, les actes sexuels s’enchaînent à l’infini, les positions sexuelles sont variées et représentent de vrais défis de souplesse. Les pratiques ‘hard’ (double pénétration, fisting…) semblent ‘naturelles’ et sans douleur. Les hommes sont toujours en érection et les femmes n’arrêtent pas de jouir. Ces situations relèvent pourtant davantage des fantasmes des producteurs que de situations réellement ‘expérimentables’ – et agréables – pour le commun des mortels.
C’est pourquoi il est fondamental d’expliquer aux jeunes ce qu’est la pornographie, c’est-à-dire une production imaginaire d’un être humain qui met en scène ses propres fantasmes. Et pas une caméra cachée ou un documentaire de la vie sexuelle humaine sur le quotidien de ‘messieurs et mesdames tout le monde’.
Il faut donc, avec les jeunes, impérativement démonter les fausses réalités, les fausses évidences et parler avec eux de ce qui leur paraît réaliste ou non. Il faut sortir de l’attrait de l’image, donc de l’imaginaire et des fantasmes, afin de démonter les stéréotypes et de parler de la sexualité réelle. Sans toutefois leur interdire de rêver, de fantasmer, car cela fait aussi partie d’une vie affective et sexuelle épanouie.

Pornographie et protection sida/MST

Dans l’enquête, les jeunes ont précisé qu’ils souhaiteraient que les acteurs et les actrices pornos se protègent grâce au préservatif. Il nous semblait intéressant de souligner ce résultat. En effet, la pornographie, servant malheureusement trop souvent d’éducation sexuelle, peut amener les jeunes à ne plus prendre en compte les dangers du sida et des MST. Les rapports sexuels dans le porno sont souvent montrés sans protection contre ces maladies. Lors d’une enquête en 2005, 15% des jeunes interrogés avaient estimé que la pornographie pouvait avoir une influence négative contre la protection MST et Sida (9). Les centres tiennent à rappeler que la seule façon d’être complètement protégé contre les MST (et le sida) et la grossesse non-désirée est la règle des ‘2P’: pilule et préservatif.

Liberté et rôles prisons…

La problématique de la pornographie est souvent liée à celle de la liberté. Où commence et s’arrête celle des uns et celle des autres? Il nous semble important de préciser que la liberté de chacun(e) doit s’exprimer dans le respect de chacun(e). Ainsi, il n’y a pas à juger la pornographie ou la diaboliser mais il y a aussi à écouter les personnes que cela interroge, que cela heurte, et surtout, à réaffirmer qu’elle ne sera jamais un moyen d’éducation sexuelle positif.
Car c’est là que réside le danger, non dans l’existence de la pornographie, mais dans le rôle qu’on lui fait – malgré elle peut-être – jouer. L’éducation à la vie affective et sexuelle dans des relations égalitaires épanouissantes ne peut s’effectuer à travers le visionnage d’actes sexuels pornographiques stéréotypés à l’extrême. La sexualité est bien plus que ce à quoi la réduit la pornographie. Et c’est cela dont il faut faire prendre conscience aux jeunes.
Notre enquête récente (10) a pu montrer que les jeunes avaient assez bien intégré les stéréotypes de ‘genre’ – le sexe social et les valeurs y étant associées – dans leur vie affective et sexuelle. Ainsi, il ressortait de l’enquête que les garçons ressentaient une pression sociale forte quant au fait de devoir être performants et toujours ‘demandeurs’ du rapport sexuel, ne pouvant pas le refuser même si un élément les dérangeait. En effet, 1 garçon sur 2 disait ne pas pouvoir refuser un rapport avec une contraception ne lui convenant pas et 1 sur 5 affirmait ne pas pouvoir refuser une pratique sexuelle dérangeante. Globalement, 40 % des garçons exprimaient se sentir ‘obligés’ au premier rapport sexuel par de nombreux éléments (amis, ‘faire comme tout le monde’…).
Dans le monde de la pornographie, les hommes sont en effet montrés comme des ‘bêtes de sexe’ devant à tout prix être performants. Ils doivent accomplir ce que Michèle Marzano appelle leur ‘devoir d’homme’: faire jouir les filles et jouir en permanence dans une ambiance de domination et d’humiliation. En ce sens, la pornographie ne fait que « reproduire les normes traditionnelles de la virilité » (11).
En parallèle, les femmes doivent être ‘disponibles’, toujours prêtes à satisfaire les envies des hommes. Lorsque l’on croise cette donnée au fait que les filles expriment une certaine timidité (12) de parler de leurs envies, de leurs préférences sexuelles, cette attitude de ‘retrait’ dans l’affirmation de soi prend tout son sens dans la perspective de rôles sociaux sexués inégalitaires.
L’important, pour vivre une vie sexuelle épanouie, ce n’est pas de s’aimer obligatoirement mais c’est surtout de se respecter, de manière égalitaire, ce que la pornographie n’a pas beaucoup tendance à montrer…

En guise de conclusion: une question privée…

Les stéréotypes ne sont pas dangereux tant qu’ils ne sont pas pris pour la réalité. Il est donc important de rappeler aux jeunes que la pornographie n’est pas un outil d’éducation sexuelle malgré ce qu’ils pensent parfois. Il est également important de leur ouvrir les yeux sur le fait que la pornographie est loin de constituer ce que certains nomment l’apogée de la liberté sexuelle. Bien au contraire. Plutôt que d’ouvrir des horizons nouveaux, elle enferme l’homme et la femme dans un modèle sexuel inégalitaire ultra restrictif et codifié. Comme si le plaisir était cloisonné à l’intérieur de ces seules pratiques… Rien n’est plus faux, heureusement.
La sexualité est quelque chose d’intime et de propre à chaque individu, et c’est le rôle des centres d’amener chacun et chacune à vivre sa vie affective et sexuelle de la manière la plus épanouissante, sans modèle préconçu et dans le respect de tous.
Enfin, nous souhaitons rappeler que les centres de planning sont ouverts à toutes les questions liées à la vie sexuelle et affective. Leur objectif est de fournir un espace de dialogue et d’information sur la contraception, les grossesses désirées ou non, les M.S.T. (maladies sexuellement transmissibles), etc.
Les professionnels des centres (médecins, psychologues, assistants sociaux, juristes) sont à la disposition de toute personne, quel que soit son âge, son sexe, qui cherche des informations dans le domaine de la vie relationnelle, affective et de la parenté responsable.
Mais surtout, les centres de planning familial des F.P.S. constituent, avant tout, des lieux d’accueil chaleureux, garants de la confidentialité, où chacun peut trouver un soutien, une aide.
Outre leur priorité d’information et de sensibilisation des jeunes, les CPF souhaitent également rencontrer un public le plus large possible notamment par des animations diverses (violence, sexualité, ménopause, prostitution, citoyenneté, drogue, etc.). Dans ce cadre, la thématique de la pornographie peut être abordée avec les jeunes et ils peuvent en discuter librement.
Frédérique Herbigniaux , Chargée d’études et de projets, Femmes Prévoyantes Socialistes
Coordinatrice de la Fédération des centres de planning des FPS: Xénia Maszowez, 02 515 04 89. Courriel: xenia.maszowez@mutsoc.be
Site de la Fédération: [L]www.femmesprevoyantes.be/cpf[/L]
Site des FPS: [L]www.femmesprevoyantes.be[/L]

Structuration du secteur planning familial

Il existe actuellement en Communauté française 97 centres de planning familial, agréés et subsidiés par les Régions (28 en Région bruxelloise et 69 en Région wallonne).
La plupart de ces centres sont regroupés au sein de 4 fédérations:
La Fédération laïque de centre de planning familial (FLCPF) . Cette fédération se définit comme étant «laïque, féministe et de gauche».
La Fédération des centres de planning et de consultation (FCPC) . D’inspiration chrétienne, cette fédération a pour objectif premier la promotion de la consultation conjugale.
La Fédération des centres pluralistes familiaux (FCPPF) . Créée à l’instigation des milieux chrétiens et laïques, cette fédération a des liens très étroits avec la Ligue des Familles.
La Fédération des centres de planning familial des Femmes Prévoyantes Socialistes (FCPF-FPS) . Elle a pour objectif de garantir le droit à un accès égal à l’information et aux services disponibles en matière de contraception, d’interruption volontaire de grossesse et plus globalement en matière d’éducation affective, relationnelle et sexuelle.

(1) Par exemple, l’enquête ESPAD 2003 (European School Survey on Alcohol and other Drugs) , Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies, France, 2003.
(2) CSA-Enquête Médiamétrie,2005 (11 % des enfants de 4 à 11 ans ont déjà été exposés à un film X).
(3) BOUCHARD P., BOUCHARD N., BOILY I, La sexualisation précoce des filles, Montréal, éd. Sisyphe, 2005.
(4) Voir notamment à ce sujet MARZANO M., ROZIER C., Alice au pays du porno: Ados, leurs nouveaux imaginaires sexuels , éd. Ramsay, Paris, 2005.
(5) Un des indicateurs de ce phénomène est la présence récurrente des acteurs et actrices de films pornographiques dans des émissions de divertissement destinées au grand public.
(6) Dans la limite de la légalité, bien évidemment.
(7) Meunier, J.P. et Peraya, D,. Introduction aux théories de la communication. Analyse sémio-pragmatique de la communication médiatique (2e édition revue et augmentée), Ed. De Boeck, Bruxelles, 2004.
(8) Voir par exemple à ce sujet TISSERON S., Psychanalyse de l’image, des premiers traits au virtuel , Paris, Ed. Dunod, 1995.
(9) Les méthodes contraceptives chez les jeunes , enquête menée auprès des 13-21 ans, Fédération des centres de planning familial des FPS, Bruxelles, 2005.
(10) L’affirmation de soi dans les relations amoureuses et affectives chez les jeunes , Fédération des centres de planning familial des FPS, Bruxelles, 2006.
(11) MARZANO M., ROZIER C., op.cit.
(12) L’affirmation de soi dans les relations amoureuses et affectives chez les jeunes, op.cit

Engraisser les actionnaires? L’obésité, conséquence des lois de l’économie de marché?

Le 30 Déc 20

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Sur 100 personnes qui entament un régime amaigrissant, à peine 10 s’y tiendront encore au bout d’un an. D’après le professeur américain Marion Nestle, une des raisons de cet échec est à imputer aux principes de l’économie de marché: nous devons consommer toujours plus pour maintenir le système actuel en place et soutenir les bénéfices des actionnaires!
Bon nombre de managers d’entreprises alimentaires sont confrontés au même problème: d’un côté les marges bénéficiaires sur les produits alimentaires sont plutôt faibles, et de l’autre, le marché est sursaturé. Bref, nous produisons depuis longtemps plus d’énergie «calorique» que nous n’en avons réellement besoin. Mais les jeunes loups du marketing ont contourné ce dilemme avec habileté.

Comment augmenter les bénéfices?

Une des solutions a consisté à augmenter la taille des portions et à faire payer le consommateur un peu plus pour ce supplément. Vu que le prix des matières premières brutes est en général peu élevé et que les coûts en personnel sont les mêmes pour des petites ou des grandes quantités, ce tour de passe-passe permet d’atteindre l’objectif final, c’est-à-dire des bénéfices! Comment résister, par exemple, à une offre aussi alléchante que «un hamburger pour 1 euro, deux pour 1,3 euro»? En tant que consommateurs, nous avons appris à faire attention à notre argent, donc ceci a tout l’air d’une superbe occasion de faire une bonne affaire. Le problème, justement, c’est que si le consommateur réalise effectivement une affaire, en réalité il achète surtout un second hamburger dont il n’a nul besoin.
Autre exemple, plus subtil: les bouteilles de limonade. Dans les années 60, une petite bouteille contenait 200 ml de soda, et les enfants s’en satisfaisaient. Aujourd’hui, une canette en contient 330 ml, et certaines bouteilles vont jusqu’à 500 ml. On en voit même apparaître à 750 ml! Ici aussi, le prix des matières premières est très bas et les coûts en personnel ne changent pratiquement pas.

Du marketing créatif

Les aliments «light» constituent une autre sorte de stratégie de marketing géniale. Imaginez que vous êtes fabricant et que vous produisez depuis des années 10 variétés de confitures. Faites donc les mêmes avec un peu moins de sucre, et vous voilà avec une deuxième gamme, des confitures light, que vous allez naturellement vendre plus cher que les premières, car il faut débourser pour maigrir. Le prix des matières premières demeure identique, de même que les coûts en personnel, et le public achète à un prix supérieur!
La restauration rapide a aussi saisi l’astuce: dans le temps, les enfants mangeaient une partie de la portion parentale. Puis est arrivé le menu «spécial enfant», avec sa portion réduite, un gadget bon marché et des slogans attrayants. C’est ainsi que nos chers loupiots sont devenus des consommateurs à part entière au lieu de simples «parasites». Et ne croyez pas que les menus qui leur sont ainsi destinés soient plus équilibrés que les autres… Même si certains y ajoutent depuis peu une portion de fruits ou de légumes. Opération bonne conscience?

Taxer les aliments mauvais pour la santé

Un nombre croissant de voix s’élèvent en faveur d’une «taxe sur les produits alimentaires néfastes». Celle-ci ne se traduirait pas nécessairement par une dépense accrue pour le consommateur, car une partie des budgets marketing des sociétés pourrait y être consacrée. Savez-vous que, même au sein d’un marché complètement saturé, le secteur de la restauration rapide aux Etats-Unis dépense annuellement 1 milliard de dollars en marketing, contre seulement 1 million de dollars dans le secteur des fruits et légumes?
Cette taxation pourrait avoir un double effet: d’une part, elle rendrait les aliments sains tels que les fruits et les légumes meilleur marché, et d’autre part, elle enverrait au consommateur des signaux lui déconseillant certains groupes d’aliments. Mais comme il n’existe aucune multinationale de fruits et légumes capable de contrebalancer le lobby du fast-food, une telle mesure n’a guère de chances de passer la rampe.
Pourtant, bombarder le consommateur de publicités pour des friandises et regarder croître en flèche les coûts des soins de santé liés aux maladies de civilisation, c’est une contradiction intenable à long terme. Peut-on encore tolérer une telle hypocrisie au 21e siècle?
Patrick Mullie
Article paru dans Equilibre d’août 2007 et reproduit avec son aimable autorisation
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Les messages sanitaires dans les publicités alimentaires sont efficaces

Le 30 Déc 20

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L’INPES a réalisé une étude sur l’impact des messages sanitaires apposés sur les publicités alimentaires (1). Elle montre une bonne reconnaissance des messages et un impact favorable sur les comportements alimentaires, qu’il s’agisse d’enfants, d’adolescents ou d’adultes. En effet 87 % des Français accueillent favorablement les messages sanitaires insérés dans les publicités alimentaires, 71 % d’entre eux les ont mémorisés et ce quelques mois seulement après leur mise en place en février 2007. 79 % pensent que c’est un bon moyen de sensibiliser les personnes à l’importance d’une alimentation équilibrée.

Une bonne reconnaissance

87% des 15 ans et plus accueillent favorablement la mesure d’insertion des messages sanitaires dans les publicités alimentaires et ils sont 70% à attribuer ces messages sanitaires aux pouvoirs publics, essentiellement au Ministère en charge de la Santé (60%).

Fiche technique

Enquête réalisée du 1er au 17 octobre 2007 en face-à-face auprès d’un échantillon de 1063 personnes représentatif de la population française âgée de 15 ans et d’un échantillon de 400 enfants représentatif de la population française âgée de 8 à 14 ans. Les échantillons ont été construits selon la méthode des quotas appliquée aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle du chef de famille, après stratification par région et catégorie d’agglomération.

71% des personnes interrogées se souviennent avoir vu, lu ou entendu ces messages dans les derniers mois (principalement à la TV). Notons que les femmes de moins de 50 ans sont plus nombreuses à s’en souvenir et que 71% des personnes les ont bien mémorisés et sont capables d’en restituer au moins un spontanément, sur les quatre diffusés. 74% des enfants apprécient les messages écrits et 86% les messages «mis en scène» à l’initiative de certaines chaînes de TV.
Le message relatif à la promotion de la consommation de 5 fruits et légumes par jour est le plus souvent cité spontanément par les adultes et les enfants, suivi des messages sur la limitation du grignotage et de la consommation de produits trop gras, trop sucrés et trop salés.
90% des personnes interrogées les reconnaissent (de 82 à 98% selon le message, voir tableau).
Les enfants de 8 à 14 ans s’en souviennent mieux que leurs aînés avec environ 10 points de reconnaissance en plus.

Reconnaissance des messages sanitaires dans les publicités

Message

Adultes Enfants
Au moins 5 fruits et légumes 93% 98%
Eviter de manger trop gras, trop sucré, trop salé 87% 96%
Pratiquer une activité physique régulière 83% 90%
Eviter de grignoter entre les repas 82% 91%

Les messages sanitaires sont considérés comme très clairs et très faciles à comprendre par près de la totalité de la population (97%), d’autant que les personnes interrogées se sentent majoritairement concernées pour elles-mêmes, leur famille ou leurs proches.
Toutefois quelques problèmes de confusion entre le message sanitaire et le produit promu apparaissent. En effet, alors que le message sanitaire apposé sur la publicité n’est pas nécessairement en rapport avec le produit promu, une majorité de Français de 15 ans et plus (60%) pensent l’inverse, c’est-à-dire que le message affiché serait adapté au produit promu. Ainsi, interrogés sur des publicités précises comme par exemple un yaourt aux fruits avec le message «pour votre santé, mangez au moins 5 fruits et légumes par jour», 44% pensent à tort que ce yaourt fournit une portion de fruits pour la journée.

Un impact favorable sur les comportements alimentaires

Questionnés sur l’impact de ces messages sur leur comportement alimentaire et d’achat, 21% des 15 ans et plus déclarent avoir changé leurs habitudes alimentaires et 17% leurs habitudes d’achat de produits alimentaires ou de boissons. Tous déclarent au minimum consommer davantage de fruits et légumes. L’incitation au changement de comportement est plus importante chez les adultes (plus de 15 ans) petits consommateurs de fruits et légumes et chez ceux qui grignotent.
Si les femmes reconnaissent à 48% que ces messages les incitent à réfléchir sur ce qu’elles mangent, les hommes, eux, ne sont que 37%.

L’influence de la publicité sur les enfants

Les 400 enfants interrogés dans le cadre de cette enquête sont 47%, dans la tranche des 8-14 ans, à dire que les publicités qu’ils regardent leur donnent envie de manger ou de boire.
62% d’entre eux demandent par ailleurs à leurs parents d’acheter les produits dont ils ont vu la promotion à la télévision, ce que reconnaissent 62% des parents. 91% des enfants interrogés déclarent obtenir ce qu’ils ont demandé.

Des perceptions différentes selon la corpulence des personnes interrogées

De façon générale, on constate que la perception des messages sanitaires est plus négative chez les personnes obèses et /ou se considérant comme trop grosses, que dans la population générale. En effet 24% des personnes obèses trouvent ces messages culpabilisants, contre seulement 13% des personnes ayant un poids «normal».
De même 28% des personnes se considérant trop grosses trouvent ces messages culpabilisants, 14% estimant même que ces messages sont sources d’angoisse pour elles. Celles qui se considèrent «à peu près du bon poids» ne sont par contre que 10% à les trouver culpabilisants et 6% à y voir une source d’angoisse.
d’après un communiqué de l’INPES

(1) La loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique prévoit que les messages publicitaires en faveur de boissons avec ajout de sucre, de sel ou d’édulcorant de synthèse et des produits alimentaires manufacturés contiennent une information à caractère sanitaire.
A défaut de l’apposition de ce message sanitaire, l’annonceur ou le promoteur doit s’acquitter d’une contribution financière reversée à l’Institut national pour la prévention et l’éducation pour la santé (INPES) pour lui permettre de conduire des actions d’éducation nutritionnelle.
Le décret et l’arrêté du 27 février 2007 sont venus fixer les conditions d’application de la loi, notamment en déterminant le contenu de l’information sanitaire.
Le montant de la taxe qui sera collectée pour la première fois en 2008 devrait rapporter entre 900.000 et 3 millions d’euros.