Articles de la catégorie : Initiatives

Une prévention pavée de bonnes intentions

Le 30 Déc 20

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En introduction à la première des 3 rencontres (voir ci-dessus), Serge Zombek, psychiatre et directeur d’Interstices CHU St-Pierre, président de la FEDITO bruxelloise, a synthétisé de maîtresse façon les enjeux actuels en matière de gestion du cannabis. Voici le texte de son intervention, légèrement modifié pour les besoins de la publication.
Je rappellerai le contexte de la rédaction de ces «pistes de réflexions» de la FEDITO Bruxelloise. L’enfer de la drogue est en partie aussi pavé des bonnes intentions des femmes et hommes politiques qui nous promettent, depuis fort longtemps, des changements significatifs dans la gestion des drogues et ce vers une politique annoncée comme toujours plus claire, plus cohérente, plus pragmatique, moins répressive, plus sociale et plus sanitaire, plus respectueuse des droits de chacun… Ne voyant toujours rien venir, la FEDITO bruxelloise a désiré sortir de sa réserve et a réussi le pari de produire une réflexion quasi consensuelle sur la question du cannabis.
Du document synthétique que vous avez étudié avec la plus grande attention, je me suis permis d’épingler quelques éléments qui me semblaient pouvoir interroger les secteurs de l’enseignement et de l’éducation que vous représentez: je les énumère presque en vrac, pardonnez-moi le style quelque peu décousu.
32% des 15-16 ans ont expérimenté et 16% consomment régulièrement du cannabis; il y a là de quoi nous rendre soucieux, d’autant que cette consommation est un phénomène qui tend à s’épuiser avec l’âge; les 14 – 25 forment ainsi la grande majorité des consommateurs.
Les adultes (parents et éducateurs de «seconde ligne» dirons-nous) nous interpellent à ce sujet et nous demandent informations, avis, aide et conseils… alors que les jeunes ne sont que fort rarement en demande de la moindre aide à cet égard… Il nous faut donc œuvrer à leur intention de façon moins frontale…
Deux mythes demeurent particulièrement « actifs » s’agissant de la population des plus jeunes, mythes qui doivent être impérativement déconstruits:
-la théorie de l’escalade à laquelle nous préférons celle non moins préoccupante mais d’une toute autre nature, la notion de porte d’entrée, sorte de contagion sociale de proximité;
-le syndrome a motivationnel , que l’on applique abusivement selon nous à une entité complexe faite de désintérêt, de dépressivité, de décrochage scolaire ou social, d’isolement relationnel, etc. dès que la consommation de cannabis y est associée.
Les dérives de nos sociétés ou leurs valeurs majoritaires participent largement au conditionnement des différents types de consommation des jeunes, dès lors plus ou moins «problématiques», vous remarquerez les guillemets: relâchement du lien social, étanchéité entre les sous-cultures, chômages et ghettos urbains, société à deux ou trois vitesses, rentabilité des rapports sociaux, consumérisme, culte de la performance, lutte des places, individualisme, hédonisme, etc.; la consommation de cannabis y sera tantôt réactive, tantôt s’y conformera de façon caricaturale.
Parmi les programmes que la cité ( polis en grec) met en œuvre à l’adresse de nos jeunes têtes de toutes les couleurs, la FEDITO continue à déplorer vigoureusement les interventions policières (répressives et/ou préventives) dans les écoles et autres lieux de rassemblement des jeunes.
Si l’on songe aux actions qu’il conviendrait de multiplier à l’adresse de cette sous-population particulièrement exposée, il est tragique de constater que 50 % des moyens en matière de drogues sont destinés à la répression, et 4 % seulement à la prévention!
Dans ce même registre, la FEDITO rappelle que le régime illégal d’un produit (comme le cannabis) n’influence en rien le nombre de consommateurs mais affirme au contraire que le maintien de sa pénalisation handicape l’éducation à et la promotion de la santé; en outre, c’est une redite, ce régime pénal favorise le contact des plus jeunes avec certains réseaux criminels. En résumé, le régime actuel, où tout est interdit, rend tout possible et donc le pire et ce particulièrement en ce qui concerne les plus vulnérables… à savoir les adultes en voie de développement.
C’est pourquoi la FEDITO pense que la dépénalisation assortie d’une légalisation et d’une réglementation précise, sont des options de nature à mieux prévenir les abus et les problèmes.
Enfin, deux des «cannapistes» que nous avons esquissées nous semblent particulièrement sensibles en ce qui concerne les «jeunes».
La première piste est celle de l’organisation de l’approvisionnement par l’Etat: à cet égard, nous suggérons la majorité légale à 16 ans comme pour l’alcool…
En ce qui concerne l’indispensable développement des programmes de prévention, il nous semble que des modules spécifiques pour les adolescents, centrés sur la prévention de l’usage «problématique», devront être impérativement mis en œuvre, entre autre par les acteurs que vous êtes.
Au nom de la FEDITO, je vous le demande solennellement, qu’en pensez-vous?
Serge Zombek

Cannabis: un bon Vaudeville

Le 30 Déc 20

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Il ne s’agit pas ici des vicissitudes du statut judiciaire des joints, interdits, autorisés, tolérés, ni l’un ni l’autre, au contraire et inversement, mais d’une bonne pièce proposée par la FEDITO bruxelloise, qui regroupe bon nombre d’institutions pour toxicomanes de la capitale.
En effet, elle a eu l’idée de susciter trois rencontres sur le sujet, dans le cadre charmant et très convivial du théâtre du Vaudeville. Les résultats de ces échanges devraient être injectés dans les débats législatifs annoncés pour cet automne.

J’ai eu l’occasion d’assister à une partie de la première, qui invitait le 7 juin dernier les secteurs de l’enseignement et de la jeunesse (fédérations de parents d’élèves, universités, aide à la jeunesse, mouvements de jeunesse…) à débattre au départ du témoignage d’une quinzaine de personnes. Grâce à l’autorité bienveillante et non dénuée d’humour du modérateur Jacques Bredael , ceux-ci ont pu exprimer quelques idées maîtresses sans lasser l’auditoire.
Pour ma part, j’ai retenu en particulier le témoignage de Pierre Waaub , professeur à l’Institut St Dominique de Schaerbeek, qui nous explique ses réticences à voir débarquer dans son établissement de nombreuses offres de programmes éducatifs dans le domaine de la santé, qui perturbent les apprentissages des élèves plus qu’autre chose. Il plaide pour des projets construits par la communauté éducative elle-même, et qui, s’agissant de la problématique ‘cannabis’, en questionnant l’autonomie et la dépendance, aident les jeunes à se forger une opinion et trouver leurs propres repères. Une démarche audacieuse, à mille lieues des interdictions et prescriptions alarmistes qui polluent le débat.
Il nous dit aussi qu’en abordant honnêtement la question, dans un contexte qui n’est pas celui d’une crise aiguë avec son lot de trafics et de rackets, l’école qui ose parler en termes mesurés d’un sujet qui inquiète nombre de parents, peut même concilier une démarche pédagogique adulte et un argument de marketing pour ‘doper’ (si j’ose le verbe) les inscriptions de nouveaux élèves. Passionnant.
Une deuxième rencontre a eu lieu le 21 juin avec les secteurs droit et justice, et une dernière est programmée le 6 septembre avec le social et la santé. Nous y reviendrons.
Christian De Bock
Rencontres cannabis, FEDITO, rue du Président 55, 1050 Bruxelles. Sur le site https://www.feditobxl.be , vous pouvez prendre connaissance des Réflexions du secteur ‘toxicomanie’ bruxellois , parues début 2005 (document de 12 pages également disponible en une ‘version longue’ papier de 80 pages qui comprend en plus les actes de la journée ‘Cannapistes’).

Répondre aux besoins des familles

Le 30 Déc 20

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Les Etats généraux de l’ONE

Dans la perspective de son nouveau contrat de gestion 2005-2010, l’Office de la Naissance et de l’Enfance a organisé, de février à mai de cette année, des Etats généraux de la petite enfance , qui lui permettront de poser des balises quant aux défis que cette institution importante de la Communauté française est appelée à relever dans le futur.
Ces Etats généraux se sont achevés lors d’une matinée d’études organisée au sein du (très beau) Parlement de la Communauté française, un lieu symbolique qui souligne à suffisance le caractère prioritaire du public des jeunes parents et des enfants pour notre communauté.
Le public (féminin à 90%, cela ne surprendra personne), a pu entendre un excellent exposé de Michel Andrien (CERES) venu présenter les résultats encore partiels mais très encourageants d’une enquête de satisfaction menée auprès des usagers des services de l’ONE, qu’il s’agisse des consultations prénatales, des consultations pour enfants, ou des milieux d’accueil (crèches, prégardiennats, accueillantes…). Cela nous valut un commentaire bien à propos du Président de l’ONE, Georges Bovy : ‘ J’ai envie de pousser un petit cocorico , la salle où nous sommes ( 1 ) s’y prête ‘. Nous aurons peut-être l’occasion d’y revenir.
Christine Collard , de l’asbl Flexigroupe, présenta ensuite une synthèse de la large consultation des collaborateurs et partenaires de l’ONE, à laquelle pas moins de 641 personnes ont activement participé dans les 6 sub-régions de la Communauté. Des priorités en matière d’accessibilité (2), de formation des puéricultrices, de continuité des services et de coordination des politiques, de partenariat avec les parents et les bénévoles ont été évoquées, ainsi qu’une attention toute particulière (et c’est assez récent) au soutien à la parentalité.
Les priorités relevées par le Conseil scientifique et les collèges des pédiatres et gynécologues de l’ONE ont également été présentées brièvement. On pointera l’intervention de Perrine Humblet (Ecole de Santé publique de l’ULB) centrée sur les inégalités de santé, qui nous rappela toute l’importance d’un bon monitoring de la mise à disposition du public de services universels, pour éviter le piège d’une allocation inéquitable des ressources.
Dans ses conclusions, l’Administratrice générale de l’ONE, Danièle Lecleir , plaida en faveur d’une collaboration plus étroite avec l’AWIPH et la COCOF pour ce qui concerne l’accueil des enfants handicapés, et avec les services PSE pour assurer une meilleure continuité du suivi médical des enfants, de la naissance à 12 ans. Bien vu, mais une représentante d’un CLPS, après la fin des travaux, déplorait quand même l’absence de toute allusion au secteur de la promotion santé (hors école), alors que cette dimension est évidemment très présente dans le travail de l’ONE. Ce sera peut-être quand même au menu du prochain contrat de gestion…
Christian De Bock
Pour en savoir plus: https://www.one.be .
(1) Un splendide bas-relief représentant l’emblème de la Communauté trône dans l’hémicycle de l’assemblée!
(2) Dans son allocution finale, Catherine Fonck , la Ministre de la Petite enfance, tout en rappelant les mérites de son prédécesseur en la matière, dut bien constater l’échec patent du Plan Cigogne, qui prévoyait l’ouverture de plus de 10.000 places d’accueil entre 2003 et 2010. Elle entend bien corriger le tir en concertation avec les Régions et le pouvoir fédéral.

Les maladies bucco-dentaire dans le monde

Le 30 Déc 20

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Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les maladies bucco-dentaires telles que la carie dentaire, les parodontoses (qui touchent les gencives) et les cancers de la cavité buccale et du pharynx posent un problème de santé partout dans le monde, dans les pays industrialisés comme, de plus en plus, dans les pays en développement, surtout dans les communautés les plus pauvres. Ainsi, l’OMS estime à cinq milliards dans le monde le nombre des personnes présentant des caries dentaires.
« Au niveau mondial , la perte de dents est perçue comme une conséquence naturelle du vieillissement , alors qu’elle est évitable », a déclaré le Dr Catherine Le Galès-Camus , Sous-directeur général de l’OMS pour les maladies non transmissibles et la santé mentale. « On croit que la carie dentaire ne pose plus problème dans les pays développés alors qu’elle touche 60 à 90 % des enfants d’âge scolaire et la grande majorité des adultes . La carie dentaire est également la maladie bucco dentaire la plus courante dans plusieurs pays d’Asie et d’Amérique latine
Les effets des maladies bucco-dentaires – douleur, souffrances, dysfonctionnement et baisse de la qualité de la vie – sont nombreux et coûteux. Le traitement représenterait de 5 à 10 % des dépenses de santé dans les pays industrialisés et n’est pas à la portée de nombreux pays en développement.
Si la carie dentaire semble constituer un problème moins grave dans la plupart des pays d’Afrique, le rapport estime qu’avec l’évolution des conditions de vie, son incidence devrait augmenter dans de nombreux pays en développement d’Afrique, en particulier du fait de la consommation croissante de sucres et d’une exposition insuffisante aux fluorures.
« Dans de nombreux pays en développement , l’accès aux soins de santé bucco dentaire est limité et les dents ne sont pas toujours soignées ou extraites », déclare le Dr Poul Erik Petersen , Coordonnateur du Programme mondial OMS de santé bucco-dentaire. « En Afrique , le nombre de dentistes par habitant est d’environ 1 pour 150 . 000 contre 1 pour 2 . 000 dans la plupart des pays industrialisés . Et si , dans les pays développés , des progrès restreints ont été faits chez les plus jeunes , la carie dentaire reste une cause majeure de douleurs et de morbidité pour beaucoup de personnes âgées
Globalement, la plupart des enfants montrent des signes de gingivite (gencives qui saignent) et chez l’adulte, on observe les premiers stades de parodontopathie. La parodontose sévère, qui peut aboutir à la perte de dents, touche 5 à 15 % des populations. Dans les pays industrialisés, les études montrent que le tabagisme est le facteur de risque principal de parodontopathie.
Le cancer de la cavité buccale est le huitième cancer par sa fréquence chez l’homme au niveau mondial. En Asie centrale du Sud, il figure parmi les trois types de cancer les plus répandus. Toutefois, une nette augmentation des cancers de la cavité buccale et du pharynx a également été signalée dans plusieurs pays et régions comme l’Allemagne, le Danemark, l’Ecosse, L’Europe centrale et orientale et, dans une moindre mesure, l’Australie, les Etats-Unis d’Amérique, la Nouvelle-Zélande et le Japon. Le tabagisme, l’usage de tabac sans fumée, la chique de bétel et l’alcoolisme sont autant de facteurs de risque.
Le Rapport définit les priorités et les principaux éléments du Programme mondial OMS de santé bucco-dentaire. Il porte non seulement sur les risques modifiables tels que les pratiques en matière d’hygiène bucco-dentaire, la consommation de sucres, la carence en calcium et en micronutriments et le tabagisme, mais aussi sur les déterminants socioculturels majeurs que sont des conditions de vie médiocres, un faible niveau d’instruction mais aussi l’absence de tradition favorable à la santé bucco-dentaire. Les pays devraient veiller à ce qu’il soit fait un usage approprié des fluorures pour prévenir la carie dentaire. Par ailleurs, une eau insalubre et de mauvaises conditions d’hygiène sont des facteurs de risque environnementaux aussi bien pour la santé bucco-dentaire que pour la santé en général.
Les systèmes de santé bucco-dentaire doivent être orientés sur les soins de santé primaires et la prévention. L’initiative mondiale OMS pour la santé à l’école, qui s’efforce de mobiliser les secteurs de la promotion de la santé et de l’éducation aux niveaux local, national, régional et mondial, a récemment été confortée par un document technique sur la santé bucco-dentaire. D’autre part, l’accent est mis davantage sur les personnes âgées; d’ici 2050, deux milliards de personnes dans le monde auront plus de 60 ans, et 80 % vivront dans des pays en développement. Le programme de santé bucco-dentaire apportera également une importante contribution au diagnostic précoce, à la prévention et au traitement du VIH/SIDA, qui se manifeste souvent d’abord par des infections et des lésions buccales d’origine mycosique, bactérienne ou virale.
« Une mauvaise santé bucco dentaire peut avoir des répercussions importantes sur l’état de santé général et sur la qualité de la vie » a déclaré le Dr Petersen. « L’expérience de la douleur , les abcès dentaires , les difficultés de mastication et donc d’alimentation , les dents manquantes , colorées ou abîmées ont des effets non négligeables sur la vie quotidienne et le bien être des individus
Pour plus d’informations : Dr Catherine Le Galès Camus Sous Directeur général , Maladies non transmissibles et santé mentale , OMS , téléphone : + 41 ( 22 ) 791 2999 , courriel : legalescamusc@who.int
D’après un communiqué de presse de l’OMS

Grande misère de la santé bucco-dentaire en Belgique

Le 30 Déc 20

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Les maladies bucco-dentaires sont un véritable fléau. L’OMS estime que 60 à 90 % des enfants en âge scolaire en sont atteints. De plus, «la perte des dents est perçue comme une conséquence naturelle du vieillissement, alors qu’elle est en fait évitable».
En Belgique, la part relative des soins dentaires est inférieure à 5% du budget des soins de santé. Cette pénurie de moyens a obligé la Convention nationale dento-mutualiste à choisir des priorités de remboursement. Parmi celles-ci, les soins préventifs destinés aux enfants et aux jeunes de moins de 18 ans font l’objet d’un remboursement quasi complet depuis 1998.
Cependant, certaines études montrent que l’accessibilité financière aux soins, pour importante qu’elle soit, est une condition largement insuffisante pour optimaliser la consommation de soins dentaires des enfants. L’éducation à la santé bucco-dentaire est le pilier indispensable sur lequel s’appuyer. Une enquête française du CREDES relève pour sa part trois éléments parmi les obstacles à la consommation de soins pour les adolescents: les parents qui ne se soignent pas, les parents qui ont dû renoncer à un soin dentaire pour eux-mêmes, et le fait de devoir avancer les frais de soins même s’ils sont remboursés à 100% par la suite.
Un rapport concernant les «recommandations pour la santé buccale en Belgique» a été rédigé à la demande du ministre précédent des Affaires sociales par le professeur D. Van Steenberghe (KUL) et M. G. Perl , Président de la Convention nationale dento-mutualiste (CNDM). Les auteurs remarquent: «Si 60% des enfants de moins de 5 ans sont indemnes de caries, ce pourcentage tombe à 25% chez les enfants de douze ans». En outre, «la demande de traitement reste trop limitée lorsqu’on considère le nombre de maladies» alors que des mesures d’accessibilité financière ont rendu les traitements peu onéreux chez les jeunes de moins de 18 ans. De plus, «ce sont les groupes socio-économiques plus faibles qui sont difficiles à atteindre et à motiver en matière de soins buccaux ». De même «chez les petits enfants, une grande fraction ne consulte jamais ou rarement le dentiste».
Ce tableau pessimiste est à l’origine d’une étude visant à quantifier la consommation des enfants assurés par la Mutualité socialiste en matière de soins dentaires, avec pour hypothèse qu’il y a une large sous-consommation dans ce public.
L’étude porte sur la consommation des enfants de moins de 18 ans affiliés à la mutualité socialiste entre 1998 et 2002, et a appliqué des méthodes de statistiques descriptives à la consommation de soins préventifs, aux soins conservateurs (dents déjà atteintes) et aux soins orthodontiques.

Faible recours aux soins dentaires chez les enfants

L’étude montre une large sous-consommation de soins dentaires par les enfants alors qu’ils sont censés idéalement voir le dentiste au moins deux fois par an.
Dans la réalité on en est loin. Près d’un enfant sur deux de la population étudiée n’a jamais consulté le dentiste sur cinq ans! Moins d’un enfant sur trois a consulté au moins une fois sur les cinq ans, et un enfant sur dix seulement a eu un contact annuel avec son dentiste.
Les tout petits ne voient quasi pas le dentiste (6,6% des enfants âgés de 0 à 4 ans en 2001), puis la fréquentation du dentiste augmente jusqu’à la tranche des 10-14 ans pour retomber ensuite dans la tranche des 15-17 ans.

Nature des soins

Soins préventifs

La consommation des soins préventifs est faible: moins d’un enfant sur 10 a reçu une fois ce type de soins en 2001. Sur les 355.160 enfants susceptibles de recevoir deux visites préventives par an durant les cinq ans de l’étude, seuls 86 ont réellement bénéficié de la totalité de la prévention. Vous lisez bien, cela fait 0,02%!

Soins conservateurs et orthodontiques

Cinquante-six pour cent des enfants de moins de 13 ans ont reçu au moins un soin conservateur de dent lactéale, ce qui témoigne de l’atteinte précoce des dents.
Vingt-cinq pour cent des enfants de cette tranche d’âge ont reçu au moins un soin conservateur de dents définitives, ce qui témoigne aussi de l’atteinte précoce des dents définitives.
En 2002, 52% des enfants de 13 à 17 ans ont reçu au moins un soin conservateur de dent définitive, ce chiffre étant de 60% en 1998.
Les soins orthodontiques concernent 16,6% des enfants qui consultent le dentiste.

Evolution de la consommation de soins chez les enfants

D’année en année, on note un progrès dans la consommation des soins dentaires: 30,5% des enfants assurés ont consulté le dentiste en 1998 et 32,4% en 2002. L’augmentation de soins préventifs est encourageante mais reste beaucoup trop faible (6,8% des enfants assurés ont reçu un seul soin préventif en 1998 et 9,53% en 2002 ; 0,54% ont reçu deux visites préventives en 1998 et 1,39% en 2002).

Disparités régionales

La consommation de soins dentaires est plus élevée en Flandre qu’en Wallonie et à Bruxelles. Il en va de même pour la consommation de soins préventifs. La consommation de soins conservateurs est plus importante à Bruxelles et en Wallonie qu’en Flandre, ce qui témoigne d’une santé dentaire plus déficiente en Wallonie et à Bruxelles. Toutefois, la part des soins conservateurs a tendance à diminuer, ce qui est encourageant.

Deux priorités

Depuis l’introduction de soins préventifs pour les enfants dans la nomenclature de dentisterie, on note une progression lente mais certaine de ce type de soins et un infléchissement progressif des soins conservateurs. Toutefois, la sous-consommation de ces soins reste massive pour les assurés de la Mutualité socialiste.
Plus de 90% des enfants assurés n’en bénéficient pas chaque année. De plus, la moitié de ces enfants ne consulte jamais le dentiste.
Si les soins conservateurs diminuent, ils témoignent toujours d’une importante altération de la santé bucco-dentaire de tous les enfants consommateurs. Ils consultent parce qu’ils ont un problème.
Sur les cinq années étudiées, trois quarts des enfants reçoivent au moins un soin conservateur. Ceci souligne l’importance et l’urgence de l’action.
La Mutualité socialiste préconise de renforcer l’accessibilité financière et d’amplifier les efforts d’éducation à la santé dentaire.

Accessibilité aux soins

La gratuité des soins dentaires pour les enfants, réclamée déjà par la Mutualité socialiste entre autres lors de la précédente législature et instaurée en initiative nouvelle par le Ministre Demotte à partir de septembre 2005 pour les enfants de moins de douze ans, se justifie pleinement.
Aucun d’entre eux ne trouvant de plaisir à consulter le dentiste, le risque de surconsommation est quasi nul. Par contre, il est établi qu’avancer les frais de soins même remboursés à 100% par la suite, constitue un frein réel à la consommation de soins dentaires. La Mutualité socialiste souligne qu’il est essentiel d’associer le payement par tiers payant à la gratuité des soins.
Au niveau de la convention nationale dento-mutualiste, la mutualité socialiste soutiendra les demandes tendant à augmenter les moyens financiers à investir dans la santé bucco-dentaire des enfants. Il est clairement démontré que la prévention des problèmes dentaires lors de la toute petite enfance est un investissement rentable pour la sécurité sociale car il diminue largement les dépenses en soins curatifs chez les adultes.

Education à la santé bucco-dentaire

Quelques pistes:
-dès la naissance, un contact de la mère avec un dentiste. Elle apprendra des gestes simples comme éviter de donner de l’eau sucrée, éviter de sucer la tétine de l’enfant avant de la lui mettre en bouche, l’importance d’une hygiène buccale et dentaire précoce;
-introduction de l’éducation à l’hygiène dentaire du nourrisson et de l’enfant en bas âge dans les consultations de nourrissons et les crèches de l’ONE;
-à l’école, outre l’interdiction des distributeurs de boissons sucrées, l’introduction dès l’école gardienne d’activités ayant trait à l’hygiène dentaire: brossage de dents à l’école, apprentissage de l’utilisation du fil dentaire, hygiène alimentaire bannissant les sucreries. La distribution gratuite d’une brosse à dents par trimestre et de fil dentaire ainsi que de dentifrice pourrait s’ajouter à l’éducation. L’expérience de pays comme la Suisse montre aussi l’importance d’instaurer la dentisterie scolaire à côté de la médecine scolaire;
– l’éducation à la santé dentaire doit être poursuivie et intensifiée chez les grands adolescents. L’étude présente tend en effet à montrer un «décrochage» à cet âge, plus particulièrement chez les garçons;
-la Mutualité socialiste renforcera son action d’éducation des enfants à la santé bucco-dentaire. Son assurance complémentaire intervient déjà financièrement pour les enfants de 4 à 18 ans.
D’après un dossier de la Mutualité socialiste
Le dossier complet (46 pages) peut être téléchargé sur le site https://www.mutsoc.be , rubrique ‘Etudes et analyses’.

Vaccins: on n’arrête pas le progrès, mais à quel prix?

Le 30 Déc 20

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Les Communautés permettent la vaccination gratuite des bébés et des enfants contre un certain nombre de maladies infectieuses pouvant avoir des conséquences graves.
L’offre des producteurs de vaccin évolue rapidement, et chaque année, le Conseil supérieur d’hygiène (fédéral) met à jour le calendrier de base des vaccins recommandés. Actuellement, le Conseil recommande de vacciner les jeunes enfants contre pas moins de 11 maladies.
Sa dernière proposition concerne la vaccination contre les infections à pneumocoque, contre lesquelles un vaccin, le Prevenar ® (Wyeth) est disponible en Belgique depuis le 1er octobre 2004.
Ces infections sont heureusement rares (on parle de 59 cas sur 100.000 enfants de moins de 5 ans dans notre pays, et d’une centaine de cas chez les moins de 2 ans (1)), mais peuvent être fatales ou laisser des séquelles neurologiques et/ou auditives chez leurs victimes. Le Conseil recommande de vacciner les bébés dès l’âge de 2 mois, ce qui nécessite l’administration de 3 doses à 2, 3 et 4 mois, et d’une quatrième dose entre 12 et 18 mois (pour les enfants âgés de 24 mois à 5 ans une seule dose suffit).
Le vaccin est actif contre les 7 sérotypes à l’origine de la plupart des infections invasives à pneumocoques. Dans les pays ayant l’expérience d’une vaccination généralisée, on a pu constater une baisse d’environ 85% de ces infections chez les jeunes enfants.
Le problème c’est que ce vaccin est cher, très cher même (68 euros la dose et il en faut 4, sans compter le prix des consultations), qu’il n’est pas remboursé individuellement par la sécurité sociale et pas non plus pris en charge par la collectivité.
A côté de l’argument de l’accessibilité financière, des considérations de santé publique plaident aussi en faveur d’une approche collective de ce problème. En vaccinant les enfants à grande échelle, la circulation des bactéries est compliquée, et on limite la consommation des antibiotiques utilisés pour combattre les infections.

Initiative prématurée

Voici quelques mois, la Société belge de pédiatrie a mené une campagne d’information au ton alarmiste sur ce sujet, incitant les parents à faire vacciner leurs enfants sans tarder.
On est en droit d’estimer que la SBP a agi un peu à la légère dans ce dossier, et qu’elle aurait dû tenir compte du caractère discriminatoire et culpabilisant de son message pour les familles n’ayant pas les moyens de se payer le luxe de faire vacciner leurs bébés contre les infections à pneumocoques.
Si le bien-fondé d’une vaccination massive des nourrissons semble incontestable, il eût mieux valu sensibiliser d’abord les diverses autorités sanitaires du pays (il faut un certain temps pour dégager les budgets nécessaires, qu’ils émanent du fédéral ou des entités fédérées), et aussi faire pression sur le fabricant pour en obtenir un prix acceptable en échange de volumes plus importants.
Sinon, il est à craindre que s’il est intégré dans la liste des vaccins ‘gratuits’ du jeune âge, le seul Prevenar ® nécessitera plus de moyens que l’ensemble des autres vaccinations, et qu’il ne sera plus possible de développer une politique de protection de la santé abordable budgétairement et digne de ce nom. Surtout que l’offre de vaccins utiles ne s’arrêtera pas de sitôt…
Christian De Bock
(1) Une incidence plus importante que celle des infections à méningocoque de type C avant la campagne de vaccination systématique de 2002.

Ados, comment on vous manipule

Le 30 Déc 20

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Sur une invitation judicieuse de Thierry Poucet et de l’asbl Question Santé, une rencontre a été organisée le 17 mars avec Viviane Mahler, auteur chez Albin Michel d’un essai sur les pièges de la consommation des jeunes qui rencontre un joli succès de librairie (25.000 exemplaires vendus en six mois).
Dans cet ouvrage sur les manipulations économiques et sociales, l’auteur illustre son propos par 7 chapitres bien documentés:
-mangez et soyez minces, ou les prescriptions contradictoires de la mode et des producteurs de snacks et sodas;
-tabac, alcool, drogues, qui nous vaut un rappel du caractère crucial du recrutement des jeunes fumeurs pour remplacer ceux qui meurent ou arrêtent;
-votre santé les intéresse, alcool et tabac: il n’est guère compliqué de comprendre que le discours explicite des industriels de la cigarette sur le fait que fumer est un choix d’adulte responsable est destiné avant tout à attirer les jeunes, et pas du tout à les dissuader de commencer à fumer;
-le piège des sectes, lieux de manipulations particulièrement perverses à un âge charnière fait de doutes et d’incertitudes;
-vraiment libres avec les nouvelles technologies? Ou les charmes de la dépendance au téléphone portable et à l’Internet;
-votre argent les intéresse;
– au royaume des media, avec une rapide analyse du caractère prescripteur des ‘vedettes’ de la télé-réalité.
Tout le monde est influençable à des degrés divers pour participer à la communion consommatoire, mais Viviane Mahler nous rappelle que les ados sont une cible privilégiée, 100 fois plus sollicitée que les adultes!
L’auteur a choisi une lisibilité maximum, et le découpage de son texte en blocs autonomes permet une lecture non linéaire de l’ouvrage, ce qui correspond sans doute à une forme de zapping intellectuel propre à notre époque. Cela favorise le ‘grignotage’ du bouquin selon la jolie expression de Viviane Mahler.
Bien que son livre contienne peu d’informations sur les mécanismes fins de la manipulation, elle nous apprend de façon vivante les trucs et astuces du marketing d’aujourd’hui, qui utilise avec beaucoup de créativité les moyens de communication modernes (‘chats’, blogues, sms, etc.) et repère dans leurs lieux de vie et de loisirs les leaders d’opinion et de consommation.
Elle a aussi l’intelligence de faire preuve d’une certaine prudence dans la mise en cause de notre société de consommation et de gaspillage et des dérives du discours publicitaires, estimant à juste titre qu’il vaut mieux accompagner un peu de recul critique de la part des ados plutôt que d’affronter de plein fouet ce qui les motive.
Bref, elle offre un outil de ‘résistance’ discret mais profitable en évitant la plupart du temps de faire la leçon à ses jeunes lecteurs, qu’elle a d’ailleurs la politesse de vouvoyer, en échappant au piège du ‘jeunisme’ omniprésent de nos jours.
Ados, comment on vous manipule, Viviane Mahler, Albin Michel, Paris, 2004.

Information des patients

Le 30 Déc 20

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Le 11 mars dernier, près de 250 personnes s’étaient donné rendez-vous au Palais des Congrès de Liège pour échanger leurs expériences et réflexions en matière d’information des patients. Une initiative bienvenue trois ans après l’entrée en vigueur de la loi fédérale sur les droits du patient, qui consacre l’importance de cette dimension de la relation entre soignants et patients.
La journée démarra en douceur avec une présentation en tandem par les docteurs Jean Fléchet et Christine Vanoverbeke de l’éclairage que la philosophie défendue par la Société Balint belge apporte à la pratique quotidienne des généralistes. Ils ont à juste titre souligné qu’il n’est pas toujours pertinent de faire du droit de savoir une obligation de tout dire et tout entendre. Pas de prescription de parole obligatoire pour le médecin, donc, face à des patients pour qui la valeur des informations communiquées par les professionnels dépend de leurs attentes et de leur parcours personnel.
Rappel utile mais un peu convenu.
Avec le témoignage percutant d’ Anne Gillet (vice-présidente du Groupement belge des omnipraticiens), le colloque passa véritablement à la vitesse supérieure. Son plaidoyer en faveur de l’échelonnement des soins, reposant sur une infrastructure légère, accessible culturellement, géographiquement et financièrement pour les patients, sa critique enflammée de notre ‘non-système’ de santé qui joue sur la concurrence entre prestataires alors que tout le monde a besoin de décloisonnement et de plus de cohésion sociale, nous a rempli d’aise. On y percevait nettement plus le sens de la responsabilité sociale de la médecine générale qu’une défense étriquée d’intérêts partisans. ‘Nous pouvons subvertir l’instrumentalisation des êtres et leur marchandisation’ , nous dit-elle avec conviction, épinglant au passage notre modèle de soins hospitalocentrique et la manipulation du corps médical et des associations de patients par des ‘sponsors équivoques’.
Décoiffant!
Pour sa part, Jacques A Bury (ADSAN, Agence pour le développement et l’évaluation des politiques de santé, en Suisse), insista sur le fait que le concept d’empowerment et les priorités définies par la charte d’Ottawa voici près de 20 ans doivent être plus que jamais au centre de nos préoccupations aujourd’hui, et sont fécondes pour développer une conception éthiquement responsable et non normative de la qualité de vie. Il nous invite à éviter les pièges de l’angélisme participatif et de l’autonomie imposée (injonction paradoxale qui a fait pas mal de dégâts).
Son message à des professionnels sous-estimant parfois de façon involontairement méprisante les capacités des patients est passé comme une lettre à la poste.
La matinée nous réservait encore un moment fort, et fort agréable, avec l’intervention à la fois radicale, rigoureuse et pleine d’esprit de Gianfranco Domenighetti (Université de Lausanne et Genève), qui s’employa avec sa verve coutumière à démonter les grands mythes de la toute-puissance de la culture sanitaire scientifique: non, la consommation en croissance constante des services médicaux ne contribue pas énormément à l’augmentation de notre longévité; non, la médecine n’est pas une science exacte; oui, elle est faite de plus d’incertitude que de certitudes; non, un diagnostic précoce n’est pas toujours la façon la plus intelligente d’aborder une maladie,…
Une anecdote cocasse: dénonçant le fait que l’augmentation du nombre de médecins ORL avait comme conséquence une augmentation des ablations des amygdales sans nécessité médicale bien établie, il se vit intenter un procès pour… concurrence déloyale! Ca ne s’invente pas.
Sa maîtresse phrase: il faut en matière de culture médicale briser la pensée unique, et ramener les attentes des prestataires comme des bénéficiaires à la réalité des choses!
Après une matinée aussi stimulante, l’après-midi fut un cran en dessous, les organisateurs ayant choisi de nous épargner les sacro-saints ‘ateliers’ (pour cela on les remercie), pour proposer une table ronde au cours de laquelle une demi-douzaine d’intervenants variés eurent l’occasion de partager avec la salle leur expérience et vision de l’information du patient. C’était à la fois trop long et pas assez élaboré.
Entrecoupé de moments d’échanges conviviaux et complété par une exposition d’une vingtaine de stands en relation directe avec le thème du jour, le colloque ‘Information des patients’ nous a néanmoins confirmé si besoin était encore le talent des Liégeois à joindre l’utile à l’agréable.
Christian De Bock

Un bilan des ‘Midis à l’école’

Le 30 Déc 20

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Les lignes de force du programme

Certains éducateurs ou animateurs en matière de santé parlent d’alimentation en prônant le «bon» et en rejetant le «mauvais» ou encore en prescrivant les «bons comportements» alimentaires à adopter à l’école ou à la maison, que ce soit pour les collations, les repas, les boissons… Cette approche est aujourd’hui obsolète car les déterminants des comportements alimentaires sont beaucoup plus complexes à aborder.
L’information sur l’équilibre alimentaire est une chose importante, certes, mais manger, c’est encore autre chose! La nourriture est liée à une série d’événements et de relations tout au long de la vie, elle scande le rythme des journées, les fêtes, les rencontres… et les changements ne se font pas en un coup de cuillère à pot! De plus en plus, il est question d’aborder davantage la question de l’image et de l’estime de soi, les comportements de consommateur et l’accessibilité des aliments et des boissons saines pour donner aux enfants et aux jeunes l’occasion d’acquérir et d’exercer des compétences en matière de santé.
Le programme «Midis à l’école» a fait le pari d’une approche non prescriptive de l’alimentation , préférant susciter la curiosité des élèves sur la question des repas et le contexte de ces moments importants de la vie à l’école, associés aux moments de récréation qui les jouxtent. Le deuxième élément fort du programme est d’instaurer un processus de changement qui mette les élèves au centre en les faisant concepteurs et acteurs des actions mises en place avec l’aide de l’enseignant et des partenaires éventuels. Certes cela prendra plus du temps qu’une décision unilatérale élaborée entre adultes (et encore!) mais le projet élaboré par les élèves leur aura permis d’exprimer les besoins et d’écouter l’avis de chacun à propos des repas et des récréations de midi à l’école, de faire l’expérience d’un projet pour améliorer la gestion de ce moment collectif et de ce qui y est lié: l’organisation des récréations, les lieux pour manger et pour jouer, le déroulement des repas, le personnel d’encadrement, les menus, les possibilités de choix, etc.
Un troisième élément est d’articuler l’action ou le projet construit par la classe pour améliorer les midis avec les besoins de santé des élèves, les priorités de l’école et les objectifs d’apprentissage de la classe plutôt que d’en faire une action événementielle ponctuelle, bien que ceci puisse parfois démarrer ou finaliser un projet inscrit sur un plus long terme. Le quatrième élément est d’éduquer à faire des choix sains en matière d’alimentation et entraîner les élèves à exercer cette capacité en tant que consommateurs (en s’adaptant à l’âge bien entendu) pour être acteurs de leur propre santé.
La cinquième ligne de force est d’inviter les adultes de l’école (direction, enseignants, éducateurs, cuisinières… et pouvoir organisateur) ainsi que les parents, leurs représentants, les acteurs de santé à se retrouver comme partenaires éducatifs sur cette question de l’alimentation et de la vie à l’école en encourageant le dialogue pour favoriser la santé des élèves à l’école comme à la maison. Les structures participatives de l’école (conseil de participation et conseil d’élèves) sont sollicitées pour cette concertation.

Améliorer l’alimentation à l’école, un effort de politique publique saine, un premier pas de politique nutritionnelle

Le programme quinquennal «Midis à l’école» a été subsidié par la Communauté française de Belgique dans le cadre de ses programmes de promotion de la santé de février 1999 à septembre 2004 et ce, après deux années scolaires et demi d’expériences pilotes intitulées «L’Art des Midis», les «Midis à l’école» et «En route pour des midis à l’école plus agréables» ayant démarré en septembre 96.
Depuis ses débuts, il a reçu le soutien des ministres concernés marquant ainsi une volonté de contribuer à une politique publique saine en matière d’alimentation à l’école. Les enquêtes menées par un organisme de consommateurs et les réponses aux questionnaires bilan «A propos des midis» complétés par les écoles ont démontré, en effet, la nécessité d’améliorer la situation des repas scolaires.
Lancé en 1996 à l’initiative de Madame Laurette Onkelinx , à l’époque Ministre-présidente chargée entre autres de la santé, de l’enfance et de l’éducation, ce programme a reçu également, lors de la législature suivante, le soutien de Jean-Marc Nollet et de Nicole Maréchal , respectivement Ministre de l’Enfance et Ministre de la Santé et de l’Aide à la Jeunesse.
A l’initiative de ces derniers, un Forum intitulé «L’alimentation à l’école – Derrière un marketing juteux, un projet de promotion de la santé, un enjeu de société» a eu lieu en décembre 2000. Ce Forum a lancé le débat public entre les différents secteurs concernés: industrie alimentaire, nutrition et santé, consommation et environnement scolaire, partenaires éducatifs et alimentation à l’école. Laurette Onkelinks avait – déjà auparavant – mis sur pied un groupe de travail intersectoriel sur ce sujet, qui réunissait des représentants des différents secteurs concernés: éducation, famille, santé, enseignement, promotion de la santé, éducation nutritionnelle, enfance, restauration scolaire, inspections, médecine scolaire, parents d’élèves, formation.
Sur base des besoins dégagés par ce groupe et de priorités faisant consensus – comme la participation des élèves et l’implication des partenaires -, le programme expérimental «Midis à l’école» a été élaboré par la Coordination Education & Santé asbl. Après avoir suivi la filière d’analyse de projets auprès du Ministère de la Santé et du Conseil supérieur de promotion de la santé, il a été subsidié par la Communauté française. Par la suite, le programme quinquennal (1999-2004) s’est ajusté annuellement sur base de l’expérience de terrain et des besoins exprimés par les écoles lors des visites, des rencontres et des contacts établis avec elles et avec les acteurs éducatifs et de santé.
C’est donc en mettant en pratique les principes diffusés par le secteur de la promotion de la santé que ce projet s’est élaboré, à savoir: partir des besoins pour agir en faveur de la santé collective et construire l’action avec les personnes et les groupes concernés.

Les objectifs et les stratégies du programme

Le premier objectif du programme était d’ encourager la construction de projets locaux – de classe ou d’école – en vue d’améliorer la vie et la santé des élèves sur les temps de midis. Il visait (1) à la fois la dimension des repas (dans et autour de l’assiette) et la dimension des récréations (aspects environnementaux et relationnels).
Le deuxième objectif était d’ expérimenter dans et au départ d’écoles maternelles et primaires en Communauté française, des stratégies participatives, communautaires et intersectorielles pour encourager les changements et renforcer les acteurs et les partenaires dans leurs démarches de promotion de la santé.
Trois stratégies ont été mises en place pour soutenir la mobilisation des écoles: l’appropriation, l’accompagnement et la diffusion .
Elles se sont concrétisées de multiples manières comme par exemple: les animations dans les classes pour favoriser l’expression des élèves à propos des midis (animations D.E.C.E.), les concertations avec les enseignants, les directions, les pouvoirs organisateurs, la consultance par téléphone et par courriel, les visites-rencontres réalisées auprès des écoles adhérentes à la charte A l’école d’une alimentation saine, l’élaboration et la diffusion des outils pour différents publics, la transmission d’informations plus spécifiques, les relais par la Coordination des besoins pointés par les écoles, l’interpellation des pouvoirs organisateurs et des autorités, la récolte des priorités de changement et des besoins au travers du questionnaire-bilan «Midis à l’école», les campagnes d’information et de relance du projet, l’élaboration et l’édition d’outils, le partenariat à différents niveaux…

L’appropriation

La spécificité de la démarche réside dans la proposition faite aux écoles et aux partenaires éducatifs de construire le changement de manière tout à fait participative et ajustée selon les besoins de chaque école; en effet, aucune liste d’activités-type ni de prescriptions nutritionnelles n’ont été proposées comme solutions toutes faites pour améliorer les midis à l’école. Bien au contraire, la démarche proposée a été la suivante:
– la réalisation d’un bilan pour l’école sur les repas et les récréations de midi (organisation et priorités) par le biais d’un questionnaire pour démarrer la réflexion des adultes éducateurs (2). Près de 500 écoles ont complété et renvoyé ce questionnaire depuis mars 1999. Les données présentées en décembre 2000 sur base de 177 questionnaires seront actualisées prochainement;
– la participation d’une classe ou plus avec comme point de départ d’un projet de classe ou d’école un travail d’expression des élèves sur la vie à midi à l’école et sur leurs propositions pour améliorer les repas et les récréations;
– la concertation et l’échange de points de vue des personnes concernées par l’alimentation dans l’école comme préalable au développement d’actions pour étoffer la connaissance des situations à modifier, les impliquer dans la décision et le projet pour ainsi augmenter les possibilités de changement et leur faisabilité pour le bien-être et la santé des élèves;
– la mise à l’agenda du sujet des «Midis à l’école » dans les réunions de conseils de participation, de conseils d’élèves, des associations de parents, des actuels Centres de promotion de la santé à l’école (PSE-IMS) et Centres psycho-médicaux sociaux ainsi qu’au niveau des communes, des pouvoirs organisateurs et des autorités locales.

L’accompagnement

L’asbl Coordination Education & Santé a proposé des accompagnements à plusieurs niveaux.
L’accompagnement sur le terrain
Il se déclinait à trois niveaux:
Au niveau des classes en projet , sous forme d’animations pour faire émerger les priorités des élèves pour améliorer les midis, dans le cadre d’animations par une diététicienne sur l’équilibre alimentaire ou la découverte des saveurs, ou encore dans le cadre d’interventions pour promouvoir un climat relationnel ou des conditions environnementales plus favorables à la santé dans les cours de récréation ou les réfectoires.
Au niveau des écoles , sous forme de visites-rencontres pour animer des concertations d’acteurs dans l’école en soutien de projet, en communiquant les principes d’une démarche en promotion de la santé. Elles ont servi également à ce que les acteurs présents valorisent les actions déjà accomplies dans l’école (3) et s’approprient le choix des priorités fait par le Conseil de participation lors de l’adhésion à la charte afin de tisser de la cohérence et des partenariats internes.
Cette forme d’accompagnement systématique a constitué avec la diffusion de la charte A l’école d’une alimentation saine , une part essentielle de l’opération «A table les cartables». Une visite gratuite d’une diététicienne proposée par l’asbl Euralisa (asbl liquidée en 2004, faute de subsides) complétait ce soutien aux écoles adhérentes. Fort peu ont souhaité cette intervention, craignant à tort une forme de contrôle qui pénaliserait l’offre alimentaire de l’école.
Au niveau local , dans l’animation ou la participation à des concertations avec des partenaires éducatifs et de santé: association de parents, associations, IMS (puis PSE)-PMS, échevinats… Mais également par l’organisation conjointe avec les centres locaux de promotion de la santé (CLPS) de réunions de coordination, que ce soit pour le programme «Midis à l’école» ou pour l’opération «A table les cartables». Ces réunions ont servi à préciser des modalités d’action et de collaboration; par exemple, lors d’une intervention dans l’école, la Coordination prévenait le CLPS mais aussi l’IMS et le PMS de la visite ou de l’animation et encourageait systématiquement les directions d’école à inviter les partenaires locaux. La préparation de ces visites de personnes ressources a servi souvent à informer les écoles des partenaires susceptibles de les aider dans leur projet et des rôles de chacun. Certains CLPS et l’Observatoire de la Santé du Hainaut ont adopté une méthodologie similaire à ce mode d’intervention-rencontre de concertation sur le terrain assurant ainsi la relève et la coordination locale. Le but de la Coordination était bien entendu de renforcer les acteurs locaux plutôt que de se substituer à eux, ce qui est souvent la crainte des organismes locaux face aux programmes à échelle communautaire. La fluidité des échanges entre le local et le communautaire s’est posé quant à la circulation d’informations en temps opportun concernant les écoles mobilisées par l’un ou l’autre programme car chaque niveau a ses priorités d’action et ses exigences de monitoring propres.
L’accompagnement méthodologique
Au niveau communautaire , il s’agissait de diffuser la démarche et de faire connaître le programme par une politique de plaidoyer auprès des acteurs de différents secteurs en dehors de l’école et par la diffusion systématique des outils (voir plus loin) auprès des acteurs éducatifs, de santé et auprès des partenaires potentiels. Avec l’opération «A table les cartables», la tâche s’est élargie car il s’agissait de faire le lien entre les deux initiatives ministérielles. La Coordination a contribué ainsi à l’élaboration et à la diffusion des documents de cette campagne et à assurer la diffusion des deux projets simultanément. Une farde «liens» a été éditée pour permettre aux acteurs et partenaires potentiels de s’y retrouver.
Au niveau individuel , à leur initiative, des acteurs éducatifs, institutionnels, associatifs et privés ont pris contact avec la Coordination Education & Santé souhaitant participer à une amélioration des midis et de l’offre alimentaire à l’école fondamentale. Les demandes faites régulièrement par téléphone, par courriel et par lettre sont traitées dans le but de renforcer la capacité des personnes – quelle que soit leur fonction en lien avec l’école – d’agir en promotion de la santé, de les aider à creuser leur projet d’action et à trouver eux-mêmes les réponses. Ces entretiens téléphoniques (qui requièrent un certain entraînement à ce type d’approche) consistent en une écoute active et une démarche exploratoire amenant les interlocuteurs à s’approprier la réflexion et l’action pour:
-construire un projet en lien avec des besoins identifiés des élèves et de l’école;
-impliquer les élèves et les personnes concernées dans la conception du projet;
-rechercher des partenaires dans l’école et localement pour l’action;
-évaluer en quoi l’action est susceptible de renforcer des modes de consommation sains et augmenter la capacité de choix favorables à la santé des élèves.
Nos envois de documents (brochures, affiches, charte) ont constitué la principale source d’information à propos des programmes et de l’accompagnement proposés aux écoles. Ceci démontre le bien-fondé de la diffusion systématique faite aux écoles depuis les débuts du programme.
Sur 656 demandes d’écoles pour des conseils méthodologiques, 278 se préoccupaient de l’alimentation (repas, saveurs, réfectoire, collations, menus…) et 231 s’interrogeaient sur des questions liées à la cour de récréation et au climat relationnel pendant les temps de midi.
Il est clair que la diffusion de la charte et de sa brochure ont amené un nouveau public scolaire et éducatif à s’intéresser à la promotion de la santé à l’école, au programme «Midis à l’école» et à ses outils proposés comme points de départ dans la conception des plans d’action dans le cadre de la charte.

La diffusion

Les écoles et leurs différentes implantations, les communes, les associations de parents, les acteurs de l’éducation et les acteurs de la santé scolaire, les responsables à différents niveaux concernés par le sujet ont reçu les différents outils de manière systématique dans le but que chacun soit informé de la démarche et puisse agir en soutien des écoles dans un objectif de promotion de la santé.
De manière générale, cette large diffusion a contribué à diffuser le concept de promotion de la santé et ses principes auprès du public en lien avec les écoles ou impliqué dans des pratiques liées à l’alimentation ou à l’accueil des enfants. Par l’envoi des outils, la participation à des événements, l’information, des publics très variés ont été touchés: les parents, les élèves, les enseignants, les restaurateurs, les diététiciennes, le personnel de cuisine, les encadrants et les responsables de l’accueil, les pouvoirs organisateurs, les bourgmestres et échevins, les CPAS, les travailleurs médico-sociaux de l’ONE, etc.

Les «Midis à l’école» dans Education Santé

Plusieurs articles sont parus sur ce projet depuis 1999:
DELIENS C., ‘A Table les cartables’. Evaluation autour de l’alimentation des écoliers, n°190, mai 2004, pp.2-8
VAN AUDENHAEGE M., A table les cartables!, n°165, décembre 2001, pp.6-7
Les Midis à l’école: deux fiches-outils, n°160, juin 2001, p.16
DE BOCK C., Les Midis à l’école cartonnent, n°151, septembre 2000, p.14
DELIENS C. Echanger des mots pour changer les midis à l’école, n°150, juillet-août 2000, pp.5-9

Ceux publiés depuis janvier 2001 sont disponibles sur notre site https://www.educationsante.be . Les autres peuvent être demandés par téléphone au 02 246 48 51.

Cette manière de procéder en «arrosant» les écoles d’outils pour d’une part communiquer sur le projet et sa démarche et d’autre part sensibiliser les acteurs et partenaires scolaires présente des avantages certains. Cette appropriation des outils peut favoriser l’action selon les besoins, les envies, les capacités, le temps disponible….
Les inconvénients sont par contre évidents quand il s’agit de «gérer un programme» et évaluer à la fois les besoins et l’impact de celui-ci car recevoir une information et des outils ne signifient pas nécessairement qu’un changement va intervenir, mais plutôt qu’une certaine sensibilisation peut être attendue. Les besoins de changement ou d’outils pour améliorer les midis à l’école sont peu identifiés dans ce cas de diffusion massive car l’école ou les partenaires éducatifs et de santé ne formulent pas de demande explicite. Par contre, les contacts entrepris d’initiative permettent d’en savoir plus (voir la partie de l’article sur la mobilisation des acteurs).
Certaines actions de formation et de sensibilisation visaient des publics relais spécifiques: les diététiciennes des différentes associations se sont vu par exemple proposer une formation de 5 jours pour une approche sensorielle et ludique de l’éducation nutritionnelle à l’école; des agents ZEP et des professionnels de la santé scolaire PSE (ex IMS) – PMS, ont profité d’une formation de 3 x 2 jours pour se former à une méthode d’expression collective des élèves (sur la question des midis notamment).
D’autres actions d’information et d’animation ont été menées lors d’événements comme par exemple les Francofolies de Spa, une journée de la Ligue des familles, plusieurs éditions du Salon de l’Education à Namur, des stands lors de colloques ou journées pédagogiques. Des présentations et discussion du programme ont été faites lors de formations pour des enseignants, des licenciés en éducation pour la santé, des diététiciennes, lors de journées ONE sur l’alimentation en crèche, etc.
Des outils pour réfléchir, des outils pour agir ensemble
Ces outils ont été conçus dans l’idée de susciter l’appropriation des démarches, le travail intersectoriel et le partenariat, la participation et l’expression des élèves, le dialogue entre les parents et les acteurs de l’école autour de la question de l’alimentation; ils s’inscrivent par ailleurs, dans une pédagogie participative cherchant à mêler des propositions ludiques pour à la fois promouvoir la santé et atteindre des objectifs d’apprentissage et d’exercice des compétences.
Ces outils de sensibilisation sont destinés soit aux enseignants, animateurs et aux parents, ou encore aux restaurateurs, aux acteurs PSE et PMS, aux élèves… Un dépliant présente ces différents outils de manière visuelle, avec au verso une présentation des rôles et des actions possibles pour les différents partenaires.
Ils ont été également diffusés en encart dans des revues pédagogiques et dans la revue Education Santé ou encore présentés dans de nombreux médias spécialisés ou non (presse écrite, radio, TV) afin de sensibiliser le maximum d’acteurs potentiels comme les parents ou grands-parents et les acteurs dans le secteur de l’enfance, des familles ou de l’aide à la jeunesse. Près d’une trentaine d’articles ont été rédigés par des membres de la Coordination pour des publications à destination d’enseignants, d’élèves, d’associations de parents, d’intervenants éducatifs, de santé ou encore d’éducation à l’environnement.
Que ce soit dans le cadre du programme «Midis à l’école» ou de l’opération «A table les cartables» subsidiés par la Communauté française entre 1996 et 2004 et gérés par la Coordination, ces outils concrétisent la dynamique de sensibilisation menée depuis plusieurs années en Communauté française pour promouvoir la santé nutritionnelle ainsi que des améliorations des temps de midi au niveau des écoles fondamentales, des élèves et de leurs parents. Les voici brièvement présentés.
Le Journal «Midis à l’école» n° 1 , diffusé à 120.000 exemplaires en 1997 à chaque élève des classes participantes au projet et à toutes les écoles maternelles et primaires des différents réseaux d’enseignement en Communauté française. Ce journal élaboré à partir des textes et des dessins des élèves mettait en évidence la diversité des situations et des propositions pour améliorer les repas ou les récréations tout en communiquant à toutes les écoles la démarche proposée pour se lancer dans la dynamique.
Le feuillet et l’affiche «Les midis pour le plaisir- En parler pour changer» ont été diffusés depuis 1998 en 35.000 exemplaires. Ils visent à encourager l’expression et la prise en compte des avis des élèves et des personnes concernées par les midis, l’idée étant de dégager dans chaque école des priorités d’actions qui soient ajustées aux besoins locaux.
La brochure «Manger, plaisir et santé» . Diffusée à 30 000 exemplaires depuis 1998, cette brochure de 20 pages a été réalisée pour sensibiliser les adultes qui, de près ou de loin, partagent la responsabilité des repas des enfants et de leur santé dans les écoles ou dans les collectivités. Elle cherche à renforcer le rôle éducatif des adultes de la famille et de ceux qui interviennent dans l’école au niveau des menus, de la cuisine ou de la surveillance des repas.
Un envoi spécifique visait les Conseils de participation des écoles et le personnel responsable des repas à l’école avec un courrier d’accompagnement encourageant les écoles fondamentales à intégrer une dimension de promotion de la santé dans leurs projets d’établissement.
Une diffusion spécifique accompagnée d’une lettre d’encouragement de la ministre a été faite en février 1999 auprès des secteurs de l’enfance, de la famille, de la santé et de l’alimentation.
Le questionnaire bilan «A propos des midis» . Diffusé dès mars 1999, il sert aux écoles pour faire un bilan de leur situation «midis» et pour définir des priorités de changement en matière de récréation et de repas scolaire. La Coordination s’est faite le porte-parole des besoins des écoles auprès des autorités compétentes et dans divers médias sur base des questionnaires renvoyés par les écoles pendant toute la durée du programme.
Le Journal «Midis à l’école» n° 2 , préfacé par les ministres de la santé et de l’enseignement fondamental, a été diffusé à 20 000 exemplaires depuis décembre 1999. Il est le fruit des échanges avec les classes inscrites et d’une réflexion menée à partir des expériences et des demandes du terrain. Il propose des articles écrits par les classes et des supports, des ressources pour imaginer et construire son propre projet «midis», faciliter l’expression des élèves sur leurs midis, et développe une série de pistes pour aborder l’un ou l’autre aspect des midis (manger, jouer, réfectoire, cour, consommation et environnement, activités…).
Les fiches outils
«J’écris à la manière d’un journaliste», «Le monde des saveurs», «Récolter la parole des élèves à propos des midis», «Explorer le monde des saveurs à l’école». Chacun de ces outils a été diffusé à plusieurs milliers d’exemplaires.
La cassette vidéo Arts d’écoles – Explorations artistiques et pédagogiques autour du thème «nourritures, corps et santé» relate des expériences menées dans une quinzaine d’écoles et associations partenaires de la zone de discrimination positive ZEP D+ de Saint-Gilles (Bruxelles) soutenue par la Mission locale jeunes de St-Gilles. Elle constitue un outil de sensibilisation et de formation pour des intervenants éducatifs et des animateurs «santé» valorisant l’approche artistique, créative et participative de ces thèmes de promotion de la santé avec les élèves du fondamental et du premier degré secondaire.
L’affiche de la charte «A l’école d’une alimentation saine» et la brochure du même nom (54 pages). Diffusée aux écoles avant la conférence de presse de lancement de l’opération, cette brochure présente aux acteurs éducatifs les thématiques prioritaires pour établir et développer des projets éducatifs et de santé pour améliorer l’alimentation à l’école avec des Conseils de participation, des élèves et des partenaires locaux. Elle les invite à adhérer à la charte et à mener des actions entre 2002 et 2004. Une centaine d’écoles ont manifesté leur adhésion. Beaucoup d’autres et de nombreux acteurs ont puisé des pistes de travail dans la brochure diffusée à 18.000 exemplaires.
Co-édition d’un feuillet «parents» diffusant la charte ainsi qu’une pyramide alimentaire et des conseils utiles pour équilibrer l’alimentation familiale et favoriser des choix pour une alimentation saine à l’école. Ce feuillet a été diffusé par les ministres à l’initiative de l’opération à tous les élèves de l’enseignement maternel et primaire des différents réseaux d’enseignement en février 2002.
Contribution et édition du cahier technique « Pour une alimentation santé à l’école fondamentale – Bases pour l’établissement d’un cahier des charges » diffusé par l’asbl Euralisa. Elaboré à l’intention des restaurateurs, des autorités locales et des personnes en charge de la fabrication des repas scolaires, ce cahier technique visant à améliorer l’équilibre alimentaire et l’hygiène des repas à l’école rejoignait de fait un des objectifs de départ du programme. Il a été diffusé en février 2002 dans toutes les écoles fondamentales, auprès des personnes en charge des repas et aux traiteurs et restaurateurs confectionnant les repas livrés dans l’école. Accompagné d’une circulaire ministérielle co-signée, cette publication faisait suite aux engagements des ministres lors du colloque de Gembloux en décembre 2000. Il a été diffusé par la suite plus largement aux PSE et PMS ainsi qu’aux CLPS et aux intervenants dans la formation de diététiciennes ou de personnel de santé.
Le jeu test-santé sur l’alimentation à destination des 5e et 6e primaires et du 1er cycle du secondaire. Edité une première fois par Averbode dans la revue ID de décembre 2002, ce jeu a été réédité sous forme de set de table et en affiche grand format et diffusé à 130 000 exemplaires pour répondre aux demandes des PSE et PMS pour stimuler des animations en partenariat avec les enseignants lors des visites médicales ou dans les classes. Le matériel semble largement inutilisé pour le moment étant donné la conjoncture actuelle de réorganisation des pratiques des PSE. Il viendra sans doute à point une fois que des besoins de support auront été formulés par des classes ou que des projets-santé se seront mis en route. Cet outil a été conçu pour susciter une interpellation de l’élève et pour favoriser le dialogue entre les adultes éducateurs et le groupe classe sur les habitudes alimentaires. Il vise à encourager la capacité des élèves à faire des choix favorables à leur santé de manière autonome, ludique et non prescriptive. Plusieurs enseignants l’ont utilisé dans le cadre de projets de sensibilisation en classe à l’équilibre alimentaire. Il a été adapté au premier degré primaire dans le cadre d’un partenariat avec la ville de Seraing.
Le répertoire «Des livres à déguster»
Une sélection de livres de jeunesse sur le thème de l’alimentation, des repas, des goûts pour aborder de manière ludique des aspects parfois trop scolaires de la consommation alimentaire. Par ces supports, les enfants sont amenés à s’intéresser à leur santé et aux besoins du corps sans doute plus ou mieux qu’avec des messages prescriptifs en matière de nutrition et d’équilibre alimentaire. Cela leur donne ainsi d’autres éléments pour être plus en mesure de faire des choix de consommation plus sains et autonomes. Les commentaires faits pour chaque livre ouvrent des pistes sur les manières d’aborder la promotion de la santé nutritionnelle autrement. Diffusé en novembre 2003 à toutes les écoles fondamentales, les PSE, les PMS, l’ouvrage a également été diffusé gratuitement à toutes les bibliothèques de lecture publique par la Communauté française. Nul doute que les étagères des bibliothèques ont peut être accueilli de nouveaux albums de jeunesse à la suite de cet envoi et peut être des demandes d’acteurs scolaires!

Mobilisation pour le changement: pas n’importe comment!

Alimentation à l’école en Communauté française et recommandations internationales
Avec le projet «Midis à l’école» et ses expériences pilotes en 1996-97, l’opération «A table les cartables!» tout comme d’autres programmes de promotion de la santé, la concertation des acteurs et des secteurs concernés sur la question de l’alimentation à l’école en Communauté française, est déjà à l’ordre du jour depuis un certain temps. Cette mobilisation devançait donc les recommandations aux 45 Etats membres faites par le Conseil de l’Europe à la suite du Colloque «L’alimentation à l’école- Faire le choix de la santé», organisé conjointement avec le Bureau européen de l’OMS en novembre 2003 (4) (5) (6)
A l’image de la diversité de situations et d’expériences relevées par près de 27 pays lors de ce colloque, menées au niveau national, régional ou local par différentes institutions ou ONG, les expériences menées par les acteurs éducatifs et les écoles en Communauté française sont extrêmement variées selon les besoins de chacun et selon les partenariats mis en place.
Les échos des écoles avec qui la Coordination a été en contact depuis 1996 illustrent cette variété: pour la question des repas et de la sensibilisation autour de la nourriture, par exemple, ces projets peuvent aller d’un concours de dessins sur le «réfectoire de mes rêves», jusqu’à l’élaboration en classe d’une pyramide alimentaire en 3 D ou encore la réalisation d’un vaste projet d’école alliant réduction et tri des déchets avec une sensibilisation à des collations plus équilibrées en passant par la mise en place d’un distributeur de pommes ou d’une fontaine à eau dans le préau. D’autres actions sont entreprises dans les écoles: organisation d’un magasin santé par les élèves vendant des produits issus du commerce équitable, collations avec des fruits préparées par les grands de primaire pour les petits de maternelles, rédaction d’une charte de règles de vie pour le réfectoire ou la cour de récréation, établissement d’un cahier des charges privilégiant les aliments issus de l’agriculture biologique ou encore changement de restaurateur négocié par les parents avec les pouvoirs organisateurs de l’école dans un souci de qualité et d’équilibre nutritionnel (sans augmenter les prix des repas!).
Le Colloque de 2003 à Strasbourg a également relevé la grande diversité selon les traditions alimentaires et éducatives de chaque pays ou région et des répartitions fort différenciées au niveau des responsabilités: dans certains cas, l’application de politiques nationales ou régionales correspond aux autorités locales; dans d’autres, l’école est responsable de l’organisation des repas appropriés.
Selon le mode de fonctionnement national, régional ou local, des expériences sont réalisées dans des écoles de différents pays européens (7).
La France par exemple a lancé en 2001 son programme national de nutrition et fonctionne de manière centralisée tant en matière d’éducation que de santé.
Pour la Belgique, la reproduction de ce mode de planification n’est pas souhaitable étant donné la répartition des compétences concernées dans les entités fédérées. Par contre, il est clair que l’établissement de recommandations nationales faisant écho des recommandations européennes (Conseil de l’Europe, OMS, Union Européenne…) en matière de production d’aliments et boissons favorables à la santé nutritionnelle, d’éducation nutritionnelle, d’exercice physique et de santé ne seraient sans doute pas superflues pour orienter les politiques communautaires, par ailleurs fort développées déjà en ce qui concerne les programmes de promotion de la santé. Des budgets supplémentaires émanant du niveau fédéral et à octroyer par les Communautés et Régions aux acteurs de projets de promotion de la santé nutritionnelle selon ces recommandations, stimuleraient sans aucun doute les acteurs-relais à agir en la matière auprès des différents publics.
L’OMS et le Conseil de l’Europe recommandent que cette mobilisation se fasse selon une approche globale de promotion de la santé; la charte des écoles promotrices de santé diffusée par l’OMS et relayée en Communauté française par la Croix-Rouge et par le VIG pour la Communauté flamande a diffusé cette approche très largement au niveau des écoles. Elle est relayée actuellement par les intervenants en promotion de la santé à l’école et les centres de santé à l’école (PSE et PMS). Un des principes majeurs pour promouvoir la santé est la participation, ce qui implique dans le cas de l’alimentation à l’école par exemple: de mettre en place une démarche de changement avec la participation des élèves, direction et pouvoir organisateur, et des personnes concernées par ces repas ou par l’offre alimentaire et l’environnement nutritionnel à l’école.

Impact du programme «Midis à l’école»

La diffusion massive des outils produits dans le cadre de ce programme ainsi que les nombreux échos faits dans la presse et les médias spécialisés (santé, éducation, famille…) ont largement contribué à la mobilisation des acteurs en lien avec l’école. L’articulation de celui-ci avec l’opération «A table les cartables» a également contribué à élargir le public sensibilisé sur la question des repas et de l’alimentation en ouvrant aussi le thème à d’autres aspects de la consommation alimentaire: la découverte des saveurs et des goûts; l’équilibre alimentaire (repas chauds, pique-niques, collations et boissons); la publicité, le marketing et la vente; une restauration de qualité à coûts maîtrisés; le respect de l’hygiène; le lieu et le cadre des repas.
Un tiers des écoles adhérentes étaient des écoles «midis», ce qui laisse entendre qu’une sensibilisation continuée à la promotion de la santé peut entraîner des effets mobilisateurs sur un plus long terme. D’autant plus qu’il est fort probable que les écoles qui ne se sont pas manifestées pour l’opération «A table les cartables» étaient déjà inscrites dans une dynamique de projet pour améliorer l’offre alimentaire à l’école.
Plusieurs autres initiatives locales ou communautaires ont renforcé d’ailleurs ces deux projets en offrant souvent le support de proximité (outils, visites, animations…) dont certaines écoles avaient besoin: citons par exemple, l’action «collations santé» de l’asbl Tournesol en partenariat avec l’IBGE, les accompagnements proposés par l’Observatoire de Santé du Hainaut, les actions de la Province de Namur, les sensibilisations jeunes consommateurs du CRIOC, le soutien à des actions autour du petit déjeuner de l’APAQ-W (ex ORPAH), le feuillet Oxfam – magasins du monde et leurs campagnes pour les produits du commerce équitable, les fermes d’animation et les fermes pédagogiques, les brochures diverses: Fondation pour la Chirurgie cardiaque, OSH, Infor Santé des Mutualités chrétiennes, Mutualités socialistes,, etc. D’autres ont abordé la question de l’environnement en relation avec les repas et l’alimentation: les initiatives du Réseau Idées et du secteur Education à l’environnement, les accompagnements au niveau local par des intervenants en éco-consommation, les états des lieux «environnement» lancé par l’asbl COREN, etc. Sans oublier les initiatives antérieures «Je mange bien à l’école» du SPEOL, la campagne «Fruits et légumes» de l’ICAN dans le cadre du Programme L’Europe contre le cancer , les diffusions de «l’Ecole Ensantée», «l’Ali à l’école» et des outils de promotion santé produits par le Service Education pour la Santé de la Croix-Rouge de Belgique.

Participation des acteurs éducatifs

Nombreux sont les membres des équipes pédagogiques des écoles ou autres acteurs éducatif ou de santé qui ont pris contact avec la Coordination en tant que partenaires potentiels dans des projets. Ils ont souvent du mal à manifester ou à faire accepter leur bonne volonté auprès de l’école pour soutenir d’une manière ou d’une autre des démarches pour améliorer les midis. Les contacts entrepris notamment par les parents, le personnel d’encadrement et de service, les cuisinier(e)s, traiteurs ou restaurateurs, les centres de santé à l’école (PSE ex IMS), témoignent de cette mobilisation (voir tableau 1 page suivante).
Dans le cadre des «Midis à l’école», 1687 personnes ont pris contact avec la Coordination que ce soit dans une recherche d’outils, d’informations, de conseils méthodologiques ou pour être acteurs à leur tour.
Sur 1131 personnes dont le rôle potentiel en lien avec l’école et les midis à l’école est identifié, 169 sont des parents, des membres d’association de parents ou de conseils de participation s’interrogeant sur les outils disponibles, les organismes ressources, les manières de faire bouger l’école ou les pouvoirs organisateurs. Un nombre équivalent (n=174) représente des personnels de centres de santé à l’école (PSE-IMS, PMS) ayant pris contact avec la Coordination suite à des courriers, pour en savoir plus, discuter méthodologie d’action, conception de projets et participation des élèves.
Un grand nombre d’élèves et d’enseignants du supérieur (n=311) ont aussi été sensibilisés au programme «Midis» que ce soit dans l’intention de réaliser des stages sur le terrain ou pour mener des actions en classe.

Tableau 1 – Mobilisation des acteurs éducatifs et de partenaires potentiels

Types d’acteurs

Nombre de personnes %
Enseignement supérieur 311 23,5
Enseignants 295 22,3
IMS-PMS-PSE 174 13,1
Parents/AP 169 12,8
Acteurs promotion santé 146 11
Diététiciens 65 4,9
Administrations communales 46 3,5
Producteurs de repas (Restaurateurs, traiteurs, CPAS,…) 36 2,7
Organisme de formation 27 2
Crèches 24 1,8
Institutions du secteur culturel 19 1,4
Institutions du secteur environnement 10 0,7
Total 1322

Source: programme «Midis à l’école» 1996-2004, fichier «personnes», Cordes 2004

Les parents par contre sont souvent les «parents pauvres» (c’est le cas de l’écrire!) de ces partenariats alors qu’ils sont sans doute les premiers concernés comme premiers éducateurs de leurs enfants, la famille étant le premier lieu où se forgent les habitudes alimentaires. Bien évidemment, la nourriture est une pratique fort liée aux relations et à l’organisation familiales, au contexte affectif et au bien-être psychologique de chacun. L’éducation à de saines habitudes alimentaires est donc nettement plus complexe à aborder dans la famille que dans le milieu scolaire; la complémentarité d’actions éducatives en partenariat école-famille prend dès lors toute sa valeur car elles peuvent se renforcer mutuellement, rendant possible un véritable projet de promotion d’une alimentation saine et équilibrée à l’école comme à la maison.
Les chiffres du tableau 2 sont indicatifs et ne reprennent que certains acteurs et partenaires scolaires -autres que la direction – qui ont été à l’initiative du premier ou deuxième contact avec la Coordination Education & Santé, sur les quelque 1251 écoles avec qui des contacts ont été établis.

Tableau 2 – Mobilisation, initiative des contacts

Un enseignant 410
Un parent 198
Une infirmière PSE ou PMS 56

Source: programme «Midis à l’école» 1996-2004, fichier «écoles», Cordes 2004

Même si les premiers contacts entre l’école et la Coordination à propos des midis ont été souvent établi par l’association de parents, un parent membre du Conseil de participation, ou un parent d’élève, il est souvent nécessaire de soutenir ce processus de rencontre et de dialogue, compte tenu des enjeux individuels ou encore de la non reconnaissance ou valorisation de chacun en tant que partenaire éducatif et de santé.

Participation des élèves

Cela a été dit et redit par les pédagogues, les éducateurs, les promoteurs de la santé, les agents de changement, les spécialistes du développement communautaire… un projet a d’autant plus de chance de réussite et d’impact durable quand il se fonde sur la participation des élèves et des personnes concernées. Ceux ci peuvent utilement contribuer à l’identification des besoins, à la réflexion sur les éléments qui posent problème, à la recherche de solutions, à la conception de l’action ou du projet, son déroulement et son évaluation.
Côté élèves, leur participation dans la conception du projet–santé constitue toujours le défi le plus difficile à mettre en pratique par les enseignants, les directions ou les associations de parents et les centres de santé à l’école. Dans le cadre de l’opération «A table les cartables» par exemple, l’évaluation a montré que dans une école sur quatre seulement, les élèves ont participé à l’état des lieux, base pour construire un projet de promotion de la santé répondant aux besoins. Par contre ils étaient acteurs à chaque fois dans la réalisation d’actions valorisant un mode de consommation saine (petit déjeuner, collation, petit magasin) ou encore dans la préparation de plats lors d’ateliers cuisine ou lors d’animations.
Dès le début du programme «Midis à l’école», des animations de soutien ont été menées à la demande d’écoles pour lancer la discussion dans les classes, que ce soit sous forme de concertation, de communication via une marionnette, de reportages photos dans l’école, de rédaction d’articles par les élèves, de réalisations de dessins… Pour contribuer à cette démarche participative, 55 membres d’équipes IMS-PSE ou PMS ont notamment suivi une formation de 3 x 2 jours organisée par la Coordination à propos de la méthode D.E.C.E., ce dispositif d’expression collective des élèves innové en France par l’association AGASP (Paris).
Les moyens humains et les supports (journal n° 1 et 2, fiches outils «Récolter la parole des élèves à propos des midi») n’ont donc pas manqué pour soutenir les enseignants et faire en sorte que la décision d’un projet pour améliorer les midis soit collective. Ce défi reste d’actualité et le nouveau programme de la Coordination expérimente encore de nouveaux supports pour la rendre effective dans les classes.

Participation des partenaires

Si de nombreux acteurs de la société civile, du secteur de la santé, de la restauration, de l’éducation se sont intéressés à la question des midis, le partenariat avec l’école n’est pas toujours acquis: il exige de part et d’autre du temps, de la bonne volonté, de l’écoute, la reconnaissance en tant qu’interlocuteur et avant tout, la relégation d’intérêt particulier ou d’enjeux commerciaux au profit de l’intérêt collectif: la santé des élèves et des conditions environnementales et éducatives favorisant de leur part des choix positifs en matière de santé. Au niveau de la Communauté française de Belgique (et il existe de nombreuses expériences en Flandre à ce sujet également), le programme «Midis à l’école» a cherché à susciter ce partenariat constructif au service de la santé des élèves. Le nombre de partenaires impliqués dans des démarches autour de la question des midis à l’école témoigne de cette mobilisation
Ces partenariats se sont établis à différents niveaux et dans différents secteurs. A chaque occasion, ces expériences ont démontré une fois de plus la nécessité et l’intérêt de ce tissage intersectoriel pour faire aboutir des démarches de promotion de la santé. Elles ont aussi mis en évidence le temps et l’énergie nécessaires pour concrétiser ce principe de base d’une démarche de qualité et le défi de la mener à terme. Le principe de subsidiarité impliquant la responsabilisation et l’action aux différents niveaux de pouvoir relève du même défi en promotion de la santé.
Au niveau des cabinets ministériels
L’expérience démontre toute la richesse mais aussi toute la difficulté du travail intersectoriel tant prôné par la philosophie de promotion de la santé ainsi que le temps et l’assiduité nécessaires pour mener à bien des projets conformes à des objectifs premiers de promotion de la santé que ce soit dans le milieu associatif ou au niveau des cabinets ministériels; les enjeux de chacun des secteurs sont respectables mais la priorité – dans le cadre d’une politique de santé, que ce soit au niveau communal, provincial, communautaire ou fédéral – doit aller à la santé collective des élèves et aux principes de promotion de la santé, ce qui entraîne des choix de stratégies parfois difficilement compatibles: résultats visibles et immédiats, importance des chiffres ou des répercussions médiatiques au détriment des démarches durables, ponctualité des aides versus démarches d’appropriation, visibilité institutionnelle ou politique et cohérence des actions… La participation à la définition de politiques publiques saines et le travail intersectoriel doivent rester des défis intéressants à relever pour les acteurs du secteur malgré les difficultés «de langage».
Au niveau local
La collaboration avec les CLPS et les acteurs communaux ou provinciaux s’est concrétisée en réunions de coordination et d’échanges d’information sur les mobilisations locales, en transmission par zone de CLPS, de données «midis»/«charte» à propos des écoles et des acteurs sensibilisés, ou encore en diffusion d’outils pour les publics des CLPS et en séances de formation/information à destination des publics d’intervenants locaux organisées conjointement.
Au niveau de la Communauté française
Des actions en partenariat ou des interventions se sont concrétisées par la participation de la Coordination Education & Santé à différents événements de type formatif ou informatif: interventions dans des écoles supérieures de diététique et promotion de la santé, dans des centres universitaires ou lors de journées de formation (Cerise, UCL, ABDLF, CEDE…), auprès des fédérations d’associations de parents, tenue de stand pendant les 5 journées annuelles du Salon de l’Education à Namur, présentation lors des formations à l’attention des PSE, PMS et acteurs locaux, participation lors de la 1ère Conférence locale à Liège, animations d’ateliers et présentation d’exposés sur des thèmes en lien avec le projet (bruit, école, participation à l’école, alimentation, promotion de la santé nutritionnelle, approche ludique et sensorielle en éducation nutritionnelle, etc.), collaboration à la création et aux travaux de l’asbl Euralisa entre 1998 et 2003.
Au niveau international
En septembre 2000, le programme «Midis à l’école» a été retenu parmi les 3 lauréats du Concours européen de promotion de la santé, et a été présenté à Lyon à cette occasion devant une assemblée européenne. Il a également été recensé dans les pratiques retenues sous le nom «des trésors méconnus» du Refips en 2002. Depuis 2002, la Coordination a participé intensivement au nom de la Communauté française aux réunions et travaux du groupe Nutrition en milieu scolaire du Conseil de l’Europe pour la préparation et le suivi du Colloque du Conseil de l’Europe à Strasbourg en novembre 2003 ainsi qu’à la coordination de la participation de la Communauté française à celui-ci, avec notamment une association de parents d’une école bruxelloise mobilisée sur la question de l’alimentation.

L’alimentation à l’école – faire le choix de la santé

L’alimentation et la santé de nos enfants nous concernent toutes et tous en Europe. Et le défi est important.
Comment ne pas s’émouvoir face à l’augmentation considérable du nombre d’enfants dont l’alimentation est déséquilibrée?
Comment ne pas s’inquiéter face au développement de l’obésité qui non seulement touche le bien-être de nos enfants et des futurs adultes, mais qui soulève aussi des questions cruciales en termes d’évolution et d’impact sanitaires à long terme comme de prise en charge par la société?
Une des réponses à cette évolution complexe se trouve dans l’éducation et l’apprentissage. Le rôle de l’école et de tous les professionnels qui contribuent au bien-être de nos enfants en milieu scolaire est à ce titre essentiel.
L’alimentation à l’école concerne deux aspects qui sont liés: apprendre à se nourrir sainement et connaître l’alimentation disponible dans les écoles, ce qui touche de nombreux acteurs.
Le programme des travaux et les débats du forum ‘L’alimentation à l’école – Faire le choix de la santé’ ont bien reflété cet état des choses et font l’objet d’un rapport très complet qui propose en outre des sujets de réflexion et des possibilités d’action.
L’alimentation à l’école – Faire le choix de la santé, un ouvrage de 220 pages en vente au prix de 19 euros à la Librairie européenne, av. A. Jonnart 50, 1200 Bruxelles. Tél.: 02 734 02 81. Courriel: info@libeurop.be.

Monitoring et évaluation du programme

Les données recueillies dans les contacts par téléphone ou sur le terrain et encodées soit dans un fichier «personnes» ou dans un fichier «écoles» nous aident à piloter les programmes, à mobiliser les acteurs et à répondre aux sollicitations d’acteurs de terrain souhaitant s’inscrire dans la dynamique «midis» ou «charte». Elles nous permettent aussi d’affiner nos stratégies de diffusion, de mieux cerner les besoins et donc d’ajuster nos modes d’intervention. Ces données mesurent en effet la diversité des acteurs concernés par la question des temps de midi et de l’offre alimentaire à l’école et plus généralement par la santé à l’école; elles documentent aussi la mobilisation autour de la question des midis que ce soit par zone territoriale, par commune, etc. facilitant les synergies entre acteurs locaux (parents, enseignants, pouvoirs organisateurs, associations, écoles, PMS, PSE) pour lancer des actions «midis» en leur signalant d’éventuelles ressources dans leur école ou dans la zone de proximité.

Mobilisation des écoles: évolution

Le tableau ci-dessous indique l’évolution de la dynamique «Midis à l’école» depuis le début de l’expérimentation. Les deux premières années du projet pilote ont servi à faire connaître l’initiative ministérielle et la démarche. Cette dynamique a été relancée régulièrement et certainement renforcée par l’action d’autres acteurs de promotion santé et la médiatisation sur la question alimentaire.
Les fluctuations dans la mobilisation de nouvelles écoles peuvent être mises en lien avec différentes diffusions d’outils et de documents émanant des autorités ministérielles ainsi que des événements fortement médiatisés en lien direct avec la santé à l’école et la promotion de la santé: la mise en place du décret «Missions» et des structures participatives telle que le conseil de Participation (8).
La Coordination a maintenu ses démarches de sensibilisation des écoles et des partenaires potentiels notamment par des courriers lors des rentrées scolaires, la diffusion de nouveaux outils, le journal «Midis à l’école», l’enquête continuée via le questionnaire-bilan «A propos des midis», les articles dans la presse tout public et la presse spécialisée de différents secteurs…
Les initiatives et le soutien ministériels au cours des deux législatures ont contribué à faire accepter et reconnaître par l’école et les acteurs de l’enseignement et de la santé, l’importance de l’alimentation et de la santé à l’école mais aussi à diffuser une démarche de promotion de la santé impliquant les différents acteurs en commençant par les élèves: citons par exemple, les circulaires diffusées aux écoles et aux partenaires santé (96-97, 2001, 2002), les courriers ministériels, le Forum sur l’alimentation à l’école de Gembloux en décembre 2000 et le lancement de l’opération «A table les cartables» en novembre 2001, la diffusion en 2002 à toutes les écoles fondamentales d’un cahier technique «Pour une alimentation santé à l’école» pour établir le cahier des charges des restaurateurs, équilibrer les menus scolaires et assurer l’hygiène alimentaire mais aussi la diffusion aux parents via les écoliers d’un feuillet proposant un jeu familial, la pyramide alimentaire et quelques conseils pour permettre aux parents et aux enfants d’équilibrer et varier les repas et les collations santé.

Tableau 3 – Evolution de la mobilisation

Année scolaire

Premiers contacts
96-97 93
97-98 140
98-99 173
99-00 264
00-01 298
01-02 210
02-03 97
03-04 64
Total 1251

Source: programme «Midis à l’école» 1996-2004, fichier «écoles», Cordes 2004

Mobilisation locale

Les différentes actions de diffusion et d’information aux acteurs locaux, visent toujours les mêmes principes, à savoir: encourager les partenariats avec l’école et le soutien aux acteurs éducatifs, faciliter la communication à l’échelon local et tisser de la cohérence entre les différentes initiatives favorables à la promotion de la santé à l’école.
Il nous a semblé intéressant de reprendre ici quelques éléments d’évaluation sur cette mobilisation au niveau local car elle témoigne d’une prise de conscience à la fois de l’importance de ce temps récréatif de midi, mais peut-être aussi de l’engagement des écoles en matière de santé et de la collaboration avec les acteurs éducatifs et les nombreux partenaires. Les chiffres du tableau 4 distribués par CLPS constituent un indicateur de la mobilisation locale autour des projets menés dans leurs zones de travail. A ceux-ci devraient bien évidemment s’ajouter les contacts locaux entrepris directement auprès des CLPS. Mis en rapport avec le nombre d’écoles existantes, ces chiffres pourraient indiquer le niveau de sensibilisation des écoles à la question des midis et à l’offre alimentaire et en dériver une certaine mobilisation sur la santé à l’école.

Tableau 4 – contacts par CLPS

CLPS

Nombre d’écoles
Brabant 110
Bruxelles 215
Charleroi-Thuin 122
Hainaut occidental 88
Huy-Waremme 52
Liège 170
Luxembourg 108
Mons-Soignies 138
Namur 182
Verviers 62
Total 1247

Source: programme «Midis à l’école» 1996-2004, fichier «écoles», Cordes 2004

D’autres indicateurs reflètent une mobilisation locale dans le cadre du programme. Il s’agit par exemple du nombre de communes ayant pris contact avec la Coordination depuis les débuts. 78 communes (administration, échevinats, CPAS, etc.) ont ainsi démontré leur intérêt pour la thématique santé à l’école notamment. On peut supposer que le projet «mandataires communaux » ou «communes en santé» trouve sans doute des pistes pour concrétiser les volontés politiques dans les outils et les démarches diffusés dans le cadre des «Midis à l’école» ou de l’opération «A table les cartables».
Quant à la mobilisation des centres de santé scolaire sur le sujet de l’alimentation équilibrée, l’intérêt qu’ils ont manifesté suite à la proposition de la Coordination Education & Santé d’un jeu-test santé sous forme de set de table et d’affiche de grand format est un indicateur encourageant. L’idée était de leur faciliter l’animation sur le sujet de l’alimentation auprès des jeunes de 11 à 14 ans dans les salles d’attente de la visite médicale ou lors de leurs interventions en classe en collaboration avec l’enseignant et peut-être ainsi de promouvoir d’autres actions sur le sujet en classe. Suite à la demande, cet outil sera complété prochainement par une fiche d’animation pour soutenir les intervenants dans leur démarche auprès des classes.

Priorités et actions de changements

Les résultats de cette mobilisation peuvent être évalués sur base des questionnaires renvoyés par 450 écoles entre 1999 et 2003. D’une part, cette information permet d’estimer de manière plus précise les priorités de changement pour les écoles et d’autre part, elle permet une appréciation sur la nature des changements entrepris.
En matière de repas , les priorités pointent principalement (34%) la nécessité d’améliorer le cadre des repas, à savoir l’infrastructure, le bruit, les espaces pour manger, l’équipement des réfectoires. De manière tout aussi importante, plus d’une école sur quatre dénonce le besoin d’augmenter l’encadrement des repas par des personnes compétentes (formation à l’appui), rémunérées correctement, en privilégiant l’accompagnement éducatif de ces moments pour les classes maternelles chez qui les habitudes alimentaires se forgent ainsi en collectivité. Nombreuses sont les écoles qui ne sont pas équipées d’un réfectoire suffisamment spacieux, lumineux, insonorisé et permettant d’organiser les repas scolaires selon les critères de l’école et des critères santé favorisant l’autonomie des élèves, les formules de repas chaud ou tartines, la circulation dans les lieux, l’accès à l’eau de boisson…
Ces deux facteurs – le cadre et l’encadrement – sont déterminants du climat relationnel, de l’ambiance et de la convivialité des repas ainsi que de l’organisation des services. Pendant la période du programme «Midis à l’école», les pouvoirs organisateurs et les acteurs éducatifs ont été sensibilisés par les nombreux débats et mesures politiques amenés par les mouvements familiaux, les organismes actifs en matière d’accueil de l’enfant notamment le secteur de l’accueil extrascolaire, soulignant l’importance des temps libres et de la qualité de l’accueil pour le bien-être de l’enfant.
Quant au contenu des repas eux-mêmes, une école sur 10 souhaite des changements en matière de qualité et d’équilibre nutritionnel; 7% des écoles mettent comme priorité d’offrir des repas chauds.
En matière de récréation , les écoles signalent des priorités allant dans le même sens: pour 45% il s’agit améliorer l’encadrement avec des éducateurs par exemple (comme en secondaire) mais aussi les espaces (31%) et les possibilités pour permettre aux enfants de bouger et de choisir comment occuper leur temps libre récréatif (41%).

Changements «Midis»

45,5% des écoles sur les 450 ayant renvoyé leur questionnaire pendant la période du programme, déclarent avoir réalisé des changements concernant les repas et l’alimentation à l’école; 42,4 % déclarent avoir fait des changements en ce qui concerne les récréations.
Ces changements portent principalement sur l’offre et le contenu des repas en matière d’équilibre nutritionnel et de qualité (38%), sur l’organisation des repas (nombre de services, durée (21%)). Les changements concernent aussi le cadre (infrastructure, équipement…) des repas (38%) et l’encadrement, en moins grande importance (13%), bien qu’ils constituaient une priorité de départ, car ces changements nécessitent des budgets parfois importants.
Les changements réalisés pour améliorer les temps de récréation portent sur ces mêmes catégories, avec en premier lieu les possibilités de jeux, le cadre et l’organisation (28%).
Une école sur cinq a amélioré l’encadrement des récrés et a de ce fait élargi les activités de détente pour les élèves. Les mesures prises pour sécuriser les aires de jeux qui ont vu le jour pendant la période du programme ont parfois facilité ces entreprises de changement et leur soutien par les pouvoirs organisateurs étant donné le caractère légal contraignant.

Conclusions

Le défi reste souvent la motivation des adultes pour un travail constructif autour d’un objectif commun: la santé des élèves. Le programme a démontré la nécessité de soutenir les écoles pour la mise en place de projets santé sur l’alimentation. Un moyen fort est l’intervention d’une personne ressource extérieure (secteur santé ou éducatif) pour animer la concertation entre adultes.
Celle-ci permet notamment de créer ou dynamiser des liens entre les différents acteurs de l’école: pouvoirs locaux, acteurs éducatifs (parents, enseignants de différents degrés, direction…), professionnels de la santé scolaire (PSE, PMS) et de la promotion de la santé (CLPS, intervenants locaux, provinciaux…), personnes en charge des repas dans l’école et même parfois restaurateurs locaux.
Par ces concertations, un processus d’analyse et d’action collective se met en route ou se renforce, partant des acquis (ce qui a été fait déjà dans l’école, par les collègues, les autres classes…), des besoins (exprimés, supposés, investigués), des projets d’action envisagés tout en laissant les acteurs s’approprier le processus plutôt qu’en dictant des solutions. La difficulté subsiste d’inscrire la mobilisation des écoles dans une perspective de continuité et non pas d’actions ponctuelles et de tisser des liens entre les projets réalisés ou en cours dans les différents degrés d’enseignement.
L’expérimentation de démarches de promotion de la santé permettra sans doute aux acteurs de l’école de mieux percevoir les liens entre les missions de l’enseignement et l’approche de la promotion de la santé, favorisant ainsi l’intégration de cette philosophie dans les différentes actions de l’école, que ce soit pour amener les élèves à construire des savoirs et exercer des compétences ou encore pour renforcer le lien entre la famille et l’école, ou pour vivre à l’école en bonne santé tout simplement.

Quels enseignements pour le futur Plan National Nutrition et Santé Belge?

Ce programme conforte plusieurs éléments pointés comme essentiels pour améliorer l’alimentation, l’activité physique et la santé des élèves en général.
Nécessité d’une approche globale et multiple des moments de repas à l’école ; la volonté d’agir pour améliorer la nutrition ne peut faire l’impasse sur le cadre des repas scolaires: il est urgent de donner aux écoles des différents réseaux les moyens d’équiper un espace approprié qui soit convivial et permette la prise des repas des élèves dans un environnement favorable à la santé.
Nécessité d’un encadrement des repas , de qualité, en nombre suffisant et formé sur le plan éducatif et de la promotion de la santé. L’école accueille en effet un nombre bien plus grand d’enfants sur le temps de midi que du temps de la définition des normes d’encadrement et du temps de la construction de la plupart des bâtiments scolaires. D’autre part ces moments de repas et récréation ont une valeur éducative incontestée en tant que «temps libre», temps de repas et temps de repos pour l’enfant; ce sont aussi des lieux et des moments de socialisation importants ou se forgent les goûts, les dégoûts et des habitudes alimentaires (qui ne s’en souvient pas?) parfois différentes de la maison.
La question du contexte et de l’environnement nutritionnel passe donc avant la transmission des savoirs sur l’équilibre alimentaire . Les enfants mangent un repas avec des voisins de table, dégustent des saveurs qu’ils apprécient avec leurs 5 sens avant de réfléchir aux groupes alimentaires et d’être conscients des besoins nutritionnels qu’ils satisfont de la sorte.
L’ambiance est primordiale et conditionne sans doute une grande part des comportements alimentaires. La publicité conditionne une autre grande partie de ces comportements et l’éducation des jeunes consommateurs (influençant les dépenses des ménages!) dans le cadre scolaire doit se faire selon des critères de promotion de la santé avant tout critère d’intérêt commercial.
Un autre enseignement de ce programme serait de dépasser l’activisme «santé» sur la thématique alimentation pour mener de véritables actions de promotion de la santé c’est-à-dire:
en prenant le temps de construire avec la participation des élèves des projets qui soient éducatifs et amènent l’élève à construire ses savoirs en matière de santé et de nutrition (et non pas à les ingurgiter!);
en permettant aux élèves et aux adultes éducateurs qui les accompagnent, de s’exercer – à l’école notamment – à faire des choix alimentaires plus favorables à la santé ;
en impliquant les personnes concernées par les repas et l’alimentation à l’école dans un objectif collectif de santé des élèves avant tout. Ces concertations peuvent démarrer au sein même des conseils de participation avec les différents membres qui doivent aussi consulter les groupes qu’ils représentent.
en construisant un partenariat éducatif fort avec les parents autour de la santé des enfants et de leur développement en tant que citoyens responsables, solidaires, consommateurs critiques et actifs, etc. Les parents représentent un capital de mobilisation sous-estimé par les écoles et les pouvoirs organisateurs en tant que moteurs et partenaires d’actions pour améliorer les repas et l’alimentation à l’école tout comme le contexte des repas. Les relais parentaux et familiaux sont nombreux et traitent fréquemment de la question de l’alimentation et du bien-être de l’enfant depuis longtemps. Les associations de parents, comités ou groupes de parents sont prêts à se constituer en partenaires de l’école et à jouer leur rôle premier en matière d’éducation et de santé. Ils peuvent, par leurs compétences diverses (rarement sollicitées!), leur bonne volonté, leur disponibilité éventuelle, appuyer les démarches de santé et d’amélioration de la situation nutritionnelle (alimentation, exercice physique, consommation…) que ce soit en cherchant des ressources, en explorant la question et les alternatives, en mettant sur pied une réflexion avec les enseignants, en organisant ou soutenant des actions dans l’école. Avec l’information et le soutien nécessaires, ils peuvent compléter et relayer l’éducation nutritionnelle à la maison dans la mesure de leurs moyens en temps et en ressources. Ils méritent d’être soutenus en tant qu’éducateurs et adultes pour renforcer leur rôle d’éducateurs.
Si dans le programme «Midis» le lien était fait entre le moment de manger et le moment de jouer, une politique nutritionnelle au niveau des communautés devrait intégrer de manière active le soutien à l’exercice et l’activité physique que ce soit à l’école ou à la maison. Facteur de santé mais aussi de socialisation, les activités sportives et de détente active répondent à un besoin du corps également pour se maintenir en bonne santé. Les programmes actuels de prévention de désordres nutritionnels devraient davantage lier ces aspects. Les actions de promotion de la santé complètent cette approche préventive par une dimension participative forte et l’implication des acteurs concernés, mais aussi en mettant l’accent sur la dimension «estime et image positive de soi» et sur tous les autres aspects liés à l’acte de manger, au repas, au climat relationnel et au contexte environnemental.
Cristine Deliens , Coordinatrice Coordination Education & Santé asbl.
Adresse de l’auteure: chaussée d’Alsemberg 284, 1190 Bruxelles. Tél.: 00 32 (0)2 538 23 73. Courriel: cordes@beon.be

(1) La démarche ‘Midis à l’école’ est toujours d’actualité et peut être valorisée dans le cadre des ‘projets-santé’ à établir par les écoles; les outils sont disponibles auprès de la Coordination. Le lien peut aussi être établi avec le nouveau programme 2004-2009 de la Coordination intitulé ‘Carnet de voyage , partir en projet-santé avec des partenaires’.
(2) Ce questionnaire renvoyé par les écoles à la Coordination Education & Santé permet de dresser un état de la situation des midis à l’école.
(3) Les actions entreprises dans le cadre de la classe ou de l’école sont en effet très nombreuses. Les partenaires extérieurs sont présents à des degrés divers. Souvent cependant l’esprit ‘action-événement’ l’emporte sur la démarche – plus lente mais plus durable! – de promotion de la santé où l’action est ajustée aux besoins et construite avec la participation des élèves et des acteurs concernés.
(4) Lignes directrices pour des choix alimentaires sains à l’école, Council of Europe, 2004).
(5) Bent Michelsen, The role of school food service in promoting healthy eating at school – a perspective from an ad hoc group on nutrition in schools, Council of Europe, 2004.
(6) Young Ian, Rapport du Forum européen sur l’alimentation saine à l’école – Faire des choix sains, Conseil de l’Europe, Strasbourg, mars 2005
(7) Le rapport du Colloque de Strasbourg auquel la Belgique a participé illustre à la fois les différents modes d’organisation et de restauration scolaire et les projets pour améliorer les choix alimentaires sains en milieu scolaire. Voir le site https://www.coe.int du Conseil de l’Europe.
(8) Une opportunité à saisir par les PSE, les PMS, les Associations de parents, les élèves, les enseignants… afin d’introduire un mode de gestion plus démocratique au sein des écoles et de mettre en place des conditions plus favorables à un véritable partenariat éducatif pour la réussite des élèves et pour promouvoir la santé à l‘école.

Prévention de l’obésité chez l’enfant

Le 30 Déc 20

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L’annonce de l’interdiction des distributeurs de sodas et d’en-cas sucrés à l’intérieur de l’école a suscité bon nombre de débats et réactions. Dans la foulée, Marcel Cheron (Ecolo) a déposé un rapport introductif sur cette problématique essentielle au Parlement de la Communauté française. Il nous a autorisé à en citer de larges extraits. Nous reprenons ici l’introduction du rapport et ses recommandations finales (1). Le Parlement, après plusieurs discussions liées à l’offre alimentaire et à la présence des firmes privées dans l’école, a souhaité recentrer le débat au parlement sur la question plus large, en termes de santé publique, de la prévention de l’obésité chez l’enfant.
Le rapporteur est entré dans le sujet sans a priori sur l’analyse de la question et sur les pistes de solution à proposer face à un diagnostic posé. Le rapporteur a beaucoup lu et beaucoup écouté. Il a notamment lancé un appel à contributions qui a été largement entendu. Les contributeurs ont permis une approche fine de la problématique.
Benoît Dadoumont , diététicien, licencié en nutrition et travaillant dans le secteur de la promotion de la santé, a grandement contribué, en tant qu’expert, à notre tâche. Sa disponibilité, son souci de dépasser les frontières sectorielles, et sa préoccupation à s’entourer des avis autorisés ont été d’une aide précieuse dans la rédaction du rapport.
Au-delà de la compréhension, grâce aux chiffres épidémiologiques, de l’apparition relativement récente d’une véritable «épidémie» d’obésité, le travail a pu mettre en lumière grâce à l’apport des sciences sociales les risques d’un phénomène de stigmatisation, la problématique des publics fragilisés, et la nécessité d’apporter des solutions multi-facettes à un phénomène qui ne s’explique pas de manière simple.
C’est ainsi que les réponses à la prévalence de l’obésité chez l’enfant passent par des politiques qui favorisent à la fois une alimentation saine, une activité physique régulière et une éducation du jeune consommateur qui doit être amené à poser des choix responsables.
Ce rapport est forcément basé pour partie sur l’état des connaissances scientifiques. En la matière, nous savons que rien n’est jamais définitivement fixé: tant les aspects nutritionnels de l’obésité que l’analyse des déterminants ou l’évaluation scientifique des politiques de prévention pourraient faire l’objet de débats contradictoires. Nous n’entrerons pas dans un débat sur «ceci est la vérité sur la bonne alimentation et donc sur les bonnes calories».
Mais dans sa contribution à limiter la cacophonie alimentaire, le rapport pourrait être utile dans la mise en œuvre d’un référentiel commun susceptible de constituer le niveau le plus fiable de l’état des recherches sur la question et de promouvoir les bonnes pratiques.
Manger est un acte de citoyen libre. Un acte étroitement associé à la notion de plaisir. L’oublier serait, à notre sens, vouer toute politique de prévention de l’obésité à l’échec. Toute décision d’interdiction ne pourra jamais être prise de manière isolée ou apparaître comme le premier signal ou le seul élément du discours de l’autorité. S’il ne faut pas l’exclure, l’interdiction en matière d’alimentation ne peut que s’insérer dans une démarche globale pour être acceptée et non stigmatisante. Un enfant ou un adolescent éduqué à la consommation responsable, au décryptage des médias, et évoluant dans un environnement favorable et régulé tant en matière d’offre alimentaire que d’accès aux infrastructures sportives aura beaucoup moins de risques de devenir obèse. Le défi est imposant, mais il vaut la peine qu’on s’y attaque, dans un projet mobilisateur pour les citoyens et les acteurs de terrain.
(…)

Recommandations pour la mise en place d’un véritable projet mobilisateur pour les acteurs de terrain et les citoyens

«Il existe une chance unique de formuler et mettre en oeuvre une stratégie efficace pour réduire sensiblement la mortalité et la morbidité dans le monde en améliorant l’alimentation et en préconisant l’exercice physique. Des données solides mettent en évidence les liens entre les comportements à cet égard et l’apparition ultérieure de la maladie ou un mauvais état de santé. Il est possible de concevoir et d’appliquer des interventions efficaces pour permettre aux gens de vivre plus longtemps et en meilleure santé, pour réduire les inégalités et favoriser le développement. Si l’on mobilise pleinement le potentiel des acteurs principaux, cette possibilité devrait devenir une réalité pour l’ensemble des populations de tous les pays du monde.»
Cette invitation de l’OMS à développer un véritable projet mobilisateur avec la participation effective des citoyens et des acteurs de tous les secteurs concernés, notre Communauté a aujourd’hui les moyens d’y répondre positivement.
La survenance de l’obésité est un phénomène complexe, dont on saisit mieux aujourd’hui les contours même si de nombreuses recherches et évaluations des actions entreprises sont encore à mener. Ici, rien n’est jamais acquis, rien n’est jamais définitivement décidé.
Le rapport le montre, de nombreuses initiatives ont vu le jour durant les dix dernières années: recherches et publications, lancement de programmes de promotion de la santé directement orientés vers la prévention de l’obésité, évaluation de ces programmes et élaboration de cadres d’actions plus efficaces, réorientation des offres de produits alimentaires, prise de conscience politique, notamment au niveau mondial, etc.
La prévention de l’obésité chez l’enfant peut s’appuyer sur l’expérience et l’évaluation des politiques menées jusqu’ici. Et susciter ainsi l’adhésion autour d’un nouveau projet, au-delà de la communauté éducative, de toutes celles et ceux qui travaillent dans les domaines de compétence de la Communauté, des Régions et de l’Etat fédéral. Cette adhésion des acteurs de terrain et des citoyens est une condition essentielle pour la réussite de la stratégie et pour améliorer, in fine, le bien-être de tous et réduire les inégalités. Elle ne sera acquise que si les plans en discussion font bien l’objet d’un processus participatif impliquant chacun dans la définition des objectifs, des stratégies et des mesures concrètes.
Les recommandations qui suivent n’ont pas la prétention de constituer un catalogue de propositions à mettre en œuvre de manière non concertée et non planifiée. En clair, il ne s’agit pas ici de rédiger un plan nutrition.
Nous proposons plutôt à la réflexion et au débat quelques grands axes qui nous semblent fondamentaux à respecter, à renforcer ou à créer pour une politique globale, concertée et non stigmatisante de prévention de l’obésité chez l’enfant.
Nous espérons qu’au-delà du débat parlementaire, ces grands axes de réflexion et d’action pourront alimenter les plans en cours d’élaboration au niveau de la Communauté française et au niveau du Gouvernement fédéral.

Travailler en priorité avec les populations fragilisées

Le statut socio-économique des individus mais aussi une série de facteurs familiaux et individuels sont des facteurs déterminants de l’obésité, des pratiques alimentaires et de l’accès à des pratiques sportives. Mettre en place des stratégies spécifiques et adaptées à l’attention des populations fragilisées doit être une préoccupation transversale de nos politiques. Les axes décrits ci-dessous devraient être, chaque fois que nécessaire, prioritairement et spécifiquement envisagés par rapport à ces populations. Les populations fragilisées sont en effet celles qui retireront le plus de bénéfices de ces mesures. C’est également à travers elles que la société rencontrera les plus grands gains.
Ainsi, l’accès à la pratique sportive pourrait être facilité pour les publics précarisés par la mise en œuvre de mesures comparables à l’article 27 pour l’accès à la culture. L’accès qui est à faciliter ici est bien l’accès, de préférence familial, à une pratique sportive, et non à des spectacles sportifs.
Dans le même ordre d’idées, il faudra par exemple prioriser dans le temps et dans les moyens à y affecter le travail de dépistage précoce et d’accompagnement de l’Office de la Naissance et de l’Enfance et des équipes de Promotion de la Santé à l’Ecole vers les zones géographiques et quartiers précarisés. De même, le travail de prévention primaire devrait viser spécifiquement les écoles en discrimination positive, les filières d’enseignement technique et professionnel, les CEFA et les institutions de l’aide à la jeunesse.

Développer des programmes et des actions multi-facettes

Les travaux du Professeur Walter Burniat l’ont montré, les facteurs qui influencent la prévalence de l’obésité chez l’enfant sont multiples: facteurs physiologiques (syndromes génétiques, hérédité…), facteurs sociaux (famille coupée de ses repères culturels, famille isolée sans support social, famille monoparentale), facteurs psychologiques (intégration scolaire…) et facteurs comportementaux comme la résultante de tous les facteurs.
Parmi tous les facteurs, l’influence environnementale est ainsi insuffisamment prise en compte. Par exemple, l’aménagement de trottoirs, d’aires de jeux, de pistes cyclables sûres doit permettre aux enfants, notamment dans des zones urbaines trop livrées à la voiture, de développer une activité physique quotidienne à moindre frais.
Une action efficace à long terme repose donc sur la mise en œuvre d’actions et de programmes multi-facettes, prenant en compte toutes les dimensions du problème, jouant à la fois sur la promotion d’une alimentation saine, la promotion d’une activité physique quotidienne, l’éducation du jeune consommateur et du jeune téléspectateur, et ce à travers de multiples secteurs d’activité.
Afin de faciliter la mise en œuvre de cette dynamique, il faudra qu’elle soit progressive – avec une implication des partenaires essentiels puis un élargissement de ce partenariat à d’autres secteurs également concernés – et planifiée sur le long terme. La construction d’un cadre de référence commun (objectifs généraux), éventuellement autour de quelques secteurs de référence (enseignement, promotion de la santé, sport, enfance), devra ensuite permettre de s’entendre entre tous les partenaires (des maisons de jeunes, des mouvements de jeunesse, de l’aide à la jeunesse, du transport, de l’entreprise, de la culture, des soins de santé, de l’éducation à l’environnement, etc.). Comme dans tout projet participatif, le plan d’action détaillé mesure par mesure ne peut être défini plus précisément à ce stade: c’est du processus participatif et des apports de compétence des différents secteurs associés à la réflexion qu’émergeront les axes de l’opérationnalisation.
Mettre fin à la cacophonie alimentaire
C’est une des ambitions qui doit animer les concepteurs des politiques en matière d’alimentation saine. Il faut assurer à l’avenir la diffusion conjointe d’informations nutritionnelles valides et cohérentes au travers de différents secteurs d’activité et milieux de vie. L’école, les clubs et les centres sportifs intégrés, l’accueil de la petite enfance, l’aide à la jeunesse, les services de Promotion de la Santé à l’Ecole, les mouvements de jeunesse, les services qui prennent en charge l’accueil extrascolaire, l’enseignement supérieur, etc. doivent bénéficier des mêmes informations cohérentes qui seront à la base de leur action. L’enfant ou l’adolescent qui fréquente ces différents milieux de vie ne doit plus être confronté à des informations contradictoires ou divergentes. Par diffusion d’informations, il faut entendre non seulement l’utilisation des supports écrits, numériques, radios ou télévisés, mais surtout toutes les dynamiques de diffusion et d’émergence de projets participatifs.
Pour parvenir à limiter la cacophonie alimentaire et offrir une cohérence dans les informations diffusées, les pistes suivantes devraient être étudiées en matière de formation: favoriser l’intégration de données sur la nutrition dans les cursus existants et dans les socles de compétence; travailler sur la formation initiale et continue des enseignants, des paramédicaux, des travailleurs sociaux; des professeurs d’EPS et des médecins; travailler avec l’Adeps sur le contenu des cours de nutrition des moniteurs et, enfin, travailler avec l’AISF sur un projet de formation continue vers les fédérations et les clubs.
Un soutien des écoles et des services chargés de l’accueil extrascolaire dans l’élaboration et la régulation des offres alimentaires est également nécessaire: ce soutien devra être pratique au travers de formations à destination du personnel de cuisine, de soutien dans la négociation des cahiers de charges avec le secteur privé, mais aussi méthodologique par le biais de la formation du personnel enseignant. Il devra intégrer la participation de tous: directions, enseignants, personnel de cuisine, parents, élèves, comme le préconisent les recommandations mondiales, européennes ou étrangères en matière de mise en œuvre d’une politique nutritionnelle à l’école.
Cette politique de soutien doit permettre aux écoles et aux milieux de vie de traiter les initiatives privées relatives à la santé (fourniture des repas, distributeurs, campagnes éducatives, matériel pédagogique…).
Au niveau méthodologique, il s’agira de favoriser l’autonomisation des enfants par rapport à leur santé. Plutôt que la prescription de règles à la définition desquelles ils n’ont pas participé et auxquelles ils adhéreront donc difficilement, il s’agira d’insister sur la transmission de compétences, de connaissances et d’habiletés en matière d’alimentation et de nutrition.
Les missions décrétales des services de PSE prévoient l’organisation de projets-santé dans les écoles. Ces nouvelles missions, qui favorisent la présence des médecins et infirmières dans l’école, doivent être soutenues. Afin de permettre la démultiplication des interventions des PSE, on pourrait envisager de donner une orientation, partiellement du moins, collective à cette mission des équipes (un projet-santé qui s’adapte, pour certaines de ses composantes, à plusieurs écoles…).
Les pistes retenues in fine, accompagnées de mesures de régulation le cas échéant, doivent permettre de favoriser l’équilibre, la qualité et la variété dans l’offre alimentaire proposée par l’école, plutôt que la stigmatisation et l’interdiction de produits et de comportements alimentaires. Elles doivent également permettre à l’accueil extrascolaire de proposer une offre adaptée de petit-déjeuner et de goûter de qualité à des enfants qui passent parfois plus de douze heures par jour à l’extérieur du domicile familial.
Promouvoir l’activité physique quotidienne dans la vie de tous les jours
Prévenir l’obésité chez l’enfant ne peut se concevoir par une seule action sur l’alimentation. Les données épidémiologiques montrent un déficit d’activité physique chez les enfants et adolescents en Communauté française qui joue un rôle dans la prévalence de la surcharge pondérale. Comme le rappelle le Programme National Nutrition Santé français, «l’activité physique favorise l’équilibre du bilan énergétique, réduit l’envie d’aliments gras au profit des aliments glucidiques, améliore l’image corporelle et renforce l’estime de soi; et favorise l’intégration sociale.»(2)
L’activité physique dans la vie de tous les jours est un des premiers facteurs sur lesquels on peut agir avec efficacité: l’OMS rappelle qu’au moins 30 minutes d’un exercice physique régulier d’intensité modérée presque tous les jours de la semaine réduit le risque de maladies cardio-vasculaires et de diabète, de cancer du côlon et du sein.
Dans ce cadre, le travail de sensibilisation et de communication doit être poursuivi et renforcé vers le grand public, et ce via les médias, mais aussi via les mutualités, les provinces si elles le souhaitent, le secteur médical, les communes…
Parmi les autres pistes, il faut également travailler à la poursuite des activités de psychomotricité à l’école maternelle; à l’amélioration de la mobilité verte, pour plus de respect pour les usagers faibles, au développement des Ravel et autres infrastructures propices à l’utilisation de moyens de transport alternatifs comme le vélo et le roller (politiques régionales). Ceci devra aller de pair avec un soutien aux projets menés par des associations comme le Gracq ou Pro Vélo .
D’un point de vue méthodologique, il faut réfléchir à la manière de rendre confiance à l’individu, parfois très jeune, en ses capacités à produire un effort physique tout en y trouvant du plaisir (pédagogie progressive, self efficacy…).
Comme pour la promotion d’une activité physique régulière en club ou en individuel, la collaboration avec les mutualités devrait être recherchée et renforcée.
Promouvoir une activité sportive régulière en club ou en individuel
Pour promouvoir une activité physique régulière des enfants et des adolescents en club ou en individuel, l’accès aux infrastructures sportives devra être amélioré, en lien avec l’Adeps et l’AES. Le développement d’infrastructures propices à une pratique sportive (skate-board, basket, vélo…) dans les quartiers, hors contrainte de club et de compétition, doit également être une piste prioritaire, en même temps que la promotion d’une pratique non élitiste et adaptée à la santé. Le carnet du sportif, outil prévu par le décret relatif à la promotion de la santé dans le sport, devrait être rapidement finalisé.
Un accès facilité ou renforcé aux infrastructures permettra par ailleurs la mise en place de politiques communales de santé pour tous, à travers la mise en œuvre du décret sur les centres sportifs locaux. Dans ce cadre, une collaboration entre le secteur de la promotion de la santé et l’AES doit être envisagée si on veut que la deuxième mission des centres sportifs locaux (promouvoir des pratiques d’éducation à la santé par le sport) soit bien rencontrée.
De la même manière, le décret relatif à la promotion de la santé dans le sport et à la prévention du dopage ne sera effective que via une coopération renforcée entre les fédérations sportives et le secteur de la promotion de la santé.
Travailler sur les représentations sociales véhiculées autour du sport, de la compétition et des apports positifs du sport à la santé
Cet axe de travail fondateur devrait être mis en place tôt dans le processus car il favorisera l’implantation des autres axes.
Un travail de communication devrait être réalisé pour améliorer les représentations sociales véhiculées par le sport (santé dans le sport, sport spectacle, vedettariat, pratiques sportives bénéfiques pour la santé, sentiment de self efficacy , éthique du sport et valeurs prioritaires), après une analyse de la situation sur base des informations disponibles à la Fondation Roi Baudouin et à l’Adeps. Via l’AISF, les fédérations sportives devraient être associées à l’élaboration des campagnes, afin de pouvoir adhérer aux messages diffusés et les répercuter vers leurs clubs et leurs adhérents.
Promouvoir la lutte contre la sédentarité et l’éducation du jeune consommateur
Pour contrer la sédentarité des enfants et des adolescents et renforcer leur rôle de consommateur responsable, la piste d’un programme éducatif doit être privilégiée. Ce programme éducatif défini en collaboration avec le secteur de la promotion de la santé, la Médiathèque, les associations de consommateurs et des acteurs du secteur de la prévention des dépendances, devrait être intégré dans les différentes matières du cursus scolaire.

Promouvoir un dépistage précoce, un suivi adapté et non stigmatisant

Lorsque l’enfant ou l’adolescent risque de développer une surcharge pondérale, le dépistage rapide est essentiel. Ce dépistage ne serait cependant rien sans un suivi adapté non stigmatisant avec la famille. Ce dépistage et le suivi doivent pouvoir être assurés par l’ONE, les équipes PSE et les médecins de famille, voire le milieu hospitalier dans les situations les plus graves.
Assurer le dépistage via les courbes de corpulence
Pour assurer une politique cohérente de dépistage, il y a lieu de mettre en place une concertation ONE-PSE-SSMG. Cette concertation doit permettre de faire le choix des courbes, de leurs modalités d’utilisation, du mode de recueil informatisé des données et de circulation longitudinale des données dans le respect du secret médical et de la vie privée. La brochure du PNSS français « Evaluer et suivre la corpulence des enfants » pourrait être une base de travail intéressante.
Assurer un suivi adapté et non stigmatisant vers les familles
Une concertation est nécessaire entre ONE, PSE, SSMG, mutualités et secteur de la promotion de la santé pour définir les conditions et les modalités d’un suivi afin que ce dernier soit efficace, inscrit dans la durée et basé sur la confiance, pour reprendre à nouveau les termes de la brochure du PNSS français.
Favoriser une gestion intersectorielle des données récoltées
Afin de parvenir à une gestion partagée et longitudinale des données récoltées, outil essentiel de santé publique, une coordination doit avoir lieu entre l’ONE, les PSE, le Ministère fédéral de la Santé, les mutualités, l’Adeps, l’AES et l’AISF. Il s’agit de définir à terme les besoins de chacun des intervenants et d’opérationnaliser les moyens nécessaires à un partage et un suivi harmonieux des données récoltées (dossier médical global, dossier sportif, carte SIS, etc.).

Promouvoir l’intersectorialité et la gestion longitudinale et intégrée de la problématique

Le visage institutionnel de notre pays ainsi que le caractère multifactoriel de l’obésité chez l’enfant oblige à une concertation intersectorielle qui doit être soutenue par une coopération interministérielle entre entités fédérées et Etat fédéral. La conférence interministérielle doit rester notamment un lieu où les politiques de santé sont élaborées dans le respect des compétences de chaque niveau de pouvoir.
Néanmoins, comme la lutte contre l’obésité ne dépend pas uniquement des politiques de santé, de nouveaux lieux de concertation devraient pouvoir être organisés qui garantissent une cohérence politique et une prise en compte des contraintes des différents secteurs (aménagement du territoire, santé, enseignement, sport, enfance, régulation de la publicité, emploi, etc.).
Promouvoir et faciliter l’allaitement maternel
La promotion de l’allaitement maternel est un de ces objectifs qui ne pourra aboutir que par une politique interministérielle et intersectorielle poussée. Les campagnes de promotion doivent être renforcées. Mais les rythmes de vie et de travail sont aujourd’hui, par exemple, des obstacles à la promotion de l’allaitement maternel, dont on a vu qu’il pouvait être un élément positif dans la prévention de l’obésité chez l’enfant. Des mesures facilitatrices doivent être prises ou renforcées au niveau de l’Etat fédéral et des Régions.
Faciliter les échanges entre les secteurs
L’échange entre les secteurs ne saurait cependant se limiter au niveau ministériel. Un projet global de prévention de l’obésité peut ainsi être l’occasion d’organiser des projets d’échanges intersecteurs. Par exemple, par la mise en place de «passe-muraille» (travailleurs qui quitteraient momentanément leur secteur d’activité pour exporter leurs compétences, savoirs et techniques vers d’autres secteurs d’activité qui leurs réciproqueraient le service). Ce type de collaboration pourrait, par exemple, d’emblée être mis en place entre le secteur de la promotion de la santé et le secteur du sport autour de l’opérationnalisation de l’axe santé du décret des Centres Sportifs Locaux. Cette politique d’échanges entre les secteurs devrait faire l’objet de négociations avec les partenaires sociaux dans le cadre des accords du non-marchand, afin de faciliter la mobilité des travailleurs.
Explorer des mesures complémentaires et favorisantes
Permettre l’adhésion de la Belgique au Programme fruit de l’OMS; favoriser l’achat de fruits et légumes via l’APAQW (vers la population globale ou des publics spécifiques); stimuler un développement plus rapide et plus ambitieux du Ravel ou d’autres types de liaisons vertes (ou sécurisées); promouvoir l’assurance voiture moins chère pour les cyclistes au quotidien; légiférer par rapport aux publicités relatives à la vente de produits alimentaires; permettre l’intervention des mutualités dans la prise en charge des consultations diététiques, impliquer les médias et les entreprises de l’alimentaire dans la stratégie, notamment par la diffusion d’une charte de réduction de la diffusion de standards corporels inatteignables; voilà encore toute une série de pistes qui nécessiteront pour leur mise en œuvre une concertation interministérielle et intersectorielle.
Marcel Cheron , pour le Parlement de la Communauté française

(1) Parlement de la Communauté française, session 2005, Rapport introductif sur la prévention de l’obésité chez l’enfant, Marcel Cheron, 23 février 2005. Télécharger le document complet (77 pages).
(2) Télécharger le texte Evaluer et suivre la corpulence des enfants

Evaluation d’une campagne antitabac en Belgique

Le 30 Déc 20

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Entre le 26 avril et le 6 juin 2004, les chaînes de télévision du pays ont diffusé une série de 6 spots proposés par la Fondation Rodin qui montraient de façon très explicite les dangers de la consommation du tabac (1). L’évaluation de la campagne par le CRIOC a porté sur les jeunes de 13 à 15 ans, et visait à mesurer l’impact d’images présentant des organes humains détruits par le tabac.
Les interviews ont été réalisés selon un plan expérimental précis: 222 jeunes furent interrogés avant la campagne et à la fin de celle-ci; 107 jeunes n’ont été interrogés qu’à la fin de la campagne. Au total donc, 551 interviews ont été réalisés, tant au Nord qu’au Sud du pays. La marge d’erreur est d’environ 5%.
Cette campagne a été remarquée par 2 jeunes sur 3 (notoriété aidée). Le caractère provocateur et choquant est souligné par les jeunes. Lorsqu’on leur demande ce qu’ils en ont retenu plus précisément, un grand nombre d’entre eux répond ‘les conséquences mortelles du tabac’ (soit 25% des réponses du côté francophone et 40% des réponses du côté néerlandophone). 4% des jeunes répètent littéralement le commentaire de campagne, ‘chaque cigarette vous détruit’.
Les jeunes interrogés attribuent l’intérêt pour les spots à leur caractère dérangeant et convaincant, parce que les spots montrent les risques réels de la consommation de tabac. Le rejet de ces images par moins d’un répondant sur quatre est en général dû au fait qu’elles provoquent le dégoût ou que les jeunes n’ont pas compris le slogan de la communication.
A peine un tiers des répondants (mais 58% des filles!) comprend le slogan ‘La vérité sans filtre’. Certains l’interprètent même de manière erronée (ex. ‘La cigarette avec filtre est moins nocive’). Ce slogan passe moins bien auprès des garçons et des jeunes de l’enseignement technique et professionnel.
Pour un jeune sur deux, les mises en scène sont crédibles. Pour la majorité des répondants, les situations proposées sont plausibles (elles racontent la vie de tous les jeunes, elles arriveront un jour à tous les fumeurs) et interpellantes (elles donnent l’impression que les fumeurs vont mourir) sans tomber dans l’exagération. Un quart des interrogés pensent que les spots exagèrent la nocivité de la cigarette.
Si la mise en scène provoque et dégoûte, ce rejet semble s’inscrire dans la logique de rejet de la cigarette et non du message. A ce titre, l’alchimie semble bien fonctionner. La vision des spots provoque des modifications de perception en ce qui concerne les risques liés au tabac. Les jeunes qui ont vu la campagne sembleraient incités à arrêter de fumer à court terme.
Curieusement, la perception du risque de dépendance dès la première cigarette est moins nette après la campagne qu’avant, et ce tant dans le Nord que dans le Sud. Même si la campagne ne portait pas sur les dangers liés à la dépendance, et à l’installation rapide de celle-ci, c’est un résultat un peu malheureux, que les promoteurs envisagent de ‘corriger’ lors d’une future campagne.
Selon la Fondation Rodin et le CRIOC, la campagne semble avoir modifié positivement les attitudes envers la cigarette et contribué à diminuer la consommation de tabac chez les jeunes sans avoir incité de nouveaux jeunes à fumer. Cette modification de comportement doit toutefois être nuancée vu la taille limitée de l’échantillon et être confirmée à plus long terme.

Nos commentaires

Les promoteurs de la campagne ont fait appel à des spots particulièrement ‘gore’, d’origine australienne, qui ont été utilisés plutôt dans le monde anglo-saxon jusqu’à présent. En Belgique, ce type de communication brutale semble d’ailleurs mieux passer en Flandre qu’en Communauté française.
Le caractère provocateur des messages a deux résultats en termes d’efficacité: acceptation (75%) et rejet (25%). Certains en concluent que les campagnes qui mobilisent affectivement le spectateur sont les plus efficaces. D’autres pensent au contraire qu’en mobilisant le cœur et les tripes plutôt que le cerveau, ces campagnes n’ont qu’un effet limité dans le temps sur la consommation de tabac.
Les résultats en termes de modification de la consommation des jeunes fumeurs portent sur un sous-échantillon trop faible (moins de 30 individus) pour pouvoir être considérés comme acquis. En effet, la prévalence du tabagisme dans la classe des 13 – 15 ans, est – heureusement – faible, de l’ordre de 8%.
En même temps que les spots de la Fondation Rodin, la Communauté française a diffusé une autre campagne antitabac, jouant quant à elle sur la dénormalisation de l’industrie. Le spot a été diffusé en télévision et radio (dans le cadre des espaces gratuits concédés aux messages de promotion de la santé) et dans les salles de cinéma (2). Nous n’avons pas d’élément d’évaluation de cette campagne.
Christian De Bock
(1) Les spots sont toujours visibles sur le site https://www.rodin-foundation.org : attention les yeux! Le rapport d’évaluation peut aussi y être téléchargé.
(2) Voir le site https://www.avotreinsu.be

Inventaire des groupes d’entraide

Le 30 Déc 20

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Depuis quelques dizaines d’années, le mouvement self-help, et les groupes d’entraide qui le constituent, tentent de combler un manque ressenti par les usagers de la santé lors de leur passage dans les structures de soins existantes.
Ces groupes ont pour objectifs le développement d’un système de santé accessible à tous, l’amélioration du soutien aux patients et à leur famille, la reconnaissance de leurs droits fondamentaux, le soutien à la recherche scientifique et le travail de prévention et d’information tant vers le monde professionnel que vers le grand public.
Le service Promotion de la santé de l’Union nationale des mutualités socialistes édite depuis plusieurs années l’ Inventaire des groupes d’entraide en Communauté française de Belgique , dont l’édition 2005 vient de sortir.
Ce document répertorie 150 associations sur des thématiques aussi diverses que les acouphènes, insuffisances rénales, maladies rares, handicap visuel, moteur, auditif, homosexualité, deuil, suicide…
Toutes les coordonnées des groupes d’entraide y sont reprises ainsi que leurs objectifs principaux, leurs activités et leurs antennes locales.
Ces renseignements sont aussi disponibles sur le site https://www.self-help.be . De plus, le visiteur y trouvera des informations spécifiques telles que conférences, publications, nouvelles associations, actions de prévention, appels à l’entraide, liens, etc.
Renseignements: Service Promotion de la santé, UNMS, place Saint-Jean 1/2, 1000 Bruxelles. Tél.: 02 515 05 85 ou 02 515 05 04. Fax: 02 515 06 11. Courriel: promotion.sante@mutsoc.be

Rôle et droits du citoyen face à l’accès aux applications génétiques

Le 30 Déc 20

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Lire dans nos gènes? Qu’en pensent les citoyens?

Les techniques de génétique humaine nous permettent aujourd’hui de dresser les cartes de nos gènes grâce à une série croissante de tests génétiques. Dans les années qui viennent, les méthodes d’identification de nos maladies ou de nos aptitudes potentielles vont continuer à faire d’immenses progrès.
Comment notre société va-t-elle encadrer l’utilisation de ces nouvelles techniques de prédiction? Doit-on laisser les experts, les lobbies et les décideurs répondre seuls à cette question où technique, économie et éthique sont étroitement mêlées?
Le risque est grand aujourd’hui, vu la complexité des questions traitées, de voir les citoyens écartés de ces réflexions, avec comme conséquence possible, de créer une incompréhension ou même une fracture entre les règles définies par les autorités et les populations.
Comment prévenir ce risque de fracture sociétale et permettre l’expression d’une citoyenneté active sur ces questions?

Les citoyens ont la parole

Notons d’abord que la société civile évolue « naturellement » face à l’apparition de nouveaux débats et que certaines ONG ( voir par ex. https://www.genewatch.org ) se sont déjà positionnées spécifiquement et de manière assez critique sur le terrain de la génétique. Il faut voir les actions de ces nouveaux acteurs comme une preuve de bonne santé des débats dans nos démocraties européennes.
Il importe également que les acteurs conventionnels du dialogue social relaient ces débats auprès de leurs membres et définissent leurs positions et leurs recommandations sur les utilisations des tests génétiques. Le colloque organisé les 24 et 25 mars derniers (1) montre bien comment des mutuelles par exemple peuvent fructueusement décider de porter ce débat.
Enfin, depuis une quinzaine d’années, des méthodes de participation directe de citoyens aux réflexions et aux débats sur l’utilisation de nouvelles technologies ont été mises en place dans différents pays d’Europe et d’Amérique du Nord principalement.
Sciences du cerveau, génétique, choix énergétiques… sont autant de domaines où l’évaluation des nouvelles technologies comporte une part importante d’éthique et de confrontation de valeurs et où la participation des citoyens peut apporter une plus-value non négligeable à la réflexion.
La particularité de ces différentes initiatives participatives est que les citoyens qui y prennent part passent toujours par une phase d’information préalable et que les dialogues précédent la formulation d’un avis collectif. Les avis formulés dans ce cadre par des citoyens sont certes moins représentatifs mais souvent plus riches, plus créatifs et plus argumentés que les «photographies» de l’opinion que l’on pourrait obtenir grâce à un sondage.
Là où de telles démarches sont mises en place, les avis des citoyens ne sont pas placés en concurrence avec les autres avis émis par les comités d’experts, mais au contraire viennent les compléter. Il faut cependant considérer que ces démarches sont assez lourdes à mettre en place et que, sans l’existence de solides relais avec les décideurs, les experts et la société civile, les avis formulés par un panel de citoyens risquent bien d’avoir très peu d’impact par rapport à l’énergie déployée.
C’est en ayant ces différentes considérations à l’esprit que la Fondation Roi Baudouin a organisé en Belgique la première conférence citoyenne sur les tests génétiques ‘Lire dans mes gènes?’.
L’objectif de cette conférence était de donner une chance à des citoyens de s’informer, de dialoguer et de faire entendre leur voix sur les questions de société que posent les tests génétiques.
Ce faisant, la Fondation souhaitait également familiariser les experts à la diversité et à la pertinence des avis et recommandations qui émanent de la population. A l’issue de la Conférence, la Fondation souhaitait d’une part, transmettre aux décideurs et personnes concernées un avis citoyen fondé et d’autre part, initier un débat plus large dans la société civile autour de la question des tests génétiques.
Une invitation a été lancée au hasard à six mille hommes et femmes vivant en Belgique. Deux cents personnes se sont portées volontaires. Sur cette base, un panel de trente citoyens a été constitué, non représentatif mais à l’image de la diversité de notre société belge.
Ces 30 citoyens se sont retrouvés durant 3 week-ends pour dialoguer entre eux, discuter et échanger sur ces questions avec différents invités. Le panel s’est d’abord familiarisé avec le thème avant de formuler les questions qui lui tenaient à coeur et de choisir les personnes ressources avec lesquelles il souhaitait dialoguer. Il ne s’agissait pas seulement de médecins ou de patients, mais aussi de représentants de compagnies d’assurance, de philosophes, de spécialistes des questions éthiques, de politiciens, de représentants d’associations de consommateurs…
Après cette phase d’information et de dialogue, les trente citoyens ont formulé leurs avis et propositions qu’ils ont présentés officiellement aux décideurs, aux diverses instances concernées, à la presse et au public belge.

L’avis du panel

Tout d’abord, et cela a souvent été constaté de par le monde dans pareille expérience, ce groupe de citoyens à qui l’on a donné les moyens de s’informer et qui a pris le temps du dialogue, a remis un avis fort équilibré, qui dénote un souci de vigilance active vis-à-vis de tout ce qui touche aux tests génétiques mais qui est dépourvu d’angoisse.
Ensuite, il faut noter la forte demande de renforcement des solidarités au sein de la société vis-à-vis des groupes risquant l’ exclusion génétique . Que ce soit face aux assurances ou aux banques, il est demandé de mettre en place d’une part, des garde-fous à l’utilisation des tests génétiques à des fins économiques et d’autre part, des systèmes de mutualisation qui permettent à tous d’accéder à une bonne couverture en matière d’assurances.
Enfin, le panel de citoyens a exprimé le souhait que les citoyens continuent à être associés aux débats futurs sur ces différentes questions.
La Fondation Roi Baudouin a largement diffusé cet avis et demandé aux différentes parties concernées d’y réagir. En parallèle, elle a lancé un appel à projets qui a permis de financer 19 initiatives de débats dans la société civile : Ligue des droits de l’homme, associations de médecins ou de patients, universités, écoles, institutions d’éducation permanente, autant de lieux où des débats sur les tests génétiques ont été à l’ordre du jour.
Le texte complet rédigé par le panel de citoyens et la liste des différentes initiatives soutenues est disponible sur le site https://www.mesgenes.be .
De l’avis même des citoyens ayant participé à cette Conférence citoyenne, celle-ci a permis de démontrer que des citoyens peuvent se mobiliser pour des questions qui ne touchent pas directement leur quotidien, qu’ils sont capables de prendre du recul par rapport à des questions complexes et qu’ils peuvent construire un avis nuancé et argumenté.
Aujourd’hui les grandes questions éthiques se discutent à l’échelle de l’Europe. La Commission met actuellement en oeuvre son programme d’actions ‘Sciences et Société’ dans lequel elle a défini ses objectifs en matière de participation des citoyens aux débats sur les progrès scientifiques. Quels pourraient être les modes de participation des citoyens à un niveau européen? Cette question constitue un vaste champ d’exploration de nouvelles gouvernances qu’une série d’institutions dans différents pays d’Europe, dont la Fondation Roi Baudouin, ont décidé d’investiguer dans les mois à venir. Je vous invite à me contacter pour de plus amples renseignements sur cette nouvelle expérience.
Gerrit Rauws , Directeur du programme Gouvernance, Fondation Roi Baudouin
Adresse de l’auteur: Fondation Roi Baudouin, rue Brederode 21, 1000 Bruxelles
(1) ‘Les nouvelles applications génétiques face à l’accès à la santé’, conférence organisée par la DG Recherche de la Commission européenne et les Mutualités socialistes

A propos du dépistage du cancer de la prostate

Le 30 Déc 20

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Petit rappel

Dépister une maladie c’est rechercher sa présence chez un individu qui n’en présente pas (encore) les symptômes. Un test de dépistage «positif» ne signifie pas nécessairement que l’individu est atteint de la pathologie recherchée, mais invite à procéder à des examens complémentaires.
La démarche du dépistage est, par essence, tout à fait différente de celle du diagnostic qui a pour objet la mise au point d’un symptôme.
L’objectif du dépistage du cancer est de réduire la mortalité liée à l’affection recherchée en intervenant précocement dans son histoire naturelle, c’est-à-dire avant que des métastases ne se soient développées.
Seuls ceux qui sont atteints de l’affection pourront bénéficier du dépistage. Vu que la toute grande majorité des individus soumis au dépistage ne sont pas atteints de l’affection recherchée, il est très important de s’assurer que les effets négatifs de cette démarche soient réduits au minimum.
Il faut distinguer le dépistage «individuel» qui se justifie chez des individus qui présentent un risque plus élevé d’être atteints d’une pathologie en raison de l’existence d’anomalies génétiques ou de certains antécédents médicaux, et le dépistage «de masse» ou «organisé» qui est une démarche de santé publique, c’est-à-dire qui a pour objectif d’améliorer la santé de la population dans son ensemble.

Cancer de la prostate et dépistage de masse

Le dépistage «de masse» est une entreprise difficile et exigeante qui doit répondre à un certain nombre de conditions. Trois d’entre elles sont essentielles.
Il doit s’agir d’une affection fréquente, responsable d’une mortalité et/ou d’une morbidité élevées. Le cancer de la prostate est un cancer fréquent (5129 nouveaux cas en 1998). Son incidence croît à partir de 50 ans, et 56% des nouveaux cas apparaissent après 70 ans (Registre du cancer 1998).
En 1997, dernière année pour laquelle nous disposons de chiffres pour la Belgique, 1924 hommes sont décédés d’un cancer de la prostate. 1325 (69 %) sont survenus après 75 ans, 1813 (94 %) sont survenus après 65 ans (Institut scientifique de santé publique).
Si l’on considère une espérance de vie de 74 ans, la proportion d’années de vie perdues attribuées à la mortalité liée au cancer de la prostate par rapport aux années de vie perdues attribuées à la mortalité totale par cancer est de 3,49 % . A titre de comparaison, elle est de 36,24 % pour le cancer du poumon chez l’homme, de 8,06 % pour le cancer colo-rectal chez l’homme et de 29,95 % pour le cancer du sein chez la femme.
Le traitement doit être plus efficace que s’il avait été appliqué à l’apparition des symptômes . Cette efficacité plus grande doit se traduire par une réduction de la mortalité «spécifique», c’est-à-dire liée à l’affection recherchée. Cet effet doit, idéalement, avoir été démontré dans des études rigoureuses, comparant la mortalité spécifique dans des groupes qui ont été invités à bénéficier d’examens de dépistage à celle constatée dans des groupes «témoins».
De telles études sont en cours pour le dépistage du cancer de la prostate. Nous ne disposons pas de résultats actuellement. Gardons à l’esprit que si le dépistage avance toujours le moment du diagnostic, il ne recule pas nécessairement celui du décès.
Il n’est intéressant de trouver un cancer avant qu’il ne se manifeste par des symptômes que si cela permet d’augmenter l’espérance ou la qualité de vie. Si ce n’est pas le cas, la conséquence du dépistage sera une connaissance anticipée du diagnostic avec une perturbation de la qualité de vie.
Il faut disposer de tests fiables , c’est-à-dire qui ont une bonne sensibilité et une bonne spécificité .
Un test qui a une bonne sensibilité reconnaît la présence de la maladie chez les individus qui en sont atteints. Si la sensibilité du test est mauvaise, certains individus atteints de la maladie seront considérés comme «non atteints». Le test est alors «faussement négatif» et l’individu atteint est rassuré à tort.
La sensibilité du PSA est de 75 à 80%. Un taux de PSA (1) inférieur à 4 ng/ml ne permet donc pas d’exclure totalement la présence d’un cancer.
Un test qui a une bonne spécificité reconnaît comme «sains» les individus qui ne sont pas atteints de la maladie. Si la spécificité du test est mauvaise, certains individus non atteints de la maladie seront considérés comme «atteints». On dit alors que le test est «faussement positif» et certains individus «non atteints» seront soumis à des examens complémentaires inutiles entraînant des coûts psychologiques et financiers.
La valeur prédictive positive d’un test indique la proportion d’individus atteints de la pathologie recherchée parmi tous les individus dont le test est «positif». Elle dépend de la spécificité du test et de la prévalence (fréquence) de la maladie. La valeur prédictive positive d’un PSA supérieur à 4 ng/ml est de 30%. C’est-à-dire que pour 100 hommes qui ont un PSA supérieur à 4 ng/ml et devront subir des examens complémentaires, 70 n’auront en réalité pas de cancer de la prostate.
Ces conditions s’appliquent aussi au dépistage individualisé.

Effets positifs et négatifs

Le dépistage est généralement perçu comme une démarche n’ayant que des effets bénéfiques. Des effets négatifs peuvent néanmoins apparaître.
Il est dès lors indispensable, pour des raisons éthiques, de s’assurer que les bénéfices seront plus importants que les effets négatifs ‘ (J. Austoker, Cancer prevention in primary care, 1995).
Les effets bénéfiques du dépistage sont
-la possibilité d’un traitement plus efficace que s’il est effectué lors de l’apparition de symptômes. Cette efficacité plus importante doit se traduire par une réduction de la mortalité spécifique. Pour le dépistage du cancer de la prostate, nous ne disposons pas de données actuellement.
-la «réassurance» de ceux dont le test de dépistage est «négatif».
Les effets négatifs du dépistage peuvent être liés au test lui-même ou aux effets du traitement .
Les premiers concernent les faux positifs et les faux négatifs déjà évoqués ci-dessus, ainsi que le risque de «sur-traitement»: il s’agit de la détection de cellules cancéreuses (cancers latents) qui ne se seraient pas développées (à 80 ans, 43 % des hommes ont des cellules cancéreuses dans leur prostate). La proportion de cancers cliniquement significatifs qui risquent de mettre la vie en danger est de loin inférieure à la proportion de cancers «latents»!
Les effets négatifs liés au traitement sont le risque d’impuissance et le risque d’incontinence.
Actuellement il n’est pas démontré que le traitement réalisé à un stade précoce améliore le pronostic vital.
Le coût des tests de dépistage et des mises au point en cas de test «positif» doivent être pris en considération. Il faut en effet que les ressources financières disponibles pour la santé de l’ensemble de la Communauté soient utilisées de façon optimale. Nous n’avons pas de garantie en cette matière pour le dépistage de masse du cancer de la prostate.

Conclusion: manque d’arguments décisifs

Le dépistage de masse ne peut être recommandé en l’absence de preuves d’efficacité de la démarche pour réduire la mortalité spécifique.
Nous ne disposons pas non plus d’arguments scientifiques pour recommander le dépistage individuel. Il n’est soumis à aucun contrôle de qualité et son impact ne peut être évalué. Celui-ci est cependant largement répandu. Il est réalisé à l’initiative de praticiens ou à la demande de consultants qui souhaitent être rassurés.
Généralement, les uns et les autres ne prennent en considération que les éventuels bénéfices et ignorent ou occultent les effets négatifs. La publicité faite en faveur du dépistage par des firmes pharmaceutiques ou sur des sites internet n’y est pas étrangère.
La réassurance en cas de test «négatif» est certainement l’atout majeur du dépistage du cancer de la prostate, et le seul bénéfice démontré. Il ne faut cependant pas oublier qu’il y a des «faux négatifs», c’est-à-dire qu’un taux de PSA normal ne peut totalement exclure l’existence d’un cancer.
Si le test est «positif», soit dans environ 10% des cas, il faudra réaliser une mise au point complémentaire incluant des biopsies. Heureusement, au bout du compte, 70 % des patients pourront être rassurés, car c’était un «faux positif».
Et parmi ceux chez lesquels des cellules cancéreuses auront été mises en évidence, combien vont bénéficier de ce diagnostic en terme d’augmentation de l’espérance de vie, avec quelle qualité de vie, car risques d’impuissance et d’incontinence sont réels, et combien auront été traités pour une maladie qui n’aurait jamais mis leur vie en danger?
Ces questions, il faut que les médecins se les posent. Tout comme il faut que les hommes qui souhaitent bénéficier d’un test de dépistage soient informés de façon objective sur les bénéfices et les effets négatifs de cette démarche.
Professeur Anne Vandenbroucke , Unité de Prévention et dépistage du cancer UCL
Adresse de l’auteur: Unité de Prévention et dépistage du cancer UCL, Ecole de santé publique, Clos Chapelle-aux-Champs 30/30.51, 1200 Bruxelles

Sites intéressants: https://www.cancerscreening.nhs.uk/prostate/index.html et https://www.esculape.com/info_patients/psa_explication.html (1) Le test PSA est un dosage sanguin de l’antigène prostatique spécifique.

Contrôle de la vente de produits de tabac aux moins de 16 ans

Le 30 Déc 20

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L’interdiction de la vente des produits de tabac aux moins de 16 ans est en vigueur depuis le 1er décembre 2004 (1). Etant donné l’importance de cette mesure pour la santé publique (la protection des enfants et des jeunes), le SPF Santé publique s’est engagé à contrôler effectivement le respect de l’interdiction de vente. Le SPF Santé publique avait prévu, fin 2004, 1000 contrôles dans son planning annuel. Etant donné que la cellule de contrôle “tabac“ sera complétée par de nouveaux collaborateurs cette année et deviendra opérationnelle, le SPF sera en mesure de porter le nombre de contrôles à quelque 1500 – 2000.
Au cours des contrôles de “l’interdiction de fumer dans les écoles“, les contrôleurs s’efforcent d’apprendre où les jeunes achètent leurs produits de tabac. Ils interrogent aussi les éducateurs à ce propos. Le SPF Santé publique tente ainsi de contrôler de manière ciblée : pendant les jours de classe, les contrôles ont lieu surtout avant et après les cours, sur le chemin de l’école et à proximité de cette dernière. Les jeunes achètent surtout leurs produits de tabac dans les magasins de journaux, les confiseries, les cafés fréquentés par les jeunes, etc.
Les infractions ne peuvent être constatées qu’en cas de flagrant délit. Lors de toute constatation, les contrôleurs s’informent immédiatement de l’âge du jeune. Ce contrôle est éventuellement poursuivi auprès de l’école. Au cours des contrôles de l’âge, les contrôleurs tentent d’agir de manière sereine afin de ne pas inquiéter les jeunes. Le vendeur est entendu par la suite et un avertissement est rédigé ou un PV est dressé.
Les résultats des contrôles effectués depuis le 1er décembre par le SPF Santé publique révèlent que, sur près de 500 contrôles, 7 infractions seulement ont été constatées. Procès-verbal a été dressé dans deux magasins de journaux dont les exploitants avaient précédemment été avertis à plusieurs reprises par les contrôleurs.
De plus, les contrôles révèlent que les commerçants connaissent la mesure. Ainsi, environ 75 % des commerçants apposent un autocollant ou une autre inscription précisant que la vente est interdite aux moins de 16 ans. De toute évidence, l’attention accordée par les médias à cette mesure a contribué à la faire connaître.
Communiqué par Belga le 22/03/2005
(1) Voir ‘Prévention tabac, vos papiers s’il vous plaît’ , Education Santé n° 199, mars 2005.

CM-Fit. Deux fois quinze minutes par jour de plaisir en bougeant

Le 30 Déc 20

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La moitié des Belges ne bougent pas assez, alors qu’il ne faut pas faire d’efforts démesurés pour observer les effets favorables sur la santé d’une pratique régulière et modérée de l’exercice physique. Plutôt que d’inciter les gens à pratiquer un sport intensivement une ou deux fois par semaine, la tendance actuelle joue sur les bénéfices que chacun peut retirer d’un seuil assez bas de mouvement, mais pratiqué fréquemment.
Mieux valent deux petits quarts d’heure de marche par jour que trois heures de sport le week-end. Avec ce message, les sédentaires que nous sommes s’assignent un objectif raisonnable, parce que dénué de toute recherche d’exploit, et aussi parce qu’il peut être atteint avec des petites modifications d’habitudes: se décider enfin à prendre les escaliers pour deux ou trois étages plutôt que l’ascenseur (n’en déplaise à Calogero!), aller chercher les pistolets ou les croissants du dimanche matin à vélo plutôt qu’en voiture, descendre du bus un arrêt plus tôt le soir (ça permet en outre d’évacuer quelques-uns des soucis de la journée)… Rien que du faisable, qui ne nécessite en plus aucun investissement d’équipement de sport ou d’infrastructures coûteuses.

Une idée qui fait son chemin

La santé vient en marchant

En France, le Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, l’Assurance maladie et l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) ont démarré l’an dernier la première campagne nationale de promotion de l’activité physique. Cette campagne s’inscrit dans le cadre du Programme national nutrition santé (PNNS). Conduit par les pouvoirs publics, le PNNS a pour objectif d’améliorer l’état de santé de la population en agissant sur l’un de ses déterminants majeurs, la nutrition, mais pas uniquement sur celui-là.
En effet, la nutrition concerne tant les apports nutritionnels que les dépenses énergétiques, donc l’alimentation et l’activité physique. Augmenter de 25% la population qui chaque jour, pratique l’équivalent d’au moins une demi-heure de marche rapide, est un des objectifs du PNNS.
L’inactivité physique est un des principaux facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires, de cancers, de diabète et favorise la prise de poids et l’ostéoporose. Les effets protecteurs de la pratique d’une activité physique quotidienne, en complément d’une alimentation variée, sont aujourd’hui reconnus. Pourtant, on estime que plus d’un tiers de la population française adulte (34,4%) n’atteint pas le niveau d’activité physique recommandé par le PNNS.
Cette campagne complète le dispositif de communication mis en place depuis 2001 dans le cadre du PNNS avec notamment la campagne de promotion des fruits et légumes ‘Frais, en conserve ou surgelés, les fruits et légumes protègent votre santé’ et l’édition et la diffusion du guide alimentaire La santé vient en mangeant .

En Hainaut aussi…

Les Belges francophones observeront avec intérêt la convergence entre ce vaste programme français de santé publique, le projet ‘CM-fit’ et l’initiative de l’Observatoire de la Santé du Hainaut, qui a travaillé dans le même esprit la nutrition en 2002 et l’activité physique modérée au quotidien en 2003… (1)

De multiples déclinaisons

La Mutualité chrétienne flamande, la plus importante en termes d’affiliés dans le nord du pays, a donc choisi ce thème pour un vaste programme de promotion de la santé intitulé ‘CM-fit’ (pas besoin de traduire).
Cette initiative vise tout le monde, avec un accent particulier mis sur les 25 – 55 ans. Symboliquement, elle a démarré le jour du printemps, le 21/3/2005, une date qui s’imposait! Le programme est prévu sur deux ans.
Il est visualisé par une petite mascotte, le ‘virus du mouvement’, dont on espère évidemment qu’il se répandra le plus rapidement et le plus loin possible…
Le lancement de ‘CM-fit’ fait l’objet d’une large mobilisation, et d’une campagne d’information s’appuyant sur le vaste réseau de la mutualité.
Le projet se concrétise aussi par un grand nombre d’initiatives concrètes. En voici une liste non exhaustive.

Information

Distribution massive d’une brochure de sensibilisation et d’un dépliant présentant les avantages d’assurance complémentaire offerts aux affiliés, mise en place d’un site spécifique https://www.cm-fit.be , dépliant ‘Stap-je-fit’ expliquant l’action podomètre (voir plus loin), brochure ‘Etes-vous en forme?’ développant les bénéfices de santé attendus du programme, dépliant ‘Courez en forme’ (jogging), dépliant ‘Promenez-vous en forme’, révision des autres publications avec une rubrique ‘CM-fit’…

Actions-virus

Des bénévoles sont présents dans des lieux très fréquentés (marchés, gares…), pour des animations, des tests, et aussi pour distribuer des petits cadeaux et des infos diverses.

‘Wandel-je-fit’ et ‘Stap-je-fit’

Le but est de valoriser la marche comme un moyen très démocratique de promouvoir la santé.
La mutualité diffuse un podomètre comme gadget de motivation du public. En bonus, création d’un club ‘internet’ d’utilisateurs du podomètre qui permet à tous les marcheurs branchés de suivre leur progression.

‘Loop-je-fit’

Programme d’apprentissage progressif et encadré (pendant 10 semaines) pour un jogging de 5 km. Un accord a été pris avec la Vlaamse Atletiek Liga, qui organise ce type de programme depuis 2000.
Les clubs organisant ces activités doivent remplir un cahier des charges défini par la mutualité, et un diplôme sanctionne la réussite des participants.

La semaine du vélo pour les écoles

La Stichting Vlaamse Schoolsport encourage les enfants à se rendre à l’école à vélo dès l’âge de 10 ans. Le programme CM-Fit appuie cette initiative, en accordant une attention particulière à la sécurité routière.

‘Met belgerinkel naar de winkel’

Autre action sympa. Partant du constat que plus de la moitié de nos déplacements concernent des distances de moins de 5 km, il s’agit ici de promouvoir l’usage du vélo pour faire les courses, en partenariat avec l’Union des classes moyennes et du Bond Beter Leefmilieu. 150 communes devraient adhérer cette année.
Les commerçants participants offrent des points aux clients cyclistes, avec des prix à la clé.
On rétorquera que le vélo n’est pas le moyen idéal de faire les grosses courses au supermarché, mais l’idée est jolie, qui combine promotion de la santé, respect de l’environnement et mobilité douce.

Action ‘label sur vélo’

Accrochage d’un petit carton d’encouragement sur les vélos garés à divers endroits (entreprises, cinémas, magasins, écoles…), avec bon de participation à une tombola.
Sachant que les Flamands roulent plus à bicyclette que les Bruxellois et les Wallons, c’est bien vu!

Etc.

Un grand nombre d’initiatives locales se grefferont sur le projet, et un effort de sensibilisation sera fait l’an prochain en direction des entreprises.

Les politiques

La Mutualité chrétienne veut voir bouger la Flandre, et elle a déjà pu convaincre plusieurs partenaires de l’appuyer dans la diffusion de son message, ce qui est bien nécessaire pour atteindre un objectif de santé publique qui nécessite un changement d’habitudes.
Inge Vervotte , la Ministre flamande de la Santé, lui a apporté son soutien. La mutualité veut aller plus loin, et faire pression pour que la Flandre inscrive la promotion de l’exercice physique dans ses priorités de santé et de pratique sportive.
Une ambition à la fois forte et mesurée pour un projet résolument positif!
Christian De Bock
D’après le dossier de presse du programme CM-Fit
(1) Voir les articles ‘Une campagne de promotion de l’activité physique au quotidien’ , de Véronique Janzyk, Education Santé n° 182, septembre 2003, et ‘Evaluation d’une campagne médiatique et de mobilisation des relais sur le thème de l’alimentation’ , de Véronique Janzyk, Alain Husdens et Luc Berghmans, Education Santé n° 186, janvier 2004. Consulter aussi le site https://www.hainaut.be/sante/observatoiresante/ .

Le nouveau visage de la tuberculose

Le 30 Déc 20

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Les statistiques de l’OMS démontrent que la tuberculose reste un problème à l’échelle planétaire. Selon ses dernières estimations il y aurait eu, en 2002, 2 millions de décès et 8,8 millions de nouveaux cas dont quasi la moitié (3,9 millions) étaient particulièrement contagieux. Le taux d’incidence (1) mondial de la tuberculose progresse annuellement au rythme d’environ 1,1% et le nombre de cas de 2,4%. Les déclarations de tuberculoses ont augmenté davantage dans les pays africains à forte prévalence de VIH ainsi qu’en Europe de l’Est (principalement dans l’ex-Union Soviétique).
Comme la plupart des pays occidentaux, la Belgique subit l’influence du manque de contrôle de la tuberculose dans certaines parties du monde. Cela s’est traduit au cours des 10 dernières années par un ralentissement de la décroissance de la maladie; l’incidence est donc restée stable aux environs de 12 cas de tuberculose/100.000 habitants depuis 1993.
Malgré une diminution non négligeable de l’incidence en 2003 (10,9/100.000; n=1.128), les chiffres provisoires du registre de la tuberculose 2004 semblent confirmer un retour à la tendance qui prévalait ces dernières années puisqu’ils font état de 1.244 patients répertoriés en Belgique ce qui correspond à une incidence de 12/100.000. Comme toujours, la Région bruxelloise est la plus touchée (34,7 /100.000; n=347). La Wallonie (9,6/100.000; n=323) et la Flandre (9,5/100.000; n=574) affichent des incidences quasi 4 fois moins élevées.
Une autre conséquence de la propagation de la tuberculose à partir de foyers épidémiques (essentiellement les pays du tiers-monde et de l’Europe de l’Est) est la proportion croissante de sujets étrangers parmi les cas déclarés dans le registre belge. Celle-ci est passée de 18% en 1991 à 54% en 2003. Ceci a bien entendu une influence sur la prise en charge des malades.
Il est indéniable que le visage de la tuberculose change au fil du temps vu le type de population touchée par la maladie. On constate ces dernières années une augmentation des problèmes sociaux, d’accès aux soins, d’adhésion au traitement, de résistance aux médicaments antituberculeux. Il est également de plus en plus difficile de communiquer avec des malades provenant des quatre coins du monde. Ceci implique, par conséquent, un investissement de plus en plus important de la part des travailleurs médicaux, para-médicaux et sociaux. C’est pourquoi l’OMS a voulu, par le choix de la thématique de la journée mondiale 2005 (2), mettre en exergue le rôle essentiel joué par ces personnes dans le contrôle de la tuberculose.
La Belgique est considérée par l’OMS comme un pays en phase d’élimination de la tuberculose. Les leçons de l’histoire nous ont appris qu’il ne faut pas baisser les bras à ce stade mais qu’il est, au contraire, nécessaire d’unir ses forces pour arriver au but ultime de l’éradication. Celle-ci sera un des défis du futur. La Ministre de la santé de la Communauté française, Catherine Fonck , l’a bien compris puisqu’elle a décrété que la tuberculose était une des priorités du programme de prévention 2004-2008.
Dans ce cadre, la Communauté française finance la surveillance épidémiologique de la maladie, l’organisation et l’évaluation du dépistage parmi les groupes à risque, le dépistage des contacts de patients contagieux, l’information auprès de différents publics. La Commission Communautaire Commune, via Benoît Cerexhe , Ministre bruxellois de la Santé, participe au financement de ces activités en Région bruxelloise. La coordination du programme de prévention a été confiée au FARES (Fonds des affections respiratoires, anciennement Fondation contre les affections respiratoires et pour l’éducation à la santé).
Des informations relatives à la tuberculose et à son contrôle sont disponibles sur https://www.fares.be
Communiqué par la Ministre Fonck à l’occasion de la Journée mondiale de la tuberculose du 24 mars 2005
(1) Nombre de nouveaux cas par 100.000 habitants, par an
(2) «Central role of frontline TB care providers in the fight against TB »

Le recours aux Communautés thérapeutiques

Le 30 Déc 20

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Cet article se propose de mettre en lumière les apports des structures résidentielles pour sujets dépendants de substances, en se basant principalement sur l’expérience acquise auprès des Communautés thérapeutiques de l’association Dianova Belgique, sans négliger les contributions de la littérature récente ni celles des autres institutions francophones belges dans ce domaine.

Les Communautés thérapeutiques désormais méconnues

C’est dans les années ‘80 que des institutions spécialisées pour les personnes dites toxicomanes se sont ouvertes en Belgique. Ces institutions étaient pour la plus grande partie de type résidentiel (1). Pour cette génération, la communauté thérapeutique, ou ses variantes (le foyer de post-cure, etc.), représentait la forme canonique de prise en charge spécialisée des sujets dépendants de substances (2). Cette offre de soins essentiellement résidentielle, seule alternative à l’incarcération ou à l’enfermement asilaire, en conservait le principe de la mise à l’écart, mais en y adjoignant une dimension éducative ou thérapeutique, qui était axée sur la promotion de l’abstinence à l’égard des drogues et des produits psychotropes.
À cette époque, la guérison de la toxicomanie passait sans discussion par «une tranche de vie à la ferme», c’est-à-dire à la communauté thérapeutique. Depuis lors, son étoile a pâli dans l’opinion et dans les allocations de ressources. L’événement sida a bouleversé les conceptions et a ramené la médicalisation – la substitution – et les stratégies de réduction des risques au premier plan. Désormais, la grande majorité des intervenants du secteur ambulatoire est peu familière des ressources offertes par des structures résidentielles comme les communautés thérapeutiques, quand ils n’ont pas conçu à propos de ces lieux une opinion définitivement méfiante. Il est apparu que de très nombreux sujets dépendants de drogues ou d’autres produits psychotropes n’étaient pas intéressés à se porter candidat pour ce type de prise en charge, et restaient donc particulièrement exposés au sida et par analogie à d’autres maladies transmises par la seringue, par rapport sexuel ou par les conditions de vie précaires. En outre, la dérive de certaines de ces communautés thérapeutiques (3) a fortement entretenu cette suspicion.

Le lit en recul généralisé

Mais au-delà de ces mésaventures anecdotiques, c’est de façon générale le mode résidentiel de prise en charge qui est en recul, sous l’effet d’une politique de réduction drastique du nombre de lits d’hôpitaux (4) dans le champ de la santé et de la santé mentale. Cette évolution, lancée dès les années 1970 en Italie avec la fermeture des asiles psychiatriques (de 120.000 places en 1978 à 15.000 en 2003), se poursuit inexorablement: «Cent mille lits de psychiatrie ont été fermés en vingt ans en France sans mise en place correspondante d’alternatives à l’hospitalisation», déclarait à Paris, le Dr Bernard Odier , psychiatre, au Forum Social Européen (5). Le souci cynique d’économies sur le compte de la santé se dissimule derrière les slogans généreux de libération des fous, inspirés par l’anti-psychiatrie.
Pourtant, le mouvement des communautés thérapeutiques fait preuve d’un dynamisme qui doit soulever la curiosité (6). Les évaluations réalisées dans le monde anglo-saxon (7) ont démontré l’indiscutable efficacité de cette modalité thérapeutique, qui est considérée comme la seule alternative efficace aux traitements de substitution (8) et qui a déjà accueilli, sinon traité, plusieurs centaines de milliers de personnes de par le monde. Il serait regrettable que des préjugés, forgés à partir d’une expérience déviante (9) et dont les leçons ont été tirées avec fruit(10), privent les patients belges de cette ressource, en particulier dans les situations où le traitement de substitution ne permet pas au patient d’atteindre ses objectifs. C’est-à-dire là où le risque se profile d’un usage abusif de la substitution, détournant certains patients d’une expérience décisive en milieu résidentiel, et en particulier en communauté thérapeutique. D’ailleurs, divers rapports récents (11) attirent l’attention des décideurs publics sur le risque de voir s’effriter l’offre résidentielle et le savoir-faire qui s’y est élaboré au cours des 20 dernières années.

Ambulatoire et résidentiel: inversions de balancier

Les traitements de type ambulatoire se sont très largement développés à partir des années 1990, au dépens du secteur résidentiel, jusqu’à représenter actuellement sans doute jusqu’à 90% du volume de prise en charge dans notre pays. Dans un premier temps, l’enthousiasme des équipes et le développement rapide de ces initiatives ambulatoires basées sur des programmes de substitution ont eu des effets très positifs. Parmi ceux-ci, le recrutement d’un nombre considérable de patients jusque-là laissés sans soins, et la mise en œuvre de stratégies de réduction des risques (12). Il est évident qu’un grand nombre de patients ont tiré profit de cette réponse de substitution alors qu’ils ne trouvaient pas nécessairement un accueil à leur mesure dans les communautés thérapeutiques déjà existantes. La majorité des patients en traitement ambulatoire de substitution y a gagné une offre d’écoute, une insertion socioprofessionnelle, un équilibre personnel et familial, une hygiène de vie et d’alimentation, etc.
Aujourd’hui, il apparaît néanmoins qu’une certaine proportion de patients en traitement de substitution, soit en centre spécialisé, soit auprès de praticiens isolés, ne tirent plus de cette modalité de prise en charge les bénéfices thérapeutiques qu’on devrait en attendre. Par exemple, bon nombre de ces patients ont tendance à abuser d’alcool ou de tranquillisants, ou continuent à abuser de drogues illégales (héroïne, cocaïne…), ce qui les expose aux risques sanitaires, sociaux et juridiques que ces traitements étaient censés réduire.
Ces mêmes patients, ou d’autres, continuent à vivre dans des conditions de précarité préoccupantes au plan de leur insertion sociale, de leurs droits sociaux, de leurs conditions d’hygiène et d’alimentation, de leur conduite délinquante, etc. Pour ces patients, il faut considérer que les traitements de substitution en ambulatoire ne sont qu’un pis-aller. Sans renier les avantages indiscutables que les traitements de substitution ont apportés à une grande proportion des patients dépendants des opiacés de rue, il faut désormais se pencher sur la situation de ceux qui ne tirent qu’un bénéfice thérapeutique très relatif des prises en charge ambulatoires. Pour ceux-ci, deux offres radicalement différentes sont à envisager: la délivrance contrôlée d’héroïne (13) ou le séjour dans une structure résidentielle, une communauté thérapeutique en particulier.

Qu’est-ce qu’une communauté thérapeutique?

Les expériences de ce type sont moins nombreuses, et peut-être plus confidentielles, en Belgique (14), en France et en Suisse, que dans les pays anglo-saxons, où elles se sont développées tout d’abord, ou dans d’autres parties du monde, jusqu’en Amérique latine ou en Thaïlande. En outre, des différences sensibles existent entre celles qui sont structurées autour du paradigme comportementaliste (15) et celles qui s’inspirent d’autres références, y compris de la psychanalyse ou des théories systémiques.
«En quoi consistent ces communautés? Ce sont des lieux transitoires où les adultes vivent en groupe et apprennent à gérer leurs pulsions, à construire des relations saines avec les autres, à résoudre les problèmes de la vie quotidienne et à assurer leurs équilibres psychique et physique afin de pouvoir ensuite s’intégrer à l’extérieur, dans les meilleures conditions» (16).
En pratique, le résident y est généralement accueilli à travers un rituel d’admission qui serait un équivalent d’adoption par le groupe. Dans certains cas, notamment dans les communautés de Dianova (17) en Belgique, la désintoxication est effectuée au sein même de la communauté, sous supervision médicale. À la différence de celle effectuée en milieu hospitalier, le patient est accompagné 24h/24 par des pensionnaires plus anciens, qui ont eux-mêmes profité de cette prise en charge par des pairs lors de leur propre admission. Dans la plupart des autres structures, cette désintoxication physique doit être réalisée préalablement en milieu hospitalier. Certaines structures résidentielles de type communautaire (18) accueillent des patients (en particulier des patients psychotiques et dépendants, c’est-à-dire des cas de co-morbidité) sous traitement de substitution tout au long du séjour. L’articulation entre traitement de substitution et milieu résidentiel fait l’objet de récentes publications (19).
Ensuite, le séjour est marqué par une forte structuration de la vie quotidienne, avec une alternance en proportion variable d’activités thérapeutiques (individuelles ou de groupe, voire familiales), d’activités pédagogiques, utilitaires ou occupationnelles (ateliers divers, jardinage, entretien de la maison, cuisine, etc.) et de loisirs. Le vécu en communauté thérapeutique est dominé par une activité incessante et par une forte immersion dans des relations de groupe. Au risque d’ailleurs que la vie paraisse moins intéressante aux patients une fois sortis de la communauté. Cet effet pervers peut être réduit si, lors du séjour, le résident peut faire l’expérience de l’ennui et apprendre à le surmonter par ses propres moyens et sans substances.
Dans la plupart des communautés thérapeutiques, les résidents sont rapidement appelés à prendre des responsabilités, aussi bien dans la gestion journalière que dans la thérapie des autres pensionnaires. Cette responsabilisation contraste fortement avec le style de vie des patients suivis en ambulatoire, dont une très forte proportion émarge passivement aux régimes d’assistance sociale. Pour favoriser l’identification à une success story , dans certaines communautés, comme à Dianova et Trempoline, une part importante des équipes soignantes est composée d’anciens résidents, qui ont «traversé le miroir» et servent de modèle d’identification aux arrivants. Des procédures de sélection soigneuse et de formation de ces nouveaux intervenants thérapeutiques donnent des garanties de professionnalisme et d’attention apportée à l’autre. On pourrait dire malicieusement que ceci n’est pas sans évoquer la question de la formation des psychanalystes, qui sont également d’anciens curistes devenus professionnels.

La durée du séjour et la réinsertion

La durée de séjour recommandée est habituellement de 6 à 15 mois, selon les modèles, et le plus souvent découpée en phases, dont la dernière est bien entendu la réinsertion. Mieux le résident se sera acclimaté à la structure résidentielle et communautaire, plus difficile sera le retour à la vie sociale ordinaire, si des paliers de décompression ne sont pas interposés. En effet, la vie communautaire peut susciter des relations fortes entre pensionnaires, un sentiment de sécurité et d’abri, qui ne préparent pas en soi au mode de vie à l’extérieur. Le contraste entre le mode de vie réglé de la communauté et celui, déréglé, du monde extérieur, souligne un aspect préoccupant du malaise dans la civilisation , pour paraphraser Sigmund Freud . C’est un des défis de l’institution communautaire que «d’exclure d’abord pour insérer ensuite» (20), autrement dit de soustraire le sujet au lien social ordinaire en vue d’une authentique ré-insertion ultérieure.
La question se pose du devenir des sujets après le séjour, même réussi. Certaines communautés, dont celle de Dianova, mettent l’accent sur une activité quasi-professionnelle du pensionnaire durant tout le séjour, parfois sous la forme d’une formation professionnelle en collaboration avec les organismes habilités. Dianova a également mis sur pied une Entreprise de Formation par le Travail, avec, pour commencer, des stages de fromagerie, de boulangerie et d’horticulture. Cette dimension de la réinsertion par le travail a le mérite de rendre concret le concept de réinsertion et de tirer parti des effets structurants de l’activité professionnelle, qui sert ainsi les desseins de la thérapeutique par la mise en situation.

Les indications

Les indications d’un séjour en communauté thérapeutique devraient idéalement être définies positivement, par la demande d’un sujet déterminé à rompre le processus de dépendance aux substances et le mode de vie et de jouissance qui s’y rapporte. On sait que cette demande survient rarement de manière spontanée et qu’elle résulte plutôt de la pression continue et bienveillante de l’entourage (parents, médecin, ami, « significant other »). Et c’est bien souvent à partir de l’échec ou de la non pertinence des traitements ambulatoires ou de la répétition des échecs de sevrage court (en prison ou à l’hôpital) que le sujet consent à l’entrée en communauté thérapeutique.
Parmi les indications fréquentes, figurent les sujets qui sont principalement dépendants de produits non substituables (alcool, cocaïne, amphétamines, XTC et nouvelles drogues de synthèse, cannabis, etc.) et ceux qui nécessitent, pour des raisons personnelles ou de psychopathologie, une structure plus cadrante et un abri. En principe, la nature du produit de dépendance (héroïne ou opiacés, cocaïne ou amphétamines, XTC, cannabis, alcool, médicaments psychotropes) importe peu. Une nouvelle indication émerge récemment et concerne les adolescents en grande désinsertion ou délinquants qui abusent de substances. Pour ces mineurs, la combinaison du cadre résidentiel structuré, de la thérapie individuelle et familiale et de la dimension pédagogique forme un tiercé prometteur.
Les principales contre-indications comprennent les pathologies contagieuses (tuberculose, etc.) et la décompensation psychotique aigüe.

Les principales communautés thérapeutiques en Belgique francophone

Dianova , rue du Château 5 – 7, 7120 Estinnes
Dianova , rue Albert Billy 48, 5370 Porcheresse
Ellipse , rue du Houssu 99, 7141 Carnières
Enaden , chaussée de Gand 1018-1022, 1082 Bruxelles
La Pièce , rue Hôtel des Monnaies 71, 1060 Bruxelles
Le C.A.T.S. Solbosch , Avenue Ad. Buyl 110 b, 1050 Bruxelles
L’espérance , rue du Fosteau 42, 6530 Thuin
Les Hautes Fagnes , rue Malgrave 1, 4960 Malmédy
Trempoline , Grand Rue 3, 6200 Châtelet

Si l’on compare l’équipement de pays voisins telle que la Hollande (21), le nombre de places en communauté thérapeutique pour l’ensemble de la Belgique reste encore insuffisant. Non seulement un développement de communautés thérapeutiques en Belgique serait opportun, mais en outre ce développement devrait tenir compte des besoins nouveaux, à savoir les patients mal stabilisés par les traitements de substitution, en ambulatoire, les patients dépendants de produits non substituables et les mineurs en situation de grande désinsertion. Les années à venir devraient donc être l’occasion d’un rééquilibrage entre ces deux options principales.

Cas particulier des communautés thérapeutiques de Dianova

Les communautés thérapeutiques gérées par Dianova Belgique sont implantées en Belgique depuis 1997 et ont accueilli depuis lors 407 pensionnaires, avec une durée moyenne de séjour de 10 mois. Malgré le coût du séjour(22), et les difficultés financières que l’on rencontre généralement dans une population qui abuse de substances psycho-actives, peu préparées à réunir des fonds pour la prise en charge thérapeutique, les communautés thérapeutiques gérées par Dianova Belgique sont fréquentées assidûment par un nombre très substantiel de patients. Il y a donc une demande claire pour ce type d’offre.
Les communautés thérapeutiques gérées par Dianova Belgique présentent des caractéristiques particulières et ne sont pas superposables aux autres communautés thérapeutiques qui existent déjà dans notre pays, et qui bien entendu rendent des services incontestables (voir liste ci-contre).
-elles peuvent accueillir des sujets encore dépendants de drogues ou de substances diverses et en assurer le sevrage intra muros avec les meilleurs garanties de confort et de sécurité;
-elles assurent une admission sans délai et sans liste d’attente;
-les pensionnaires admis dans les communautés thérapeutiques de Dianova Belgique peuvent bénéficier de la poursuite d’un traitement de substitution ou d’un autre traitement médicamenteux si nécessaire;
-les équipes thérapeutiques de Dianova Belgique sont nécessairement des équipes multidisciplinaires associant des professionnels et des collaborateurs eux-mêmes anciens usagers de drogues, dans une complémentarité féconde;
-le dispositif de deux communautés thérapeutiques interdépendantes et articulées l’une à l’autre (23) permet le transfert de l’une vers l’autre d’un patient en cas de transgression et d’éviter ainsi l’exclusion;
-grâce à la participation dans les équipes d’anciens usagers, qui peuvent tirer profit de leur expérience personnelle, et grâce à une structuration rigoureuse du programme thérapeutique, des droits et devoirs des pensionnaires, les communautés thérapeutiques de Dianova Belgique se caractérisent par une forme d’autorité et de fermeté qui peut les distinguer. L’absence de reprise de la consommation de substances par les pensionnaires pendant le séjour, ou le repérage très rapide de ce type d’incidents, contraste avec ce qui s’observe généralement dans les séjours à l’hôpital. Il en va de même pour la rigueur avec laquelle les activités quotidiennes, l’entretien des locaux, l’hygiène personnelle, etc. sont attendus et garantis aux pensionnaires.

Conclusions

Les communautés thérapeutiques, en particulier celles gérées par Dianova Belgique, apparaissent donc comme une offre cohérente de désintoxication, de rééducation, de thérapie et de réinsertion psychosociale, à la fois sur le plan médical, social, psychique et familial.
Elles s’inscrivent dans un ensemble de structures résidentielles susceptibles d’accueillir les sujets que les programmes ambulatoires n’ont pas pu aider.
De manière générale, l’expérience de la communauté thérapeutique est un temps fort dans la vie d’un sujet et peut promouvoir un réaménagement pulsionnel radical. Si elle ne permet pas nécessairement une abstinence durable, elle leste le plus souvent le sujet d’un bagage précieux, parfois irremplaçable, pour la suite de son parcours de vie.
Un réinvestissement dans ces structures, par une meilleure allocation des ressources devrait être à l’ordre du jour.
Dr J.P. Jacques , médecin spécialisé dans les dépendances et psychanalyste à Bruxelles
Adresse de l’auteur: av. Jupiter 101, 1190 Bruxelles
(1) Par exemple le C.A.T.S. Solbosch, Les Hautes Fagnes, Choisis, etc.
(2) De Leon G.: The therapeutic community: study of effectiveness. Treatment research monograph 84-1286. Rockville, MD: National Institute for Drug Abuse, 1994.
(3) En France, celles de l’Association Lucien Engelmajer, mieux connue comme Le Patriarche, aux Etats-Unis, celles de Synanon.
(4) « Depuis deux ans le nombre de lits hospitaliers a diminué de 3000 unités sur un total de 48 680 lits. », extrait de l’article « Incertitudes autour du financement hospitalier » , le Journal du Médecin, n° 1601 – 15.06.2004.
(5) Bernard Odier, L’hospitalisation psychiatrique en réduction, une tendance à double tranchant, intervention
au Forum Social Européen, 12-15/11/2003.
(6) Voir le dossier « Quel avenir pour les thérapies résidentielles », in Dépendances , déc. 2004, n°24, Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autre toxicomanies & GREAT.
(7) Voir par ex. George De Leon, Therapeutic Communities for Addictions: Readings in Theory, Research and Practice, Ed. James T. Ziegenfuss, Charles Thomas Pub Ltd, 1986.
(8) Voir par ex., New Directions in Therapeutic Communities Research: Building a Partnership Between Research and Practice, Annual World Conference on Therapeutic Communities, NIDA, Sept. 29-30, 2000, San Francisco.
(9) « L’Association Le Patriarche » a d’ailleurs disparu, et avec lui ses méthodes totalitaires, mégalomanes et quasi sectaires.
(10) Dianova, tout en héritant des structures et d’une partie du savoir-faire de l’Association Le Patriarche, a opéré une profonde mutation démocratique et thérapeutique en tirant les leçons de l’expérience déviante dont elle est issue.
(11) « Plan Gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l’alcool 2004-2008 » par Didier Jayle, Président de la MILDT – France
(12) Voir ‘Assises de la Réduction des Risques liés à l’Usage de Drogues, Actes du Colloque organisé à Bruxelles’, in Bruxelles Santé , N° Spécial, 2004.
(13) À propos de la délivrance contrôlée d’héroïne, voir A. UCHTENHAGEN, A. DOBLER-MIKOLA, T. STEFFEN, F. GUTZWILLER, R. BLATTLER, S. PEIFFER, Prescription of Narcotics for heroïn addicts, Main results of the Swiss national cohort study, Karger AG, Basel, 1999
(14) En dépit de nombreuses recherches et publications. Par ex., Binot E., Exclure pour inclure. Programme de traitement et/ou programme de réinsertion? , intervention à la 3e Conférence Européenne des Communautés Thérapeutiques, Bruges, nov. 1985.
(15) George De Leon, Therapeutic Community Elements: Theory, Model, and Method, Centre for Therapeutic Community Research at NDRI Inc., NY City.
(16) Georges van der Straten Waillet, Eduquer face aux drogues et aux dépendances, Couleurs Livres / Chronique Sociale, 2002.
(17) Dianova est une fédération internationale de communautés thérapeutiques issues de l’Association Lucien Engelmajer, après une réforme majeure des modalités de fonctionnement destinée à sortir du modèle totalitaire, et à respecter les lois, les normes professionnelles et éthiques en vigueur dans nos démocraties.
(18) Par exemple, Enaden et La Pièce, à Bruxelles.
(19) Dietrich N. & Uchtenhagen A., Méthadone et thérapies résidentielles: irrésistible combinaison? , in Dépendances, op. cit., p. 23-28.
(20) Binot E., Exclure pour inclure . Programme de traitement et / ou programme de réinsertion ? , intervention à la 3e Conférence Européenne des Communautés Thérapeutiques, Bruges, nov. 1985.
(21) En Hollande 5.000 places pour 15.000.000 d’habitants. En Belgique, moins de mille places pour 10.000.000 hab.
(22) qui ne fait pas encore l’objet d’une Convention avec l’INAMI, toujours en négociation, dans un contexte de disette de la Sécurité sociale.
(23) L’une à Croix (Estinne, Hainaut) et l’autre à Porcheresse (Havelange, Namur).